/ VA L È R E N OVA R I N A /
PAR MÉLANIE MARULLAZ
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a faisait longtemps qu’il voulait passer une année entière aux Gets. Le confinement l’a exaucé. Depuis 14 mois, Valère Novarina écrit avec la Boule de Gomme à portée de bureau, voit défiler les saisons sur la pointe de Nantaux, promène quotidiennement sa démarche incertaine et ses cheveux argent dans la forêt des Chavannes. Ce territoire, le nord de la Haute-Savoie et surtout le Chablais, voilà près de 70 ans qu’il en connaît tous les détours, les sommets, les hameaux… et qu’il en écoute surtout les mots. Il se régale des noms de lieudits : Ouatapan, Seytrouset, Vauverdanne… Il dissèque les surnoms si courants dans nos vallées : « Fanfoué le Piot » pour son ami descendant d’un tailleur de pierre, qui la creusait comme un piot (un pivert) creuse le bois ; « Jean la Grêle », connu pour ses accès de colère ; « Trigaline » qui possédait trois poules… et il s’émerveille des sonorités d’un patois qu’il répète avec gourmandise, le sourire complice et l’œil brillant. “On est ici à un croisement linguistique extraordinaire : vous faites une heure de voiture, on parle allemand, vous descendez on parle
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Valère Novarina
LANGUE
vivante
Valère Novarina
©Caroline Juillard
Il joue de la langue comme d’autres joueraient d’un instrument. Il compose avec les mots, choisit les plus beaux, en invente de nouveaux. Mais ce que Valère Novarina, auteur de théâtre originaire du Chablais, aime pardessus tout, c’est les entendre prendre vie, dans la bouche de ceux pour qui il écrit.