Mémoire de fin d'études - Alicia Juge - ENP Blois

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Le territoire insulaire à l’épreuve du changement climatique

L’île de Porquerolles comme laboratoire de projet

Alicia Juge

Mémoire de fin d’études, tome 1, 2020 // 2021


Membres du jury Directrice d’étude

Catherine Farelle Paysagiste concepteur, paysagiste conseil de l’état Enseignante de projet en quatrième année à l’École de la Nature et de Paysage de Blois

Professeur encadrante

Bénédicte Flatet Comédienne indépendante, auteure Enseignante en communication à l’École de la Nature et du Paysage de Blois

Président de jury

Olivier Gaudin Docteur en philosophie des sciences sociales Maître de conférences à l’École de la Nature et du Paysage de Blois


Comment Accompagner l’île de Porquerolles dans les prochaines années face au changement climatique déjà à l’œuvre ?

N.B. : En l’absence d’indication, toute illustration, photographie ou cartographie est un document personnel


Sommaire

0. Prélude

La question climatique Les îles de méditerranée : Laboratoire du changement climatique Imaginaire insulaire Choix du site et du sujet Introduction et éléments de situation

p8 p 10 p 12 p 14 p 17

1.

Rencontre avec Porquerolles

p 22 Paysages paradisiaques Porquerolles : bien / patrimoine commun p 34 p 36 La richesse du sous-sol Le climat méditerranéen à Porquerolles p 40 et l’importance du changement climatique p 42 Quel devenir pour cette île ?

2.

Porquerolles : Paysages vécus p 46 À l’origine de la vie insulaire p 50 Une rencontre entre les hommes et le territoire insulaire p 66 La construction d’une identité forte p 68 LA gouvernance territoriale mal acceptée p 72 Une réglementation en mille-feuilles p 74 Richesses insulaire p 80 Terres fréquentées : Le tourisme, un l’élément aggravant p 82 Terres habitées : Cœur névralgique de l’île p 86 Terres domestiquées : Plaines cultivées p 98 Terres aux ambiances sauvages : Cœur forestier Terres aux ambiances sauvages : Ceinture littorale et p 104 milieux marins p 112 Transition : adaptation ou transformation ?


4. Continuer de rêver p 134 Synthèse des enjeux p 136 Une nouvelle Gouvernance ? Construire un avenir en «commun» : p 140 Vers une prise en compte des acteurs locaux Horizon 2030 p142 des expérimentations, pour amorcer dès aujourd’hui les réponses de demain La plaine de la courtade : de nouveaux p 146 paysages emblématiques p 148 Des expérimentations échelonnées dans le temps

3.

Un paradis déjà perdu ? Les effets attendus du changement climatique Comment les milieux vont-ils s’adapter ? Synthèse Et ailleurs ?

p 116 p 120 p 126 p 128

Conclusion

p 150

Bibliographie

p 152

Remerciements p 156 5


Prélude


0.


Prélude 2006

2007

2008

2011

Adoption de la stratégie climatique 1er Grenelle de Adoption par le conseil La question nationale d’adaptation au l’Environnement Européen du plan de lutte changement climatique

2018

1er Plan national 2e Plan national d’adaptation au d’adaptation au changement climatique changement climatique

contre le réchauffement climatique De nos jours, l’existence d’une modification du pour 2013-2020 Ses incidences sont visibles à l’échelle mondiale climat fait l’unanimité au sein de la communauté scientifique. La certitude de son évolution rapide depuis la seconde moitié du siècle dernier et son origine en grande partie anthropique font maintenant consensus (Brenchin, 2003 ; IPCC, 2013 ; Liverman, 2007 ; Oreskes, 2004).

1979

comme locale dans de nombreux domaines comme la santé, les activités économiques mais aussi sur les paysages, les ressources naturelles, la faune et la flore aussi bien terrestre que marine.

1988 1990 1992

1997

Convention cadre des Nations Unies sur le changement climatique

1ère conférence mondiale sur le climat Création du GIEC

2014

2015 Accords de Paris

5e rapport du GIEC

Adoption du protocole de Kyoto

1er rapport du GIEC La question du climat à l’international

195 pays. En 1997, l’accord de Kyoto fixe les premiers engagements de baisse d’émissions de gaz à effet de serre (GES). En 2015, c’est l’accord de Paris qui lui a succédé avec de nouveaux objectifs engageant à parti de 2020 l’ensemble des pays signataires à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, afin de limiter le réchauffement à 2°C par rapport à l’ère préindustrielle (Caude, 2015). Aujourd’hui nous avons déjà dépassé 1°C.

Le sujet du changement climatique a fait son apparition sur la scène internationale en 1979 lors de la première conférence sur le Climat. Peu après, en 1990, le GIEC (Groupe Intergouvernemental sur l’Etude du Climat) publie son premier rapport qui sera suivi par le sommet de la terre de Rio où sera signée la Conventioncadre des Nations Unis sur les changements climatiques (CCNUCC), ratifiée aujourd’hui par Prélude

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La question climatique


Atténuation

Dans un autre temps, l’adaptation économique a pour objectif la prise en compte et la valorisation des compétences et savoirs locaux, ou l’appel à de nouvelles compétences appropriables par la population ainsi que le soutien à une relative diversification des activités et leur évolution.

Pour ce faire, il est primordial d’agir sur les émissions de gaz à effet de serre qui sont la principale cause du changement climatique. C’est ce que l’on appelle l’atténuation. En agissant sur l’aléa, on limite donc les risques. Les deux principaux leviers dans cette approche consiste à réduire ou limiter les émissions de gaz à effet de serre ainsi qu’à protéger et favoriser les puits et réservoirs de gaz à effet de serre.

Atténuation et adaptation sont deux enjeux complémentaires qui doivent être pensés de concert afin de permettre une lutte efficace contre le changement climatique. Dans ce mémoire, je m’attacherai plus à cette deuxième partie.

Adaptation

Aux vues des évolutions actuelles, l’augmentation des températures semble inévitable. Il est donc nécessaire d’anticiper ces phénomènes afin d’en limiter les conséquences et les dégâts potentiels sur les activités et les écosystèmes. Il s’agit donc d’agir sur la vulnérabilité. On distingue deux types d’adaptation (Magan, 2012). Tout d’abord l’adaptation environnementale qui a pour objectif la non dégradation de l’environnement, le maintien de la fonction protectrice des écosystèmes face aux aléas naturels actuels et à venir, la prise en compte des incertitudes sur les impacts du changement climatique et sur les réactions des écosystèmes et la valorisation des projets participant à la résilience et à la réduction de la vulnérabilité.

2006

2007

La publication en 2014, du 5° rapport du GIEC, invite les pays et les régions à se mobiliser et initier des politiques actives (ONERC, 2016). Cependant, en région, la transposition des politiques nationales est plus lente car elle doit s’adapter plus précisément aux réalités du territoire. De ce fait la définition des politiques régionales, pour faire face au changement, est souvent laissé aux élus régionaux qui se chargent de faire rédiger rapports et études. Des actions concrètes, prospectives et spatiales semblent être la clef pour initier un changement de posture dès à présent.

2008

Adoption de la stratégie 1er Grenelle de Adoption par le conseil nationale d’adaptation au l’Environnement Européen du plan de lutte changement climatique contre le réchauffement climatique pour 2013-2020

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2011

2018

1er Plan national 2e Plan national d’adaptation au d’adaptation au changement climatique changement climatique


Les îles de méditerranée : Laboratoire du changement climatique Les îles sont des espaces où des communautés humaines habitantes se sont organisées et ont mis en place des modes de vie originaux. Les espaces et les populations insulaires ont été affectés par des enjeux qui n’étaient pas les leurs et dont ils ont subi les impacts. En outre, pour certaines îles, aujourd’hui, en raison de la puissance du changement climatique, c’est aussi la question de leur adaptation à de nouvelles conditions environnementales, voire de leur survie, qui se pose.» Jean-Marc Besse, Îles en projet, Les carnets du paysage de Versailles Îles mondes, microcosmes

Climat, cas particulier de la Méditerranée

Les îles sont des espaces aux paysages singuliers et aux milieux en équilibre fragile dont les éléments partagent des habitudes et des organisations collectives particulières. Sur leurs terres inextensibles et limitées, les espèces vivantes et les populations insulaires humaines sont particulièrement sensibles et à l’écoute des dynamiques naturelles et sociales actuelles : changement climatique, diminution de la biodiversité, pression sur un patrimoine commun, impact souvent accusé par le tourisme.

Le Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat (GIEC) a estimé, dans ces dernières évaluations, que la région méditerranéenne serait particulièrement affectée par le changement climatique (IPCC, 2018). Cela s’explique notamment par des caractéristiques géographiques, météorologiques et biologiques particulières. En effet, cette mer est quasi fermée, ce qui la rend plus sensible aux variations de pH et de température. De plus, sa position l’expose beaucoup plus à la sécheresse et aux vents puissants. On y trouve aussi une très grande biodiversité terrestre, littorale et marine ainsi qu’un grand nombre d’espèces endémiques marines et côtières. Dans le cas des espèces végétales, par exemple, la région méditerranéenne, qui ne représente pas plus de 1,8 % de la surface boisée mondiale, abrite 290 essences forestières contre seulement 135 pour le reste de l’Europe. Le changement climatique est déjà à l’œuvre et avec des effets irréversibles.

Ainsi, puisque l’insularité exacerbe les enjeux liés aux changements climatiques, les rend plus visibles et concrets, le contexte d’une petite île en Méditerranée peut constituer un « cas d’école » précieux pour l’étude d’un microcosme dans un monde en mutation, et des paysages qui en résultent.

Face à ces changements drastiques et brutaux, des tensions sur la façon de préserver, entretenir, transmettre les héritages environnementaux et humains, sur la façon d’habiter, se créent. Prélude

Chiffres clés sur le changement climatique

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Les îles de méditerranée : laboratoire du changement climatique


Hausse températures moyennes

Un manque de

Le pH des océans a diminué de

0,1 unité

20 Milliards

de m3 d’eau en 2050

depuis la révolution industrielle alors qu’il était stable depuis au moins

+1,5°C

65 millions d’années

depuis 1900 dans le bassin méditerranéen contre +1,1°C à l’échelle globale Source : météo France, indicateur Onerc

+25 cm

Acidification des océans Source : MedECC, 2019

Épisodes extrêmes plus fréquents et plus violents Source : Groupe de travail interministériel sur les impacts du changement climatique

+1,3°C

depuis 1900

dont 12 cm les 30 dernières années en Méditerranée

depuis 1982 en Méditerranée

Accélération du cycle des végétaux Hausse niveau moyen des océans

Hausse température de l’eau Source : IPCC 2018

Source : météo France, indicateur Onerc

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Imaginaire insulaire Îles muettes Îles immobiles Îles inoubliables et sans nom Je lance mes chaussures par-dessus bord car je voudrais bien aller jusqu’à vous.» Blaise Cendrars, Feuilles de routes, dans Au cœur du monde, « Poésie », p. 47

L’île Paradis

Pour les géographes, c’est un territoire circonscrit avec des dynamiques propres. Pour les historiens, l’île est un espace où les temporalités seraient distinctes de celles du continent. Enfin pour l’anthropologue c’est un terrain privilégié, dans la mesure où l’île lointaine, isolée, longtemps coupée de tout contact avec le reste du monde a pu forger une culture spécifique. Les certitudes s’effacent devant la complexité des îles ; depuis Ulysse, une longue histoire de l’ambiguïté insulaire a commencé. Finalement ce qui définirait le mieux une île serait l’image que l’on s’en fait, sa charge affective qui démultiplie les phénomènes, nos craintes et nos appétits mais aussi notre expérience.

Les îles ont toujours fait rêver : fascinantes, inquiétantes, obscures, désirées, leur complexité et leur ambivalence questionnent. Elles passionnent les scientifiques, attirent les appétits territoriaux et économiques, façonnent les images et récits romanesques, inspirent les artistes et anticipent des phénomènes écologiques à venir. Finalement, les îles ne laissent personne indifférent. Elles évoquent émotions et expériences : souvenirs, vacances, rêves, lectures, odeurs, couleurs, inquiétudes parfois... Même ceux qui ne voyagent pas en ont malgré tout une certaine vision. L’île a un pouvoir certain d’attraction, entraîne des pulsions exploratrices et une part de mystère, tout d’abord parce que la traditionnelle quête de la définition d’une île est vaine : étendue de terre entourée d’eau ? Monde clos ? Ce rocher, le nommera-t-on île ? Et cette terre immergée ? En fonction des personnes qui l’étudient, sa définition change. Pour les biologistes, l‘île est un laboratoire d’étude privilégié. Prélude

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Imaginaire insulaire


Texte au verso de la carte : « Cher Benjamin - Dieu créa Adam et Ève sur l’île de Porquerolles. Carte géographique du Paradis : voir de l’autre côté. Une fois par an, l’homme doit retourner là-bas pour son bien. Il fait comme suit : il se rend jusqu’à Hyères, de là un autobus jusqu’à Giens, de là un bateau - 20 min = 5frs - pour l’île. Ce à quoi vous invite cordialement, par la présente, votre Hannah Stern - poste restante ! Île de Porquerolles (Var) » Carte postale envoyée en 1937 par Hannah Arendt à Walter Benjamin depuis Porquerolles. Arendt suggère dans cette carte, un rituel insulaire de bonheur, l’ île comme symbole du paradis, comme refuge utopique.

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Choix du site et du sujet Mon cœur tressauta, lorsque j’entrevis les belles ombres que faisaient dans le lointain les îles d’Hyères. De douces rêveries le long des sables, pendant des jours d’espoir aveugle encore, revolèrent dans mon souvenir. » Frédéric Mistral, Paysages et Sentiment, 1906

Toujours fascinée par les îles, j’ai décidé de poser mes valises pour cette année sur une île qui m’est chère, que j’affectionne particulièrement : Porquerolles. Cet attachement me vient de l’enfance lorsque nous passions des journées en famille à barboter, après avoir accosté en bateau sur les plages de l’île. Je me souviens de la vision de ces bateaux à perte de vue, du village bondé et des glaces rafraîchissantes. À cette époque, je voyais Porquerolles seulement comme une parenthèse ensoleillée mais depuis peu cette excursion paradisiaque s’est transformée. Le risque incendie de plus en plus présent empêche de visiter pleinement l’île, certaines plages semblent reculer, des tâches grises apparaissent dans les massifs, la sécheresse se fait de plus en plus sentir... Ne venant que de façon très épisodique à Porquerolles, je remarque d’autant plus les changements qui s’opèrent. Cette année je décide donc de quitter cette posture de visiteuse curieuse afin de contribuer à une vision prospective de ce territoire. Comment les paysages évoluent avec le changement climatique ? Comment accompagner ces paysages en transformation ? Quel patrimoine transmettre aux futures générations ? Prélude

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Choix du site et du sujet


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Localisation du territoire porquerollais

Provence-Alpes-Côte d’Azur

Prélude

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Introduction et éléments de situation


Introduction et éléments de situation C’est une évidence : une île est un morceau de terre entouré d’eau. Close on peut la cerner. Distincte on peut la penser. Distante on peut la rêver. Mais la saisir est compliquée ». Éric Fougères, Une île, des îles Revue 303, N° 149 – Novembre 2017 boisées en balcon sur la mer, la côte se déploie en un long linéaire orienté plein sud, pour s’ouvrir finalement sur les îles de Porquerolles, Port-Cros et du Levant. L’archipel, point le plus méridional de la côte provençale, est un fragment isolé du massif ancien des Maures dont il emprunte les caractéristiques physiques (géologie, topographie, végétation). Ce massif, formé de roches cristallines d’âge primaire (schistes, grès et quartzites) constitue la toile de fond des paysages de Porquerolles. à la fois parce qu’il est omniprésent lorsque l’on est sur l’île et que l’on regarde l’horizon, mais aussi parce qu’il constitue la base des paysages porquerollais.

Porquerolles est une île du sud de la France, située dans le département du Var, sur la commune d’Hyères qui donne son nom à l’archipel dont elle fait partie, composé majoritairement de trois îles (Porquerolles, Port Cros et Le Levant). À proximité de Porquerolles, on retrouve la métropole toulonnaise, Carqueiranne et Hyères qui sont les grandes portes d’entrées sur le territoire. Le visage de ce littoral est majoritairement urbanisé. Si les pentes les plus fortes ont été épargnées et quelques beaux espaces agricoles et boisés sauvegardés, l’urbanisation a tout de même investi la première bande côtière. Dès lors, sur un fond de collines

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La Plaine des Maures

Garéoult Gonfaron Cuers

Forêt domaniale des Maures

Pierrefeu-du-Var Solliès-Pont

Calvaire-sur-Mer

30 min

Bormes-les-Mimosas La Londe-les-Maures

20 min

30 min

Toulon

20 min

25 min

Hyères

Le Lavandou

Carqueiranne Presqu’île de Giens

Port-Cros

20 min La Tour Fondue

Le Levant Porquerolles

LÉGENDE 30 min

Temps de trajet jusqu’à l’émbarcadère Itinéraire

La Tour Fondue

Embarcadère vers Porquerolles

20 min

Temps de trajet de la navette maritime Itinéraire marin Aire optimale d’adhésion Coeur terrestre Aire marine adjacente

5 km

Coeur marin du PNPC

Prélude

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Introduction et éléments de situation

N


Introduction et éléments de situation Une protection indispensable à la préservation des milieux

Le Parc National de Port-Cros : une identité forte

Accessible en 20 minutes de la côte varoise, il est obligatoire, pour accéder à Porquerolles, de traverser la Presqu’île de Giens, dont l’OGS (Opération Grand Site) vient d’aboutir, motivée par la surfréquentation estivale de ces paysages si précieux. Territoire soumis aux pressions urbaines et touristiques, la côte varoise possède un patrimoine exceptionnel à protéger.

Du fait de la richesse extraordinaire de ses milieux et du patrimoine qu’elle constitue, cette île se trouve au cœur d’une démarche publique de conservation de l’environnement au travers du Parc national de Port Cros (PNPC). Créé le 14 décembre 1963, le Parc national dont les cœurs Port-Cros et Porquerolles occupent 1700 hectares de terres émergées et 2900 hectares de surfaces immergées, est le plus ancien parc marin en Europe et en France. Il est composé de deux « cœurs », espaces de protection forte constitués de l’île de Port-Cros et de l’île de Porquerolles ainsi que leur frange marine jusqu’à une distance de 600 m. L’aire d’adhésion, comprend les communes de La Garde, Le Pradet, Hyères-lesPalmiers, La Croix-Valmer et Ramatuelle, signataires de la Charte du Parc National. Enfin l’aire maritime adjacente, réplique en mer de l’aire d’adhésion, couvre l’espace marin de La Garde à Ramatuelle et est étendue jusqu’à 3 milles marins au sud des îles d’Hyères. La charte est un document de projet collectif pour le territoire. Construite collectivement avec les communes et les acteurs des territoires, la charte indique pour 15 ans les orientations de protection, de mise en valeur et de développement durable retenues pour le territoire, en cœur comme dans l’aire d’adhésion.

Certaines journées d’été, presque 6 000 touristes débarquent par navette maritime sur l’île, auxquelles s’ajoutent les bateaux de plaisance accostant pour la journée face aux baies et dans les criques. Le territoire insulaire, littoral et maritime, du Parc National de Port-Cros fait l’objet d’études scientifiques poussées depuis des dizaines d’années, ce qui permet d’avoir un recul suffisant et nécessaire pour comprendre l’impact du changement climatique sur l’île de Porquerolles. Observer ces phénomènes, en évaluer les conséquences et rechercher des mesures à mettre en place dans les années futures est donc possible sur l’île de Porquerolles, ce qui en fait un laboratoire tout à fait précieux.

Le grand territoire et l’île de Porquerolles

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1.


Rencontre avec Porquerolles


Rencontre avec Porquerolles Paysages paradisiaques Plages de sable blanc : paysages emblématiques De nos jours, les touristes affluent à Porquerolles pleins d’espoir : trouver un petit coin de paradis sans partir à l’autre bout du monde. Cette vision paradisiaque de l’île en est devenue un mythe ; un imaginaire s’est créé et la vision des plages de sable fin joue définitivement son rôle dans cet imaginaire collectif. La plage d’Argent, une des plages appréciées de Porquerolles est l’image typique « carte postale » que Porquerolles véhicule : du sable fin à perte de vue, l’eau transparente turquoise, une végétation luxuriante en arrièreplage, une odeur de crème solaire et un soleil doux, chaleureux. Lorsque l’on marche sur cette plage en pleine journée, on croise majoritairement des touristes ; ce n’est que lorsque le soleil se couche que les habitués du lieu viennent s’y promener et profiter de la chaleur du sable blanc. La plage d’Argent, paysage édénique

Rencontre avec Porquerolles

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Paysages paradisiaques


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Rencontre avec Porquerolles

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Paysages paradisiaques


Paysages paradisiaques

Le village : un jardin cosmopolite Un autre endroit connu de Porquerolles est le village. Réel cœur névralgique de l’île, on y retrouve touristes et habitants, à vélo ou en sandales, en train de jouer aux boules, attablés à la terrasse d’un café ou sur le départ. Village aux ambiances exotiques, aux tons pastels, architectures simples, surlignées ici et là d’un muret en pierre sèche : la chaleur du sud est palpable. Le village est un carrefour cosmopolite dans le jardin indigène de l’île. C’est à partir du village que les touristes partent à la découverte de l’île, pour les plus aventureux vers le sud, pour les autres en longeant la côte nord vers les plages connues et souvent bondées. Endroit privilégié pour rencontrer les Porquerollais, il n’est pas rare de pouvoir discuter avec un habitué du coin. L’hiver, après l’intense saison touristique, une autre ambiance se dégage du village, laissant la place à une lenteur agréable. Le village de Porquerolles

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Paysages paradisiaques

Les plaines agricoles : une mer de vignes à perte de vue Lorsque l’on s’enfonce un peu dans le village, on arrive assez rapidement dans la plaine agricole principale de l’île, composée majoritairement de vignes, de maraîchage et d’arbres fruitiers. Dans les plaines de Porquerolles, des haies s’entrouvrent et se ferment, laissant passer le regard ou au contraire laissant la surprise des paysages à venir. Dans la plaine du village, pêchers, oliviers ou encore figuiers jalonnent le parcours des promeneurs. Ces collections fruitières, implantées par le Conservatoire rassemblent d’anciennes variétés fruitières méditerranéennes menacées de disparition à cause du changement climatique. Une diversité de culture semble alors se dégager mais cela n’est malheureusement pas le cas dans les autres plaines agricoles de l’île, où la viticulture est l’unique plantation. La viticulture au cœur des paysages

Rencontre avec Porquerolles

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Paysages paradisiaques


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Rencontre avec Porquerolles

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Paysages paradisiaques


Paysages paradisiaques

Les rochers : des anfractuosités remplies de vie Si l’on longe la côte nord, des paysages plus rocheux apparaissent. Ce visage de Porquerolles est moins connu, moins visité aussi, mais regorge d’une grande variété de milieux et d’espèces. Au pied de ces roches grisâtres et sombres, l’écume fait briller et blanchit les lichens colorés. Si l’on s’aventure au bord de l’eau, lorsque l’eau est calme, on peut faire mille rencontres, mille découvertes. Dans les replis de la roche, formes, couleurs, mouvements, se confondent. On en arrive à se demander si il s’agit d’un animal, d’une algue ou seulement d’une ombre. Accessibles seulement à pied, il n’est pas rare de croiser, dans ces paysages, quelques habitants venus se réfugier loin de l’agitation touristique du cœur de l’île. Des odeurs aromatiques se dégagent de la végétation brossée par le vent et un calme absolu règne dans ces lieux. La pointe ouest

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Rencontre avec Porquerolles

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Paysages paradisiaques


Paysages paradisiaques

La côte rocheuse : paysage méconnu Ces paysages de falaises abruptes, difficiles d’accès et éloignés du village rendent la découverte d’autant plus agréable. Interface entre l’eau, l’air et la terre, ces falaises et promontoires sont soumis aux embruns marins comme nulle part ailleurs sur l’île. Paysage en mouvement constant, les vagues y sont plus fortes, l’érosion plus importante et le vent plus puissant. Là où bat la vague le plus intensément, au fond d’étroites failles où l’eau est remuée par l’effet du ressac, la roche est souvent couverte d’algues ou d’herbes grises appréciant le sel. En retrait de cette ceinture salée, la végétation est «déformée»: arbres et arbustes sont plaqués au sol, modelés par les caprices du vent. Ils s’étirent souvent en massifs allongés contre lesquels il n’y a plus de terre, tant le vent y est fort. Les essences qui composent ces massifs sont particulièrement sensibles à l’augmentation des températures et il n’est pas rare d’y voir des tâches grises apparaître, signe de la mortalité accrue de certaines espèces. La côte sud, un relief marqué

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Paysages paradisiaques

Le visage sous marin de l’île

L’herbier de Posidonie, le poumon vert de la méditerranée

Le visage sous-marin de Porquerolles est encore plus exceptionnel. De la terre vers le large, les teintes de l’eau ondulent du bleu au vert. Lorsque l’on s’éloigne des plages de sable où l’eau est de couleur turquoise, on trouve de sombres fonds marins bleu nuit, dont les profondeurs restent invisibles de la surface. L’herbier de posidonie s’étire en vastes prairies ondulantes sur les fonds de sable ou en touffes éparses sur fond de roches. Les fonds marins de porquerolles regorgent aussi d’une faune impressionnante. Il n’est pas rare de se trouver face à un banc de poissons mais avec un peu de chance on peut faire une rencontre inattendue avec des poissons solitaires cachés dans les roches ou l’herbier. Rencontre avec Porquerolles

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Paysages paradisiaques


Une diversité d’espèces remarquables

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Porquerolles : bien / patrimoine commun Notre héritage n’est précédé d’aucun testament.» René Char, Fureur et mystère, Feuillets d’Hypnos, feuillet 62 p. 190.

construit aussi à partir d’éléments inédits, émergents. Un paysage en tant que bien commun ne signifie pas que ce paysage doit être muséifié et conservé tel quel, cela signifie qu’il doit être transmis, alors qu’il évolue inévitablement.

Les paysages de Porquerolles sont paradisiaques, emblématiques, reconnus et partagés, à la fois par les îliens mais aussi par les visiteurs ou simples rêveurs d’un voyage prochain. L’imaginaire insulaire porquerollais a joué un rôle très important dans la construction d’un mythe de nature préservée, riche par sa faune et sa flore, à terre comme en mer. Cet imaginaire, associé à un sentiment d’héritage fort sont à l’origine de la construction du patrimoine commun que représente Porquerolles.

La question de la meilleure gestion de ces évolutions en relation avec le changement climatique correspond à une problématique particulièrement actuelle . Pour reprendre une expression d’Hannah Arendt, elle même reprise de René Char, ce bien commun que constitue Porquerolles est un « héritage sans testament » : liberté est laissée aux légataires de se saisir de l’héritage et de le réinterpréter. Le bien commun questionne le futur plus qu’il ne regarde un passé volontiers nostalgique. En outre, le bien commun met en avant la problématique de la responsabilité des acteurs et usagers vis-à-vis du collectif : collectif des prédécesseurs, qui ont façonné le paysage tel qu’il est perçu aujourd’hui, collectif des contemporains qui aspirent à partager ce bien « public », et collectif des absents : les générations futures.

Ces paysages insulaires ont alors été érigés en patrimoine national, au nom de leur capacité à exprimer une identité commune (Walter, 2004 ; Sgard, 2008). Ainsi, dans un contexte marqué par la menace du changement climatique, deux types de réaction émergent, non exclusives l’une de l’autre : une demande générale insistante pour conserver les paysages hérités au risque de leur muséification, et parallèlement, une volonté de se projeter dans l’avenir, aussi incertain soit-il, en s’interrogeant : quel sera le paysage du « vivre-ensemble » de demain ? Comment transmettre aux générations futures ce bien commun tel que nous l’avons en partie reçu et en partie construit ? Construit à partir d’éléments légués, puis ajustés, retravaillés, redéfinis en fonction des impératifs du présent, Rencontre avec Porquerolles

Cette responsabilité tant individuelle que collective des usagers actuels alerte sur l’importance d’afficher les priorités et les enjeux, et de faire dialoguer les différents acteurs . Carte des paysages

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Porquerolles : Bien / patrimoine commun


1 km

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N


La Richesse du sous-sol Les Maures sont formés de roches variées

Vues de la mer, les côtes des îles et du continent sont de multiples couleurs, parfois subtiles. La toponymie de certains lieux de l’archipel en sont révélateurs : Cap Blanc, point rouge, pointe rousse, Calanques des pierres de Fer, plage d’argent... Cette palette de couleurs nous rappelle la diversité de roches qui composent les îles.

Le sous-sol, élément déterminant d’un paysage, se définit essentiellement par la nature des roches qui le composent. L'archipel des Îles d'Or (Porquerolles, Port-Cros et du Levant), est considéré comme le chaînon le plus méridional, en partie submergé, du massif des Maures. Il y a 500 millions d’années, quand n’existaient ni l’Europe, ni la Méditerranée, une mer recouvrait la région. Le rapprochement des bords de ce bassin provoqua l’enfouissement des sédiments accumulés qui se transformèrent en profondeur. 150 millions d’années plus tard, au carbonifère, la formation de la chaîne hernycienne, dont les Maures font partie, ramena à la surface ces roches métamorphiques. Au terme de son histoire longue et mouvementée, le massif des Maures apparaît comme un fragment de socle usé, décapé de sa couverture.

ARC

La diversité géologique de Porquerolles C DE

La structure géologique de Porquerolles est Forcalquier de roches composée majoritairement métamorphiques primaires cristallines (schistes, grès et quartzites), en couches plissées et compactes qui forment les reliefs orientés nordGrasse sud. À l’est, le banc de quartzite massif du Cap des Cannes PROVENCEdu reste de TANNERON Mèdes se détache géologiquement Draguignan l’île. Des sédiments quaternaires se sont déposés ESTEREL CALCAIRE dans les plaines, issus de l’érosion et de Saint Raphaël l’altération de ces roches. En effet, par sa lithologie constituée essentiellement de matériaux Saint Tropez S Marseille RE «tendres», Porquerolles est prédisposée à subir Cassis S AU M RI C les assauts de l’érosion. Celle-ci s’exerce d’une E Toulon Hyères NC manière linéaire (cours d’eau temporaires), VE O PR incisant facilement le matériel schisteux et exportant des débris de petite taille sous forme de limons et d’argiles. E

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Grasse

PROVENCE

Sain

TANNERON Draguignan

Marseille

Saint Raphaël

me

Saint Tropez

Beau

ES

R AU M

Cassis Toulon

Bassins (Oligo-miocène) Bassins (Oligo-Miocène)

ESTEREL

CALCAIRE

te Sain

Cannes

Hyères

Les îles

Couverture sédimentaire (Trias-Eocène)

Permien sédimentaire Permien sédimentaire

IS CR CE N E OV PR

Socle primaire Socle primaire Domaine alpin Domaine alpin

d'Hyères

Nappes alluviales (Pliocène) Bassins (Oligo-miocène)

Couverture sédimentaire (Trias-Eocène) Couverture sédimentaire (Trias-Eocène)

TA LL IN E

re

ctoi te Vi

Rencontre avec Porquerolles

36

La richesse du sous-sol

Un socle issu du massif des Maures


Cap de l'Esterel Presqu'île de Giens

Rochers des Mèdes ou des Deux Frères

Cap des Mèdes

Tour Fondue

Pointe Maoufat

Pointe du Lequin Pointe de Pointe du l’Aiguade Bon Renaud

Île du Petit Langoustier

Plaine du Brégançonnet

Presqu'île du Langoustier

Pointe de l'Alycastre

Plage de la Courtade

Plaine de Porquerolles

Pointe du Gros Baou

Plaine de Notre Dame

Calanque du Buon Dieu Pointe de la Galère Le Gros Sarranier

Plaine de la Courtade

Pointe du Gabian Pointe des Salins

Pointe du Brégançonnet

Pointe de l'Oustaou de Diéu

Gorges du Loup

Calanque de l'Indienne Cap d'Arme

1 km

Sédiments continentaux quaternaires (Pléistocène)

FORMATION PALEOZOIQUES Unité Supèrieure (Fenouillet) Alternance grès/schistes Schistes (Cambrien) Grès Niveau de grès microconglomératiques

Contact Alternance grès / schistes noirs / schistes rubanés à intercalations de calcaires et calcshistes Quartzites fines anthracites /schistes noirs Quartzite jaune du Cap Médès

Unité Infèrieure (les Maurettes) Schistes / micashistes Schistes noirs / verts, quartzites, grès Schistes à intercalations de métabasites de calcshistes et de minéralisations à sulfure Schistes verts monotones

Le Petit Sarranier


L’eau à Porquerolles

L’île de Porquerolles est la plus grande de l’archipel des îles d’Or avec ses 1276 hectares. Elle s’étend sur environ 7 kilomètres de long pour 3 kilomètres de large. Sa forme en croissant orienté Est-Ouest est très reconnaissable.

L’île ne possède aucun cours d’eau permanent mais uniquement des ruisseaux temporaires dont quelques-uns conservent des flaques pérennes. Seulement 10% des eaux de pluie s’infiltrent et alimentent les nappes phréatiques, le reste étant perdu par ruissellement et évaporation depuis le sol ou par l’intermédiaire des plantes. Les précipitations étant rares en été, la surexploitation avec un pompage excessif des nappes souterraines conduit à leur salinisation par la remontée du biseau salé. L’existence de piézomètres de contrôle permet de surveiller le niveau des eaux et leur concentration en sels.

Le relief de Porquerolles demeure modeste, avec une altitude maximale de 142 mètres. Il est dissymétrique ; le littoral nord, le plus abrité, accueille l'essentiel des plages et microplages ; en amont, les pentes y sont longues et peu abruptes et le relief plonge progressivement sous l'eau. Le littoral sud, nettement plus découpé et rocheux est caractérisé par de hautes altitudes et des pentes abruptes avec une topographie sous-marine arrivant rapidement à des profondeurs de -20 mètres. L’île est constituée de 5 chaînons de collines orientés nord/sud qui délimitent 4 bassins versants (plaines de Notre-Dame, de la Courtade, du village et du Brégançonnet d’est en ouest). Les écoulements au travers des plaines agricoles ou en fond de vallon débouchent sur la mer par les plages au nord et par les calanques au sud.

Plaine de Notre Dame

Plaine du Brégançonnet

Plaine de la Courtade

Plaine du village

Légende : 1 km

N

L’eau, une ressource convoité

BASSINS VERSANTS

Limite bassin versant

Nom chapitre

38

Nom sous chapitre

Limite bassin versant Cours d’eau Bassins, Points d’eau


NNE Pointe du Lequin

Plaine de Notre-Dame (15 m)

NO

SE

Pointe de l’Aïguade

Mont Sarranier (105 m)

1 km

ONO

b

500 m

Cap des Mèdes

NO

a

d’

L’oustaou de Diou

Lagunes (19 m)

Mont des Salins (125 m)

aPlaine de la Courtade

(22 m)

NE

a

c SO

1500 km m

Gorges du Loup (48 m) c’

Mont Sarranier (128 m)

N

SSO b’

Pointe des Carrières

a

Lagunes (19 m)

Pointe du Lequin Alternance grès/schistes

d’

Alternance grès / schistes noirs / schistes rubanés à intercalations de calcaires et calcshistes

Quartzites fines anthracites Mont Sarranier /schistes noirs (105 m) Quartzite Cap Médès Niveau de grès Lejaune GrosduSarranier (17 m) microconglomératiques

N

a

NO b

Maquis haut Maquis bas

b

c’

Gorges du Loup (48 m)

SO SO

Gorges du Loup (48 m)

Lagunes (19 m) Lagunes (19 m)

c c 500 m

SE

Pte de Maoufat

N

Phare Le Moulin du Bonheu (44Agathe m) Fort St (36 m (40 m) d b’ de la Courtade Plage Phare S (44 m)

c

39 Sédiments continentaux quaternaires (Pléistocène)

S a’

a

a’

Mont des Salins (125 m)

Plaine de la Courtade (22 m) Mont Sarranier (105 m)

b’

Mont Sarranier (128 m)

Mont Sarranier (105 m)

ONO

ONO

Pte de Maoufat

d

Cap des Mèdes

Le Gros Sarranier (17 m)

a’

SE

Calanque d

ENE

Pte du Gros Baou

Cap des Mèdes

ENE d’

Pte du Gros Baou

Pte de Maoufat

b’

d

Alternance grès / schistes noirs / Schistes / micashistes schistes rubanés à intercalations de Schistes noirs / verts, Mont Sarranier calcaires et calcshistes Schistes (Cambrien) Mont des Salins quartzites, grès (128 m) L’oustaou de Diou Quartzites fines anthracites (125 m) Schistes à intercalations de Gorges du Loup L’oustaou de Diou Mont Sarranier Grès /schistes Lagunes noirs Mont des Salins métabasites de calcshistes et de Plaine de la Courtade (48 m) (128 m) L’oustaou de Diou Quartzite (19 m) jaune du Cap Médès minéralisations à sulfure Niveau (125 m) SO de grès (22 m) Plaine de la Courtade microconglomératiques Schistes (22 verts m)monotones Plaine de la Courtade (22 m) Alternance grès/schistes

Falaises

Schistes noirs / verts, quartzites, grès Schistes à intercalations de métabasites de calcshistes et de minéralisations à sulfure Schistes verts ONOmonotones Cap des

Pointe des Carrières

Alternance grèsPlaine / schistesde noirsNotre-Dame / Schistes / micashistes Le Gros Sarranier a’ (15 m) Pointe du Lequin Plaine de Notre-Dame Mont Sarranier schistes rubanés à intercalations de (17 m) SE Sol en culture viticole (15 m) (105 m) Schistes noirs / verts, Pointe du Lequin (52 m) calcaires et calcshistesPlaine de Notre-Dame Schistes (Cambrien) NO c Sol en culture nourricière Le Gros Sarranier (15 m) quartzites, grès (52 m) Quartzites fines anthracites (17 m) SE Végétation Schistes à intercalations de Grès /schistes noirs (52 m) Maquis haut Sol en culture viticole métabasites de calcshistes et de Maquis bas Quartzite jaune du Cap Médès minéralisations à sulfure Niveau de grès Sol en culture nourricière b’ microconglomératiques Falaises Schistes verts monotones b Végétation Sédiments continentaux quaternaires (Pléistocène) 500 m

NO

Schistes / micashistes

Mèdes

Fort St Agathe Le Moulin du Bonheur (36 m) (40 m) NE Plage de la Courtade Fort St Agathe Le Moulin du Bonheur SSO (36 m) (40 m) Plage de la Courtade Calanque du Bon Dieu

a’ L’oustaou de Dioua

Sédiments continentaux quaternaires (Pléistocène)

Pte du Gros Baou

Alternance grès/schistes

Grès

PointePointe des Carrières de l’Aïguade

a’

ENE

continentaux a quaternaires (Pléistocène)

Schistes (Cambrien)

SSO

NNE

Pointe de l’Aïguade

c

Cap Sédiments des a’ Mèdes

d

c’

N

Pointe des Carrières

Plaine de Notre-Dame (15 m) (52 m)

Pointe de l’Aïguade Calanque du Bon Dieu

NNE

b’

b

Gorges du Loup (48 m) SO Mont Sarranier NNE (128 m) b

ONO

Pte de Maoufat

Pte du Gros Baou

Pointe du Lequin

d

SE

ENE

Pte de Maoufat

b’

Le Gros Sarranier (17 m)

(52 m) a

Plage de la Courtade

SSO

Sol en culture viticole Sol en culture nourricière Mont des Salins Calanque du Bon Dieu Végétation (125 m)Maquis haut NE Maquis bas

Calanque du Bon Dieu Falaises

NE c’ c’


Le climat méditerranéen à Porquerolles Cap de l'Esterel Presqu'île de Giens

Rochers des Mèdes ou des Deux Frères

Cap des Mèdes

Tour Fondue

Pointe Maoufat

Pointe du Lequin Pointe de Pointe du l’Aiguade Bon Renaud

Île du Petit Langoustier

Pointe de l'Alycastre

Pointe du Gros Baou

Plage de la Courtade

Calanque du Buon Dieu Pointe de la Galère Le Gros Sarranier

Presqu'île du Langoustier

Pointe du Gabian Pointe des Salins

Pointe du Brégançonnet

Pointe de l'Oustaou de Diéu

Gorges du Loup

Calanque de l'Indienne Cap d'Arme

NATURE DE FOND

1 km

N

Roche

Sables

Graviers

Sables fins et vases

Sables Graviers

Sables fins

Le Petit Sarranier

Le climat porquerollais

Pour mieux comprendre les caractéristiques du climat de Porquerolles et appréhender les enjeux du changement climatique qui pèse sur cette île, il est primordial de décrire rapidement le contexte climatique méditerranéen dans lequel elle évolue.

L’île de Porquerolles se situe dans une des zones les plus chaudes du littoral méditerranéen français, à la limite entre les étages thermo- et méso-méditerranéens. Elle bénéficie de conditions climatiques particulières avec 3 mois estivaux secs (presque 4), des hivers tempérés et une forte humidité relative de l’air (même en période estivale), liées à la situation insulaire et méridionale. Les précipitations totales moyennes au Sémaphore atteignent 570 mm par an (entre 1988 et 1997), pour une température annuelle moyenne de 16°. Le Mistral est dominant bien que le Levant (vent d'Est) se fasse aussi sentir. L'île est relativement à l'abri des grands froids (notamment ceux de 1956, 1970 et 1985) qui ont eu beaucoup plus d'incidence sur la végétation du continent.

Le climat méditerranéen

Les caractères climatiques méditerranéens sont très tranchés, plus que dans les deux autres climats français (méditerranéen, atlantique et montagnard) (Joly et al., 2010). Avec le changement climatique, le découpage de ces zones va évoluer et se modifier. La répartition des précipitations et les variations de températures au cours de l’année, permettent de distinguer le climat méditerranéen, des climats arides et des autres climats tempérés. Les températures annuelles sont élevées, associées à des jours froids rarissimes et des jours chauds fréquents. À des hivers et étés doux et secs, succèdent des printemps et automnes très arrosés, souvent sous forme d’orages. Le climat méditerranéen est donc réputé pour sa douceur, mais il est ponctué d’événements météorologiques extrêmes d’une rare intensité telles que les pluies torrentielles (en quelques heures, une moyenne mensuelle de précipitation peut être dépassée) et les sécheresses peuvent être très longues, susceptibles d’affecter les populations et les différents milieux. Rencontre avec Porquerolles

Porquerolles est très vulnérable au changement climatique de par sa situation insulaire et méridionale. En hiver, une diminution, voire une disparition, du nombre de jours de gel pourraient apparaître. L’été, les épisodes de canicule seraient plus longs et plus intenses, renforcés par la baisse des pluies estivales. À quelle vitesse ce climat va -t-il évoluer ? Quel sera son impact sur les paysages de Porquerolles ?

40

Le climat méditerranéen


Les qualités permanentes de Porquerolles

«

La diversité géologique de l’île est à l’origine des paysages emblématiques d’aujourd’hui. Le relief, intime et la largeur réduite de Porquerolles, créent un croissant accueillant, à l’abri du vent. Sa morphologie, avec des plaines tournées vers le nord, créée des ambiances hétéroclites dans ces alcôves enveloppantes, fraîches. Ces fondements sont à l’origine de la diversité de paysages et de milieux retrouvés dans l’archipel et constituent le visage immuable de Porquerolles.

Il y a des changements en permanence en Méditerranée, je ne dis pas qu’il faut nier les faits mais c’est difficile de se faire une opinion. »

Carte des versants : Une île à l’abri du vent

Le Puncho di Buon Diou 128 m

Plaine de Notre Dame Plaine du Brégançonnet Mont Sarrat 72 m

Mont d'Esterly 87 m Mont de Tiélo 107 m

Plaine de la Courtade

Sémaphore 142 m

Monts Sarranier 128 m

Plaine du village

Pointe du Gabian

Mont des Salins 125 m

Légende : Plaines Versant Nord Versant Est EXPOSITION DE L’ÎLE Versant Sud Versant Ouest Falaises

N

Plaine

1 km

Versant Nord Versant Est Versant Sud

Versant Ouest Falaises

1 km

N

41


Quel devenir pour cette île ? Comment répondre aux défis en environnementaux dans leurs différentes dimensions, qui touchent aussi bien aux questions de biodiversité végétale et animale qu’à celles de la qualité des conditions spatiales, paysagères et architecturales, de la vie sociale ? » Jean-Marc Besse, Îles en projet, Les carnets du paysage de Versailles, p.7

La pérennité des paysages de Porquerolles, pourtant inscrits dans la mémoire collective est en péril avec l’accélération des processus. Comment ces paysages ont-ils déjà évolué ? Comment les hommes les ont-ils façonné ?

Grâce à mon arpentage du territoire, à la compréhension des dynamiques à l’œuvre et à mes rencontres avec certains îliens et acteurs insulaires, je commence à mieux saisir la singularité des paysages porquerollais ainsi que sa vie insulaire et les enjeux importants en cours où à venir. À première vue, Porquerolles est un petit coin de paradis en Méditerranée où les habitants se partagent l’île avec des touristes toujours plus nombreux, et le Parc National de Port-Cros s’occupe de la préservation de ce bijou immaculé. Toutefois, cette image édénique et lisse ne reflète pas les mutations en cours car un réel basculement est en train de s’opérer. Le changement climatique ne peut qu’accentuer le déficit en eau durant la saison de végétation, aggravant ce qui constitue déjà le principal facteur limitant pour la flore. La course-poursuite entre le climat et la flore est donc déjà bien engagée. Rencontre avec Porquerolles

Pour l’instant, les mesures prises pour faire face aux défis environnementaux et sociaux sont peu nombreuses. Sont -elles suffisantes pour enrayer les transformations déjà à l’œuvre ? Cette île peut-elle conserver sa richesse ? À travers ce travail, j’espère permettre à tous les amoureux de Porquerolles de garder espoir et de continuer à rêver.

Une dualité forte, entre terre-mer

42

Quel devenir pour cette île ?


43


Porquerolles : Paysages vécus


2.


Porquerolles : Paysages vécus À l’origine de la vie insulaire Une insularité récente

De l’histoire humaine, Porquerolles a gardé la trace de toute la diversité des usages anciens qui ont façonné les paysages actuels ; usages commerciaux et escales avec les épaves de navires antiques, utilisation des terres avec les vestiges d’habitats groupés dans les plaines, activité militaire avec les forts et les batteries, et plus récemment la naissance du tourisme avec les hôtels et auberges.

Ce territoire insulaire « remarquable » nous a été légué il y a longtemps. Au maximum glaciaire, il y a 18 000 ans, le niveau de la mer était 125 m plus bas. Les îles d’Hyères étaient des collines rattachées au continent. La mer, après la fonte des glaces, a isolé ces reliefs, dessinant des îles. Peu à peu le sable soufflé par le vent, poussé par la mer, a reculé vers les côtes formant l’isthme de la presqu’île de Giens Cette insularité est donc, si l’on parle en temps géologique, assez récente. De nos jours, la mer continue de monter de 2,5 mm/an ; il est donc possible que la presqu’île de Giens redevienne une île et que certaines plages de l’île disparaissent progressivement.

Grâce à tous ces vestiges du passé, le Parc National de Port Cros a pu lancer un programme de recherche pluridisciplinaire rassemblant plusieurs spécialistes de l’histoire ancienne. La confrontation des observations de ces différents corps de métiers (historiens, archéologues, archéobotaniste et géomorphologue) m’a permis de comprendre quels milieux ont trouvé les hommes venus s’installer sur Porquerolles depuis le continent, mais aussi de connaître leur influence,au gré des fluctuations du peuplement, sur l’île. Comment l’île a-t-elle été habitée depuis des millénaires ? Comment le territoire a-t-il été pratiqué pour former l’occupation spatiale telle que nous la connaissons aujourd’hui ? Quels impacts ont eu les dynamiques anthropiques et naturelles sur ces milieux insulaires ? Porquerolles : Paysages vécus

46

à l’origine de la vie insulaire


L’évolution des modes d’occupation humaine et la mutation du paysage

Porquerolles entretient depuis des millénaires un lien étroit avec les Hommes qui ont façonné de manière très importante les paysages que l’on connaît aujourd’hui. Lieu de passage ou d’occupation prolongée, territoire exploité ou désolé, boisé ou dénudé, l’île de Porquerolles a su convaincre des générations de l’occuper. Cette recherche historique a pour but de comprendre comment le paysage porquerollais nous a été transmis. Je m’appuierai ici sur des travaux d’archéologues, archéobotanistes et de géomorphologues afin d’avoir une vision générale du lien entre le territoire et les sociétés qui l’ont fréquenté. Pour chaque période historique, nous nous intéresserons donc particulièrement au binôme inséparable que constituent les activités anthropiques et le paysage, en le combinant avec l’importance de la ressource en eau disponible.

-18 000 ans -125 m

-11 000 ans -50 m

Port-Cros Porquerolles

-8 000 ans -20 m

Blocs diagrammes de la formation de l’archipel

Aujourd’hui

47

Le Levant


Occupation humaine

Couvert forestier

Terres en cultures

Ressource en eau

Le couvert forestier est important lorsque les premiers hommes arrivent.

À cette époque le climat est plus sec, l’écoulement des cours d’eau est réduit.

Les traces des premiers hommes datent du début de l’Âge de Cuivre.

Âge de cuivre

Âge de bronze Porquerolles est seulement fréquentée, probablement en lien avec des usages maritimes de l’île.


Âge de fer Dégradation du couvert végétal (réduction du couvert arboré, extension du maquis)

Nette augmentation de la fréquention des îles d’Hyères

L’île sert d’escale pour certains bâteaux

Mise en culture progressive des plaines des versants nord. Installation de populations permanentes. Construction de deux habitats pérennes.


Une rencontre entre les hommes et le territoire insulaire Les traces des premiers passants (-3000 à - 800 av. J.-C.)

relation avec des activités de pêche. Aucun charbon de bois n’a été retrouvé datant de cette période, nous ignorons si des activités agro-pastorales ont modifié le paysage des îles à cette époque mais l’on suppose que lorsque les premiers hommes sont arrivés sur l’île, un couvert forestier dense devait être présent, le trait de côte plus bas que l’actuel, le climat plus sec et l’eau rare.

L’occupation et le passage des premiers Hommes sur l’île de Porquerolles sont renseignés par des fragments archéologiques qu’ils ont laissés derrière eux (céramiques et éclats de silex, perçoir-grattoir en silex). Ces nombreux indices d’une présence fugace nous permettent de remonter aux premiers temps de l’histoire humaine insulaire. En effet, au Chalcolithique et à l’âge de bronze l’île, semble avoir été seulement fréquentée, pas encore habitée, sans doute en

Île boisée

Activité de pêche

Les prémices d’une vie insulaire

Porquerolles : Paysages vécus

50

Une rencontre entre les hommes et le territoire insulaire


Une installation insulaire permanente (-800 à -52 av. J.-C.)

y faire escale. À cette époque la végétation est dominée par des Pins, d’Alep surtout, Maritime aussi, accompagnés de Bruyères arborescentes. Le chêne vert n’est pas du tout présent sur l’île : il fera son apparition plus tardivement. Le défrichage des plaines boisées réduit le couvert végétal (réduction du couvert arboré, extension du maquis) et fragilise les sols.

L’âge de fer est marqué par l’établissement sédentaire de deux groupes : l’un à l’emplacement de l’actuel village, l’autre dans l’anse de la Galère. Ces habitats importants attestent d’une population permanente. On assiste en même temps à une nette augmentation de la fréquentation des îles de l’archipel. La grande quantité de gisements du 1er siècle avant J.-C. est sans doute à mettre en relation avec des activités de pêche intensive dans les parages de l’île. En effet, l’emplacement des habitats à proximité d’abris contre les vents forts et la grande quantité d’amphores à vin indiquent un attrait pour la forme de l’île en croissant et sa situation sur certaines routes commerciales pour

La fin de l’Âge du fer est donc une période de rencontre entre le territoire insulaire et différentes communautés humaines. La maitrise des terres cultivées provoque une certaine révolution alimentaire et une accélération démographique.

Habitat groupé

Mise en culture de la plaine

Escale appréciée

L’essor de la vie insulaire

51


Habitats groupés toujours en activité sans interruption.

Extension du « village » plage Notre-Dame Création de thermes

Mise en valeur systématique des terres des plaines et paturage d’animaux domestiques

Décapage des sols qui s’étaient développé sous couvert forestier pour conforter le village et mettre en culture les plaines des versants nord

Période romaine


Antiquité tardive Période marquée par l’insécurité : établissement de l’habitat fortifié des Mèdes L’île est désertée peu à peu Culture de l’amandier

Abandon progressif des terres cultivées

Présence de cours d’eau épisodiques dont le débit pouvait être important

Le déboisement a dépassé le seul cadre des plaines et affecte partiellement les versants


L’exploitation intensive des ressources

À l’Antiquité, de nombreux textes évoquent l’existence de l’archipel. Ces mentions sont très succinctes, apportant très peu d’éléments à la connaissance de son histoire. On y apprend toutefois qu’elles devaient leur nom de Stoechades à leur position alignée (Pline l’Ancien, Histoire Naturelle, III, 5, 79). Si l’on en croit Pline l’Ancien, les noms des trois principales îles devaient être Porquerolles / Proré, Port- Cros / Mesé et Le Levant / Hypaea. Nous retiendrons aussi, des textes de Strabon, Pline l’Ancien et Tacite, que les Grecs de Marseille avaient entretenu une garnison sur cet archipel pour lutter contre la piraterie. Les mêmes auteurs mentionnent le corail de belle qualité récolté aux alentours (Bats 1985).

(-52 av. J.-C. à 284)

Porquerolles était très appréciée par les navigateurs car elle leur servait d’escale sur la route du cabotage entre l’Italie et l’Espagne, juste après s’être arrêté à Massalia (Marseille). Sa forme en croissant protégeait les bateaux du vent. C’était donc l’endroit parfait pour faire escale et profiter du village déjà bien établi et de la nouvelle villa construite plage Notre-Dame. À Notre-Dame, tout annonce une forte exploitation agricole, telle qu’on peut la rencontrer sur le continent. Au village, des thermes décorés d’une mosaïque, détruits lors de la construction d’un immeuble, ainsi que des murs qui affleurent sur la place du village permettent d’imaginer que la vie insulaire s’est durablement installée.

Déboisement des coteaux

Expansion agricole

VIllage prospère

Une île exploitée et habitée

Porquerolles : Paysages vécus

54

Une rencontre entre les hommes et le territoire insulaire


Il faut sans doute penser que cet habitat était encore très lié aux activités maritimes mais l’exploitation agricole des plaines continue de prendre de l’ampleur et le déboisement a dépassé le seul cadre des plaines pour s’étendre partiellement sur certains versants. Le pâturage, probablement de chèvres, a contribué à l’ouverture des paysages à Porquerolles mais aussi sur les autres îles de l’archipel. La fruiticulture devait sans doute être importante car de nombreux charbons d’amandier ont été trouvés.

l’habitat fortifié des Mèdes au Vème siècle. L’attrait des lieux est moindre, mais cela n’empêche pas la fréquentation de nombreux sites d’habitats d’origine plus ancienne. Sur Porquerolles, les activités agro-pastorales paraissent perdurer mais de façon moins importante de siècle en siècle. À cette époque, les évènements tempétueux devaient être plus fréquents, la pluviosité plus abondante car des substrats historiques ont montré un apport alluvial plus important. La ressource en eau devait donc être plus conséquente et facilitée. L’Antiquité a donc été l’âge d’or de Porquerolles, période pendant laquelle les innovations dans les modes de vie ont permis un essor de l’attractivité de la vie insulaire. Malgré cette richesse, l’île perd peu à peu de sa splendeur et la forêt reprend sa place aux endroits où l’homme s’est retiré.

Le déclin progressif de la communauté insulaire (284 à 486)

Cette période est marquée par l’apparition d’un sentiment d’insécurité, illustré par la création de

Enfrichement des terres agricoles

Un abandon progressif

55


La recrudescence des pluies et leur concentration en averses plus brutales, favorisent un écoulement plus important des cours d’eau

Enfrichement des anciennens plaines cultivées

L’île est abandonnée de façon permanente

La végétation reprend ses droits et la fôret recolonise peu à peu les anciennes plaines cultivées Rares traces de passages ponctuels de bateaux, faisant escale

Moyen-Âge


Époque moderne Utilisation de la ressource en eau potable des nappes

Exploitation intensive des ressources forestières Exploitation agricole intensive des plaines nord

Repeuplement de l’île pour assurer une meilleure défense de la côte provençale

Fortification de Porquerolles et des îles d’Hyères

Désintéret du caractère défensif de l’île


C’est d’ailleurs seulement sur cette île qu’ont été retrouvées des traces d’occupation humaine : au début du Moyen-Âge, Porquerolles est abandonnée. Seuls quelques bateaux continuent de faire escale. Le milieu se referme, les champs s’enfrichent et les arbres fruitiers se fondent dans la forêt. La vie insulaire s’est éteinte progressivement, laissant la place, selon certains, à des corsaires.

L’île déserte (486 à 1500)

À cette période, la présence d’institutions ecclésiastiques est monnaie courante mais l’installation d’établissements religieux n’a pas été confirmée à partir des vestiges archéologiques relevés à Porquerolles. La présence de moines, et en particulier du monastère des îles d’Hyères, est attestée par Jean Cassien mais il semble vraisemblable qu’ils n’ont pas occupé Porquerolles mais l’île du Levant, sa deuxième voisine à l’Est. Sa situation très isolée, son accès difficile du fait de sa côte rocheuse, font de cette île le lieu le plus approprié à la retraite recherchée (Pasqualini 1992).

Un visage végétal différent

Entre le Moyen-âge et la période moderne, la végétation redevient importante et de nombreux charbons de bois attestent d’un paysage végétal totalement différent. La végétation à cette époque se différencie de la Reboisement naturel par abandon des cultures

Abandon des lieux d’habitat

Une île fantôme

Porquerolles : Paysages vécus

58

Une rencontre entre les hommes et le territoire insulaire


situation actuelle par l’absence du Chêne vert (abondant actuellement), la présence du Chêne blanc (rare actuellement) et s’en rapproche par l’abondance relative des maquis et la présence d’un pin, probablement le Pin d’Alep. En outre, une flore arborée plus riche qu’actuellement en espèces feuillues méditerranéennes est présente (Chêne à feuillage caduc, Chêne liège, Châtaignier, Orme champêtre...) ainsi qu’en feuillus particulièrement mésophiles (Hêtre, Saule, Érable), absents de la flore actuelle des îles. Comment interpréter une représentation des feuillus plus importante à l’époque moderne qu’actuellement ? Il s’agit peut-être, en premier lieu, de l’effet d’une dynamique forestière naturelle, consécutive au relâchement de la pression humaine au Moyen Âge, mais ce changement appelle sans doute aussi une explication climatique. Un ou plusieurs épisodes plus humides qu’actuellement, historiques, ont pu favoriser un regain de ces espèces sur l’île de Porquerolles (et sur le continent), et conditionner un paysage plus riche en feuillus avant les déboisements intenses de l’île au XVIIIe siècle. Grâce à certains textes, on sait que la période historique du «Petit Age glaciaire» (XVIe-XIXe siècle), culminant au XVIIe siècle, fut caractérisée en Europe par un refroidissement, mais aussi par des printemps et des étés humides (Duplessy, Morel 1990). Cet exemple permet de rappeler que nous savons peu de choses sur le régime climatique aux périodes préhistoriques et historiques, sans compter les différences entre la région méditerranéenne et l’Europe du nord (Alexandre 1987). Des falaises inhospitalières

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La reconquête des îles d’Or : fortifier pour se défendre

corsaires s’ajoutent les menaces espagnole puis anglaise. Pour y faire face et à la demande de Richelieu, d’importants travaux de défense sont réalisés sur les îles de Port-Cros et de Porquerolles entre 1634 et 1643, où trois forts sont construits (les deux forts du Langoustier et celui de l’Alycastre). Lorsque la menace espagnole disparu, les îles furent de nouveau laissées pour compte, les bâtiments défensifs abandonnés. Le rôle stratégique de la rade s’affirme tout au long du XVIIIe siècle sur fond de guerres et de rivalités franco-anglaise, Porquerolles fut de nombreuses fois pillée et les animaux permettant à l’agriculture de s’installer, volés. Un moulin est installé, sur les hauteurs du village, probablement

(1500 à 1800)

L’insécurité règne sur les côtes provençales aux XVe siècle et les rares habitants des îles subissent fréquemment les pillages des Turcs et des Maures. Le repeuplement de Porquerolles est amorcé probablement au XVIe siècle, sur les ordres de François Ier, pour assurer une meilleure défense de la côte et éviter que ces îles ne servent de refuge aux ennemis. Le fort Sainte Agathe est alors fortifié. Au XVIIe siècle, le climat d’insécurité règne toujours dans la rade d’Hyères et à la menace des

Porquerolles : Paysages vécus

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Une rencontre entre les hommes et le territoire insulaire


À cette époque, l’agriculture est en plein essor : des cultures, des vignes, des bois entretenus et le moulin en fonctionnement sont représentés sur la Carte des Isles d’Hières publiée en 1764 par Jacques-Nicolas Bellin. Lors de l’occupation de l’île par les Anglais, en 1793, pendant et après l’occupation de Toulon, d’où ils furent chassés par Bonaparte, il y eut probablement une tentative de destruction de certains bâtiments défensifs, des fortifications et des habitations de Porquerolles. Napoléon, alors capitaine, pose les premières grandes bases des fortifications des îles (forteresse centrale, batteries côtières, vigie, etc.).

aux alentours de 1730, en réponse à une nécessité économique de l’époque puisque le blé était très convoité. À partir de 1744, les militaires s’installent afin de ne pas laisser les bâtiments défensifs sans surveillance alors que la marine anglaise séjourne régulièrement dans la baie d’Hyères. Un hôpital militaire est construit, une garnison d’invalides est installée, les forts sont réoccupés et des chemins sont construits en grand nombre. Quelques années plus tard, un déboisement intense des îles et de l’ensemble de la région côtière s’opère pour alimenter en bois des industries qui se trouvent sur la côte (verreries, savonneries de Marseille, construction navale...).

Déboisement intense et mise en culture des terres Construction de fortifications Arrivée de nouvelles populations

Un reconquête insulaire Un patrimoine militaire témoin du passé, le fort de la Repentance

61


Remise en valeur de l’agriculture suite à l’achat de l’île par J-F Fournier avec la plantation d’arbres fruitiers, de vignes, d’élevage...

Forte utilisation de la ressource en eau potable des nappes

Au début du 20ème siècle, grâce à J.F Fournier l’île redevient auto suffisante Forte présence militaire sur l’île (militaire du génie, la marine...)

Le couvert forestier diminue fortement suite à trois incendies (1856, 1865 et 1897) avec la valorisation des terres par l’agriculture

Nombreux dommages sur les milieux insulaires avec l’implantation d’une usine de soude

Époque contemporaine

1912


Légére déprise agricole liée à la baisse de la population de l’île et la création du Parc national

Essor du tourisme, forte augmentation de la fréquentation de l’île en été

La forte consommation de la ressource en eau et l’augmentation de la chaleur font fortement baisser les nappes phréatiques jusqu’à les épuiser. L’eau est amenée par bateau sur l’île Prise en compte environnementale des boisements (achat de l’île par le parc national)

1963

1971

1985

2012


Une rupture lente et imperceptible

graviers noirs présents sur les plages de la pointe du Langoustier issus de scories déversées au XIXe siècle. Quelques années plus tard, s’ajoute à ce lourd bouleversement, une catastrophe écologique puisqu’au cours des années 1880, l’île de Porquerolles subira 3 incendies (1856, 1865 & 1897). Le dernier particulièrement important, dévasta les deux tiers de l’île durant 15 jours.

(1800-2000)

Après le temps des conflits, la vie sur Porquerolles redevient peu à peu paisible, le village commence à prendre sa forme actuelle. En 1810, une loi fait obligation d’installer les activités les plus polluantes à l’écart des villes : Porquerolles se trouve être un site idéal. En 1826, une fabrique produisant de la soude est installée à l’ouest de l’île à proximité de la Pointe du Grand Langoustier. Celle-ci causera de nombreux dommages aux milieux insulaires (air, mer, végétation, sable) car pour fonctionner, elle utilisait du sel marin et du bois, prélevé dans les massifs pour alimenter ses fours. Elle employait 100 à 150 personnes. Après avoir changé plusieurs fois de propriétaire, cette société fera faillite en 1876, ruinée par la découverte d’un nouveau processus de fabrication. Encore aujourd’hui, les traces de cette activité sont bien visibles. En témoignent les sables et

En 1905, la Compagnie Foncière de l’île de Porquerolles est fondée. Celle-ci rachète l’île et a pour but de la transformer en grande exploitation agricole. Elle se lance alors dans de grands travaux : construction d’une ferme comprenant laiterie, four de boulanger, vacherie, porcherie, écuries, selleries, menuiserie, forge, maréchalerie, chai, cave. À cela s’ajoutent une centrale électrique, des bassins de rétention d’eau, des canalisations, des serres et de vastes

Vestiges de fortifications

Exploitation des ressources forestières

Viticulture dans les plaines

Un territoire insulaire anthropisé

Porquerolles : Paysages vécus

64

Une rencontre entre les hommes et le territoire insulaire


habitations, ainsi que des logements ouvriers... La mise en culture des plaines, le pastoralisme dans les sous-bois et un grand défrichement furent entrepris. Quatre ans après, suite à une gestion désastreuse, la Compagnie fit faillite et passa de main en main. En 1912, François-Joseph Fournier achète 1100 hectares sur l’île. Il remet rapidement en valeur l’agriculture, notamment en introduisant de nombreuses essences d’arbres d’ornements (acacias, belombras) et fruitiers (kumquats, pamplemoussiers, orangers, citronniers…). Il agrandit le vignoble qui couvre bientôt 175 hectares. On développe le maraîchage, l’élevage bovin, la culture de roses sous serres. Une coopérative agricole est créée et la centrale électrique réhabilitée. L’alternance des plantations et des coupes permettait de fournir le combustible nécessaire au fonctionnement de la centrale électrique. La vie insulaire jouit alors d’une prospérité qui lui permet de recommencer à exporter vers le continent et de devenir autosuffisante. Après les années de sécheresse intense des années 60, et l’utilisation de la ressource en eau, l’avancée du « biseau salé » menace fortement les nappes phréatiques d’eau douce, remettant en cause l’autonomie insulaire. L’essor du tourisme depuis la deuxième moitié du XXe siècle, impacte fortement le développement de l’île et son environnement, à la fois terrestre et marin. L’agriculture est reléguée au second plan, faisant du tourisme sa vocation première. Le nombre de visiteurs en été avoisine les 20 000 personnes. La population insulaire est multipliée par 10 sur cette période. Dernier événement notable en lien avec cet essor touristique : l’installation en 2018 de la Fondation d’art contemporain Carmignac. Carte Postale, Archives départementales du Var, Sous-bois des Mèdes

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La construction d’une identité forte L’évolution conjointe des différentes sociétés insulaires et leur territoire

Le contexte d’isolement dont jouit Porquerolles aujourd’hui, a permis de conserver des traces ancestrales de la relation entre les insulaires et leur environnement (silex, amphores à vin, vestiges de villa, forts, moulins...). L’évolution démographique est aussi à mettre en lien avec la ressource en eau de l’île. En effet, l’île n’a jamais manqué d’eau potable même pendant les temps de forte affluence, malgré quelques variations climatiques. Mais récemment l’impact touristique et les sécheresses estivales mettent à mal cette ressource fondamentale pour la vie insulaire et les différents milieux présents. Le Parc National de Port-Cros essaye justement de protéger, depuis ces dernières décennies, cet espace en équilibre fragile.

Ce récit est le manifeste d’une histoire mouvementée, tantôt habitée, tantôt désertée, successivement cultivée puis délaissée, boisée puis défrichée. Cette île a depuis toujours; été prisée pour sa forme en croissant brisant les vents, ses plaines en pentes douces cultivables et sa situation géographique stratégique. Ce territoire a d’abord été façonné depuis le rivage pour s’étendre rapidement aux plaines permettant à des civilisations de s’implanter de manière durable, en créant des lieux de ressources alimentaires suffisantes. L’histoire des reliefs boisés est indissociable de celles des plaines cultivées. Aujourd’hui, la survie de ces boisements est conditionnée par l’existence de plaines défrichées, fonctionnant comme des pares-feu. Bien que l’histoire de l’île soit étroitement liée à la culture des plaines, on oublie facilement l’importance du pâturage, la diversité culturale qui a permis de conserver pendant longtemps les paysages ouverts, d’éviter sans doute de nombreux incendies dévastateurs et permettre à certaines périodes que l’île devienne autosuffisante. Aujourd’hui cette pratique pastorale est totalement oubliée, laissant au soin et à la responsabilité de l’homme, nombre d’espaces boisés inflammables et cette diversité de cultures a elle aussi complètement disparu. Des changements des visages végétaux de l’île se sont aussi opérés depuis des millénaires et aujourd’hui un nouveau changement est en train de se produire. Nous allons découvrir un peu plus loin le visage végétal actuel de l’île et comment et ses évolutions. Porquerolles : Paysages vécus

Âge de Cuivre

Âge de Fer

Époque Gallo-romaine

Antiquité tardive

Moyen-Âge

XVIIe

XIXe

1950

Aujourd’hui et demain ?

Âge de Bronze

66

Occupation humaine

Couvert forestier

Terres en cultures Ressource en eau La construction d’une identité forte


? Traces d’occupations, une évolution insulaire fluctuante

67


toire durables Service terri

acceptée

Un parc à plusieurs visages qui rassemble, écoute et réalise

+

ueil, communicati n o Service acc , tourisme et citoyenne té

Une gouvernance

il économique, social et culturel Conse

Parc National territoriale mal de Port-Cros

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de protéger les espaces naturels français en De siècle en siècle, l’île de Porquerolles a été danger. En 1971, l’État achète Porquerolles au léguée, transmise de main en main. Depuis près d’un siècle, sa mise en valeur et sa protection sont 4/5ème et place l’île sous la tutelle du Parc pour la s au coeur des préoccupations étatiques et desL e protéger de lal epression foncière des côtes td u lt u r l e l i t ro a p e c a e C o r l s c é Parc en devient propriétaire par r le o m i n Le actions humaines. provençales. o M c s d té ins e a iff é r ité d rc et l u a l’État en 1985 mais il faudra attendre ents laire Créationdotation d’un com , lede P acteu rie rs re la maipour ent2012 que l‘île soit définitivement protégée Une « protection » historique En 1912, lorsque François Joseph Fournier, achète par le statut de Parc national. Cette réforme a vu it le jour à l’issueod’une concertation avec les Porquerolles, il travaille durement afin qu’un r ra pu s e l l e o incendie ne se reproduise plus et que les paysages acteursPorlocaux. ié uer Adjointe spéciale de q e privilég icParc National ont donc toujours été des r L’État et le porquerollais restent intacts. t u c o l r devenir une inte acteurs « protecteurs », imposant des Presque trente ans après sa mort, le Parc réglementations permettant de préserver, de National de Port Cros est créé sur le territoire de Port-Cros, suite à la loi de 1960 ayant pour objectif gérer et d’étudier l’île.

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V ill e d ’ H y è r

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Le Parc devient propriétaire de l’île par dotation de l’État 2006

1985 1971

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Achat de l’île par L’Etat, au 4/5 ème, sous Pompidou

Création du Parc National de Port-cros

tat de l’E ce 2012

1963

Agrandissement du Parc National à Porquerolles lors de la réforme du Parc

2020 Quel avenir pour le PN de Porquerolles ? Quels acteurs pour faire face aux changements climatiques ?

1960 Loi du 22 juillet Création des Parcs Nationaux Objectif : préserver de grands espaces naturels libres de toute occupation humaine

Modification de la loi de 1960 Impose l’écriture de la charte du Parc

1912 Achat de l’île par Fournier à la compagnie foncière

Dates clés

Un village niché au fond de la baie

Porquerolles : Paysages vécus

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Une gouvernance territoriale mal acceptée


69


Schéma d’acteurs : Le Parc National au cœur de la gouvernance territoriale

Charte du Parc approuvée par le ministère et le premier ministre Assisté par : Le conseil scientifique +

Conseil économique, social, culturel t (m Éta

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Un parc à plusieurs visages

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Service territoire durab les

NM

Parc National de Port-Cros Amène les touristes avec les compagnies maritimes (TLV TVM) Maire

=

Vice président

Ville d’Hyères

Métropole TPM Transfert de compétences

Interlocuteur quotidien

ONG Smilo Création d’un comité insulaire regroupant différents acteurs du territoire * CBNM : Conservatoire Botanique National Méditerranéen * Metropole TPM : Métropole Toulon Provence Méditerranée * TLV TVM : société de transport assurant des liaisons maritimes entre les Îles d’Or et Hyères Charte du Parc approuvée par le ministère et le premier

ministre vécus Porquerolles : Paysages Assisté par :

)

70

Une gouvernance territoriale mal acceptée


Connaissance technique et scientifique du territoire du Parc National de Port-Cros

concertées car la relation avec les autres acteurs s’est affaiblie au fil du temps. De nos jours, la métropole et la mairie d’Hyères collaborent (le maire d’Hyères est par exemple le vice président de la métropole) mais le dialogue avec le Parc est difficile à mettre en place, les intérêts des trois acteurs étant différents. De plus, les acteurs locaux se sentent moins écoutés par le Parc. Pourtant, ils sont des témoins directs de l’impact du changement climatique, puisqu’ils le vivent au quotidien. En parallèle, le Parc lui aussi modifie son organisation interne pour mieux répondre aux problématiques actuelles, dont celle de l’érosion de la biodiversité ou de l’afflux touristique trop important.

Un Parc National est une « grande machine » à plusieurs visages ayant des capacités et des objectifs bien précis dans le but de préserver le territoire, d’œuvrer à la pérennité des paysages. Placé sous la tutelle du Ministère de la Transition écologique, le Parc National est présidé par un Conseil d’administration où siègent toutes les échelles du grand territoire. La particularité du Parc National de Port-Cros est qu’il dispose d’une partie recherche très importante, grâce au soutien du Conseil Scientifique et du Conservatoire Botanique National Méditerranéen, il s’agit donc d’un acteur indispensable pour observer et étudier les effets du changement climatique sur l’île.

Conflits entre le Parc National, les viticulteurs et les habitants

Inaction des acteurs face au changement climatique

On assiste donc en ce moment à la distanciation des acteurs « historiques » mais les tensions avec les acteurs locaux ne sont pas récentes. Garant d’un espace préservé pour les uns, contraint pour d’autres, le Parc a pu avoir des relations délicates avec les viticulteurs et les habitants. Ces discordes sont généralement imperceptibles, seulement connues au détour d’une conversation avec les insulaires.

Pourtant, malgré ces ressources, le Parc National ne semble ni agir, ni même expérimenter. Les acteurs locaux ne semblent pas l’être plus actifs, à part quelques actions solitaires (arrosage de leur jardin moindre, essai d’essences supportant la sécheresse sur leur parcelle) mais rien de significatif. Cette inertie provient peut-être de la puissance réglementaire et foncière du Parc face aux autres acteurs.

C’est dans ce contexte qu’un autre acteur apparaît sur l’île, faisant évoluer les jeux d’acteurs mis en place depuis déjà quelques années : il s’agit de l’ONG Smilo (Small Islands Organisation). Cette ONG se donne pour mission de développer, à travers le monde, un programme pour accompagner les îles vers une gestion plus durable. Dans le cadre de ce programme, un comité insulaire est créé ayant pour objectif de rassembler les voix des acteurs du territoire et de servir d’intermédiaire référent avec l’ONG. Une nouvelle façon de communiquer est-elle possible ?

Un dialogue compliqué

Le Parc National, lors de son extension à Porquerolles, dialoguait majoritairement avec la mairie d’Hyères et les habitants mais l’arrivée de la métropole toulonnaise en 2018 modifie considérablement les liens, rapports, interactions entre les acteurs locaux, la mairie et le Parc. Actuellement, le Parc n’est pas en capacité de mettre en place des mesures d’adaptations

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Une réglementation en mille-feuilles Présent sur l’île, le Conservatoire du littoral possède environ 34 hectares situés notamment au niveau de la Pointe du Langoustier, de l’Oustaou de Diou ou encore au niveau du Fort du Lequin et de l’Alycastre. Ces lieux reflètent l’histoire, la richesse naturelle et paysagère de l’île.

Par son caractère pittoresque, l’île est classée au titre des paysages depuis 1988. Le patrimoine paysager et naturel remarquable est composé d’une mosaïque très diversifiée d’espaces forestiers, d’enclaves agricoles, de calanques, d’édifices et d’îlots rocheux. Il procède d’une mise en scène qui relie très étroitement les occupations humaines au socle géologique et aux formations naturelles, en démultipliant les ambiances et la diversité des perceptions. Grâce à toute cette diversité, l’île de Porquerolles, apprivoisée avec ses espaces cultivés, compose un monument naturel tout à fait remarquable. On y compte 24 plantes protégées pour leur intérêt national et 37 inscrites au livre rouge de la flore menacée en France. Le territoire présente sur terre et en mer une richesse et une diversité d’habitats naturels et d’espèces dont les plus remarquables bénéficient d’ores et déjà d’un ensemble très dense de statuts et de dispositifs de protection et de gestion. De nombreux outils législatifs, de protections réglementaires et contractuelles s’appliquent à l’île de Porquerolles et ses environs. Ce mille-feuilles terrestre et maritime a pour but de préserver le patrimoine naturel, culturel et paysager dont les nombreuses richesses floristiques et faunistiques tant terrestres que marines.

ZNIEFF terrestre type 1

ZNIEFF maritime type 1 et 2

Coeur de Parc marin

Coeur de Parc terrestre

Occupation humaine Terres en cultures

Natura 2000

Porquerolles : Paysages vécus

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Une réglementation en mille-feuilles

Couvert forestier

Propriétés du Ressource en eau Conservatoire du littoral


Dispositif de protection et conservation

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Richesse insulaire Par définition, le jardin signifie enclos. Une île est un jardin.» Gilles Clément - Entretien avec Dominique Truco, Îles en projet, Les carnets du paysage de Versailles, p.116

îliens continuent d’habiter ce territoire en le connaissant mais les perceptions insulaires commencent également à évoluer à cause des impacts visibles du changement climatique en cours.

L’enquête historique a mis en évidence que Porquerolles a toujours été un territoire convoité, pratiqué et exploité. Depuis le XXème siècle, une prise de conscience de la richesse écologique, patrimoniale et des paysages de l’île a induit une envie de préserver et de prendre soin de ce territoire. Le Parc National avec sa valeur réglementaire, et les autres dispositifs de préservation permettent sa protection mais finalement les insulaires sont les premiers à prendre soin de ce territoire au quotidien ?

Quels milieux composent Porquerolles ? Comment sont-ils gérés ? Quels impacts visibles du changement climatique sont repérés par les îliens ? Quels impacts sont constatés par le Parc National ?

En outre, les paysages et milieux d’aujourd’hui sont hérités du long passé anthropique de l’île croisé avec la géologie singulière que l’on y trouve, le climat méditerranéen et l’hydrographie particulière. De nos jours, cinq massifs forestiers d’axes nord-sud séparent quatre plaines alluviales, majoritairement viticoles, ouvertes vers le nord (plaines du Bregançonnet, du Village, de la Courtade et de Notre-Dame d’est en ouest). L’île est comme basculée vers le continent. Cette variété de paysages entraine une richesse impressionnante de milieux et d’espèces, à la fois terrestres et marines. Actuellement, cette richesse constitue un bien commun à préserver ; toutefois des indicateurs annoncent des transformations profondes. Les Porquerolles : Paysages vécus

Carte des paysages porquerollais

74

Richesse insulaire


1 km

75

N


Richesse insulaire En général, la façon dont j’aborde les îles, (...) c’est plutôt avec l’idée que je vais trouver quelque chose qui n’existe pas ailleurs, par définition puisque nous sommes dans l’isolat géographique.» Gilles Clément - Entretien avec Dominique Truco, Îles en projet, Les carnets du paysage de Versailles, p.116 Les écosystèmes insulaires de Porquerolles sont plutôt résilients au regard de leur richesse originale. Les perturbations liées au changement climatique vont être responsables de profondes modifications sur la diversité des milieux et des espèces à terre comme en mer ainsi que de changements dans la structure des peuplements, avec en particulier la possibilité d’assister à des explosions d’espèces envahissantes ou encore à la disparition d’espèces rares.

La flore des rochers littoraux est particulièrement représentée sur la côte sud de Porquerolles. Le milieu marin est majoritairement composé d’herbier de posidonie. Cet herbier encercle l’île, et laisse parfois sa place à des bancs de sable, récifs et rochers. Des algues invasives se sont introduites sur la rive nord-est depuis une dizaine d’années. Outre leur richesse écologique, ces milieux remplissent des fonctions importantes en luttant contre l’érosion et en régulant les écoulements hydriques.

Une mosaïque de milieux

Porquerolles est aujourd’hui composée d’une diversité de milieux marins et terrestres, dans lesquels des espèces emblématiques du milieu méditerranéen habitent.

Ces milieux marins et terrestres peuvent être classés en trois catégories : les terres habitées, les terres cultivées et les terres sauvages. Dans chacune de ces parties, l’homme a une influence directe plus ou moins importante alors que le changement climatique, également lié à l’Homme, impacte quant à lui tous les milieux. Nous allons voir dans la partie suivante de quoi sont composés les milieux : nous analyserons leur richesse mais aussi leurs faiblesses face au changement climatique. Nous essaierons aussi de comprendre quels impacts visibles du changement climatique sont repérés par les îliens.

Au creux des vallons, facilement accessibles, les plaines cultivées sont encerclées majoritairement par des pelouses, des friches post-culturales et le maquis. Le maquis bas et les cistaies sont abondants le long des chemins forestiers, suite à des débroussaillements, entourés à leur tour par du maquis haut et des yeuseraies. Les pins d’Alep, de tous âges, forment des pinèdes superposées aux formations arbustives et aux bois de Chênes verts que l’on retrouve généralement sur les hauteurs. Au bord de la mer, on retrouve les morphoses (modification morphologique du végétal) créées par le vent et les embruns. Porquerolles : Paysages vécus

Carte des milieux de l’île

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Richesse insulaire


N

1 km

Ceinture côtière et marine Légende:

Herbier de Posidonie Banc de sable

Cœur forestier Maquis haut Maquis bas LÉGENDES: YeuseraieMilieux terrestres Milieux marins Cistaies Maquis haut Herbier de Possidonie Banc de sable Maquis bas Couverture de pin d’Alep Yeuseraie Zone de présence de Caulerpa taxifolia Cistaie Couverture de pin maritime Récifs et rochers Cultures

Plaines investies Cultures Pelouses Végétation des rochers littoraux Fourré de myrtes, lentisques et genèvriers Village Couverture de pin d’Alep Couverture de pin maritime

Pelouses

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Zone de présence de caulerpe (Caulerpa taxifolia) Récifs et rochers Végétation des rochers littoraux Fourrés de myrtes, lentisques et genévriers Plages et arrière plages 1 km

N


Le cœur village pris d’assaut par les touristes

Les deux visages du village

Des ruelles désertes

Porquerolles : Paysages vécus

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Terres fréquentées et habitées


Le port, porte d’entrée de Porquerolles

De l’inhabité au surfréquenté Le port et la place d’Armes, lieux emblématiques de l’île

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Terres fréquentées : Le tourisme, facteur aggravant Le territoire de Porquerolles est soumis à une pression touristique très intense en période estivale.

Une sur-fréquentation estivale

déchets et de l’assainissement. Les eaux usées sont traitées dans la station d’épuration au nord de la plaine du village puis sont déversées dans un système de lagunage, avant d’être réutilisées pour l’arrosage des cultures. Cependant, en période estivale, les capacités de la station et des lagunes sont généralement dépassées.

L’île voit sa population très largement évoluer au cours de l’année en fonction des vacances scolaires, notamment en été. Dès le début de la saison estivale, l’île change radicalement de visage. Le nombre de ses habitants se multiplie, passant de 350 à 20 000 personnes par jour. Au total, plus d’un million de visiteurs séjourne sur l’île chaque année pour découvrir les richesses de l’île et profiter de ses plages. Ainsi, on trouve dans le village des petits commerces, loueurs de vélos, hôtels et restaurants prêts à accueillir les visiteurs d’un jour, qui permettent à l’économie insulaire de fonctionner.

L’impact sur le milieu marin

Étroitement liés à l’activité touristique, les flux en provenance et en partance de Porquerolles fluctuent. Les navettes reliant l’embarcadère de la Tour Fondue au port de Porquerolles sont le moyen d’accès le plus utilisé mais d’autres rêveurs de Porquerolles arrivent aussi avec leur bateau personnel ou de location. En été, on assiste donc à un ballet incessant de bateaux qui n’est pas sans conséquence sur les fonds marins. Les masses d’eau déplacées, combinées aux mouillages sauvages sont responsables de la détérioration des fonds, des herbiers et des habitats marins riches. La limitation des impacts sur le milieu marin relatifs à l’intensité de la plongée sous-marine, de la pêche de loisir, du mouillage et des rejets des navires de plaisance, nécessite une attention particulière afin de préserver la richesse de ce milieu. En 2016, une zone marine exempte de toute activité humaine a été créée au sud de Porquerolles. Cette « zone ressource » a pour ambition d’évaluer l’évolution du milieu marin sans impact humain.

Les milliers de touristes débarquant sur l’île se retrouvent libres au cœur de ce milieu insulaire. L’intensité et la simultanéité des circulations cycliste et piétonne sur les pistes et sentiers balisés tendent à dépasser leurs capacités. Malgré la stratégie de signalétique mise en place par le Parc et le guidage des itinéraires les piétinements hors des chemins ne sont pas rares.

La ressource en eau en péril

L’activité saisonnière exerce une pression considérable sur la ressource en eau douce et potable, qui est déjà rare. Depuis 2004, pour répondre à cette problématique, un bateau dédié au transport d’eau douce depuis le continent fait le trajet quotidiennement en été. La fréquentation pose également le problème des Porquerolles : Paysages vécus

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Teres fréquentées : le tourisme, facteur aggravant


Un tourisme peu soucieux de son impact

Cette sur-fréquentation de Porquerolles n’est pas soutenable à long terme. Elle risque d’accélérer le processus de transformation des milieux lié au changement climatique.

L’incidence touristique sur l’île très important, il me semblait important de mentionner les différentes retombées et conséquences que cela engendre sur le territoire. Cette fréquentation, qui dépasse, au plus fort de la saison, les capacités physiques de l’île, met en péril la pérennité de la vie insulaire mais aussi le bon fonctionnement des milieux. Mais le passage furtif des touristes les rend beaucoup moins sensibles aux changements actuels et à la qualité des paysages.

Printemps

Été

Automne

Schéma de la vie insulaire estivale

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Hiver


Terres habitées : cœur névralgique de l’île Le reste de l’année, une vie insulaire paisible se déroule au village, installé dans la plaine principale de l’île, abrité au creux de la baie. Les habitants de Porquerolles, entre 300 et 350 à l’année, ont un profond attachement aux paysages qui les entoure et à sa vie insulaire.

Le Parc National : nouvelle identité insulaire Vivre sur une île, parc national qui plus est, n’est pas anodin. Les parcs nationaux français habités en leur cœur sont peu nombreux. La combinaison de cette double particularité entraîne localement des adaptations, des réappropriations ainsi que l’apparition d’une rhétorique spécifique permettant aux insulaires de trouver et de négocier une place acceptable sur ce territoire.

Le patrimoine naturel, beaucoup de chercheurs l’ont montré en France et à l’étranger, s’est toujours négocié au travers de prises de position fortes des acteurs impliqués dans sa préservation et sa valorisation mais aussi au travers d’usages et de conflits d’usages. Dès lors, l’édification d’un espace naturel privé, comme Porquerolles, en patrimoine de grande diversité biologique, ouvert au public a imprégné l’insulaire et façonné le paysage donné à voir. La surimposition d’un parc national sur ce territoire insulaire engendre des rapports au territoire empreints d’ambiguïté et des discours chargés de nostalgie et de revendications. En effet, sa reconnaissance comme haut lieu du patrimoine naturel national a entraîné une Porquerolles : Paysages vécus

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Terres habitées : cœur névralgique de l’île


transformation des modes de vie ainsi que différents processus d’adaptation, de réappropriation et de revendication de la part des populations locales.

Les habitants : protecteurs de l’île

Un sentiment d’affection, de dévouement, et d’attachement à cette île apparait clairement dans les discours de ses habitants. Ce désir d’insularité leur vient pour beaucoup de l’enfance : soit parce qu’ils ont été élevés sur l’île soit parce que des souvenirs de vacances marquants, leur ont donné l’envie de venir s’installer durablement. Ils ont alors un regard très particulier sur l’évolution du milieu insulaire dans lequel ils vivent, cultivent leur propre relation au territoire et façonnent leur propre perception des milieux qui les entourent. Cette vision panoramique de la situation passée et actuelle en fait des protecteurs de l’île. L’amour du territoire des porquerollais est une force, qui peut fédérer les acteurs autour d’un projet de territoire.

La place du village, lieu de vie incontournable

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Viticulture, Plaine de Notre-Dame

Rangs de vignes, Plaine de Notre-Dame

Les plaines cultivées

Parcelle agricole délaissée

Porquerolles : Paysages vécus

Oliveraie du Conservatoire botanique

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Terres domestiquées


Préparation du sol, Plaine du Brégançonnet

Plaine du Brégançonnet

De la vigne aux fruitiers Oliveraie du Conservatoire botanique

Pelouses fauchées, plaine de la Courtade

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Terres domestiquées : Plaines cultivées uniformisation des paysages agricoles de Porquerolles. L’héritage cultivé de l’île a totalement disparu laissant la place à certaines pratiques agricoles, utilisatrices d’intrants, entraînant des problématiques d’érosion des sols et du maintien de la biodiversité. Cette agriculture mono-spécifique constitue un risque pour la conservation des ressources naturelles de l’île (ressources en eaux, flore et faune associées aux parcelles de culture) mais peut aussi constituer une menace pour elle même puisqu’elle s’expose à de nombreuses maladies et n’est pas résiliente face aux perturbations potentielles. Cependant, des efforts sont faits par certains viticulteurs pour adapter leurs modes d’exploitation aux nécessités de la conservation de la biodiversité. Les différents domaines viticoles présents sur l’île au travers d’une viticulture raisonnée ou biologique mettent en place des actions de préservation des sols, ou encore de diminution d’utilisation d’intrants et autres produits phytosanitaires. Aujourd’hui, les périodes de sécheresses étant plus longues et les souffrances hydriques plus importantes, les vignes commencent à être impactées mais elles ne sont pas pour autant arrosées. Les viticulteurs ont remarqué que les récoltes sont de plus en plus précoces. Certains l’expliquent par un changement des modes consommation du vin, pour d’autres il s’agit d’une conséquence directe de l’avancée du calendrier phénologique de la vigne. La deuxième option semble plus probable. Des maladies et ravageurs de la vigne sont aussi des problématiques actuelles à prendre en compte.

Présente historiquement sur l’archipel et composante essentielle du caractère du Parc National, l’agriculture ne subsiste à Porquerolles que par la présence de trois domaines viticoles, de plusieurs oliveraies dont celles, emblématiques, du conservatoire botanique national, auxquelles sont associées des collections de variétés anciennes de fruitiers méditerranéens ainsi qu’un peu de maraîchage.

Paysages viticoles uniformisés

Les trois domaines viticoles de l’île représentent une surface d’environ 80 hectares répartis sur les quatre plaines de l’île. La plaine du Brégançonnet et de Notre-Dame accueillent le domaine de l’Île qui s’étend sur 34 hectares racheté en 2019 par la Maison Chanel. Dans la plaine du village, on retrouve le domaine Perzinsky, créé à la fin des années 80’, qui couvre 10 hectares et enfin dans la plaine de la Courtade on retrouve le domaine du même nom avec 36 hectares en agriculture biologique. Tous ces domaines sont propriétaires de leur vignes mais louent des baux au Parc National de Port-Cros qui reste le propriétaire des différentes parcelles viticoles, ce qui est source de conflits entre les viticulteurs et le Parc. Ces paysages viticoles rythment la marche lorsque l’on se trouve dans ces plaines. Les rangs de vignes suivant les légers reliefs, guident notre regard vers les sommets. Mis à part la plaine du village, les autres plaines ne sont constituées que de viticulture, avec quelques rares parcelles d’oléiculture, destinée à la production de vin sous l’appellation Côtes de Provence. Cette mer de vignes monospécifique entraîne une certaine Porquerolles : Paysages vécus

Un croissant fertile

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Terres domestiquées : plaines cultivées


Plaine de Notre-Dame (70 ha)

Plaine de la Courtade (60 ha) Plaine du village (110 ha)

Plaine du Brégançonnet (30 ha)

1 km

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N


Mûriers

Village

Oliviers Allée de Pins parasols

Maraichage Fossé planté humide

Réservoir Palmiers

Vignes

La plaine agricole du village, une diversité d’essences remarquables

Porquerolles : Paysages vécus

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Terres domestiquées : plaines cultivées


Une arche de Noé pour les essences fruitières

l’avenir de la plaine cultivée de l’île et plus généralement pour les milieux méditerranéens, sous réserve qu’on sache la faire perdurer au travers du changement climatique.

Le verger conservatoire de Porquerolles est initié en 1979 par le Parc national de Port-Cros et le Conservatoire Botanique National Méditerranéen (CBNM). Cette collection d’arbres fruitiers rassemble une multitude de variétés méditerranéennes sur près de 17 hectares et représente un patrimoine génétique d’importance nationale et internationale, face aux multiples pressions qui s’exercent sur les cultures fruitières, menaçant certaines d’entres elles d’extinction.

Maraîchage : un lien étroit avec les vergers

Depuis 2014, le Parc national et le CBNM ont souhaités confier l’entretien et la valorisation de cette collection à l’Association de Sauvegarde Des Forêts Varoises. Du partenariat entre les trois structures est né le projet COPAINS (Collections PAtrimoine INSertion) qui a aussi pour objectif de rétablir le maraîchage anciennement présent sur l’île. L’association n’embauche pas des ouvriers agricoles expérimentés mais «des personnes en rupture professionnelle» en réinsertion.

Ces plantations fruitières sont seulement présentes dans la plaine du village, qui fonctionne comme les rideaux d’un théâtre à ciel ouvert, grâce aux haies qui s’entrouvrent ici et là sur l’ordonnance des cultures. Ces vergers abritent quelques 250 types d’oliviers, près de 250 variétés de figuiers et 50 variétés de mûriers, accompagnés d’autres espèces fruitières méditerranéennes connues, comme les amandiers, les palmiers, ou encore les lauriers. La gestion de ces plantations est minimale aujourd’hui : l’irrigation est rare, sauf pour aider les jeunes plants à s’installer et sur quelques parcelles localisée. L’eau provient de la réutilisation des eaux usées épurées par les lagunes.

Une partie du maraîchage fonctionne en agroforesterie associant arboriculture et potager, qui favorise de nombreuses synergies et interactions naturelles. Cependant, les cultures sont tout de même irriguées. Cette installation récente aurait besoin de l’aide des autres agriculteurs de la plaine pour commencer à bien se développer, avec par exemple le prêt de matériel pour défricher certaines parcelles à l’abandon. Cependant cela ne semble pas être le cas. L’ancienne coopérative agricole n’est plus qu’un lointain souvenir. Aujourd’hui cette production maraîchère est encore timide et ne répond pas aux demandes des îliens (prix, quantité, disponibilité...).

Cette collection unique en France, permet à la fois de conserver des essences oubliées, sert de support à des travaux de recherche en partenariat avec des organismes français et étrangers mais permet aussi d’expérimenter avec des essences qui contribuent au caractère des paysages méditerranéens. La constitution de cette banque de semences et de collections vivantes de variétés fruitières méditerranéennes pourrait devenir capitale pour

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Porquerolles : Paysages vécus

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Terres domestiquées : plaines cultivées


Des friches à potentiel agricole

Les sécheresses de plus en plus importantes ou encore la montée du biseau d’eau salé dans les nappes phréatiques commencent à mettre cette ressource en danger. Afin d’économiser cette précieuse ressource, un système de recyclage des eaux usées a été mis en place sur l’île grâce à une station d’épuration. Après traitement dans une station d’épuration, l’eau encore chargée de matières organiques, de germes pathogènes et de produits ménagers s’écoule successivement dans trois lagunes où, sous l’action du rayonnement solaire, des algues microscopiques et des bactéries décomposent, assimilent et transforment les polluants. Une fois traitée, l’eau se déverse dans des fossés plantés aux abords des parcelles de plus en plus secs actuellement. Il y a quelques décennies des « écluses » dans ces fossés permettaient à l’eau de s’infiltrer de manière prolongée mais tout comme les retenues collinaires elles ont disparu. Les fossés Fournier, rigoles creusées dans la terre qui servent à canaliser les eaux de pluie, sont encore aujourd’hui visibles mais plus utilisés, faute d’eau. La gestion économe des ressources en eau de surface et des eaux souterraines mérite une attention toute particulière de la part des acteurs du paysage insulaire, autant des agriculteurs que des habitants.

De nombreuses friches sont présentes dans les différentes plaines de l’île, particulièrement dans la plaine du village. Issues de l’abandon de pratiques agricoles et d’une légère gestion de fauche effectuée par le Parc, elles font parties des paysages agricoles de l’île. La reconquête de ces espaces est une volonté inscrite dans la charte du Parc National.

Un besoin en eau continu

Ici et là, une citerne ou une borne incendie aux abords du chemin ou à la marge d’une parcelle d’abricotiers, rappellent que les cultures ont un rôle à jouer dans la protection de l’île contre les incendies, en séparant les massifs forestiers. Les nappes phréatiques sont superficielles à Porquerolles. Elles sont constituées dans les plaines de l’île et alimentées par les eaux de pluie (pluviométrie directe et ruissellement). Les couches géologiques de schistes permettent de retenir l’eau potable à une profondeur facilement accessible. Le fond des nappes se situe entre 5 et 10 mètres en dessous du niveau de la mer. L’eau est une ressource indispensable au maintien de l’agriculture à Porquerolles. Il est difficile de savoir quel volume utilise l’agriculture puisque les prélèvements effectués dans la nappe phréatique ne sont pas comptabilisés. En outre, différents domaines viticoles possèdent leurs propres puits dont il est difficile de connaître l’importance des volumes prélevés dans la nappe.

La plaine viticole de la Courtade

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Paroles habitantes

Leur vision du changement

«

On va s’adapter, la vigne va s’adapter. Il faudrait seulement que l’État et le Parc nous entendent parce qu’on est un peu l’identité de Porquerolles. On va trouver de nouveaux cépages plus résistants, on va travailler différemment. »

Le dérèglement du calendrier phénologique des plantes cultivées

De nos jours, les viticulteurs vendangent beaucoup plus tôt : presque deux semaines en avance par rapport à ce qu’ils faisaient il y a dix ans. Ce dérèglement du calendrier phénologique de la vigne a des conséquences certaines sur la qualité de la vendange, plus chargée en sucre (et donc en degré alcoolique) et moins en acide. Les personnes chargées de l’entretien des cultures du Conservatoire Botanique National Méditerranéen, remarquent aussi cette l’avancée des stades phénologiques, qui a d’autant plus d’importance sur les fruitiers puisque l’on s’éloigne de plus en plus tardivement de la levée de dormance.

L’héritage cultivé en perdition

Progressivement, la diversité des productions agricoles s’est perdue. La présence de l’Homme dans les plaines n’a que très peu régressé, laissant seulement quelques parcelles s’enfricher, mais la spécialisation des cultures s’est accentuée ne laissant plus de place au pastoralisme et à la promotion des milieux ouverts et semi-ouverts autrement que par la main de l’Homme. L’héritage agricole de l’île s’est estompé mais il reste très présent dans les mémoires. La diversité culturale lorsque Jean-François Fournier était encore vivant, reste une image bien présente dans l’esprit des Porquerollais, une certaine nostalgie règne lorsqu’on évoque avec les «anciens» cet âge d’or insulaire. Cette diversité serait un réel atout pour lutter contre les impacts du changement climatique puisqu’elle permettrait à une biodiversité plus importante de se développer et de lutter contre les potentiels défis à venir. Porquerolles : Paysages vécus

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Terres domestiquées : paroles habitantes


« «

Les retenues collinaires c’est un vrai problème. On va finir par manquer d’eau. Il y a des efforts pour la préserver mais c’est un vrai enjeu pour les années à venir. Lorsqu’il pleut tout ruisselle jusqu’à la mer et vu le peu de pluie qu’on a…

Sur la vigne, il y a une baisse de la croissance. C’est dû au manque d’eau. Les vendanges sont de plus en plus précoces c’est vrai mais c’est surtout parce qu’on a changé notre façon d’apprécier le vin. On le veut plus léger maintenant donc forcément on ramasse plus tôt. »

«

Pour le maraîchage on va devoir minimiser les apports en eau, mieux choisir les espèces fruitières et légumières, moins gourmandes en eau et adapter les techniques d’irrigation pour maintenir au maximum l’humidité du sol. »

L’eau, ressource en déclin

La baisse significative des précipitations printanières et estivales et l’accroissement de l’évapotranspiration potentielle affecte à la hausse les besoins en irrigation des cultures particulièrement au printemps. Parallèlement, l’évolution des ressources naturelles en eau (superficielles et souterraines) inquiète les agriculteurs. La raréfaction de l’eau dans les nappes phréatiques de l’île entraine la remontée du biseau salé, mettant en péril la mince indépendance de l’île en terme d’irrigation. Si l’eau salée continue de monter, un retour en arrière ne sera plus possible, laissant les nappes devenir saumâtres.

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Porquerolles : Paysages vécus

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Terres domestiquées : plaines cultivées


Des paysages agricoles dépendants ?

Actuellement, les plaines agricoles sont encore façonnées par la main de l’homme. Les insulaires œuvrent grandement au maintien des ces plaines coupe-feu. La culture des plaines dépend majoritairement de 3 viticulteurs, chacun affilié à un domaine, du Conservatoire Botanique National Méditerranéen avec ses collections d’arbres fruitiers et de l’association maraîchère Copain’s. Cette organisation spatiale est totalement différente de celle connue aux siècles derniers, la viticulture étant devenue majoritaire sur l’île. Les paysages agricoles insulaires que nous connaissons donc aujourd’hui sont très récents. La présence majoritaire de vignes ainsi que l’ensemble de la charpente paysagère et certaines ambiances bucoliques forment l’image emblématique de ces plaines ; reléguant aux seconds plans les autres cultures plus diversifiées, comme la culture fruitière ou le maraîchage. Cependant cette légère diversité culturale ne profite pas aux îliens. En effet, leur prix ainsi que leur quantité ne permettent pas aux habitants d’avoir accès aux productions insulaires. Les Porquerollais sont très sensibles aux modifications en cours puisque le changement climatique impacte non seulement la physionomie des cultures mais aussi leur calendrier de travail ainsi que les qualités gustatives des produits. Fréquentant beaucoup ces espaces agricoles, les îliens ont alors une vision de la transformation des paysages qui s’esquisse. le manque d’eau est aussi facilement observable puisque les fossés généralement en eau sont de plus en plus secs, selon certains îliens. En outre, l’intrusion du biseau d’eau salée met en péril la vie insulaire et agricole de l’île, à chaque fois que le niveau de la nappe baisse. La plaine viticole du Brégançonnet

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Un cœur boisé aux essences endémiques

Les deux visages de l’île

Un littoral soumis aux aléas climatiques

Porquerolles : Paysages vécus

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Terres aux ambiances sauvages


Une ceinture littorale contrainte par les éléments

Entre terre et mer Un contraste fort

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Terres aux ambiances sauvages : Cœur forestier constitue l’élément essentiel du paysage et de la colline de Porquerolles avec la yeuseraie. Ces milieux sont très sensibles au risque incendie puisqu’ils sont composés d’espèces inflammables (callunes, bruyères, cistes).

Maquis, suberaies, yeuseraies, pinèdes composent le visage forestier emblématique de Porquerolles. Ces milieux abritent un cortège faunistique et floristique remarquable : Pin d’Alep, Pin maritime, Ciste de Montpellier, Cistes à feuilles de sauge, Bruyère arborescente, Genèvrier, Chêne vert, Chêne liège, Pistachier, Arbousier composent les paysages porquerollais. La majorité des peuplements sylvestres actuels se sont constitués suite à l’incendie de 1897 qui a ravagé une grande partie de l’île. Cette apparence «sauvage» n’est finalement qu’illusion, l’Homme joue un grand rôle dans la composition forestière.

La forêt de chêne vert : témoin du passé

Sur les coteaux boisés de l’île, se développe la yeuseraie (260 hectares) communément appelée forêt de chêne vert. Le chêne vert est apparu au XIXe siècle après des déboisements importants et l’utilisation intensive des ressources forestières de l’île. Aujourd’hui il fait partie des espèces majoritaires sur l’île, est présent dans les 5 massifs forestiers et représente l’image de la forêt porquerollaise. Les diverses formations de chênes verts ne sont pas encore arrivées à leurs limites géographiques et devraient continuer de se développer puisque leurs structures et leurs classes d’âges sont encore peu diversifiées. Malheureusement, de nos jours le changement climatique risque d’avoir un impact sur son développement. Les sécheresses étant de plus en plus intenses et prolongées, les chênes verts dépérissent. À quoi ressemblerait Porquerolles sans cette espèce emblématique ?

Les maquis : stade pionnier

Les maquis sont des milieux liés en général à des perturbations d’origine anthropique. À Porquerolles, les incendies, l’ancien pâturage, et actuellement le débroussaillage, ont fait régresser les chênaies, excluant les grands arbres, détruisant les jeunes plants, ne favorisant que les herbes et les pyrophytes. D’où cette « formation d’arbustes et d’arbrisseaux touffus, ne laissant pas voir le sol entre eux et serrés au point d’empêcher la marche » (Gaussen, 1933). Héritage du passé agricole et des activités présentes sur l’île, on en retrouve trois stades différents à Porquerolles : maquis haut, maquis bas et cistaies, qui sont les stades d’évolutions avant la yeuseraie (forêt de chêne vert). Le maquis bas est un milieu commun sur l’île. On le trouve généralement non loin des plaines agricoles. Dès qu’il fait un peu chaud, un parfum entêtant d’huiles essentielles, de tanins et de résines s’en dégage. Le maquis élevé quant à lui se trouve majoritairement sur les hauteurs et Porquerolles : Paysages vécus

La pinède : état transitoire

Le pin se développe à Porquerolles au-dessus du maquis ou de la yeuseraie. La pinède n’est en effet qu’une étape après la création du maquis et avant que le milieu ne devienne une yeuseraie.

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Terres aux ambiances sauvages : Cœur forestier


Pin d’Alep

Chêne vert

Pistachier lentisque Arbousier

Bruyère arborescente Bruyère à balais

Cistes

Une richesse de milieux

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Salsepareille

Myrte

Callune


Arrêt du fauchage

Fauche, entretien

1 l’Homme déboise l’Homme n’intervient pas

4 Retard de fauche, peu d’entretien

2 Coupes et/ou incendies

l’Homme n’intervient pas

5

1 - Maquis haut 2 - Jeune forêt de chêne vert 3 - Forêt anciennes (100 ans) 4 - Pelouse 5 - Maquis bas et cistaies

3

Dynamique d’évolution des paysages porquerollais

Porquerolles : Paysages vécus

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Terres aux ambiances sauvages : Cœur forestier


Évolution des paysages forestiers

un entretien (fauche, débroussaillage) ou un piétinement régulier peuvent, par exemple, maintenir un maquis pendant plusieurs années ou décennies. Mais dès que les conditions de blocage disparaissent (par exemple arrêt du fauchage), la dynamique reprend. Les arbustes vont se développer puis différentes espèces d’arbres (pins, puis Chênes verts et enfin Chênes pubescents) vont prendre la place. C’est ce que l’on observe avec les yeuseraies présentes sur la majeure partie de l’île.

On assiste au sein d’un milieu à ce que l’on appelle une dynamique de végétation : une succession naturelle faite de plusieurs stades dont l’aboutissement est représenté par le stade terminal (appelé «climax»). S’intéresser à cette « dynamique de végétation» permet de comprendre l’évolution d’un milieu à court et long terme. Au cours du temps, les écosystèmes évoluent passant par étapes d’un stade « jeune » vers un stade « mature », en l’occurrence à Porquerolles, la forêt. Cette dynamique de la végétation s’observe par la succession progressive de différentes formations végétales.

La gestion forestière des îles de Port-Cros et Porquerolles s’articule pleinement sur les principes fondamentaux définis par l’ensemble des parcs nationaux de France et notamment sur leur caractère d’espace de protection permettant le suivi de l’évolution des successions naturelles. De ce fait, aucune filière de production de bois n’est établie sur les îles.

A Porquerolles, un des premiers stades est la pelouse sèche, milieu ouvert à la couverture végétale basse clairsemée constituée essentiellement d’herbacées, de petits arbustes et graminées. Puis, peu à peu, apparaissent des espèces ligneuses et arbustives formant des milieux de maquis (bruyères, cistes...). Ensuite, ce sont les arbres qui se développent aboutissant à des milieux fermés, formations forestières de chênes verts, pins d’Alep et pins maritimes. Cette dynamique de la végétation peut repartir de zéro lorsque d’importantes perturbations (incendies, événements météorologiques exceptionnels, actions humaines de défrichement ou de coupes forestières) ramènent l’écosystème d’un stade mature vers un stade jeune. Le maquis est donc une des étapes de la dynamique de végétation des paysages forestiers porquerollais. Il ne peut se maintenir à long terme sur un même espace que si cette dynamique est bloquée. Des incendies répétés, des conditions locales de sol ou de microclimat particulièrement contraignantes,

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Porquerolles : Paysages vécus

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Terres aux ambiances sauvages : paroles habitantes


Paroles habitantes

Leur vision du changement

«

La nature est forte sauf face aux incendies. Oui il y a les sécheresses naturelles. Oui si il ne pleut plus il y aura un risque plus fort d’incendie. Mais je pense que l’on est impuissant face à cela. La nature sera toujours plus forte que l’Homme. Si l’île brûle cela va changer beaucoup de choses. »

Le risque incendie

La richesse en espèces pyrophyles du milieu forestier accroît le risque incendie et met en péril la survie des espèces du milieu forestier mais aussi la pérennité des milieux adjacents. L’augmentation des températures, la perturbation du cycle de l’eau et l’intensité des sécheresses, des vents violents et fréquents vont accroître ce risque de façon considérable.

«

Le sol s’assèche énormément, les hivers sont secs. J’ai l’impression que cela impacte beaucoup la végétation de Porquerolles. Les arbousiers, les bruyères, les lentisques, ils ont le système racinaire suffisant, ils vont repartir, les chênes par contre…

La mortalité du chêne vert et la vulnérabilité des autres espèces

Le chêne vert, ainsi que d’autres espèces forestières ne semblent pas s’adapter aux nouvelles conditions climatiques, en particulier face à la sécheresse. Celles à venir risquent donc d’être d’autant plus dévastatrices.

«

Depuis quelques années j’ai l’impression que les végétaux se rabougrissent. Les sous-bois s’assèchent beaucoup et en plus de ça ils sont tellement peu entretenus qu’on ne peut plus y pénétrer. »

L’évolution de la dynamique forestière

Vue sur le phare ; Le pin d’Alep, essence pionnière

La diversité des paysages est induite par le cycle des stades d’évolutions des milieux. Si un de ces stade dépérit, cela remet en cause l’intégralité de la dynamique actuelle et risque de modifier considérablement les paysages actuels.

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Terres sauvages : Ceinture littorale et milieux marins Pin maritime Soude épineuse Arroche couchée

Callune

Banquettes de posidonie Posidonie

Bruyère à balais Tamaris

Oursins Cinéraire

Etoile de mer

Un littoral mouvant

Porquerolles : Paysages vécus

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Terres aux ambiances sauvages : ceinture littorale et milieux marins


plages disparaissent peu à peu. Les milieux sableux abritent des espèces psamophiles (espèces qui affectionnent un substrat sableux) de grande valeur patrimoniale. Malheureusement, la hausse du niveau de la mer étant trop rapide, ces espèces n’ont pas le temps de migrer vers les milieux sableux en recul de la plage.

La ceinture littorale est composée de nombreux milieux différents tous liés les uns aux autres. Les habitats littoraux porquerollais sont composés d’une mosaïque d’habitats méditerranéens thermophiles. Ils se caractérisent par l’alternance de falaises côtières au sud et de systèmes dunaires comme ceux des plages Nord.

L’arrière plage : manteau protecteur

Les bancs de sable sous-marins

Les plages sont essentiellement représentées au nord. La largeur du couvert végétal de l’arrière plage varie considérablement en fonction de la topographie mais elle est généralement composée des mêmes espèces : halophiles pour la plupart (qui s’accommodent ou ont besoin de fortes concentrations en sel pour vivre). L’arrière plage est composée d’arbrisseaux et de buissons aux couleurs variées et joue un rôle de tampon entre la plage et les divers milieux en recul de la côte, retenant les embruns marins. Y dominent des tamaris, du pin maritime, de la soude épineuse et d’autres essences n’étant pas perturbées par les embruns salés ou la rareté de l’eau douce. Les plages étant très recherchées par les touristes, ce milieu est en mauvais état. Des travaux de rénovation du couvert végétal ont été entrepris pour essayer de «réparer» les dégâts causés par la surfréquentation estivale.

Cet habitat pouvant atteindre une profondeur de 20 mètres sous le niveau de la mer, subit l’influence hydronamique des houles et des courants. Il abrite des herbiers à Zostères (plantes aquatiques marines) et à Cymodocées (genre de plantes monocotylédones sous-marines), de nombreuses espèces d’invertébrés, des mollusques et des petits crustacés attirés par l‘abondance des matières organiques en suspension. Aujourd’hui, ces bancs de sable sont majoritairement menacés par l’impact humain (piétinement, pollution d’hydrocarbure) mais il est possible que dans quelques décennies le changement des courants marins puisse modifier la dynamique de ce milieu.

L’herbier de posidonie : poumon de la mer

L’herbier de posidonie est présent tout autour de l’île, comme une ceinture. La posidonie est une algue qualifiée d’espèce «clef de voûte» puisqu’elle joue un rôle prépondérant dans l’équilibre biologique des côtes. Elle est à la fois productrice d’oxygène, briseuse de houles, fixatrice de sédiments, une ressource alimentaire et un abri indispensable pour la flore et la faune marine. Aujourd’hui des espèces envahissantes, comme l’algue verte invasive Caulerpe, prolifèrent et rentrent en compétition avec elle. En outre, les mouillages de plus en plus nombreux abîment son réseau racinaire.

La plage : bande sensible

Sur la plage, on retrouve un sable fin et ocre, un assemblage de feuilles de posidonie, de brindilles, de bois flottés polis et blanchis par une longue dérive. C’est ce qu’on appelle la laisse de mer. Son maintien sur les plages est volontaire. Elle permet de protéger les plages de l’érosion et favorisent leur stabilité en contribuant à l’édification et à l’alimentation des dunes. Elle empêche que le sable soit emporté par les vagues, et que les

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Les falaises et rochers littoraux : jardins suspendus

terrains rocheux, envahit les promontoires au détriment de la diversité d’espèces.

La côte sud, inhospitalière est majoritairement composée de falaises rocheuses tombant à pic. Au nord, des bandes rocheuses sont aussi présentes. Les conditions de vie de ces milieux sont difficiles. Cependant, quelques végétaux peuplent ce milieu rude, soumis au déferlement des vagues, arrosé par les embruns marins qui l’enrichissent en sel, lessivé par la pluie, brûlé par le soleil.

Les falaises sous-marines et récifs

Les bancs d’algues rouges (trottoirs à lithophylum), remarquables et très fragiles, se trouvent à la limite entre la terre et la mer. Lorsque l’on passe sous l’eau, les fonds rocheux sont le siège d’une vie intense d’invertébrés, crustacés, poissons, en particulier pour les juvéniles. On retrouve aussi une flore sous marine riche sur les parois rocheuses. Des algues peuvent s’accrocher formant ainsi ce que l’on appelle le coralligène ou alors des coraux peuvent se développer formant des récifs, très représentés à Porquerolles. Constituant un des principaux réservoirs de biodiversité méditerranéens, par son extrême hétérogénéité de structure, il réunit un nombre important de compartiments écologiques. Il abrite notamment de nombreux cnidaires, gorgones et éponges. De nos jours, ces habitats sous-marins sont fortement en danger. L’acidification des eaux, liée à l’absorption du CO2 par les océans, et la hausse des températures de l’eau remettent en cause cette vie sous-marine. Un réchauffement important survenu en 1999 a, par exemple, entraîné une forte vague de mortalité, notamment des gorgones. Cette hausse de la température de l’eau entraine également l’apparition d’espèces «tropicales», s’acclimatant aux nouvelles températures méditerranéennes. Par ailleurs, les tempêtes sont capables de détruire de nombreuses espèces par la force du courant.

À la limite de la terre et de la mer une végétation clairsemée, fixée dans la fente de la roche, s’accroche. La saladelle et le crithme sont des espèces caractéristiques de ce milieu. Véritable «bonsaï» ils mettent du temps à se développer. Cette ceinture halophile (qui aime le sel) est présente, plus ou moins profondément, sur tout le périmètre rocheux de Porquerolles et des îlots. Sa largeur dépend de la force des vagues, de la zone d’extension des embruns, de l’exposition de la station, de l’ouverture aux vents et de la topographie de la côte. Ainsi, sous l’influence du mistral ou du vent d’est, on observe un développement halophile plus important sur les côtes exposées ouest (îlot du Petit Langoustier, pointe du Grand Langoustier) et est (côte du Cap des Mèdes au Gros Saranié). En arrière de cette zone adaptée au sel le recouvrement végétal augmente. Arbres et arbustes sont tous plaqués au sol et comme taillés en brosse, étirés dans le sens du vent. Les vents et les événements tempétueux de plus en plus violents et récurrents mettent en péril cet équilibre déjà instable et précaire entre terre et mer. L’apparition d’espèces envahissantes remet aussi en cause l’équilibre de ce milieu : actuellement les griffes de sorcières, espèce particulièrement bien adaptée aux embruns et aux Porquerolles : Paysages vécus

La côte rocheuse sud

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Terres aux ambiances sauvages : ceinture littorale et milieux marins


Algue rouge Lithophyllum

Crithme maritime Saladelle

Ilots et rochers

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Pistachier lentisque Genévrier de Phénicie Barbe de Jupiter


Paroles habitantes

Leur vision du changement

«

On voit le trait de côte se modifier, c’est clair. Mais rien ne tiendra. Avec les vagues en plein mistral ça bouscule. La Courtade recule, Notre Dame aussi… C’est une histoire de va et vient, ça n’est pas linéaire cette affaire. On ne peut rien faire sauf peut-être ralentir un peu le phénomène. Et encore, je ne vois pas comment faire. Avec le changement climatique on prévoit de gros épisodes de dépression, des minis tornades et si la température de l’eau continue d’augmenter on en aura de plus en plus souvent. »

La hausse du niveau de la mer et l’érosion

Les plages sont particulièrement concernées par la hausse du niveau de la mer qui entraine inévitablement l’érosion rapide des côtes sableuses. Cette montée rapide du trait de côte entraine une sallinisation rapide des terres de l’arrière plage et met en péril les espèces qui la compose, retenant les embruns marins pour les milieux en retrait.

«

Les effets du réchauffement m’inquiètent à force. La température de l’eau augmente et on voit de nouvelles espèces des mers plus chaudes arriver. Il y a aussi une mortalité importante du corail, des gorgones et des éponges.

La hausse des températures de l’eau

Le réchauffement des eaux de surface, combiné à son acidification mettent en péril les différents milieux marins de Porquerolles. Un impact direct sur la subsistance des espèces sous marines, comme le corail ou les gorgones est déjà visible. Des espèces des mers tropicales font aussi leur apparition depuis quelques années. Porquerolles : Paysages vécus

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Terres aux ambiances sauvages : paroles habitantes


La violence et la récurrence des événements tempétueux

Le recul de la végétation de la ceinture littorale, particulièrement touchée lors d’événements tempétueux importants a pour effet d’augmenter l’érosion des sols, tendres sur Porquerolles et surtout de fragiliser les parties aériennes des végétaux. Cela a aussi un impact sur les milieux aquatiques. La force des vents et la concentration de sel dans les embruns marins entraînent des difficultés de régénération des espèces littorales.

«

Je vois le changement sur la faune marine. Ça fait un bout de temps que je regarde sous l’eau. J’observe une grosse diminution de la quantité. Certaines espèces s’adaptent mieux que d’autres c’est sûr, des espèces ont totalement disparu, celles qui étaient déjà rares et d’autres, des nouvelles sont apparues. D’autres ont changé de comportements, comme le mérou qui nous fuit beaucoup plus. Les loups et les dorades il y en a de plus en plus. Il y a aussi des barracudas, des girelles paons… Cela va sûrement avec le réchauffement de l’eau. »

Émergence d’espèces invasives

La végétation côtière ainsi que la flore marine est en train de voir apparaître de nouvelles espèces, mieux acclimatées aux nouvelles conditions climatiques. Ces espèces prennent la place de celles déjà présentes, comme celle de la posidonie ou des poissons dans les récifs et leur font concurrence.

109


Des paysages vraiment sauvages ?

Ces terres dites «sauvages» sont composées de deux grandes entités : une forêt intérieure et une ceinture côtière et marine, toutes deux riches d’une multitude de milieux et d’espèces. Pour certains d’entre eux, l’intervention humaine est nécessaire à leur survie, pour d’autres son absence conditionne sa bonne évolution. Ces terres dites «sauvages» qui nous apparaissent, au premier abord, comme des terres préservées, avec des paysages «naturels» sont finalement plutôt anthropisées. Fréquentant beaucoup ces espaces de nature, les îliens ont alors une vision lucide des changements qui s’y opèrent. Ils prennent conscience du changement de paysages qui est en train de s’opérer et remarquent des dynamiques isolées sur certains milieux. Ces témoignages mis bout à bout prouvent bien que les insulaires sont particulièrement sensibles aux modifications en cours. Les milieux naturels terrestres et marins assurent des fonctions essentielles pour le territoire : production des ressources, prévention des risques naturels, amélioration de la qualité de l’eau et de l’air ; fonctions qu’il convient de préserver ou d’accompagner dans ce contexte de changement climatique. Plus largement, la préservation et la valorisation de la biodiversité terrestre et marine relèvent de l’effort collectif. La sensibilisation et l’information des insulaires mais aussi des promeneursplongeurs sur les enjeux que représentent les milieux naturels pour l’ensemble des services écosystémiques est à mener. La ceinture littorale de Notre Dame et la baie de l’Alycastre

Porquerolles : Paysages vécus

110

Terres aux ambiances sauvageS


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adaptation ou transformation ? Cette description et cette analyse nous ont aussi permis de pointer les rôles et les relations des habitants et des structures chargées de la préservation de l’île.

Ces paysages qui paraissent être sauvages sont en réalité des paysages constitués d’éléments naturels anthropisés et c’est ce qui constitue leur richesse. Il suffit de faire la comparaison avec Port-Cros pour s’en rendre compte. Le classement en Parc National de cette île presque 50 ans avant Porquerolles, la vie insulaire très peu présente de tous temps mais surtout actuellement, entraînent une diversité de milieux moins importante mais, a contrario, une plus grande richesse d’espèces et d’habitats.

Ce patrimoine paysager unique et protégé nécessite un accompagnement pour évoluer de manière simultanée au changement climatique. Comment ces paysages évolueront-ils ? Quelles seront les incidences du changement climatique sur l’évolution des paysages ? Nos représentations des paysages idylliques s’accommoderont-elles de ces nouveaux paysages ? L’île devra-t-elle s’adapter ou se transformer ?

On a jusque là tenté de décrire et de comprendre la formation des milieux et des paysages spécifiques de Porquerolles.

L’arrière plage fixe les dunes sableuses et protège les cultures des embruns La posidonie est largement présente toute autour de l’île

Porquerolles : Paysages vécus

Aux abords des parcelles le maquis bas est présent La viticulture est majoritaire dans les plaines

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Adaptation ou transformation ?


Coupe perspective de la plaine de la Courtade. Cette plaine illustre les ambiances, la diversité des paysages et l’organisation spatiale retrouvées sur l’île.

Le chêne vert et le pin d’Alep sont majoritaires et forment un couvert dense

La végétation côtière est soumise aux aléas et protège les milieux forestiers à l’arrière Les buissons sont morphosés par le vent Le relief marqué des falaises se prolonge sous l’eau

113


3. Nom chapitre

114

Nom sous chapitre


Un paradis déjà perdu ?


+2°C à 4°C

Hausse températures moyennes

d’ici 2100

Diminution

-25%

des précipitations au nord du bassin méditerranéen

d’ici 2100

+4°C

Hausse température de l’eau Source : IPCC 2018

d’ici 2100 dans le bassin méditerranéen sans politiques climatiques Source : RCP 8,5 ; GIEC, 2019

Baisse des précipitations Source : Plan Bleu, ONU, 2019

+37 à 90 cm d’ici 2100

dans le bassin méditerranéen sans politiques climatiques

Hausse niveau moyen des océans Source : MedECC, 2019

Migration des espèces

- 15%

de la disponibilité en eau douce

d’ici 2100

Réduction de la disponibilité en eau douce Source : MedECC, 2019

Un paradis déjà perdu ?

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L’acidité des océans va être multipliée par

x3

d’ici 2100

Acidification des océans Source : MedECC, 2019

Les effets attendus du chnagement climatique


Un paradis déjà perdu ? Les effets attendus du changement climatique froides et chaudes, ce qui rend cette modification du climat d’autant plus importante. Le changement climatique engendre actuellement un phénomène de «méridionalisation» qui se traduit par la désertification des écosystèmes terrestres et la tropicalisation des écosystèmes marins.

Les indicateurs d’évolution climatique sont souvent donnés, dans les documents scientifiques à l’échelle globale, décrivant ainsi une situation générale sur la planète. Cependant, les effets du changement climatique ne sont pas uniformes d’un point de vue spatial et temporel. Selon les continents, les pays, la région ou les territoires, l’évolution du climat diffère, même si les tendances générales concordent. Plus intense et important que sur le reste de la planète, le changement climatique sur le pourtour méditerranéen a donc une dynamique propre, qui s’applique sur les territoires en faisant parti. Les données, chiffres et prévisions concernant ce changement à venir, produites pour le bassin méditerranéen sont donc applicables à Porquerolles.

La désertification des écosystèmes terrestres

Un réchauffement de la température de l’air de presque 4°C (GIECC 2019) est attendu pour 2100 selon le scénario le plus pessimiste du GIEC (RCP 8,5). Cela devrait générer des conditions climatiques que de nombreux écosystèmes terrestres méditerranéens n’ont jamais encore expérimenté depuis presque 10 000 ans. Un réchauffement de 1°C en un endroit implique, pour retrouver la température initiale, un déplacement de 180 kilomètres au nord en plaine ou de 150 mètres en altitude. Des espèces présentes 700 kilomètres plus au sud pourraient alors s’adapter au climat méditerranéen. (ONERC, 2021) L’effet combiné du réchauffement, de la sécheresse et de la diminution en moyenne des précipitations devrait entraîner une hausse généralisée de l’aridité et par conséquent la désertification de plusieurs écosystèmes terrestres de la région méditerranéenne.

Le climat restera-t-il méditerranéen ?

Le changement climatique actuel modifie considérablement la définition même du climat méditerranéen. La hausse des températures conjuguée à la baisse des précipitations et au manque important d’eau dans le sol et dans l’air va créer un climat totalement différent. Ces conditions se rapprochent plutôt d’un climat aride aussi appelé désertique. La position d’interface du bassin méditerranéen entre les biomes tempérés et tropicaux, lui permet d’accueillir à la fois des espèces à affinités

Chiffres des impacts prévus, du changement climatique dans le bassin méditerranéen

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mondiaux. L’augmentation de la température des eaux en Méditerranée provoque des changements au niveau de la composition et de l’abondance des cortèges des espèces présents dans la région. De manière générale, les espèces vivant en eaux froides deviennent moins abondantes ou disparaissent, tandis que les espèces vivant en eaux chaudes se multiplient, ce qui provoque une homogénéisation du biote méditerranéen. De plus, le changement climatique favorise l’implantation d’espèces tropicales en provenance notamment de la mer Rouge. Cela se manifeste par la migration d’espèces aquatiques, de poissons, de micro-organismes, d’algues vers la mer Méditerranée par le canal de Suez. Cela entraîne une réduction de la biodiversité liée à l’arrivée d’espèces concurrentes qui tendent à supplanter, voire faire disparaître les espèces autochtones.

Le climat méditerranéen est un des seuls au monde, où avec le réchauffement climatique au XXIe siècle, on s’attend à un assèchement, une diminution de la quantité des précipitations en moyenne sur l’année. À l’inverse, une augmentation des extrêmes lors de ces mêmes précipitations est à prévoir. La période pendant laquelle le sol sera sec devrait alors être plus longue (passant de 2 mois et demi actuellement, à 4 mois), commençant plus tôt au printemps et se poursuivant jusqu’en hiver. La situation moyenne de l’humidité des sols pourrait ressembler, en fin de siècle, aux situations actuelles extrêmes de sol sec. Par ailleurs, le réchauffement des températures conjugué à l’élévation du niveau de la mer, et la modification du régime des précipitations, modifiera grandement les écosystèmes méditerranéens, provoquant un taux de mortalité accrue et la colonisation d’autres espèces. De nombreuses espèces végétales côtières, les espèces forestières les moins tolérantes à ces changements devraient connaître des modifications de leurs aires de répartition avec un déplacement vers le nord de leurs limites latitudinales. Simultanément, des espèces méridionales pourront faire leur apparition avec la remontée de leur aire de répartition. La modification des écosystèmes méditerranéens entraînera une transformation drastique des paysages. Ce phénomène est déjà visible sur Porquerolles avec quelques essences qui sont fragilisées par les fortes sécheresses.

Selon le MedECC (Mediterranean Experts on Climate and environmental Change), 622 « espèces étrangères » évolueraient désormais dans les eaux méditerranéennes faisant de cette mer l’espace maritime européen le plus touché par ce phénomène de tropicalisation avec un rythme d’introduction d’une espèce toutes les 6 semaines environ.

La tropicalisation des écosystèmes marins

La mer Méditerranée concentre une biodiversité exceptionnelle. Elle héberge entre 4 et 18 % des espèces marines connues dans le monde, une statistique remarquable alors qu’elle ne représente que 0,8 % de la surface des océans Un paradis déjà perdu ?

Les griffes de sorcières envahissent les falaises

118

Les effets attendus du chnagement climatique


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Comment les milieux vont-ils s’adapter ? La chênaie est amenée à perdre du terrain, descendant vers des zones topographiques moins exposées (vallons, vallées ou bas de pente) où le sol profond et un accès à l’eau plus facile lui permettront de résister à la sécheresse. Le Pin d’Alep quant à lui aura tendance à rester sur les hauteurs. Sans concurrence du chêne vert, cette espèce pourra librement se développer. En outre, ses capacités de résistance aux sécheresses, son abondante régénération naturelle et son adaptation aux conditions édaphiques difficiles en font une espèce susceptible de survivre et, à terme, de « coloniser » les massifs forestiers de l’île.

Avec la « migration » des zones de répartition, de nombreux végétaux seront amenés à régresser fortement voire disparaître. Étant très sensibles aux variations brutales, les arbres, qui étaient déjà soumis à des contraintes importantes dans le climat méditerranéen, n’auront pas le temps nécessaire pour mettre en place une adaptation spécifique (houppier de taille réduite, racines plus profondes). Le cortège végétal associé à ces arbres subira de plein fouet leur disparition, modifiant considérablement les peuplements porquerollais. L’augmentation de la fréquence des sécheresses extrêmes et l’accroissement constant du stress hydrique feront évoluer les aires de répartition des milieux sur l’île : certaines stations actuellement favorables à un certain type de milieu ne le seront plus à long terme.

Contrairement à la strate arborée, la strate arbustive composée du cortège végétal associé au chêne vert sera peu sensible. L’arbousier, la bruyère arborescente, la ciste à feuilles de sauge, ou encore le calycotome épineux sont très bien adaptés à la sécheresse et se plaisent dans des latitudes méridionales dont les climats sont plus secs. Ce cortège végétal de sous-bois continuera de se développer sur des stations aussi bien ensoleillées qu’ombragées. Malgré la persistance de la strate arbustive, le paysage forestier sera tout de même fortement modifié, du fait de la régression des yeuseraies.

La disparition de l’ambiance forestière méditerranéenne à Porquerolles

Essence emblématique de la forêt méditerranéenne et de Porquerolles, le chêne vert disparaît. Cette essence pourtant très bien adaptée au climat méditerranéen subit les sécheresses estivales de plus en plus longues et rudes. À Porquerolles, la chênaie occupe la quasi-totalité de l’île, vallon, pentes, plaines, souvent installée sous le Pin d’Alep. La combinaison de ces deux essences forment le visage forestier de Porquerolles.

Un paradis déjà perdu ?

120

Comment les milieux vont-ils s’adapter ?


Un risque incendie accru

La sensibilité du pin d’Alep aux incendies et son développement sur l’île ne feront qu’augmenter ce risque. Ses aiguilles étant très inflammables, les caractéristiques structurelles des peuplements sont favorables au développement du feu.

Cette évolution du couvert végétal conjuguée à l’augmentation des températures et des sécheresses, aura des répercussions sur le risque incendie. Celui-ci va indéniablement augmenter dans les décennies à venir.

Forte présence du pin d’Alep

Dépérissement du chêne vert

uel Act

Surface du maquis bas en progression 0 210 En

Une mutation des boisements forestiers

Une nouvelle dynamique forestière

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L’amenuisement des fourrés rocheux

Le dépérissement de la végétation en bordure du littoral

L’occurrence de phénomènes météorologiques violents va se renforcer dans les années à venir. La végétation présente sur le pourtour rocheux de l’île va se raréfier, laissant presque à nu ses versants sud. Les tempêtes hivernales avec des vents violents mettront à mal les peuplements de Pins d’Alep des côtes rocheuses sud de l’île. Les nombreux sujets fragilisés ne pourront plus stabiliser les sols rocheux, augmentant les phénomènes d’érosion et de sécheresse pour le cortège végétal arbustif. Les espèces actuellement présentes sur ces falaises auront du mal à se régénérer laissant certaines espèces invasives se développer sans résistance. Les griffes de sorcières actuellement présentes étoufferont les arbustes morphosés par le vent, si typiques de cette côte sauvage.

La hausse du niveau de la mer va avoir un impact considérable sur les cordons dunaires. Les plages de Notre-Dame et de La Courtade seront amenées à reculer affectant le cortège floristique présent ainsi que des essences protégées comme le Lis et le Panicaut maritime. En effet, la remontée rapide du niveau de l’eau et la salinisation des terres ne permettront pas aux espèces végétales de migrer suffisamment rapidement et de s’adapter à ce niveau de salinité. De plus, les embruns marins de plus en plus forts entraîneront des nécroses aboutissant à la mort des arbres. Le tamaris sera un des seuls arbres à perdurer et le pin maritime laissera sa place au Pin pignon plus adapté.

Plantes exotiques envahissantes

Dépérissement

uel Act

0 210 En Colonisation d’algues L’invasion de la côte sud

Un paradis déjà perdu ?

122

Comment les milieux vont-ils s’adapter ?


Hausse du niveau de la mer

uel Act

0 210 En

Régression de l’herbier de posidonie

Un recul des plages et arrières plages

La régression de l’herbier de posidonie

l’hypothèse d’une extinction de 15 à 37% des espèces marines occupant le nord-ouest de la Méditerranée d’ici à 2050 est prévisible. (GIECC, 2018) Un appauvrissement des fonds marins serait inévitable, impactant les activités socioéconomiques du territoire tels que la plongée ou encore la pêche.

Tout comme les écosystèmes terrestres, les écosystèmes marins seront impactés par cette méridionalisation. La posidonie, espèce indispensable à certaines formes de vie sousmarine, risque de disparaître. À Porquerolles, la température moyenne actuelle de l’eau est de 24°C. Les prévisions climatiques annoncent une hausse de 2 à 4°C d’ici 2100 pouvant atteindre 28°C. Au dessus de 28,5°C, le taux de mortalité grimpe en flèche. Puits de carbone majeur (l’herbier stocke environ 14 millions de tonnes de carbone autour de Port-Cros et Porquerolles) sa destruction entraînera la libération de carbone menaçant l’écosystème marin dans son ensemble. Sans lieu de reproduction, ni d’alimentation et de refuge, de nombreuses espèces de poissons, crustacés seront vulnérables. Sur la base d’un scénario de changement climatique modéré,

Les épisodes de blooms

Autres impacts de l’augmentation des températures marines, les épisodes de blooms. Ces phénomènes de multiplication massive rapide et épisodique d’une espèce, comme les méduses, sont de plus en plus fréquents et importants sur les côtes méditerranéennes françaises et notamment sur le territoire du Parc national de Port-Cros. Ce dérèglement du nombre d’individus d’une même espèce impactera la richesse de la faune aquatique.

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La viticulture en danger

Le changement climatique va faire évoluer la limite des cépages et la qualité du raisin. Même si la chaleur sera l’un des principaux problèmes, le manque d’eau va aussi impacter les vignobles. La pérennité du vignoble à Porquerolles est alors remise en cause. Les inter-saisons, favorables à la vigne, seront de moins en moins perceptibles. Avec des températures plus élevées, le cycle de végétation se raccourcira, la maturation interviendra alors de façon plus précoce et de nouvelles maladies feront leur apparition. Tous les stades de développement de la vigne seront plus précoces et auront des conséquences directes sur l’organisation du travail. Lors des fortes chaleurs, les rameaux pousseront plus vite demandant une réactivité accrue de la part des viticulteurs. La hausse des températures conduira à l’augmentation de la teneur en alcool des vins en accélérant la maturation des raisins, qui se gorgeront de sucre et formeront, au cours de la vinification, un alcool plus fort sous l’action des levures.

Un changement de cépages ?

L’une des solutions pour répondre à ces problématiques sera de remplacer les cépages actuels par des cépages plus résistants aux conditions climatiques chaudes et sèches. Le changement des cépages ne sera pas anodin. Les conséquences juridiques et législatives, notamment dues aux appellations d’origine, seront à prendre en compte. L’appellation Côte de Provence à Porquerolles pourrait être perdue. Si la production n’est plus suffisamment rentable, la viticulture sur l’île continuera-t-elle ? Quels paysages agricoles formeront alors Porquerolles ? Ira-t-on vers un abandon des parcelles ? La viticulture mise à mal

Un paradis déjà perdu ?

124

Comment les milieux vont-ils s’adapter ?


Le dépérissement des arbres fruitiers

Le Conservatoire Botanique National Méditerranéen travaillant, entre autres, sur l’adaptation des essences fruitières méditerranéennes face au changement climatique est conscient des enjeux à venir. Mais s’y préparet-il suffisamment ? La phénologie (phases de développements saisonniers des plantes) va être durement touchée par l’augmentation des températures, la réduction du nombres de jours de gel et le manque d’eau. Les processus phénologiques étant très liés à la température, des avancées du débourrement végétatif, de la floraison et de la maturité des fruits sont à prévoir. Le changement climatique induira aussi une modification des processus de croissance et d’architecture, comme des déformations des racines, des pousses végétatives, ainsi que des fleurs, et des fruits. D’autres impacts indirects majeurs sont aussi pressentis, comme des désynchronisations entre floraison et activité des insectes pollinisateurs Ces effets sur l’arbre fruitier, entraîneront des troubles de maturation du fruit et par conséquent une dégradation de la qualité gustative (équilibre entre sucre et acidité, fermeté...) et de la coloration des fruits. Certains bioagresseurs des pays chauds pourraient étendre leur aire de répartition jusqu’à Porquerolles et ceux déjà présents pourraient renforcer leurs ravages en France : xyllela fastidiosa, monilia fructicola, ou encore carpocapse. À l’inverse, le réchauffement climatique pourrait avoir des incidences positives sur l’arboriculture. Les gels printaniers pourraient être plus rares et certaines maladies, comme le chancre bactérien, pourraient décliner.

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L’économie insulaire bouleversée

prenaient d’assaut l’île en été disposeront de conditions favorables sur une plus longue période. Cette période va s’allonger jusqu’en automne avec la douceur des températures propices pour découvrir l’île et profiter des ses plages de sable. La pression estivale liée à la charge touristique que subissait le territoire en plein été va donc s’étendre sur cette période. Le territoire insulaire et les milieux marins, côtiers et forestiers subiront une pression sur le long terme. Les activités économiques actuelles de l’île (viticulture et tourisme) seront donc forcément remises en question.

Le tourisme, élément majeur de l’économie de Porquerolles va lui aussi être impacté dans les années à venir. L’élévation des températures pourra être un élément bénéfique pour celui-ci dans un premier temps. Cependant conjuguée aux vagues de chaleur et de canicule, à la sécheresse mais aussi à la prolifération des méduses, ces différents phénomènes pourraient à terme dissuader les touristes. L’économie de l’île basée sur cette activité sera mise à mal. Dans une autre mesure, l’augmentation des températures va influer sur la période de fréquentation de l’île. Les nombreux touristes qui

Actuel Les cultures se retrouvent exposées aux embruns marins Le niveau de la mer augmente abîmant le couvert forestier côtier

La vigne dépérit, et les rendements diminuent

De nouvelles espèces marines se développent et l’herbier de posidonie régresse

Un paradis déjà perdu ?

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Synthèse

Des incendies ont ravagé une partie de la forêt


Synthèse Ce que le changement climatique met en péril

Hausse des températures : compromet les espèces peu adaptées à ces fortes chaleurs et aux sécheresses prolongées (végétation des côte rocheuses, vignes, espèces feuillues forestières), intensifie le risque incendie mettant en danger la pérennité des milieux forestiers.

Apparition d’espèces invasives : provoque une concurrence accrue avec les espèces déjà présentes, dégrade l’herbier de posidonie. Hausse du niveau de la mer : pousse le trait de côte et fait reculer les plages, entraine la sallinisation des arrières plages et favorise l’intrusion du biseau d’eau salée dans la nappe.

Baisse des précipitations : menace les espèces peu adaptées à un manque prolongé d’eau, réduit la disponibilité en eau douce nécessaire à la vie insulaire et le maintien des cultures.

Hausse des températures marines : réduit la diversité faunistique et floristique marine des espèces peu adaptées à ces nouvelles conditions, engendre l’apparition de nouvelles espèces mieux adaptées.

Intensification des événements tempétueux : érodent les versants, dégradent le couvert forestier côtier exposé.

Les précipitations intenses ravinent et érodent les versants

Des espèces envahissantes colonisent les côtes rocheuses

La mortalité du chêne permet au pin de se développer

Les buissons morphosés par le vent disparaissent

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Et Ailleurs ? Des mosaïques végétales fragiles et instables

Le climat méditerranéen est présent dans cinq régions du monde (Méditerranée, Californie, Chili, Afrique du Sud et Australie méridionale). Ces régions peu étendues en latitude, ont en commun de faire la transition entre le domaine tempéré et le domaine tropical ainsi que les nombreuses affinités en terme de végétation. Ces lieux sont des sources d’inspiration pour comprendre comment les paysages porquerollais pourraient s’adapter face au changement climatique. Il s’agit aussi de cas d’études intéressants pour initier une réflexion prospective.

En 1902, des incendies ont ravagé 8000 ha de ce massif. Ils ont eu des conséquences dramatiques sur le couvert végétal. Soumise ensuite à la récurrence des incendies, à l’intensité des défrichements et du surpâturage, la végétation n’a jamais été capable de retrouver une dynamique progressive, sans pouvoir évoluer à nouveau vers une forêt. On observe alors un maquis arboré élevé, dans lequel les végétaux atteignent 3 m de hauteur. Dans les stations où subsiste un maquis arboré très dense, la strate haute est essentiellement formée de chênes lièges ou d’oléastres, auxquels s’ajoutent quelques lentisques et filaires de grande taille. Lorsque la dégradation est plus forte, la végétation prend la forme d’un maquis peu dense de 1 à 1,5 m de hauteur, à base de calycotomes, de cistes et de genévrier. Les stades de dégradation les plus poussés aboutissent à des maquis bas touffus .

Tout d’abord, nous nous intéresserons au massif de Mogods en Tunisie septentrionale, composé de milieux fragiles soumis aux aléas. Ensuite, nous verrons l’exemple du chaparral californien, qui est un territoire situé en zone semi-aride marqué par la forte présence du maquis méditerranéen.

Le massif des Mogods

Le massif de Mogods est situé en bordure du littoral nord de la Tunisie. Actuellement, la Tunisie connaît un apport pluviométrique inégalement réparti dans l’espace et dans le temps, caractérisé par une grande variabilité des quantités annuelles reçues, de l’intensité et du régime saisonnier. Cette situation pourrait s’apparenter à ce que connaîtra l’île de Porquerolles dans quelques années. Le maquis, formation arbustive dense, occupe une grande partie du massif. On retrouve différentes formations forestières composé de chêne kermès, du chêne liège, et de l’olivier et du lentisque.

Un paradis déjà perdu ?

Limite de l’étude

La récurrence à venir des incendies, liés aux sécheresses plus intenses, entraînera peut-être sur l’île cette forme de dégradation du milieu forestier, qui fragmentera les espaces boisés. Cependant, les incendies ne sont pas l’unique raison de la dégradation des paysages des Mogods. L’agriculture et le défrichement jouent aussi un rôle important, qui ne sont pas des dynamiques actuellement présentes à Porquerolles. Verrons-nous une telle dégradation du cœur boisé de l’île à l’avenir ?

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Et ailleurs ?


Massif des Mogods en Tunisie, photos google street view

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Végétation du Chaparral californien, photos google

Un paradis déjà perdu ?

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Et ailleurs ?


Le chaparral californien

Une pépinière à ciel ouvert :

La Californie est beaucoup moins riche en éléments arborés que le bassin méditerranéen mais son cortège végétal reste tout de même associé au climat méditerranéen. Situé sur des latitudes plus basses, cette région est soumise à une sécheresse plus intense comparable à ce que l’on pourra retrouver sur Porquerolles d’ici quelques années. Afin de faire face à ces conditions rudes, la végétation a dû s’adapter donnant naissance au « Chaparral ». Cette formation végétale est « un maquis d’arbustes et de buissons, qui dépassent rarement deux mètres de haut ».

La végétation des chaparrals est endémique des milieux semi-arides, a su évoluer, s’adapter face à ce manque d’eau. Ce type de formation végétale est une aubaine et une opportunité formidable en terme d’adaptation pour des territoire comme Porquerolles. La connaissance de cette composition végétale peut permettre d’expérimenter de nouvelles essences afin d’anticiper la disparition d’essences du bassin méditerranéen qui subiront le changement climatique.

Des essences adaptées à la sécheresse

D’une façon générale, « le chaparral est bien représenté dans des secteurs secs, sur des substrats perméables et des versants sud ». Les espèces représentatives de ce milieu sont principalement des chênes buissonnants, du chamise et des manzanitas, ayant développé des adaptations morpholgiques. La manzanita, par exemple, de la famille des Ericaceae, a développé des feuilles orientées perpendiculairement au soleil pour éviter de perdre de l’eau et des «burls» qui contiennent des bourgeons dormants permettant à la plante de se régénérer rapidement en cas d’incendie. Les chênes buissonnants comme le chêne broussailleux (Quercus berberidifolia) ou le chêne arbustif turbinellé (Qercus turbinella) ont tous les deux un port dense et compact, des feuilles glauques et épaisses limitant l’évapotranspiration lors de fortes chaleurs.

131


Continuer de rêver


4. 133


Synthèse des enjeux protection de l’île, ne laissant pas la place à l’action et divisant les opinions. La rapidité du changement climatique ne laisse que très peu de temps pour agir. Faut-il laisser le milieu évoluer selon ses propres dynamiques ? Faut-il lutter pour la préservation de ces paysages emblématiques ? De ces espèces endémiques ? Faut-il inventer d’autres paysages ? Porquerolles est un lieu qui interroge. Face à l’incertitude à venir, le regard sur l’espace et la vision transversale du paysagiste lui permet d’imaginer une projection donnant envie d’agir.

L’île de Porquerolles attire la curiosité. Ses paysages paradisiaques en font un haut lieu du rêve insulaire d’un jour ou de toujours. Les touristes qui fréquentent cette île pour y trouver une nature vierge et protégée grâce au PN, repartent souvent avec des souvenirs de vignes à perte de vue, de plages de sable fin, d’une forêt dense et de points de vue à couper le souffle. Cet imaginaire est aussi très présent chez ceux qui ne sont jamais venus. Tout cela induit une forme de patrimonialisation de l’île qui a pour conséquence une certaine

Réinventer les paysages emblématiques de Porquerolles tourisme dont la survie dépend de l’attractivité du paysage mais aussi aux porquerollais venus s’installer pour vivre dans ce cadre précis. Expérimenter avec ces paysages représentatifs de la richesse des milieux méditerranéens, permettrait de créer un véritable laboratoire, légitime pour mettre en place des actions à d’autres échelles afin de lutter ou de les accompagner face aux effets du changement climatique sur le milieu marin et terrestre, aussi bien forestier qu’agricole.

La valeur patrimoniale de Porquerolles n’est plus a prouver. Les paysages édéniques qui la constituent sont riches en biodiversité, rares dans leur diversité sur un territoire si petit, stimulant l’imaginaire, le développement touristique et favorisant le maintien d’une agriculture héritée de longue date. Sa viabilité profite à tous : aux viticulteurs tirant parti du prestige de Porquerolles pour la vente de leur vin, aux scientifiques du Parc qui peuvent continuer d’étudier des dynamiques dans un cadre insulaire préservé, aux acteurs du Continuer de rêver

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synthèse des enjeux


Retrouver un système agricole résilient et productif constitution de corridors favorables au déplacement des espèces. L’expérimentation de nouvelles façons de cultiver et d’associer les cultures permettra d’imaginer un nouveau rapport à l’eau, si problématique dans les années à venir. La proposition spatiale de ce nouveau modèle cultivé prendra en considération l’impact du changement climatique sur le territoire.

La proposition d’un modèle plus résilient et respectueux de l’héritage cultivé de l’île pourra favoriser une nouvelle biodiversité dans les plaines, ainsi qu’une nouvelle liberté (autonomie) alimentaire, sans sentiment de dépendance au continent. Cela permettra ainsi de recréer un système de circuit de proximité favorable à une vie insulaire animée. Ce nouveau système agricole pourra aussi légitimer l’utilité originelle de pare-feu des cultures et contribuer à la

Créer un espace de discussion propice à une gestion durable de l’île compréhension des processus. La connaissance du terrain des porquerollais pourrait être une véritable ressource. Il s’agirait ici de mettre en place, un espace de dialogue laissant chacun s’exprimer et proposer des actions concrètes, réalisables à son échelle. Ce nouvel espace de dialogue pourrait permettre une mise en place concertée du territoire, pour comprendre les problématiques propres à chaque acteur afin d’imaginer une trajectoire commune future.

Le pouvoir de décision du Parc National est fort, ce qui, dans une certaine mesure, peut être un atout pour le territoire puisque les décisions sont sans équivoques. Cependant un sentiment d’inaction face aux problématiques pressantes (régulation du tourisme, approvisionnement extérieur en eau...) se fait ressentir. En effet, les acteurs locaux ne se sentent pas entendus. Ils sont souvent concertés sur de multiples sujets mais aucune action ne semble découler de ces réunions. Le changement climatique est un réel enjeu pour les années à venir mais de la même façon le Parc ne semble pas dans l’action mais plutôt dans la

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Une nouvelle Gouvernance ? plausible pour ne pas tomber dans une caricature des situations. Ils permettent de se projeter plus facilement et d’imaginer les grandes tendances pour l’avenir de l’île. Le but est aussi de comprendre l’impact de la collaboration possible des acteurs.

Imaginer les conséquences des choix pris par les acteurs, sur le territoire, permet de mieux comprendre quelle gouvernance serait la plus capable de mener à bien un scénario de mise en action du territoire. Dégageant des valeurs plus ou moins importantes, chaque scénario semble

Scénario 1 Une série de catastrophes écologiques s’enchaînent Le Parc National et les porquerollais répondent aux différentes situations dans l’urgence afin de minimiser les dégâts

Fragile

Modèle agricole Attractivité touristique Gouvernance

Faible Individuelle

Résilient Forte Collective

Dynamisme de la vie locale

Faible

Fort

Richesse des milieux

Pauvre

Riche

Les cultures, pas encore adaptées, seront mises à mal et pour certaines dépériront. Les différents milieux, forestiers et côtiers, accuseront les coups faisant disparaître définitivement certaines espèces emblématiques. Les touristes, trouvant ces paysages moins attractifs, seront moins tentés de fréquenter l’île.

Ce premier scénario représente l’inaction des acteurs face au changement climatique à venir. Si rien n’est fait, si rien ne change dans les années suivantes, on risque d’aboutir à une réponse précipitée. Les acteurs insulaires et Le Parc National répondront aux évènements climatiques a posteriori, essayant de minimiser les impacts. Continuer de rêver

136

Une nouvelle gouvernance ?


Scénario 11 Le Parc National s’empare du sujet, une stratégie scientifique se met à l’œuvre sur Porquerolles L’île devient un véritable laboratoire Les pôles de recherche sont de plus en plus nombreux et actifs

Fragile

Modèle agricole Attractivité touristique Gouvernance

Faible Individuelle

Dynamisme de la vie locale Richesse des milieux

Résilient Forte Collective

Faible

Fort

Pauvre

Riche

Parc s’exacerberont. Certains espaces transformés en «espaces tests» influenceront le tourisme (défection d’anciens plaisanciers, compensée peut-être par la curiosité de nouveaux). Le modèle agricole, aidé par les scientifiques et le Conservatoire National Botanique Méditerranéen deviendra plus résilient. Les milieux, étudiés par le prisme du changement climatique seront aidés pour une adaptation sur le long terme, voyant leur cortège végétal évoluer.

Le Parc pourrait décider de prendre en main le sujet du changement climatique et d’agir. Le conseil scientifique ne serait alors plus seulement une instance consultative mais permettrait la réelle organisation d’une stratégie d’adaptation et d’expérimentation de l’île. Les îliens subiraient les décisions prises «d’en haut», diminuant leur envie d’agir à leur échelle, se sentant seulement informés. Le territoire, théâtre d’expérimentations, modifié sans leur accord semblera leur échapper, et les tensions avec le

137


Scénario 111 Les îliens s’organisent à leur façon Chacun essaye à son échelle La vie locale et collective se développe La gestion des milieux est prise en main par les habitants

Fragile

Modèle agricole Attractivité touristique Gouvernance

Faible Individuelle

Dynamisme de la vie locale Richesse des milieux

Forte Collective

Faible

Fort

Pauvre

Riche

fruit des expérimentions d’adaptation. Ce dynamisme de la vie insulaire entraînera une envie de la part des viticulteurs et du maraîcher d’essayer à leur tour, rendant le modèle agricole plus résilient. En revanche les tensions avec le Parc risquent de s’accentuer, celui-ci voyant d’un mauvais œil l’initiative insulaire personnelle sur un territoire protégé. L’attractivité touristique du territoire restera stable, les transformations du territoire étant peu visibles.

Les acteurs insulaires pourraient aussi décider d’essayer à leur échelle d’adapter leur pratiques, voyant l’impact puissant sur leur vie quotidienne. Les îliens s’entraideront plus, se donnant des informations sur la réussite ou l’échec de leurs expérimentations. Les actions individuelles déjà présentes aujourd’hui, comme la réduction personnelle de la consommation en eau, les essais d’essences dans chaque parcelle pourront s’étendre à d’autres porquerollais. D’autres milieux domestiqués pourraient alors voir le jour,

Continuer de rêver

Résilient

138

Une nouvelle gouvernance ?


Scénario 1V Les îliens et le Parc collaborent Les décisions sont prises en commun Les îliens sont intégrés à la recherche scientifique du Parc

Fragile

Modèle agricole Attractivité touristique Gouvernance

Faible Individuelle

Dynamisme de la vie locale Richesse des milieux

Résilient Forte Collective

Faible

Fort

Pauvre

Riche

«domestiqués». Le conseil scientifique pourrait permettre de piloter la stratégie de recherche, mettant à disposition ses connaissance sur le suivi des évolutions climatiques, et conseiller les îliens pour la mettre en place. Le Conservatoire Botanique National Méditerranéen, apporterait son expertise aux viticulteurs et au maraîcher, permettant une réelle prise de position pour les essais agronomes.

L’initiative collective face au changement climatique est souvent recommandée. De nos jours, la communication entre les différents acteurs est rare, et la relation entre le Parc et les îliens peut être compliquée. Un espace de dialogue pour échanger sur les actions et une nouvelle gestion à mettre en place pourrait permettre de nombreuses améliorations du système en place. Le territoire serait pris en compte dans son entièreté, sans faire de distinction entre milieux «sauvages» et

139


Construire un avenir en « commun »

La création d’un comité insulaire

Un nouveau temps d’échange semble donc indispensable pour mettre en place des actions sur le long terme en réponse au changement climatique. Plutôt que de créer un énième conseil, une autre instance de réunion avec les acteurs locaux, il semblerait intéressant de compter sur ceux déjà présents et fonctionnels. Le comité insulaire de l’ONG Smilo constitue une base solide et déjà en mouvement pour prendre en compte les remarques, avis, envies des îliens. Des ateliers de concertation pourraient être le début d’un nouveau partage des perceptions de chacun des acteurs, avec la diversité de points de vue que cela entraine. Ce nouveau temps d’échange et de rencontre entre acteurs permettrait de renforcer l’action locale, décidée collégialement et donc appliquée avec une adhésion plus large, ce qui renforcerait son efficacité. Les projets d’adaptations concertés, qui concernent au premier chef les îliens souhaitant s’investir dans ces questions, ne pourront cependant pas être mis en place sans la participation active des collectivités. Jusqu’ici le dialogue et la coopération étaient minces mais aujourd’hui la mairie d’Hyères, la métropole toulonnaise et le Parc se mettent d’accord. Continuer de rêver

Enfin, il faudrait que les liens entre les différentes facettes du Parc communiquent plus les unes avec les autres pour permettre à tous les services nécessaires à la mise en place de stratégies d’adaptations de fonctionner de manière plus transversale. Ce nouveau visage du Parc, le « parc local », pourrait permettre de mettre en place la trajectoire commune pour permettre à Porquerolles de s’adapter. La spatialisation des intentions de projet sur l’île de Porquerolles nécessitera l’intervention d’un paysagiste. Un tel projet demandera une approche transversale considérant l’ensemble des enjeux pour créer des espaces adaptés au changement climatique tout en prenant en compte les activités s’y déroulant. Le «parc local» pourra alors représenter la maitrise d’ouvrage pour le paysagiste. En redonnant une place aux acteurs locaux, ce comité insulaire est un outil offrant de nombreuses possibilités de projet. Si une stratégie d’expérimentation à l’échelle de l’île semble nécessaire, il serait dommage qu’elle soit mise en place seulement par des scientifiques. Ce comité permettra la mise en place d’un projet commun en cohérence avec les valeurs du territoire. Une nouvelle gouvernance pour les acteurs de l’île

140

Construire un avenir en commun


Charte du Parc approuvée par le ministère et le premier ministre Assisté par : Le conseil scientifique +

Conseil économique, social, culturel t (m Éta

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141

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Un parc à plusieurs visages qui rassemble, écoute et réalise

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NM

Parc National de Port-Cros


Ce que nous ne perdrons pas et ce que nous pouvons retrouver

Malgré tous les changements à venir, certains éléments caractéristiques de Porquerolles vont subsister. Pour ce projet de territoire, nous pouvons nous appuyer sur ce qui aura encore une valeur paysagère.

Puiser dans l’héritage cultivé de l’île

Le caractère immuable de Porquerolles

Pour créer une vision prospective de ce territoire, nous pouvons aussi prendre appui sur l’héritage historique de l’île. Une attention particulière aux ressources rares, comme l’eau, et à leur utilisation, peut-être une source d’inspiration. Les anciennes retenues collinaires, fossés Fournier ou encore les écluses permettaient une préservation de cette ressource. L’ancienne autonomie alimentaire de l’île est aussi un bon exemple de l’ingéniosité des anciens habitants et de leur connaissance du territoire.

La rareté de la géologie de l’île, permettant aujourd’hui la qualité des paysages que nous connaissons, continuera de servir de socle riche aux paysages de demain. Ses roches tendres permettront à la végétation de s’enraciner profondément et d’apporter du matériel limoneux aux plaines. La morphologie particulière de Porquerolles continuera d’exister. Ses alcôves, tournées vers le frais seront d’une grande aide pour lutter contre les vents et épisodes climatiques extrêmes. Son relief intime et accueillant sera toujours propice à l’installation humaine. La largeur réduite de l’île subsistera et avec elle son lien à la mer immuable. Le relief doux au nord et plus marqué au sud ainsi que les rochers plongeant dans une mer transparente persisteront. Cette charpente permanente permettra de conserver certaines qualités de l’île et d’avoir quelques indices pour l’avenir. Continuer de rêver

142

Ce que nous ne perdrons pas et ce que nous pouvons retrouver


Des expérimentations pour amorcer dès aujourd’hui les réponses de demain Un territoire d’expérimentations

Réinventer un territoire de qualité qui garde une identité

Ce projet de territoire aura pour objectif principal d’inciter, d’essayer de voir ce qui s’adapte ou au contraire dépérit ; de travailler avec le vivant. L’objectif principal de ce projet n’est pas de fixer ou de définir une forme de paysage mais de lui donner pièce par pièce une adaptabilité aux enjeux climatiques de demain, tout en veillant à l’équilibre entre les ressources et la vie insulaire.

Ce projet de territoire a pour objectif de conserver des ambiances paysagères de grande qualité. Ces expérimentations doivent être pensées dans l’espace, pour s’adapter à l’existant afin de conserver la spécificité de chaque site.

Aider les milieux à s’adapter en conservant une diversité

En outre, la diversité des paysages de l’île peut permettre l’installation d’un véritable laboratoire à ciel ouvert. Représentative des autres milieux méditerranéens, la situation insulaire de Porquerolles entre terre mer, entre nature «sauvage» et cultivée nous permet d’imaginer une large variété de tentatives. La situation insulaire de Porquerolles implique d’avoir une première réflexion cohérente à l’échelle de l’île. La stratégie d’adaptation des paysages s’organise sur le territoire insulaire dans son ensemble car à l’échelle de sites isolés, elle ne pourra pas être efficiente. Chacune des quatre plaines agricoles possède une identité propre de nos jours. Utiliser leurs caractéristiques permettra de ne pas se détacher des valeurs qui leur sont propres. La plaine de la Courtade semble être un cas d’étude intéressant de par sa relation étroite à la mer, ses contraintes foncières moins importantes et sa situation de carrefour entre de nombreux milieux. Nous la prendrons donc comme prototype de réflexion , puis verrons dans un second temps comment le projet peut se décliner à une échelle plus locale.

Les ambiances littorales et forestières sont repensées avec de nouvelles essences plus adaptées mais conservent leur emplacement. De nouvelles associations d’essences mais aussi des gestions différentes sont expérimentées.

Diversifier les productions locales

Le projet s’intègre à la trame agricole existante. Initier de nouvelles pratiques agricoles et diversifier les productions locales permet une adaptation progressive des cultures à long terme.

Conserver la ressource en eau

Cette ressource doit, à l’avenir, être préservée mais aussi optimisée. La collecte des eaux de pluie, l’amélioration de son infiltration et l’irrigation des cultures sont repensée.

Limiter le risque incendie

Le massif forestier sera de plus en plus propice aux départs de feu. Des lisières et une nouvelle gestion permettent de limiter les causes de son déclenchement éventuel et sa propagation.

143


Carte des intentions à l’échelle de l’île Réinventer un territoire de qualité qui garde une identité Densifier la ceinture littorale de l’île Conserver des ouvertures visuelles permettant d’appréhender l’évolution des paysages par la Mise en place de pâturages sur certaines parcelles enfrichées Protéger le cœur boisé dense de l’île Préserver les milieux ouverts et semi-ouverts Créer une zone refuge

Aider les milieux à s’adapter en conservant une diversité

Expérimenter de nouvelles essences terrestres et marines plus adaptées au changement climatique sur des espaces tests Limiter et lutter contre l’implantation d’espèces envahissantes sur la côte rocheuse et en mer Limiter les activités anthropiques marines Protéger l’herbier de posidonie et installant des ancrages permanents

Limiter le risque incendie

Créer des lisières ignifuges entre les massifs aux abords des chemins Réintégrer le pastoralisme dans certains sousbois pour atténuer leur vulnérabilité

Diversifier les productions agricoles

S’appuyer sur la banque de semences du Conservatoire Botanique comme ressource Essayer de nouveaux cépages Expérimenter de nouvelles associations culturales

Conserver la ressource en eau

Remettre en fonction les retenues collinaires


Zoom-exemple

1 km

N


La plaine de la courtade : de nouveaux paysages emblématiques La plaine de la Courtade sert prototype de réflexion sur ce qui pourrait être mis en place à l’échelle de l’île. Ce projet a pour intention d’accompagner l’île à s’adapter face au changement climatique dans son entièreté, mais à cette étape du projet, présenter un exemple à une échelle plus fine semblait nécessaire. Il s’agira de préserver le potentiel cultural de l’île, en conservant l’intégrité des espaces agricoles structurants et en favorisant les continuités écologiques. Engager une démarche de diversification des productions locales en favorisant les variétés locales anciennes et adaptées aux conditions climatiques permettra de conserver ce qui a contribué à façonner les paysages emblématiques de Porquerolles tout en les aidant à mieux s’adapter. La reconquête des espaces en friche par une gestion pastorale sera à imaginer. Un appui technique et scientifique du Conservatoire Botanique National Méditerranéen pourra être envisagé.

Révéler les nouveaux paysages de Porquerolles Végétaliser l’arrière-plage et conserver les banquettes de posidonie Conserver les banquettes de posidonie Tester de nouvelles essences forestières Planter des ceintures ignifuges aux abords des chemins afin d’éviter que le feu se propage Planter des lisières mixtes, diversifiées Mettre en place des gestions adaptées aux fonctions du site Limiter la prolifération d’espèces invasives Souligner le caractère humide des fonds de vallon

Une gestion de l’eau plus durable Tester de nouvelles essences moins consommatrices d’eau Rénover et créer des retenus collinaires Créer un système de stockage de l’eau dans les fossés par la mise en place d’écluses afin de favoriser l’infiltration

La gestion de l’eau dans son ensemble est aussi à réinventer. Pour cela, le savoir-faire ancestral de l’île doit être mis à profit, à la fois pour permettre aux jeunes plants de subsister mais aussi pour recharger la nappe de façon prolongée. Grâce à ces deux parties du projet, on peut espérer une vulnérabilité moins importante face aux incendies. Les arrière-plages et les plages pourront être densifiées pour protéger les cultures à l’arrière et éviter un recul du trait de côte trop rapide. Continuer de rêver

Diversifier les productions Expérimenter de nouvelles cultures et associations variétales à la sécheresse (mise en place de la permaculture) Réintégrer l’arbre au sein de la parcelle (agroforesterie) Créer une pépinière d’espèces adaptées grâce aux expérimentations sur les terrains du Conservatoire du Littoral Tester de nouveaux cépages adaptés à la sécheresse

146

La plaine de la courtade : de nouveaux paysages emblématiques


200 m

147

N


Des expérimentations échelonnées dans le temps sur de plus vastes superficies avant de les introduire dans des espaces stratégiques. Une pépinière pourra être envisagée. La création du «parc local», la concertation avec les acteurs peut être commencée dès à présent. Les acteurs pourront être mobilisés dès le début du projet, accompagnés par le Conservatoire Botanique et le Parc. Une plaine pourra servir d’espace test, en intégrant la question du foncier. La plaine du Village semble être la plus adaptée par la présence du Conservatoire et par le nombre de terrains enfrichés. Dans les massifs forestier la propriété du conservatoire du littoral pourrait être un bon endroit pour commencer.

Pour tester de nouvelles essences adaptées au changement climatique, on pourra mettre en place deux programmes diversifiés. Le premier consistera à essayer des essences, avec des sols et expositions différents. Une sélection d’espèces végétales plus résistantes, de plusieurs variétés, et importées éventuellement, pourrait être un début. La réussite de certaines d’entre elles laissera une possibilité sur leur capacité d’adaptation. Il pourra être envisagé en premier. Par la suite, une fois que certaines essences auront prouvé leur bonne adaptation aux conditions de Porquerolles, il s’agira de les planter Des ceintures ignifuges sont plantées aux abords des chemins. La ceinture littorale est densifiée pour éviter aux embruns marins d’arriver jusqu’aux cultures

Des haies sont créées entre les parcelles comme couloir de biodiversité

Des associations culturales avec de nouvelles productions sont essayées

Les lisières feuillues viennent faire la transition entre cultures et massif forestier

De nouveaux cépages sont expérimentés

Des mouillages permanents permettent de limiter le nombre et l’impact du mouillage sur l’herbier de posidonie

Horizons 2100 Continuer de rêver

148

La plaine de la courtade : de nouveaux paysages emblématiques


Actuel

Ce qui pourrait arriver si l’on n’agit pas

Les retenues collinaires sont recréées ou rénovées, les écluses améliorent l’infiltration de l’eau en profondeur

Une nouvelle dynamique forestière est en place, de nouvelles essences sont expérimentées pour amender le sous-bois

Les espèces envahissantes sont réduites au maximum : des campagnes d’arrachage sont initiées

De nouvelles espèces expérimentales sont implantées sur certains espaces test

149

Des espaces tests en mer sont aussi créés pour expérimenter de nouvelles essences marines plus résistantes


Conclusion


Ouverture

Le changement climatique est déjà à l’origine de plusieurs problématiques qui risquent de modifier profondément les paysages de cette île et les modes de vie de ses habitants. Certains milieux vont évoluer, d’autres régresser. La vie insulaire va être de plus en plus difficile, les cultures de moins en moins productives et adaptées, la forêt changera radicalement de visage et les milieux côtiers se métamorphoseront.

En regardant pour la première fois Porquerolles au delà de son image idyllique et des souvenirs de vacances qui me rattachaient à elle, j’ai pris conscience des enjeux climatiques qui pesaient sur elle. L’île de Porquerolles traverse actuellement une période charnière. Comment accompagner l’île de Porquerolles dans les prochaines années face au changement climatique déjà à l’œuvre ? Telle était ma question originelle.

Au terme de cette étude, après avoir saisi les enjeux du changement climatique sur ce territoire, il nous semble que derrière des constats préoccupants, peut se dessiner collectivement un avenir durable et passionnant qui permettra de conserver l’âme de ce lieu, cher à ses habitants et aux heureux touristes qui auront la chance de pouvoir encore s’y promener.

Le changement climatique en Méditerranée se traduit concrètement d’une part par des épisodes climatiques importants (tempêtes, pluies diluviennes), mais également par des manques d’eau, et des périodes de sécheresse majeures. Porquerolles est un territoire particulièrement intéressant pour étudier ces changements puisque l’insularité exacerbe les enjeux liés aux changements climatiques, les rend plus visibles et concrets. Le contexte d’une petite île en Méditerranée peut constituer un « cas d’école » précieux pour l’étude d’un microcosme dans un monde en mutation, et des paysages qui en résultent. Aujourd’hui les paysages porquerollais sont vécus par tous. Habités, pratiqués, exploités pour certains, fréquentés, visités pour d’autres. La rareté de Porquerolles entraine une curiosité qui amène un afflux touristique mais aussi un attachement particulier de la part de ses habitants et visiteurs.

151


Bibliographie Références générales GIEC, Bilan 2007 des changements climatiques :cinquième rapport d’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat. Genève, GIEC, 2007 Conservatoire du littoral : http://www.conservatoire-du-littoral.fr/ DREAL Provence Alpes-Côte d’Azur: http://www.paca.developpement-durable.gouv.fr/ Histoire de l’eau à Hyères : https://www.histoire-eau-hyeres.fr/ Parc national de Port-Cros, Charte du Parc national de Port-Cros, Janvier 2006, 372 pages Parc national de Port-Cros, Atlas du Parc national de Port-Cros, ISBN, 2005, 72 pages Parc national de Port-Cros : http://www.portcros-parcnational.fr/fr MedECC : https://www.medecc.org/

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PNUE-PAM-CAR/ASP, Impact des changements climatiques sur la biodiversité en Mer Méditerranée. Tunis, CAR/ASP, 2008. 30 pages PNUE-PAM-CAR/ASP, Impact des changements climatiques sur la biodiversité marine et côtière en Mer Méditerranée : État actuel des connaissances, Tunis, CAR/ASP 2010, 85 pages Parc national de Port-Cros, Adaptation aux changements climatiques : État des lieux et prospectives 2019, 2019, 60 pages Plan bleu : https://planbleu.org/

Imaginaire insulaire Besse J-M., Monsaingeon G., Le temps de l’île, Mucem/Parenthèses, Édition Parenthèses, Marseille, 2019, 252 pages France Culture, de Rocquigny T., Le lieu des utopies, Les possibilités d’une île, Entendez-vous l’éco ?, [Émission de radio], France, 2019

Géologie Bronner G., De Schiste et d’eau Archipel d’Hyères, Cahier de découverte n°8, Parc national de Port-Cros, CNDP-CRDP, IMG Nice, 84 pages

Gouvernance Guérin J-P., L’île de Porquerolles classé Parc National, JT 13H, Office national de la radiodiffusion télévision française, INA.fr, INA, 1974, vidéo 00min49s

Histoire Borel V., Porquerolles et les îles d’Hyères vers 1900, Ed. Champflour, Marly-le-roi, La Rosalba, Giens, 1997, 127 pages Borréani M., Chabal L., Mathieu L., Michel J-M., Pasqualini M., Lippmann-Provansal M., Peuplement et histoire de l'environnement sur les îles d'Hyères (Var), Documents d'Archéologie Méridionale, vol. 15, Espaces et monuments publics protohistoriques de Gaule méridionale, 1992, pages 391 à 416 de Gallard Pepin S., Dumont T ., A la découverte de Porquerolles : Île d’Hyères…Et aujourd’hui, Ed. Aris, Bandol, 1991, 87 pages Heiser S., Launey S., Porquerolles : vocation militaire et patrimoine culturel, guides des généalogie, Archives et Culture, Paris, 77 pages Guillaume F., Porquerolles,19/20 France 3, INA.fr, INA, 1996, vidéo 02min26s Farber Y., Poruqerolles, 13H, France 2, INA.fr, INA, 1998, vidéo 02min14s

153


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154


Les milieux méditerranéens Brahim J., Analyse cartographique et paysagère des transformations spatiales du couvert forestier des Mogods (Tunisie septentrionale) », Physio-Géo, Volume 15, 2020, 28 pages Clavreul D., Gérardin N., Moutte P., Port-Cros et Porquerolles : les îles à pas comptés : Habitats naturels, espèces protégées et paysages, aquarelles, Denis Clavreul, Rodez, Ed. du Rouergue, Parc national de Port-Cros 2000, 111 pages Office national des Forêts, Directive régionale d’aménagement pour la zone méditerranéenne de basse altitude, Direction Territoriale Méditerranée Région Provence-Alpes-Côte d'Azur, 2006, 95 pages Parc national de Port-Cros, Document d'objectifs Natura 2000, La côte d’Hyères et son archipel : Les îles d’Hyères, Île de Porquerolles Janvier 2008, 220 pages Tassin C., Paysages végétaux du domaine méditerranéen : Bassin méditerranéen, Californie, Chili central, Afrique du Sud, Australie méridionale [en ligne]. Marseille : IRD Éditions, 2012, 424 pages

Intentions Festa D., Notion en débats : les communs, In Géo confluences, Géo confluences, Juin 2018. Sgard A., « Le paysage dans l’action publique : du patrimoine au bien commun », Développement durable et territoires [En ligne], Vol. 1, n° 2, Septembre 2010 Sgard A. et al., Construire en commun par le paysage. Trois controverses paysagères relues à l’aune du bien commun, ESPACES ET SOCIETES, n°175, 2018, pages 105 à 122

155


Remerciements


Au fabuleux binôme Catherine et Bénédicte

pour leur soutien, leurs corrections et leur regard avisé sur ce sujet

Aux porquerollais

pour le temps précieux qu’ils m’ont accordé et leurs témoignages

À ma famille

pour leurs corrections et leur soutien sans faille

À Fanfan

sans qui ce mémoire n’aurait pas été le même

À ma colocataire

Madenn, pour les moments de joie et de rigolades

À la promo du radeau

pour leur amitié et leurs conseils

Aux copains et copines

pour les moments de détente

157


Les îles sont des espaces aux paysages singuliers et aux milieux en équilibre fragile dont les éléments partagent des habitudes et des organisations collectives particulières. Sur leurs terres inextensibles et limitées, les espèces vivantes et les populations humaines sont particulièrement sensibles et à l’écoute des dynamiques naturelles et sociales actuelles comme celle du changement climatique. Sur l’île de Porquerolles, l’appréhension et l’impact du changement climatique est particulièrement visible en raison des caractéristiques physiques de l’île : espace «clos» fini, ressources naturelles limitées entraînant une forte dépendance aux approvisionnements extérieurs du continent, sensibilité particulière aux rythmes naturels, marquant la vie quotidienne et la culture insulaire. Finalement, comment répondre aux défis environnementaux dans leurs différentes dimensions, qui touchent aussi bien aux questions de biodiversité terrestre et marine qu’à celles de l’organisation du cadre de la vie insulaire ? Quels paysages en résulteraient et comment pouvons-nous intervenir ? Espace privilégié de « révélation » locale des enjeux du changement climatique en mer Méditerranée, Porquerolles possède un potentiel naturel, agricole et forestier à révéler et faire évoluer dans l’objectif de s’adapter à ces changements.

École de la Nature et du Paysage 9 rue de la Chocolaterie, 41 000 Blois 02 54 78 37 00

Nom chapitre

158

Nom sous chapitre


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Bibliographie

5min
pages 152-155

Conclusion

1min
pages 150-151

paysages emblématiques Des expérimentations échelonnées dans le temps

1min
pages 148-149

Construire un avenir en «commun»

2min
pages 140-141

Vers une prise en compte des acteurs locaux Horizon 2030 des expérimentations pour amorcer dès aujourd’hui les réponses de demain

4min
pages 142-145

La plaine de la courtade : de nouveaux

2min
pages 146-147

Synthèse des enjeux

3min
pages 134-135

Et ailleurs?

3min
pages 128-133

Synthèse

2min
pages 126-127

milieux marins

9min
pages 104-111

Terres habitées : Cœur névralgique de l’île

2min
pages 82-85

Terres domestiquées : Plaines cultivées

11min
pages 86-97

Terres fréquentées : Le tourisme un l’élément aggravant

2min
pages 80-81

Terres aux ambiances sauvages : Cœur forestier Terres aux ambiances sauvages : Ceinture littorale et

6min
pages 98-103

Transition : adaptation ou transformation ?

1min
pages 112-115

Richesses insulaire

4min
pages 74-79

Choix du site et du sujet

1min
pages 14-16

Quel devenir pour cette île ?

1min
pages 42-45

Paysages paradisiaques

5min
pages 22-33

La question climatique

3min
pages 8-9

Porquerolles : bien / patrimoine commun

2min
pages 34-35

Imaginaire insulaire

2min
pages 12-13

Une rencontre entre les hommes et le territoire insulaire

13min
pages 50-65

LA gouvernance territoriale mal acceptée

5min
pages 68-71
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