OUTRE-MER grandeur Nature _ n°6 septembre-octobre 2021

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GUYANE LES SAVANES LITTORALES AU CŒUR D’UN PROJET EUROPÉEN CONTRIBUANT À LEUR PROTECTION

Très vulnérables, les savanes revêtent une grande importance en termes de biodiversité. Ici, la Savane des Pères. © Florent Bignon

Depuis 2018, le projet européen LIFE BIODIV’OM, coordonné en France par la LPO, vise à protéger les derniers reliquats de savanes en Guyane. Sur place, le GEPOG et les partenaires locaux s’attellent à sauvegarder cet habitat rare, fortement menacé par deux espèces exotiques envahissantes. Le long de la plaine côtière, à Kourou, Sinnamary, Iracoubo par exemple, les savanes sèches s’apparentent à de simples petites clairières à l’échelle de l’immense massif forestier environnant. Malgré leur surface réduite, qui représente seulement 0,3 % du territoire guyanais, les savanes abritent 16 % de la diversité végétale de Guyane – soit environ 760 espèces – ainsi qu’une faune abondante : tamanoirs, hérons, tortues, caïmans... Des oiseaux d’une grande rareté y sont par ailleurs observés, tels que la bécassine géante, un limicole classé par l’UICN en danger critique d’extinction sur la Liste rouge des espèces menacées en France.

Illustration : © Cécile Rousse

Dans ces formations herbacées parfois ponctuées de bosquets, d’arbres ou arbustes isolés, la faune et la flore ont dû s’adapter à des conditions spécifiques : les sols argilosableux des savanes subissent au fil des saisons des inondations, des épisodes de sécheresse, de fortes chaleurs mais aussi de fréquents passages de feux. La biodiversité que concentre pourtant ce milieu façonné depuis des siècles par l’homme et la nature en fait un écosystème remarquable nécessitant une protection. D’autant plus que les savanes de Guyane reculent, sous la pression du développement urbain du littoral, d’activités agricoles et

Le dessin ci-dessous de Cécile Rousse (LPO) illustre la progression de l’Acacia mangium dans la savane sèche. Ce milieu naturel abrite par exemple le tamanoir, qui se nourrit de termites et fourmis, ou encore la droséra, une petite plante carnivore adaptée à ces sols pauvres. « L’acacia peut envahir rapidement les milieux en poussant jusqu’à 2,5 mètres par an. Il est difficile à concurrencer par la flore des savanes, très peu dynamique. Les savanes et leurs habitants disparaissent, laissant place à des forêts uniquement composées d’acacias.» (LIFE BIODIV’OM)

surtout de la présence de deux arbres exotiques invasifs : l’Acacia mangium et le niaouli. La lutte pour contenir ces espèces est l’un des enjeux du projet de cinq ans LIFE BIODIV’OM initié en 2018. Piloté en Guyane par le GEPOG (Groupe d’étude et de protection des oiseaux en Guyane), ce projet européen s’inscrit dans la continuité des actions déjà conduites dans les savanes de 2010 à 2015 par le GEPOG, dans le cadre du programme LIFE + Cap DOM : étude des sols, recherches en botanique et ornithologie. L’Acacia mangium et le niaouli sont deux arbres originaires d’Australie. L’acacia tout d’abord a été introduit en Guyane dans les années 1970 pour revégétaliser les sites miniers. Ce grand arbre pouvant atteindre 30 mètres de haut a alors été distribué aux agriculteurs et aux communes, qui ont involontairement participé à son implantation sur le littoral. L’acacia, de croissance rapide, est très résistante aux feux et tolère différents types de sols. Ses graines peuvent être disséminées par des oiseaux à longue distance, y compris dans les espaces ouverts et sans ombre des savanes, qui conviennent tout particulièrement à l’espèce. Quant au niaouli, son expansion a été favorisée à la même période par le Plan Vert, projet de développement de la Guyane qui a encouragé dans la filière bois l’industrie papetière. Le niaouli, appelé « arbre à écorce de papier », est alors importé.


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