Le paysage culturel reprendrait-il du poil de la bête à Strasbourg ? Après deux ans de pandémie, des mois de fermeture, des jauges et autres contraintes, l’été et son accalmie sanitaire ramènent un public ravi de retrouver des espaces pour rêver et découvrir… Avec de nouveaux usages et exigences, auxquels s’adaptent les salles, les médiathèques et les musées. La Cité—Le dossier
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Culture Reloaded? Par Déborah Liss
Les symboles sont là : un opéra de Strasbourg plein à craquer tout au long des huit représentations de West Side Story, une « grosse teuf » à l’Espace Django (d’après les mots de Benoît Van Kote, son co-directeur) pour le concert techno-électro d’Irène Drésel en mars ou encore l’énorme succès de l’exposition Jean-Jacques Henner au musée des Beaux-Arts à l’automne 2021. Des moments de « frémissement » pour Paul Lang, directeur des Musées de Strasbourg, des signes « très positifs », selon Alain Perroux, directeur général de l’Opéra National du Rhin. Toutefois, et c’est là l’une des premières leçons de cette reprise, « le public revient surtout sur des événements ponctuels, à caractère festif », pointe Paul Lang, qui s’est réjoui d’une belle édition de la Nuit des musées, où on est « quasiment revenus aux chiffres du monde d’avant » (14 631 visiteurs contre 15 000 en 2019). Pour la fréquentation habituelle, c’est une autre histoire. « On a perdu 37% d’affluence sur la période de janvier à mai, regrette-t-il. Alors que de 2016 à 2019, on
était sur une pente ascendante. Cet élan a été b risé par la pandémie. » Même son de cloche dans les salles : 70% de remplissage au TNS (au lieu de 90-95%) et idem pour l’Opéra, qui accuse une baisse de 12% des abonnements entre 2019 et 2021. Aux cinémas Star, Stéphane Libs, le gérant, rapporte une perte de « 55 à 60 millions d’entrées ». Mais tous préfèrent relativiser : on « remonte la pente » sur la campagne d’abonnement 20222023 de l’Opéra, on crée « près de 10 000 nouveaux abonnements » dans les médiathèques (il y en avait 13 000 en 2019), et on « revient à une tendance proche des chiffres de 2018 » aux cinémas Star, objectif plus réaliste que 2019, qui était « une année record avec 213 millions d’entrées ». Pourtant, aux musées par exemple, « on n’a pas encore retrouvé le public d’avant », concède Paul Lang. Les raisons ? « La peur, encore, et de nouvelles habitudes », suggère-t-il.