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TAGADA JONES, nouveau manifeste Tout pourrait ici sembler anachronique : publier un album physique à l’heure des plateformes numériques ; tout autant que perdurer dans un style (le punk-rock) désormais boudé par les médias. Et pourtant…
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ingardisé, oublié, relégué à une simple pulsion adolescente et nostalgique… Le rock est annoncé sous respirateur artificiel depuis une quinzaine d’années. Pour preuve : on l’a exilé des festivals généralistes pour gagner la périphérie spécialisée. Parqué. Mis à part. Bon pour les reportages où l’on filme les gens bourrés ou autres tapes sur les culs défroqués. Merci la crédibilité…
Est-ce parce que la dernière décennie fut une ère de déni ou de passivité ? Si certains y verront un écho à l’insouciance des années 80 (triomphalisme, néo-libéralisme, entertainment…), les Tagada Jones y trouvent, eux, une logique : « Le rock n’est pas censé être grand public… Et pour cause : c’est une contre-culture ! De la même manière que nous ne sommes pas un groupe à la mode et n’avons pas à l’être… Cependant, ces dernières années, les citoyens se sont sentis de plus en plus dépossédés
de leurs voix et absents des décisions qui les concernaient. Ça a entraîné une réelle méfiance envers un État, pourtant censé nous représenter... Il subsiste donc une colère dormante qui ne demande qu’à s’assumer. Or, quel style a toujours porté comme valeurs la révolte contre le conformisme, la morale dominante et la société de consommation ? » Le chanteur des Tagada Jones marque une pause... avant de reprendre : « Ne reste que cette question : est-ce qu’il faut en venir à la violence pour obtenir satisfaction ? La question est pour le moment sans réponse ». Nouveau silence convenu. Ces thèmes, ils ont nécessairement influencé l’humeur de ce nouvel album, dont le confinement aurait pu rendre complexe l’enregistrement prévu sur la période. À commencer par le clip “Nous avons la rage”, premier extrait de celui-ci et transformé malgré eux en exercice participatif.
Tagada Jones - Photo : Cedric Uriprod
« Est-ce qu’il faut en venir à la violence pour obtenir satisfaction ? »
38 Longueur d’ondes N°93