MEMOIRE MASTER ARCHITECTURE - Intelligence Artificielle - ENSAM - 2020 - Loïck Maire

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École Nationale Supérieure d’Architecture de Montpellier

Concevoir, Fabriquer, Gérer En quoi l’intelligence artificielle induit une disruption dans les métiers de l’architecture.

Mémoire de Master Loïck Maire

Sous la direction de Élodie Nourrigat, Architecte, Docteure en Architecture, Professeure à l’ENSAM. Membres du jury Élodie Nourrigat, Architecte, Docteure en Architecture, Professeure à l’ENSAM. Jacques BRION, Architecte, Professeur à l’ENSAM. Jérôme LAFOND, Architecte, Maître de Conférence ENSA Clermont Ferrand. Cédric Torne, Plasticien, Maître de Conférences associé.

06 Novembre 2019


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Avant-propos

Ce mémoire rentre dans le cadre de l’obtention du diplôme de Master d’architecture à l’école nationale supérieur de Montpellier. Il étudiera l’effet de l’utilisation des nouvelles technologies et en particulier celle de l’intelligence artificielle dans le monde de l’architecture, de plus nous verrons son impact sur le comportement des entreprises et des agences d’architecture en France et dans le monde. L’idée de ce mémoire est venue du constat que la société utilise de plus en plus d’IA, son utilisation se démocratise et il semble primordial pour des entreprises de s’y intéresser. De plus, ce domaine d’application m’intéresse, et j’éprouve beaucoup de plaisir à me renseigner et à m’initier de près ou de loin à cet univers. En effet, depuis 2016, le discours des leaders (Facebook, Google, IBM, Microsoft) dans ce domaine suit celui des grandes organisations gouvernementales sur ce qui semble être une nouvelle tendance. L’IA est devenu un nouvel outil surpuissant, fiable et autonome. Les grandes métropoles en sont toutes actuellement équipées (Dubaï, Londres, Singapour …) et même si le milieu de l’architecture n’en soit pas encore très affecté, une rupture est en train de s’opérer. Cette étude se veut être une contribution devant permettre de mettre en relief les différentes difficultés, mais aussi les opportunités de ce nouveau marché mondial. Ainsi, des solutions sont proposées pour lever ces obstacles, en particulier ceux qui sont liés à mes trois domaines d’application : Conception, Fabrication et Gestion. Des difficultés n’ont pas manqué. Elles concernent particulièrement la disponibilité de données fiables et actuelles en langue française. Elles dépendent également du positionnement de l’état français à l’échelle mondiale, même si celui-ci dispose de bonnes ressources humaines, très peu restent dans le territoire. Enfin, ma principale difficulté aura été de travailler en terrain inconnu, sachant qu’à l’heure de cette écriture, très peu d’écrits mettant en exergue l’intelligence artificielle et l’architecture ont été publiés et mis à disposition. Un grand travail de recherche et de compilation a dû être fait, afin de choisir de manière empirique, les sujets qui me semblaient les plus pertinents et les plus en lien entre ces deux champs d’études.

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Remerciements

Je tiens à exprimer toute ma reconnaissance à ma directrice de mémoire, Madame Élodie Nourrigat. Je la remercie de m’avoir encadré, orienté, aidé et conseillé sur ce sujet qui me tient à cœur. J’adresse mes sincères remerciements à tous les professeurs, intervenants et toutes les personnes qui par leurs paroles, leurs références, leurs conseils et leurs critiques ont guidé mes réflexions et ont accepté de me rencontrer et de répondre à mes questions durant mes recherches.

Je remercie également Laurence Vaissière, pour la relecture du mémoire.

À tous ces intervenants, je présente mes remerciements et ma gratitude.

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Sommaire Avant-propos Pétition de l’UNSFA Glossaire

p.5 p.3 p.7 p.8

INTRODUCTION

p.10

I CHAPITRE I – CONCEVOIR En quoi la conception de l'architecture assistée par IA peut-elle être profitable ou néfaste au travail de l'architecte.

p.14

I.1 Les différents outils de l’architecte ? Passif, Génératif, Intuitif. I.1.a Technologie passive, le BIM, prémisse d’une nouvelle ère. I.1.b Intuitive Design, vers une révolution de notre manière de concevoir. I.1.c Le Generative Design en architecture, formidable avancée technique.

p.16 p.17 p.18

I.2 Les 4 étapes clés. GENERATE. EVALUATE. EVOLVE. EXPLORE I.2.a L’approche du site. I.2.b Design Decision Making.

p.22 p.24

I.3 Le Data Learning. La base de l’IA. I.3.a La « donnée » d’une IA pauvre. I.3.b Machine Learning pour l’Architecture & l’Urban Design.

p.28 p.31

II CHAPITRE II – FABRIQUER Est-il possible que l'intelligence artificielle anticipe et propose des solutions durables à la fabrication et à la construction de nos futures villes ?

p.35

II.1 Les nouveaux outils de projection et d’anticipation numérique. II.1.a Virtual Reality, l’architecte et cette techno-réalité. II.1.b Photogrammétrie et construction, le drone : outil du futur. II.1.c Comment cette adoption du drone va changer les villes.

p.39 p.42 p.46

II.2 La robotique avancée, tournant décisif pour nos méthodes de construction. II.2.a La machine pourrait-elle remplacer l’Homme ? II.2.b L’expérience : Humain et Robots, construire ensemble.

p.49 p.52 p.55

II.3 Vers une méthode de construction 100% autonome, utopie ou réalité ? II.3.a Impression 3D à l’échelle de la ville et du bâtiment.

p.58 p.60

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III CHAPITRE III – GERER À l'heure de la Smart City, ce modèle est-il viable ?

p.65

III.1 Data Learning et BigData, le pétrole du 21eme siècle. III.1.a Une décennie de stockage de donnés. III.1.b Intégrer les systèmes d’IA dans notre ville contemporaine. III.1.c Les problématiques du marché actuel.

p.67 p.71 p.74

III.2 Les outils de gestion à l’échelle de la ville et du bâtiment. III.2.a Ville connectée, quel sont les risques d’un BigBrother 3.0 III.2.b Mobilité ; la grande problématique actuelle. III.2.c IA et optimisation de la consommation énergétique. III.2.d L’intelligence artificielle au service du bâtiment responsable.

p.77 p.80 p.84 p.87

III.3 Vers une Smart-Home plus intuitive. III.3.a Aller plus loin que notre domotique actuelle.

p.90

CONCLUSION

p.92

BIBLIOGRAPHIE

p.96

LIGNE DU TEMPS

p.100

ANNEXES

p.101

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"Autodesk développe des algorithmes pour créer des quartiers entiers par intelligence artificielles en pillant les projets des architectes"

Le 12 février 2018, le Moniteur a publié une interview d'Andrew Anagnost, PDG d'Autodesk. Quel ne fut pas notre indignation de lire en réponse à la question du Moniteur sur « les évolutions qu'il anticipe à l'avenir » … AA. : Nous avons déjà lancé des solutions de « generative design » ou « conception générative » pour la construction. Il s'agit d'utiliser un algorithme qui va analyser des millions de design afin de ne présenter au final que les meilleurs par rapport à un contexte ou un cahier des charges précis. L'intelligence artificielle permet déjà de concevoir des quartiers entiers de cette façon. Notre objectif est ainsi d'aider nos clients à concevoir plus rapidement de meilleurs projets. L'autre axe d'innovation est la fluidification des flux entre la conception et le chantier, là aussi l'intelligence artificielle constitue une ressource. Elle permet de gagner en efficacité, afin de construire mieux, moins cher et avec moins d'impacts sur l'environnement. […] l'abonnement comprend un service de stockage de données dans le cloud ». Autodesk ne se contente pas de racketter les entreprises d'architecture (ainsi que tous les utilisateurs de REVIT), mais se flatte de piller nos propres projets pour créer via « des algorithmes, des quartiers entiers » et concevoir «de meilleurs projets » ! Au-delà du pillage de nos créations et du déni de la créativité humaine, qui est l'essence même de notre profession, quel avenir nous prépare-t-on ? Si les Hommes avaient eu un raisonnement aussi binaire et un développement des techniques si grégaire, croyons-nous que l'adaptabilité de l'homme à son environnement et le vivre ensemble selon des variables infinies auraient été viables depuis des siècles ? Ne laissons pas de simples marchands, fussent-ils si puissants financièrement, établir la construction des mondes. Et introduisons, si nécessaire, des dispositifs législatifs complémentaires interdisant le pillage des données relatives aux droits d'auteur et aux prestations intellectuelles. Si, comme nous, vous êtes convaincus que la créativité humaine doit primer sur l'intelligence artificielle, et que vous voulez que les architectes continuent à concevoir le cadre bâti, signez et faites signez cette pétition « Je m'oppose au pillage des données stockées dans le cloud, que ce soit celui d'AUTODESK ou d'un autre » « Autodesk-Pillage organisé des prestations intellectuelles des architectes », Pétition de l'UNSFA, 21 février 2018

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Glossaire •

IA : Science empirique qui résous des problèmes donnés à la façon humaine.

BIG DATA : il s'agit de récolter et traiter des quantités importantes de données. désigne la masse des données numériques, toutes sources confondues, générées par l’usage des technologies numériques.

MACHINE LEARNING et DEEP LEARNING : deux techniques largement répandues d'analyse de données. Voici leurs principales différences :

MACHINE LEARNING •

Réseaux de neurones mono couches

Besoin de milliers de données

Données quantitatives

DEEP LEARNING •

Réseaux de neurones multi couches

Besoin de millions de données

Tous types de données (images, sons, texte, etc.)

La singularité est le moment où l'IA sera capable de s'affranchir de l'homme en s'améliorant de façon autonome

La totalité des IA aujourd'hui sont spécialisées (créées pour effectuer une tâche unique et devenir excellentes) et non généralisées (capables d'appliquer leurs capacités pour n'importe quelle tâche)

RESEAUX DE NEURONES : systèmes informatiques inspirés par les cerveaux humains. Ils permettent de réaliser différentes tâches dans des disciplines comme la reconnaissance vocale ou la reconnaissance d’images.

ALGORITHME : Ensemble des règles ou instructions qui permettent de résoudre un problème au moyen d’une suite d’opérations exécutable par un ordinateur.

SOFT DATA : Les soft data, appelées « soft » en opposition aux « hard data » traditionnelles produites par les institutions statistiques, peuvent être définies de façon très générale comme des informations disponibles sur Internet, non contrôlées par une administration publique.

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HARD DATA : Les Hard Data sont définis comme des données sous forme de nombres ou de graphiques. Dans le monde du Big Data et de l'Internet des Objets (IoT), Hard Data décrit les types de données qui sont générées à partir d'appareils et d'applications, tels que téléphones, ordinateurs, capteurs, compteurs intelligents, systèmes de surveillance du trafic, enregistrements des détails des appels, enregistrements des transactions bancaires, etc.

INTERNET OF THINGS: l'Internet des objets (IdO) est une « infrastructure » mondiale pour la société de l'information, qui permet de disposer de services évolués en interconnectant des objets (physiques ou virtuels) grâce aux technologies de l'information et de la communication interopérables existantes ou en évolution.

NTIC :

Les Technologies de l’Information et de la Communication, désigne

l'ensemble des technologies permettant de traiter des informations numériques et de les transmettre. •

GANs : En intelligence artificielle, les réseaux adverses génératifs (en anglais Generative Adversarial Networks ou GANs) sont une classe d'algorithmes d'apprentissage non-supervisés. Ils permettent en partie de générer des images avec un fort degré de réalisme.

PAAS : Une Plateforme en tant que Service (PaaS) est un service Cloud Computing permettant aux entreprises d’externaliser l’hébergement des outils logiciels et matériels de développement d’applications.

MAAS : Le service MaaS (Mobility-as-a-Service) vise l’abandon des modes de transport personnels et celui des solutions de mobilité consommées en tant que service. Ceci est possible en combinant les services de transport des fournisseurs de transport publics/privés via une passerelle unifiée.

UAV : est l’acronyme des termes en anglais Unmanned Aerial Vehicle. Actuellement, dans le domaine du drone, UAV est le terme le plus fréquemment employé en anglais pour définir un objet volant utilisé pour des applications civiles dans un cadre amateur ou professionnel.

R&D : ensemble des activités entreprises « de façon systématique en vue d’accroître la somme des connaissances, y compris la connaissance de l’homme, de la culture et de la société, ainsi que l’utilisation de cette somme de connaissances pour de nouvelles applications ».

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INTRODUCTION Concevoir, Fabriquer, Gérer : En quoi l’intelligence artificielle induit-elle une disruption dans les métiers de l’architecture ?

Aujourd'hui nous pouvons facilement avancer que le métier d'architecte est sujet à de nombreuses évolutions. Ces évolutions, non sans conséquence, auront énormément d'impacts sur la manière dont les architectes et les urbanistes concevront les habitations et les villes de demain.

Le but de ce mémoire sera donc de mettre en exergue les différentes intelligences artificielles et en particulier lorsque celles-ci sont utilisées dans les métiers de l'architecture, afin de questionner l'avenir de nos métiers, en distinguant les domaines de la conception, de la fabrication et de la gestion architecturale. Pour y répondre, j'ai choisi de travailler sur ces trois axes qui m'ont semblés pertinents dans l'amorçage de ce sujet, car celui-ci étant relativement nouveau et encore peu traité il sera primordial d’analyser les deux facettes (positive et négative) de cette technologie. Tout ceci pour répondre à une problématique simple, sommes-nous à l’aube de changements majeurs dans notre façon de concevoir et produire de l’architecture ? Pour ce faire je m’appuierai sur les travaux déjà réalisés en France, avec le rapport de Cédric Villani et les recherches des philosophes Éric Sadin et Pascal Chabot.

En France et dans le monde, l'intelligence artificielle connaît un essor sans précédent, bien que celle-ci soit un sujet de recherche fondamentale relativement ancien, les performances atteintes au cours de ces dernières années permettent l’éclosion d’un marché reposant sur une multitude d’applications arrivant à une certaine maturité. Le marché de l’intelligence artificielle sort de sa niche pour devenir l’un des piliers de l’économie pour les décennies à venir.1 2

1 2

Rapport de Cédric Villani : donner un sens à l'intelligence artificielle (IA) - 2018 Grand débat | Digital et intelligence artificielle – UNTEC - 2019

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Le marché est estimé à 11 milliards d'euros en 2024 alors qu'il pesait 200 millions en 2015

950 Start-up dans le monde sont actives dans le domaine de l'IA dont plus de 270 en France

52% des entreprises françaises sont sensibles à l'IA avec en moyenne un budget annuel croissant estimé à 576 000€ (étude TCS)

La France compte parmi les 4 premiers pays au monde pour la production d'articles de recherche sur l'IA

Il

existe

des différences

de

perception de

l'IA parmi

les

experts

du

domaine (certains en faveur d'une plus grande régulation de l'IA avec une mise en garde de ses dérives et d'autres qui voient davantage le côté positif de l'IA). •

En France, l'IA est principalement encouragée dans les secteurs de la santé, du transport et des mobilités, de l'écologie, de la défense et de la sécurité. 3

Utilisant de plus en plus les données accumulées grâce au deep learning, nos machines sont en passe de nous remplacer. À l'heure où l'impression 3D, la photogrammétrie avancée et la démocratisation des drones, s’invitent de plus en plus dans notre société, est-il possible alors, que les métiers de l'architecture soient encore liés au pouvoir du faire et de l'artistique ?

Il est fort probable que les futures années proposeront des avancées technologiques qui requestionneront fondamentalement notre métier, en bien ou en mal. Car chaque période s'interpénètre et emprunte aux précédentes. C’est pourquoi, quand on regarde l’histoire, il est essentiel de distinguer deux niveaux de création : les inventions et les innovations. Les inventions découlent de la recherche universitaire, tandis que les innovations sont induites par les inventions. En architecture, innovations veut dire réellement : façonner une pratique continuellement en mouvement. Une pratique qui a joué entre les époques. À partir de là, notre chronologie vise à démontrer les évolutions profondément imbriquées des domaines de l'informatique et de l'architecture avant d'introduire l'âge de l'architecture artificielle, une sorte de point culminant. C’est pourquoi la reconstruction du contexte et des faits saillants de l’histoire récente de notre discipline est une condition préalable à notre travail.

3

https://www.imbrikation.fr/le-marche-de-l-ia-en-france

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Une question se pose alors, comment maîtriser cette technologie et cette intelligence grandissante afin que celle-ci ne brise pas la relation fragile, du dominant et du dominé ?

Nous verrons dans un premier temps qu'il est nécessaire d'établir l'état existant des recherches en France et dans le monde afin de proposer un inventaire complet des techniques actuelles et à venir. Pour ce faire je m'appuierai sur différentes sources avec notamment des travaux écrits d’architecte, chercheurs, sociologues et philosophes, rapports4 … différents sites internet (Dezeen5) et en particulier les avancées et recherches venant des universités du MIT et de Zurich.6 Chronologie des Inventions, Innovations et Théories de l’IA

Fig 1 Source : Stanislas Chaillou - AI + Architecture – p18-19

La pratique de l’architecture, avec ses méthodes, ses traditions et son savoir-faire sont aujourd'hui au centre de débats passionnés. Interpellée par la nouvelle génération arrivant avec de nouvelles pratiques, et interrogée de l'intérieur, alors que les praticiens doutent de son état actuel, l'architecture est en train de vivre une véritable révolution. Parmi les facteurs qui auront un impact durable sur notre discipline, la technologie est certainement l'un des principaux vecteurs en jeu. La mise en place de solutions technologiques à chaque étape de la chaîne de production a déjà considérablement transformé l'architecture. La conception des bâtiments a en effet déjà commencé à se transformer : d'abord en s'appuyant sur de nouvelles techniques de construction, puis en développant

4

AI Index 2018 Annual Report par Zoe Bauer

5

https://www.dezeen.com/

6

https://arch.ethz.ch/en

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des logiciels adéquats, et enfin aujourd'hui en introduisant des capacités de calcul surpuissants.

Plutôt qu'une continuité comme le démontre Stanislas Chaillou dans sa thèse AI + Architecture publié en Juin 2019, nous tenterons ici de démontrer si cette technologie conduit l'Architecture à une disruption au travers de 3 grandes étapes successives. La conception informatique, la fabrication robotisée et enfin la gestion par l'intelligence artificielle, sont pour nous les 3 étapes complexes d'une transition au rythme lent. Et pour rejoindre M. Chaillou, au-delà du contexte historique, nous pensons que cette évolution est le fil conducteur d'une amélioration radicale de la conception architecturale. Ce travail aura donc pour but d'établir une base de données liée à l’IA et à l’architecture, afin de proposer de futures évolutions et bases de développement, concernant cette intelligence qui questionnera, tôt ou tard le fondement même du métier d'architecte.

Fig 2 Source : The Answer Company / Auteur

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I

CHAPITRE I – CONCEVOIR concĭpĭo \kɔ̃.sə.vwaʁ\ (Figuré) Créer, inventer ou imaginer, par une opération de l'esprit.

Nous parlerons ici de l’acte de concevoir, non pas dans sa forme physique, mais plus dans sa forme mentale et intellectuelle. A l’image de la Conception Assistée par Ordinateur, nous proposerons une Conception Assisté par IA.

Depuis maintenant 400 ans

l’architecture est régie par le dessin, qui sera la base de toute réalisation architecturale. Le sens du terme dessin évolue avec l'histoire des arts visuels. Le terme italien signifiait à la fois la pratique, et le projet ou intention. Ce dessin est à la base du métier d’architecte, même si son enseignement a moins d’importance avec l’utilisation de l’outil informatique. C’est en dessinant, d’abord sous forme d’esquisse et de croquis, puis par le dessin plus élaboré, que nous trouvons et précisons notre projet. Cette étape préliminaire de dessin à main levée est à peu près universellement pratiquée. « Les architectes ont-ils vraiment besoin aujourd'hui pour concevoir des bâtiments de quatre étages vaguement carrés que l'on peut trouver partout ? Probablement pas. Un ordinateur bien programmé pourrait faire mieux - et plus vite », Phillipe Morel dans un article de Le Moniteur

Venant de différentes directions, une réflexion approfondie sur le potentiel de la conception informatique a commencé dès le milieu des années 50, au sein d'une discipline adjacente : l'ingénierie. En 1959, le professeur Patrick Hanratty a publié PRONTO7, le premier prototype de logiciel de DAO (dessin assisté par ordinateur), conçu pour la conception de pièces industrielles. La possibilité offerte par ce logiciel, associée à l’évolution rapide de la puissance de calcul des ordinateurs, a déclenché une rupture dans le domaine de l’architecture.

Peu de temps après Christopher Alexander, architecte puis professeur à l'Université Berkeley, a entamé la discussion en exposant les principes clés de la conception 7

Patrick Hanratty and MCS - The Engineering Design Revolution

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informatique. (Voir page 47-48). Dans ses « Notes sur la synthèse de la forme » (1964)8 et plus tard, dans « un langage de motifs” (1968) 9 , Alexander a théorisé pourquoi et comment les ordinateurs devraient être utilisés pour aborder la question de la conception de forme.

Sa compréhension précoce du potentiel des logiciels de Design contrastait profondément avec l’avancée du matériel de l'époque. Les principes fondateurs qu'il a définis dans ses livres sont encore aujourd'hui la pierre angulaire de la programmation logicielle : des concepts tels que les récurrences, la programmation orientée d’objet ainsi que leur application au design ont représenté un progrès radical dans le domaine. À la suite de cet élan, une génération entière d’informaticiens et d’architectes créera un nouveau champ de recherche : la conception informatique. La technologie présentée dans ce mémoire est la suite logique de cette époque, car elle questionne fondamentalement nos techniques de travail et notre manière de concevoir l’architecture.

Fig 3 Source : PRONTO

« L'intégration des systèmes d'IA dans la conception architecturale permettra aux architectes d'utiliser l'ordinateur comme un véritable partenaire pour résoudre des problèmes de conception complexes plutôt que comme un panel de dessin 3D super puissant. »

Michael Bergin

8

C. Alexander, Notes on the Synthesis of Form, Massachusetts, Harvard University Press – 1964

9

C. Alexander, A Pattern Language, OUP USA - 1968

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Les différents outils de l’architecte ? Passif, Génératif, Intuitif. I.1.a

Technologie passive, le BIM, prémisse d’une nouvelle ère.

Je ne m’attarderai pas à développer le BIM, celui-ci étant bien implanté en France, il a déjà fait l’objet de nombreuses thèses et mémoires. Cependant il est intéressant de noter qu’il reste relativement passif dans son utilisation, passif dans le sens où il a besoin de son utilisateur humain pour fonctionner, même si celui-ci facilite la transition et la communication entre de nombreux métiers, à l’image de l’intelligence artificielle, il ne propose que très peu de solutions pendant la conception même du bâtiment.

Cette révolution plus profonde, fondée sur la paramétrisation et amorcée au début des années 2000, est toujours en cours : la modélisation des informations du bâtiment (Building Information Modeling). Sous l'impulsion de Philip Bernstein, alors vice-président d'Autodesk, la naissance et le perfectionnement du BIM ont amené la rationalité et la faisabilité à un niveau inédit dans le secteur de la construction. L'idée sous-jacente du BIM est que chaque élément d'un modèle 3D de construction est fonction de paramètres (propriétés) qui contrôlent la forme de chaque objet et les documentent.

D'Autodesk Revit, le principal logiciel BIM actuel, au SketchPad (ci-dessous) de Sutherland en 1962, nous ne voyons qu'un seul fil conducteur : l'utilisation explicite des paramètres en tant que moteur de la conception.

Fig 4 Source SketchPad 1962

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I.1.b

Intuitive Design, vers une révolution de notre manière de concevoir.

Les nouvelles avancées technologiques ont permis d'explorer toutes les phases du processus de conception à l'intérieur d’une même plateforme. Si nous prenons l’exemple de Revit, celui-ci dispose de nouveaux outils de conception et de composants adaptatifs et intuitifs qui permettent un nouveau niveau de relations entre la conception conceptuelle et la conception constructive. De nouvelles applications ont été créées qui fonctionnent dans Revit avec une programmation visuelle permettant l'introduction du script dans l'environnement du logiciel ainsi que l'amélioration de ses capacités de conception paramétrique pour la conception générative.

Fig 5 Source : USAGE. Ux and Digital Experience

Toutes les phases de conception sont abordées en BIM à l'aide des outils comme Revit, de la stratégie urbaine aux détails constructifs. Tous les paramètres sont assignés au modèle pour répondre aux intentions programmatiques et architecturales en évaluant et en donnant une réaction à l'architecte, afin d’en améliorer encore le processus de conception. Ces paramètres de ‘’reporting’’, qui sont nettement supérieurs aux paramètres de contraintes, permettent essentiellement d'être plus intuitif dans ce sens.

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I.1.c

Le Generative Design en architecture, formidable avancée technique.

Dans le monde des paramètres, il est possible d’aborder à la fois des tâches répétitives et des formes complexes, lorsqu’elles sont rationalisées en simples ensembles de règles. Les règles peuvent être encodées dans le programme pour automatiser le processus fastidieux de leur mise en œuvre manuelle. Ce paradigme a conduit l'avènement du paramétrisme.

En quelques mots, si une tâche peut être expliquée par un ensemble de commandes données à l'ordinateur, la tâche du concepteur sera de les communiquer au logiciel tout en isolant les paramètres clés ayant une incidence sur le résultat. Une fois codé, l’architecte serait en mesure de faire varier les paramètres et de générer différents scénarios possibles : différentes formes possibles, donnant plusieurs résultats de conception à la fois.

Au début des années 1960, l'avènement de l'architecture paramétrisée a été annoncé par le professeur Luigi Moretti. Son projet “ Stadium N”10, Bien que théorique au départ, est la première expression claire du paramétrisme. En définissant 19 paramètres de conduite parmi lesquels le champ de vision des spectateurs et l'exposition au soleil des tribunes, Moretti a directement tiré la forme du stade de la variation de ces paramètres.

Fig 6 Source : A model of stadium N – by Luigi Moretti – Exhibited at the 1960 Parametric Architecture

PARAMETRIC ARCHITECTURE IN IT’S SECOND PHASE OF EVOLUTION. Journal of Building Performance - 2018 10

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La forme qui en résulte, bien que surprenante et assez organique, offre le premier exemple de cette nouvelle esthétique paramétrique : organique dans l'aspect, tout en étant strictement rationnelle comme processus de conception. Enfin, les solutions génératives posent la question de la place de la créativité. Si l’intuition première laisse imaginer une uniformisation des productions, d’autres voient au contraire une manière de sortir des méthodes traditionnelles. Selon le collectif d’artistes Obvious 11, l’IA est “un nouvel outil qui permet d’amplifier le potentiel créatif des humains”. Pour le cabinet Baker Baynes, le design génératif amorce la transition d’un concepteur/créateur à un concepteur/curateur12. Aujourd’hui le générative design est le plus utilisé par les grandes universités et sociétés de R&D numériques comme Autodesk, MIT, Google, ETH Zurich, Nvida ou Airbus. Cette nouvelle méthode de travail induit des changements majeurs dans notre manière de concevoir, comme l’explique Maurice Conti dans sa conférence pour TEDxPortland13 en 2016 que nous allons basculer vers un monde dans lequel les choses ne seront plus fabriquées (fabricated) mais cultivées (farmed), dans lequel les choses ne seront plus construites (constructed) mais qu' on les fera pousser (grown), nous passerons de l’isolation à une connexion, nous abandonnerons l’extraction au bénéfice de l’agrégation.

Sur un plan philosophique. L‘humanité a toujours cherché à aller au-delà de ses capacités «to expand our reach» comme le répète Ray Kurzweit.14 On pourrait argumenter à l'heure où l'on reproche au mouvement moderne d'avoir donné naissance à des « cages à lapin» 11

http://obvious-art.com – 2018

12

https://bakerbaynes.com/architectural-technology-trends-technology-lead-advances-architecture

13

https://www.ted.com/talks/maurice_conti_the_incredible_inventions_of_intuitive_ai

14

Directeur département Ingénierie chez Google – Théoricien / Transhumanisme / Technologue

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ou à des « barres d'immeubles » déshumanisées, mais duquel sont issues toutes les recherches sur la méthodologie du design et jusqu'à un certain point, les bases de ce qui a donné la conception générative, que l'on retrouve une forme de spiritualité dans cette envie de dépasser les capacités humaines et à tendre vers quelque chose qui nous dépasse. Les mathématiques ont en cela quelque chose de spirituel, qui est inhérent à la pratique de l'architecture, depuis les Grecs jusqu’à aujourd'hui.

15

Page précédente : Elbo Chair- First Chair Generated par IA avec Stark Design - 2018

16

Ci-dessus : Exemples projet Dreamcatcher – Châssis automobile et Châssis de drones - 2018

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17

Cloison de séparation d’avion – Développée avec Autodesk et Airbus

18

Prototype Spatial par DreamCatcher - NASA

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Les 4 étapes clés. GENERATE. EVALUATE. EVOLVE. EXPLORE

L’approche du site.

I.2.a

La collecte d'informations sur le projet et ses contraintes est souvent la première étape d'un processus de conception architecturale, qui consiste traditionnellement à se rendre sur un site, pour mesurer, dessiner et prendre des photos. Dans un monde en ligne et connecté, il y a déjà une abondance de données que l'architecte peut exploiter, qui sont déjà liées, synchronisées et référencées.

Cela permet au concepteur/architecte de simuler le site environnant sans jamais avoir à s'y être engager physiquement. (source IOT sensor prediction for 2022 19 ). Ce tissu d'informations a été désigné sous le nom d'"internet des objets". Les outils BIM actuellement disponibles sur le marché exploitent déjà ces bases de données, permettant à un architecte d'évaluer les conditions du site avec une précision minutieuse. (Voir Photogrammétrie p.47)

Des logiciels tels que EcodesignerStar ou des plugins de Sketchup permettent déjà aux architectes de calculer immédiatement l'analyse du site sans avoir à quitter leurs bureaux. Ce phénomène récent permet de nombreuses pratiques et d'entreprendre de grands projets à l'étranger qui auraient pu être irréalisables sur le plan logistique il y a à peine dix ans. À l'échelle mondiale, nous accumulons en temps réel des données de plus en plus nombreuses

sur

le

comportement et les interactions

des

utilisateurs.

(Voir

L'internet

des

objets, IoT-A)

Fig 7 Source : IHS Statista 2019

19

https://www.i-scoop.eu/global-sensor-market-forecast-2022

ENSAM – Mémoire Master – Loïck Maire - 2019 - 22 -


Les données personnelles "douces" pourraient, dans le sens le plus optimiste du terme, contribuer à la conception "socialement ciblée" qui a été largement diffusée au cours des dernières années, par sa capacité à intégrer les besoins propres des utilisateurs. Cette approche, ne serait-ce que dans les premières étapes du processus de conception, aurait un impact sur les idéaux du XXe siècle et sur la normalisation du design. Les informations rassemblées par nos appareils et stockées dans le cloud représentent bien plus que les conditions matérielles du monde qui nous entoure. À l'échelle mondiale, nous accumulons et enregistrons sans cesse les comportements humains et des interactions en temps réel. Les données personnelles « informatisées » pourraient, dans le sens le plus optimiste, contribuer à une « conception sociétale » qui a été largement diffusée ces dernières années en raison de sa capacité à intégrer les besoins des utilisateurs.

L'Internet des objets pourrait-il créer une architecture socialement adaptable et réactive ?

On pourrait supposer que, par exemple, lorsque la population d'enfants dans une ville dépasse un seuil maximal par rapport au nombre d'écoles, un avis pourrait être envoyé au conseil de district indiquant qu'il est temps de commander une nouvelle école. Par conséquent, Amnesty International pourrait rédiger un mandat pour les architectes et leur confier une mission en générant de nouveaux projets là où ils sont le plus nécessaires.

Fig 8 Source : auteur

ENSAM – Mémoire Master – Loïck Maire - 2019 - 23 -


I.2.b

Design Decision Making

Plutôt qu'un programme, cette technologie est mieux comprise comme un système “d'auto-conception interconnecté”20 qui peut se mettre à jour de manière autonome. Il est possible alors d'exploiter une énorme quantité de puissance, de calcul et d'expérience en travaillant avec ces outils, même en tant qu'individu - comme Pete Baxter, vice-président de la fabrication numérique chez Autodesk, a déclaré au AUIN2018

21

"Aujourd'hui, un concepteur seul, un concepteur diplômé, peut avoir accès à la même puissance de calcul que ces grandes agences multinationales".

L'architecte doit saisir les paramètres du projet, qui sera en fait un " cahier des charges " pré-édité, alors le système informatique proposera une gamme de solutions qui répondent à tous ces critères. Cette innovation a le potentiel de révolutionner la façon dont l'architecture est imaginée mais aussi exprimée fondamentalement pour les designers qui choisissent d'adopter ces nouvelles méthodes de design.

Fig 9Source : Autodesk MaRS Office

20

The International Journal of Advanced Manufacturing Technology

Hamida, M.A., De Leon-Morales, J. & Messali, A. Int J Adv Manuf Technol - 2019. 21

AUIN2018: Future of Design and Manufacturing | Pete Baxter, Autodesk – Youtube - 2018

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Alors que leur travail s'adressait initialement aux industries de l'automobile et du design industriel, Dreamcatcher®

22

commence maintenant à s'orienter vers des projets

d'architecture. Il a été utilisé récemment pour développer le design génératif de The Living23 pour le nouveau bureau d'Autodesk à Toronto et pour le pont en acier de MX3D’s à Amsterdam24.

Fig 10Source: Autodesk MaRS Office

Le concept de base est que les modèles CAO du site environnant et d'autres bases de données, telles que les données clients et des informations environnementales, sont rapidement introduites dans le processus. Quelques instants plus tard, le système produit une série de solutions de conception 3D optimisées prêtes à être rendues. Ces processus s'appuient efficacement sur le “cloud computing” pour créer une multitude d'options basées sur des paramètres algorithmiques d'auto-apprentissage25. Ces treillis organiques, sont souvent le résultat esthétique rendu par la machine, car le logiciel imite les règles structurelles que l'on trouve dans la nature.

22

https://autodeskresearch.com/projects/dreamcatcher - 2017

23

The Living - Autodesk @ MaRS - 2018

24

https://mx3d.com/projects/bridge - 2015

25

Autodesk Generative Design – Youtube – 0:18 min

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Le logiciel Dreamcatcher a été conçu pour optimiser la conception paramétrique et s'intégrer aux logiciels existants conçus par Autodesk® et les étendre, tels que Revit® et Dynamo®. Il est intéressant de noter que Dreamcatcher peut utiliser un large éventail de données de conception de plus en plus nombreuses, comme les formules, les exigences techniques, la géométrie et les informations données par les capteurs - et que l'équipe de recherche expérimente maintenant la capacité de Dreamcatcher à reconnaître les croquis et le texte comme données de saisie26.

Cette vision du futur architecte a été imaginée par l'ingénieur et inventeur, Douglas Engelbart lors de ses recherches sur les systèmes informatiques émergents à Stanford en 196227. A l'aube de l'informatique personnelle, il imaginait l'esprit créatif se chevauchant symbiotiquement avec la machine pour co-créer des « designs ». Selon lui, ce double emploi aurait le potentiel de générer de nouvelles réalités qui ne pourraient pas être réalisées par l'une ou l'autre entité opérant seule. Aujourd'hui, les systèmes d'autoapprentissage, aussi connus sous le nom d'intelligence artificielle modifient la façon dont l'architecture est pratiquée, comme ils le font dans notre vie quotidienne, que nous le réalisions ou non.

Fig 11 Source : Autodesk MaRS Office

26

https://www.autodesk.com/solutions/future-of-product-design-and-manufacturing

27

Augmenting Human Intellect: A Conceptual Framework - Douglas C. Engelbart - 1962

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Michael Bergin, chercheur principal chez Autodesk, suggère alors d'imaginer l'avenir des outils de conception comme "des systèmes qui acceptent tout type d'entrants qu'un concepteur peut produire, pour permettre une meilleure collaboration avec l'ordinateur afin de cibler de façon interactive et intuitive, un design plus performant qui répond à tous les besoins variés de l'équipe de conception"28.

Cela signifierait que les futurs architectes se consacreraient moins au dessin qu'à la spécification des exigences du problème, ce qui les rendrait plus en phase avec leurs homologues « machines » dans le projet. Bergin suggère également que les architectes qui adopteront des outils d'IA auront la capacité de " synthétiser un large éventail d'exigences de la part des parties prenantes de la conception, y compris les clients et les ingénieurs, et de produire des documents de conception comme résultat conformément à la vision d'Engelbart d'augmenter les compétences des designers/architectes en utilisant de l’IA.

L'intelligence artificielle est également utilisée directement dans des logiciels tels que le DepthmapX® de SpaceSyntax29, conçu au Bartlett UCL Faculty de Londres, pour analyser le réseau d'une ville dans le but de comprendre et d'utiliser les interactions sociales dans le processus de conception. Un autre outil, Unity 3D®, est construit à partir d'un logiciel développé pour les moteurs de jeu vidéo afin de permettre aux concepteurs d'analyser leurs cartes de level design, tels que les distances les plus courtes jusqu'aux sorties de secours, simulations acoustiques et visualisation VR

(voir page 29).

Ces informations

permettraient alors à l'architecte de réaménager ou de générer des espaces en plan, voire d'organiser l'ensemble des futurs bâtiments. Parmi les exemples d'architectes qui adoptent ces méthodes, nous pouvons citer Zaha Hadid avec le projet de la Tour de Pékin (conçu avant sa mort), MAD Architects en Chine30 et Foster + Partners.

28

Hannah Wood - The Architecture of Artificial Intelligence - 2017

29

Space Syntax: Past, present and future. – UrbansNous – Youtube - 2018

30

https://blogs.unity3d.com/2019/09/25/connecting-design-and-construction-with-unity-reflect - 2019

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Le Data Learning. La base de l’IA. Le « DATA » d’une IA pauvre.

I.3.a

« Le Big Data et l’IA serons sans nul doutes les prochaines disruptions numériques » - Le Big Data Magazine

Le Big Data et l’intelligence artificielle sont deux technologies inextricablement liées, au point que l’on peut parler d’une Big Data Intelligence. L’IA est devenue omniprésente dans les entreprises et toutes les industries au sein desquelles la prise de décision est transformée par les machines intelligentes 31 . Le besoin en matière de décisions plus intelligentes et de gestion du Big Data sont les critères qui dirigent cette tendance. La convergence entre le Big Data et l’IA semble inévitable à l’heure où l’automatisation des prises de décisions intelligentes se présente comme la prochaine évolution du Big Data. Une tendance en hausse, des processus plus intelligents et une meilleure productivité sont les bénéfices les plus probables de cette convergence. Cependant l’évolution de la gestion des données ne s’est pas déroulée sans problèmes. Beaucoup de données sont aujourd’hui stockées sur ordinateur, mettant en relief certains problèmes de stockage et de consommation d’énergie, or il reste encore de nombreuses informations sur papier, malgré la possibilité de numériser des informations et de les stocker sur des disques ou dans des bases de données. Une grande numérisation a d’ailleurs débuté à Venise par le biais du projet Venise Time Machine32 : il s’agit d’un projet de recherche européen "Europe Time Machine" qui a l'ambition de numériser et dématérialiser les archives de plusieurs grandes villes, comme Anvers, Paris ou Budapest, qui auront suivi l'exemple de Venise. Une forme de machine à remonter le temps grâce à laquelle les citoyens pourront naviguer dans l'espace et le temps au cœur du patrimoine de l'Europe. Des donnés de plus qui viendront alimenter le Big Data…

31

https://www.lebigdata.fr/intelligence-artificielle-et-big-data - 2018

32

Numériser nos archives - Europe Time Machine - De Venise à l'Europe – ARTE - 2019

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Il suffit de rentrer dans un hôpital, une administration, un cabinet médical ou n’importe quel commerce pour se rendre compte que de nombreuses informations au sujet des clients, des vendeurs, ou encore des produits sont encore stockées sur papier, même si beaucoup d’efforts sont réalisés par les collectivités et gouvernement, afin de numériser toutes traces écrites. A l’image du projet Europe Time Machine.

Le seul fait de collecter ou d’avoir accès à de larges ensembles de données comme cellesci, n’est pas suffisant pour produire un résultat. La plupart d’entre nous ne sommes pas suffisamment préparés pour l’extraction de connaissances et la demande de prises de décisions rapides qu’exige notre société moderne. Aujourd’hui, l’usage du machine Learning, des systèmes experts et des technologies analytiques en combinaison avec le Big Data se présente comme l’évolution naturelle de ces deux disciplines. La convergence est inéluctable. Éric Sadin développe dans son livre33 cette corrélation du Big Data. Ce processus est décrit par l’auteur comme « une sorte de “fission nucléaire” continuellement expansive et partout disséminée, qui trouve son origine dans le mouvement historique de numérisation progressive du monde, dont nous saisissons aujourd’hui et avec force qu’il instaure un nouveau type d’intelligibilité du réel constitué au prisme des données » (p. 25).

Ce dernier s’attelle dès lors à appliquer le précepte de Michel Foucault, repris en exergue, c’est-à-dire à « remettre en question [...] la forme de rationalité en présence »34 dans le recours aux données pour rendre intelligible le réel, et à adopter une perspective critique sur la « datafication », soit la mise en corrélation des comportements en ligne. Pour ce faire, Éric Sadin chemine dans le dédale des multiples implications des Big data, en commençant par une immersion dans le futur proche d’un individu lambda presque totalement data-guidé.

33

La Vie algorithmique. Critique de la raison numérique - 2015

34

Michel Foucault, « “Omnes et singulatim”: Vers une critique de la raison politique », Dits et Écrit (...)

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Les terrains d’investigation de l’auteur sont nombreux mais nous pourrions distinguer deux domaines principaux d’application des Big Data : tout d’abord ses usages commerciaux et logistiques – que ce soit la pratique des recommandations en marketing, la gestion logistique de l’offre guidée par les données récoltées sur la demande dans l’industrie, les smart cities et les maisons connectées qui adaptent leurs services aux besoins des usagers révélés par les corrélations algorithmiques, les outils technologiques de gestion de sa santé personnelle, etc. – et ensuite ses utilisations politiques, à travers la surveillance massive des individus à des fins de sécurité intérieure.

Chaque individu sera donc connecté et relégué au statut de producteur de données – collectées et virtuellement mises en relation – et rien ne semble échapper à l’analyse omnisciente et granulaire des Big data qui modifie l’expérience humaine. « Le monde s’institue comme une sorte de MÉTA-DONNÉE unique et universelle » (p. 59) rendue intelligible en temps réel par les Big data.

Il conclut par « Soumettre la vie algorithmique contemporaine à une critique en acte de la raison numérique qui l’ordonne relève d’un combat politique, éthique et civilisationnel majeur de notre temps » (p. 261). Tel est l’exercice auquel nous convie Éric Sadin au terme de son travail sur l’utilisation au quotidien, par les données et de leur exploitation à des fins tant commerciales que sécuritaires.

Éric Sadin nous fait prendre conscience de l'émergence d'une «data-driven society» où les statistiques établies à partir du siphonage de nos données gouvernent l'action des pouvoirs publics. Et où les foules sont guidées par des technologies qui passent insensiblement de l'incitatif à l'impératif et du prescriptif au coercitif. 35

35

L'intelligence artificielle, l'opium du XXIe siècle – La Figaro - 2018

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I.3.b

Machine Learning pour l’Architecture & l’Urban Design.

Depuis toujours, les humains s'inquiètent de voir les machines prendre leur travail et dans certains cas, cette peur est devenue réalité. Toutefois, dans les domaines de la conception, les créations tirent parti des avantages de l'apprentissage automatique en architecture et trouvent plus de temps pour la créativité tandis que les ordinateurs gèrent les tâches basées sur les données. Mais de réels progrès impliqueront de remettre en question les définitions traditionnelles du design et des concepteurs, de l’architecture à la fabrication en passant par l’ingénierie.

Les technologies automatisées ne sont pas nouvelles. Elles évoluent simplement, de la même manière que l'esprit humain évolue, dans la façon dont il traite l'information. En fait, la conception assistée par ordinateur (CAO) existe depuis plus d'un demi-siècle. Comme le dit Jim Stoddart du studio d’architecture The Living36 , avec les technologies de pointe, « nous avons des versions plus rapides du stylo et du papier ».

Avec le développement de la technologie de l'information, les idées de programmation et de calcul en masse ont été introduites dans le domaine de la conception, ce qui a entraîné la croissance de la conception assistée par ordinateur. Avec l'idée de “concevoir par la donnée”, nous avons commencé à manipuler les données directement et à les interpréter à travers des travaux de conception. L'apprentissage automatique en tant qu'outil d'aide à la décision a été largement utilisé dans de nombreux domaines. Il peut être utilisé pour analyser de grandes quantités de données et prévoir les changements futurs. Generative Adversarial Network (GAN)37 est un cadre modèle en apprentissage automatique, afin de présenter cette méthode, nous pouvons citer le travail de thèse de Stanislas Chaillou (The Advent of Architectural AI – Towards Data Science)38 où une combinaison de résultats prometteurs à été réalisée à l’échelle du bâtiment et de l’aménagement intérieur. En outre la machine est déjà en capacité de proposer une infinité de propositions d’aménagements intelligents, prenant en compte une multitude de données.

36

The Living - Autodesk @ MaRS - 2018

37

GANs in Action: Deep learning with Generative Adversarial Networks - Jakub Langr - 2019

38

AI + Architecture - Thesis - Harvard GSD - Stanislas Chaillou - 2019

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Traduit de l’anglais : “ Si la génération d'appartements standard peut être réalisée en utilisant notre technique, repousser les limites de nos modèles est l'étape suivante. En fait, le GAN’S peut offrir une souplesse remarquable afin de résoudre des problèmes apparemment très contraignants. Dans le cas de la disposition des plans d'étage, comme l'empreinte change de dimension et de forme, le cloisonnement et l'ameublement de l'espace à la main peuvent être un processus difficile. Nos modèles s'avèrent ici très "intelligents" dans leur capacité à s'adapter aux contraintes changeantes. “ “ Notre capacité à contrôler la position des portes d'entrée et des fenêtres des unités, associée à la flexibilité de nos modèles nous permet d'aborder l'aménagement de l'espace à plus grande échelle, au-delà de la logique d'une seule unité. En ajoutant des algorithmes simples à notre travail sur la conception de bâtiments entiers contenant plusieurs unités de production d'appartements … “39

Cet algorithme est conçu pour apprendre et générer des données de sortie présentant des caractéristiques similaires ou identiques. Pix2pixHD est une version modifiée des GAN’s qui étudie les données d'image et génère de nouvelles images en fonction cette l'entrée.40 Stanislas Chaillou a donc appliqué pix2pixHD, à la reconnaissance et à la création de dessins architecturaux, en marquant des pièces de différentes couleurs, puis en générant des plans d’appartements via deux réseaux de neurones. Ensuite, afin de comprendre le fonctionnement de ces réseaux, l’auteur a analysé leur cadre de travail et expliqué les trois principes de fonctionnement des réseaux : couche de convolution, couche réseau résiduelle et couche de déconvolution. Enfin, afin de visualiser les réseaux dans les dessins d’architecture, l’auteur a dérivé les données de différentes couches et de différentes époques, et a visualisé les résultats sous forme d’images en niveaux de gris. (Voir figure page suivante)

39 40

AI + Architecture - Thesis - Harvard GSD - Stanislas Chaillou – 2019 – Page 50-51 High-Resolution Image Synthesis and Semantic Manipulation with Conditional GANs – Youtube - 2017

ENSAM – Mémoire Master – Loïck Maire - 2019 - 32 -


Fig 12 Source : AI + Architecture - Stanislas Chaillou

Il a été constaté que les caractéristiques des dessins du plan architectural ont été progressivement apprises et stockées en tant que paramètres dans l’IA. À mesure que les réseaux s’approfondissent et que la formation augmente, les caractéristiques du graphique deviennent plus concises et plus claires, cette IA évolue, apprend et analyse toutes formes de plans, afin de proposer des solutions toujours plus personnalisées.

By already knowing everything about us, our hobbies, likes, dislikes, activities, friends, our yearly income, etc., AI software can calculate population growth, prioritize projects, categorize streets according to usage and so on, and thus predict a virtual future and automatically draft urban plans that best represent and suit everyone. Rron Beqiri sur Future Architecture Platform.41

Le City Science Group du MIT étudie notamment l’interaction des caractéristiques sociales, économiques et physiques des zones urbaines afin de comprendre comment les habitants utilisent et expérimentent les villes dans le but d’améliorer les pratiques de conception urbaine afin de faciliter une communication entre les différents acteurs. CityScope42 développe une multitude de plates-formes tangibles et numériques dédiées à la résolution des problèmes d'aménagement du territoire et urbaniste. Les outils mis en place quantifient l'impact des interventions perturbatrices dans les villes aux applications de collaboration communicables.43

41

http://futurearchitectureplatform.org/news/28/ai-architecture-intelligence

42

CityScope: A Data-Driven Interactive Simulation Tool for Urban Design. Use Case Volpe - 2018

43

https://www.media.mit.edu/projects/cityscope/overview/

ENSAM – Mémoire Master – Loïck Maire - 2019 - 33 -


Il développe et déploie ces outils dans le monde entier et maintient des référentiels open source pour la majorité des déploiements. Pour résumer, "CityScope" est un concept de calcul interactif partagé pour la planification urbaine.

Fig 13Source : MIT - CityScope

ENSAM – Mémoire Master – Loïck Maire - 2019 - 34 -


II

CHAPITRE II – FABRIQUER fabbricare \fab.bri.ˈka.re\ transitif. Exécuter ou faire exécuter certains ouvrages suivant les procédés d’un art mécanique, en atelier ou en usine.

Si le lien entre construction et intelligence artificielle semble encore loin d’être évident, le secteur de la construction a bel et bien entamé sa digitalisation. Il s’agit d’un secteur en mutation permanente. Cependant, pour rester sur le territoire français, la filière construction commence à peine à s’intéresser à l’IA, avec un premier salon dédié, qui a eu lieu à Avignon en Juin 2019 (UNTEC).44 En témoigne, à partir de 2016, l’accroissement significatif du nombre d’investisseurs dans les startups de la « ConstructionTech » : 214 se sont créées depuis 2007, passant de 51 à 265 en 2018. 45 L’IA survient ainsi dans un contexte de mutations profondes de ces métiers, créatrices de valeur ajoutée. Elle permet, en partie grâce à cette nouvelle intelligence, de simuler et d’optimiser les performances du bâtiment.

Sommes-nous alors dans des prévisions utopiques et/ou dystopiques ? Selon Rand Hindi46, la singularité en l’état actuel des choses, n’est encore qu’un mythe. Certes l’IA est dès aujourd’hui bien plus performante que l’être humain dans les situations « standard » de classification : elle ne se fatigue jamais et reste en permanence à son optimum d’efficacité, cependant, à son stade actuel, elle n’est pas encore en capacité de prendre des décisions de son propre chef, et cela dans un domaine où tout est encore fabriqué sur mesure, dans un chantier architectural classique, cela semble très limité … Avec son rapport « A Digital Future for the Infrastructure Industry » 47 (juin 2017), Balfour Beatty a jeté un pavé (futuriste) dans la mare. Certes, l’entreprise britannique ne manque pas de citer les incertitudes liées à la matérialisation de cette vision. Mais elle prédit tout de même que la numérisation et l’automatisation vont progressivement prendre la main, jusqu’à endosser les aspects décisionnels. Le chantier 4.0 sera-t-il alors rempli de drones et de robots ?

44

Débat complet - https://www.youtube.com/watch?v=NB9Sx67rT7E&t=1806s – 1h30

45

Rapport Observatoire CONSTRUCTION TECH avec XERFI – PDF - 2018

46

The impossibility of Artificial Human Intelligence - Rand Hindi – TED – Youtube - 201

47

https://www.balfourbeatty.com/media/244600/balfour-beatty-innovation-2050.pdf

ENSAM – Mémoire Master – Loïck Maire - 2019 - 35 -


Si l’automatisation totale des chantiers n’était encore qu’une vision il y a quelques années, (2017) de part l’engouement et les récentes recherches en IA et robotique, ceci laisse présumer le contraire, aujourd’hui le milieu du bâtiment évolue, certes moins rapidement que ces homologues. (Santé, transport, finances …) mais un réel désir des grands groupes de BTP se fait sentir, générant une grande masse financière et intellectuelle vers ce domaine, qui ne devrait en tout logique, pas rester immobile pour la décennie à venir. Cependant, à l’heure actuelle beaucoup de barrières sont toujours présentes.

D’une part, parce qu’il n’est pas si simple de robotiser tout un chantier. Les conditions, qu’il s’agisse de météorologie ou de la présence de poussière, exigent des robots particulièrement résistants, tandis que les tâches ne sont pas strictement duplicables de chantier à chantier. Et d’autre part, parce la robotisation du secteur s’entend d’abord en termes de collaboration et de multiplication des interfaces hommes-machines. Les robots et les drones seront progressivement amenés à prendre en charges les tâches les plus dangereuses, difficiles ou répétitives, notamment grâce au déploiement à grande échelle du BIM qui leur fournira les données nécessaires.

Le secteur de la construction est un secteur économique majeur, mais il souffre d'inefficacités et d'une faible productivité. La robotique et les systèmes automatisés ont le potentiel de remédier à ces lacunes, cependant, le niveau d'adoption dans le secteur de la construction est très faible.

Big Data Enterprise and Artificial Intelligence Laboratory de Université de Bristol a récemment publié une étude48 développée par 7 chercheurs sur l’adoption de l’IA et des systèmes automatisés dans la construction, mettant en exergue les différentes postures à ce sujet. 5 points forts en ressortent :

48

ScienceDirect.com - Robotics and automated systems in construction – for adoption - PDF

ENSAM – Mémoire Master – Loïck Maire - 2019 - 36 -


• La robotique peut remédier à la faible productivité dans la construction, mais l'adoption est très faible. • Étude des facteurs spécifiques à l’industrie limitant l’adoption de la robotique dans la construction. • Les analyses de fiabilité, de composants et de corrélation permettent de comprendre les facteurs mis en jeu. • Quatre catégories de facteurs limitants ont été définies, classées et expliquées.49 •Les résultats aident les parties prenantes à concevoir des stratégies d'atténuation pour faire face aux futurs défis. Nous pouvons facilement avancer50, que comparé à d’autres industries (en France) le domaine du bâtiment souffre d’un certain retard sur l’acte de construire 3.0 et sur l’utilisation des nouvelles technologies (robotique, IA, automatisation …)

Fig 14 Densité de robots travailleurs / pays

49

Chap 2 - Robotics and automated systems in construction – PDF (voir 33)

50

Source : International Federation of Robotics

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Comme l’explique Philippe Dessertine, économiste, si nous replaçons l’histoire économique dans son contexte, l’humanité est confrontée à un immense défi environnemental, d’ailleurs aujourd’hui une vague de protestation des jeunes est à l’œuvre contre ce dérèglement climatique. En clair ce modèle économique doit changer et/ou évoluer en profondeur. Nous devons donc changer de logiciel économique, or ce procédé n’est arrivé que très rarement dans l’histoire, hormis lors d’une rupture technologique. Cette première étape qu’a été le digital il y a 20 ans a bien fait évolué le métier, or l’IA va, toujours selon M.Dessertine, changer et structurer la société humaine d’une manière plus approfondie. Un changement de paradigme puissant doit être fait. En outre l’intelligence artificielle est comparable à une General Purpose Technology, tout comme l’électricité l’a fait au xix siècle, il s’agit d’une longue adoption, qui changera fondamentalement notre manière de vivre.

Fig 15 Source : hackernoon.com

Outre sa formidable capacité à exercer une activité pénible et répétitive, l’IA doit donc s’axer sur un autre grand thème de notre époque : cette question environnementale reste en effet, une variable très sensible en 2019. Une question se pose alors, quel sens doit-on donner à l’intelligence artificielle et la robotisation dans les métiers de la construction pour que celle-ci soit d’un réel intérêt pour les générations futures ?

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II.1.a.1

Les nouveaux outils de projection et d’anticipation numérique. Virtual Reality, l’architecte et cette techno-réalité.

L’émergence d’applications de réalité virtuelle pour l’architecture est l’une des grandes révolutions de ces dernières années. Dans l’avenir, la réalité virtuelle deviendra une partie intégrante non seulement de la présentation d’un projet, mais aussi du processus de conception. Pour de nombreuses industries axées sur le design, le plus gros défi consiste souvent à convaincre le client que le projet fini ressemblera (ou sera supérieur) à la représentation 2D ou 3D. Un tel changement de méthode de représentation a le potentiel de modifier ce qui est possible dans le domaine de l'architecture, comme l'a fait la CAO au début de ce siècle. Selon une enquête de CGarchitect51, c’est en Europe qu’on se sert le plus de la réalité virtuelle pour la visualisation architecturale (40 % des personnes interrogées), ainsi qu’aux États-Unis (21 %). Certains participants estiment que la technologie va révolutionner le secteur. Près de 70 % d’entre eux font appel à des appareils de réalité virtuelle, augmentée ou mélangée, ou prévoient de le faire à partir de 2017, et 77 % disent tester cette technologie ou prévoient de le faire.52

Quel que soit le talent du concepteur, il faut un acte de foi et une imagination débordante de la part du maitre d’ouvrage pour le convaincre de l'idée et l’enthousiasmer. L’architecture n’est pas différente et c’est pourquoi la réalité virtuelle pour l’architecture et le design pourrait aider à transformer ce secteur. Nous examinerons les possibilités offertes par cette nouvelle technologie des plus passionnantes issue du jeu vidéo, les avantages de la conception dans un monde virtuel (pour le concepteur et le client), et la manière dont nous prévoyons que le secteur se développera et évoluera en tant que tel, afin de savoir si la réalité virtuelle (VR) sera acceptée et mis en œuvre dans toutes les agences.

La technologie de la réalité virtuelle a un fort potentiel pour les architectes et les designers. Des maquettes de conception initiale à la collaboration de projet, en passant par les finitions, qui font passer une conception de bâtiment de bonne à excellente. La réalité

51

http://www.cgarchitect.com/features/category/industry-surveys

52

https://www.autodesk.fr/redshift/la-realite-virtuelle-et-larchitecture

ENSAM – Mémoire Master – Loïck Maire - 2019 - 39 -


virtuelle possède la capacité de vendre une idée mieux que tout autre support. Comme mentionné au début du paragraphe, l'un des plus grands défis des architectes est de travailler avec un client pour le convaincre qu'un projet fonctionne avant de recevoir un retour d'information précieux - et réalisable - pouvant être intégré dans un projet fini.

Et plus le projet est important, plus il impliquera forcément de parties prenantes. Il est peu probable qu’il y ait un seul décideur ; plusieurs personnes seront plutôt invitées à donner leur avis sur divers aspects de la conception d’un bâtiment. Il peut être extrêmement difficile de réunir toutes ces personnes dans une seule pièce pour discuter de ces décisions de conception, sans parler de sa perte de temps et de son inefficacité.

Les plans d'étage, les rendus 3D et les modèles sont souvent utilisés pour véhiculer une idée d'un espace particulier dans une conception. Même ces approches (élément essentiel de la conception architecturale) peuvent ne pas permettre de communiquer efficacement les idées aux clients. C’est là que la réalité virtuelle prendra toute son ampleur. En tant que technologie immersive, elle transportera les utilisateurs dans un environnement 3D totalement interactif, leur permettant d'explorer une représentation virtuelle d'une pièce, d'un étage ou d'un bâtiment donné, avec un réaliste toujours plus poussé.

Cependant, cette description de la réalité virtuelle pour l'architecture peut paraître assez superficielle. Cela fonctionnera sans aucun doute comme un outil de présentation, permettant aux clients de comprendre à quoi un design ressemblera à l’échelle et à un niveau plus viscéral. Mais quel en sera l’impact sur le flux de travail d’un architecte ? Virtual Reality and the Built Environment53 54 de Jennifer Whyte et Dragana Nikolic publié en 2017 développe cette idée de l’utilisation des ressources de la VR dans l’environnement du bâti. Le livre vise à examiner trois questions clés. Quels sont les facteurs opérationnels pour l'utilisation de la réalité virtuelle ? Quelles sont ses limites ? Comment implanter la réalité virtuelle au sein des agences d’architecture, et de toutes les organisations en lien avec le BTP ? En utilisant des études de cas internationales, il répond

53

Virtual Reality and the Built Environment - Jennifer Whyte – 165p - 2002

54

Disponible en OpenSource : https://archive.org/details/Virtual_Reality_and_the_Built_Environment

ENSAM – Mémoire Master – Loïck Maire - 2019 - 40 -


à ces questions tout en abordant la croissance de l’utilisation récente de la modélisation des informations de construction et le regain d’intérêt pour la réalité virtuelle pour visualiser et comprendre les données afin de prendre des décisions le plus clairement possible.

Fig 16 « Cités Millenaires » - Eglise Notre-Dame de l’heure - Iconem - 2019

Étant donné qu'une grande partie de la technologie intégrée à l'intelligence artificielle a été développée à partir de l'industrie du jeu vidéo, sa capacité à produire des formes de "réalité augmentée" a un potentiel intéressant pour changer la perception et l'engagement envers les conceptions architecturales, tant pour les architectes que pour les non architectes qui participent à un projet.

Il est également possible que de nombreux projets d'architecture restent également dans cette zone non construite, dans une réalité numérique parallèle, que la majorité des futurs citoyens du monde habiteront simultanément, à l’image du film « Ready Player One » sortie en mars 2018 et réaliser par Steven Spielberg, tiré lui-même du roman de Ernest Cline.55

55

Player One – Roman - Ernest Cline – USA - Crown Publishing Group - 2011

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II.1.b

Photogrammétrie et Constructions autonomes, le drone : outil du futur.

"Maintenant que les drones sont entre les mains de tout le monde dans la rue, ils sont potentiellement aussi perturbateurs qu’'Internet." - Liam Young

Avant tout, il est nécessaire de rappeler que la technologie du drone est une technologie jeune et encore en croissance, développée dans le milieu des années 1990 par l’armée américaine, le drone militaire fut conçu en tant que machine autonome ayant pouvoir de tuer. Cette technologie récente a moins de 15 ans de développement tout-public, de plus avoir un drone (ou quadricoptère) dans les années 2000 relevait d’une grande capacité technique en aéromodélisme sachant que la plupart du temps, il fallait construire la machine soi-même. Sans prendre en compte tous les accessoires comme les lunettes FPV, contrôleurs intégrés, GPS, camera thermiques … ceci alors était très couteux il y a encore 10 ans. Aujourd’hui nous trouvons des drones ultra performants à moins de 1000 euros56 et des modèles professionnels qui avoisinent les 2000-3000 euros.57 L’industrie du jouet et du loisir s’est bien évidement engouffrée dans la niche en proposant des drones de loisir à bas prix, disponible pour tous les âges et pour tous les niveaux. Il est intéressant de noter qu’en 2018 il y avait plus de drones civils dans les airs que de drones militaires sur toutes leurs durées de fonctionnement par l’armée américaine. Il n’est donc pas étonnant que cette technologie intéresse les architectes (concepteurs) et les urbanistes qui y voient une nouvelle méthode de travailler, d’appréhender et de produire de l’architecture, car il s’agit avant tout d’un robot capable de réaliser des taches qu’un être humain ne pourrait pas réaliser avec autant de précision.

Le drone forcera tôt ou tard à réétudier nos modes de déplacement, nos espaces publics, nos routes … tout ceci sera obligatoirement pensé sous une forme de verticalité. Comme l’explique l’architecte Norman Foster dans le film « Elévation » sortie en Mai 2018.58

56

www.dji.com/mavic

57

www.dji.com/inspire2

58

Elevation documentary: how drones will change cities – Youtube – 18min

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Fig 17

Or, pour les architectes le drone apporte une donnée fondamentale, une sorte de conscience élargie ou comme un œil supplémentaire pour explorer des contrées que notre vision n’a jamais pu explorer, du moins pas avec autant de facilité. L’université de Zurich (ETH Zürich) a beaucoup développé l’utilisation du drone en tant qu’outil de développement autonome. Leurs travaux proposent des constructions semiautonomes gérées en partie grâce à de l’intelligence artificielle. En effet, l’utilisation de l’IA couplée à la technologie du drone pourrait amener une vraie disruption dans notre manière de fabriquer de l’architecture. Il n’est pas difficile d’imaginer pour le futur des éléments architecturaux entièrement assemblés par des drones, travailleurs à l’image du projet Flight Assembled Architecture pour le FRAC Centre en 2011, ou encore Cyber Physical Macro Material en 2017 avec une ombrière adaptative autogérée.59 Depuis 2013, la start-up française Iconem se spécialise également en numérisation 3D des sites appartenant au patrimoine mondial en danger, en utilisant les nouvelles technologies embarquées des drones qui leur permettent d’être le plus réactif et discret possible.

59

Cyber Physical Macro Material - Thesis Project Miguel Aflalo, Jingcheng Chen, Behrooz Tahanzadeh

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Leurs expertises dans les technologies du drone, de la photogrammétrie et du laser leur permettent de créer des modèles numériques 3D photoréalistes d’une grande précision. Grâce aux architectes et aux archéologues de leurs équipes et du réseau développé pendant 6 ans, ils sont dans la capacité de reconstituer en 3D les monuments détruits ou disparus. De plus, les modèles 3D à grande échelle de tissu urbain ou rural facilitent le travail essentiel de conservation et de restauration des experts du patrimoine. 60

Une autre manière de créer des expériences numériques pour des expositions muséales qui immergent le visiteur dans un magnifique témoignage de notre passé architectural.

Fig 18 Source : Iconem.fr

Comme l'impression 3D (présenté p.60), les drones sont utiles dans de nombreuses tâches de construction, telles que l'inspection de pipelines et pour la surveillance des prisons, la recherche et le sauvetage dans des zones obscures telles que les mines, et même comme outils pour garder le bétail ou livrer des colis. Alors que le prix de la technologie baisse rapidement, les sociétés mettent les drones en service de plus en plus fréquemment.

Un chantier de construction est donc un choix judicieux pour des inspections visuelles rapides à l'aide d'un drone aérien. Ajoutez une technologie spécialisée à leurs caméras, 60

http://iconem.com/fr/

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telle que des filtres infrarouges ou des capteurs pour détecter les fuites de gaz, et le drone devient inestimable. Il restitue des données riches et multifonctionnelles tout en réduisant les coûts et les risques associés à l'inspection humaine des zones difficiles d'accès.

Certains types de drones offrent une précision surprenante, notamment ceux qui utilisent plusieurs hélices pour plus de stabilité. (8 ou 10 pales) Les acteurs du secteur de la construction, petits et grands, ont commencé à employer des quadricoptères équipés de caméras à haute résolution, d'appareils de balayage laser et de stabilisation gyroscopique afin de proposer un chantier encore plus sécurisé.

La combinaison de ces technologies peut renvoyer des données millimétriques. Les fournisseurs de groupes de panneaux solaires résidentiels et commerciaux, tels que Kiosk Solar, à Toronto, ont utilisé des drones pour inspecter avec précision les structures des clients afin de créer des propositions d’installations. Le fabricant Siemens envisage un avenir dans lequel des UAV parcourent les structures existantes pour obtenir des informations complètes sur les bâtiments afin de créer des modèles numériques 3D. Ce type de modèle BIM pourrait aider à déterminer les besoins de maintenance et même à planifier des rénovations via une simulation 3D numérique précise et intuitive.

Fig 19 Source : Flight Assembled Architecture - 2011

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II.1.c

Comment cette adoption du drone va-t-elle changer les villes ?

"There are a lot of implications of drones changing the way architecture is perceived and also in the future the way architecture is built" - Hans-Ulrich Obrist, artistic director of the Serpentine Galleries.

D’après Liam Young, urbaniste indépendant, designer et futuriste : le futur est clair, l’utilisation du drone indique une réelle disruption dans notre manière de communiquer les uns avec les autres, dans l’espace, le territoire et dans la ville. 61 Il y a beaucoup d’implications en termes de drones qui changeront la façon dont l’architecture est perçue, et (finalement) dont celle-ci est construite. La première chose est la verticalité. Le toit faisant partie autrefois de l’invisible pour la ville, c’était souvent un endroit où les usagés stockaient leurs déchets, des espaces d’entreposage ou toutes sortes de choses. Or, maintenant il devient tout à coup une partie intégrante de la ville visible et donc du projet architectural. Cette nouvelle notion, autrefois réservée à un pourcentage limité de personnes, est en train de changer, car aujourd’hui tout le monde peut facilement faire l’expérience de voler, tout en restant les pieds sur terre.

En ce qui concerne la façon dont la technologie des drones pourrait modifier davantage l’expérience urbaine, les véhicules sans conducteur, ou UAV, sont depuis longtemps au cœur des représentations de l’avenir, et certains chercheurs pensent que si les voitures sans conducteur deviennent une réalité, des avions sans conducteur pourraient bientôt suivre.62 Une technologie de drone miniaturisé pourrait être la clé pour libérer le potentiel de véhicules plus imposants sans pilote et même pour développer les voitures volantes de la science-fiction. Cette réalité pourrait être encore plus proche que nous ne l’imaginons, certains avions à réaction de Boeing et d’Airbus étant déjà en train de décoller, atterrir et freiner jusqu’à un arrêt, sans intervention humaine. Tout comme les architectes ont déjà contribué à la notion de ville technologique, avec des véhicules sans conducteur, illustrée par la proposition de BIG pour le Audi Urban Future Award, les architectes peuvent également jouer un rôle dans le développement d’une telle infrastructure pour l’espace aérien urbain.

61

Elevation documentary: how drones will change cities – DEZEEN – Youtube 2018

62

Drones are Ready for Takeoff - Richard Conniff, Smithsonian Magazine

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Il est donc essentiel de réagir à la manière dont les véhicules sans pilote navigueront dans nos villes et si nous voulons créer des espaces sûrs et flexibles qui changent en fonction du trafic, des besoins et de l’heure.

Pour répondre à cette demande, l'environnement urbain devra s'adapter. Peut-être que l'ampleur de la transformation urbaine ne sera pas aussi extrême qu'avec l’automobile car les drones ne nécessitent pas d'infrastructures à grande échelle telles que des routes et des ponts. Mais les changements seront certainement nombreux et profonds.

Il existe d'innombrables autres applications pour les drones au-delà des services de livraison présenté récemment par Amazon Prime. Ils peuvent également être utilisés pour surveiller des structures telles que les éoliennes ou pour contrôler l'environnement - depuis l'érosion des berges et des côtes jusqu'à la montée des eaux et pour les menaces d'inondations. Les drones pourraient même remplacer certains rôles et systèmes dans nos villes, tels que les agents de la circulation, les radars automatiques et certaines formes de maintien de l'ordre, sujet de l’excellent court métrage anticipatif In the Robot Skies

63

mettant en scène une ville entièrement gérée par des drones. 64

En agriculture, les drones sont notamment déjà utilisés pour surveiller les cultures et détecter tout problème. Ils jouent également un rôle dans les enquêtes sur les accidents. Et ils restent bien entendu, déployés à des fins militaires et de sécurité.

Toutes cette spéculation sur le drone, dans notre environnement urbain soulève d'importantes questions juridiques concernant la propriété de l'espace tridimensionnel dans les villes.65 La Federal Aviation Administration (FAA) réglemente déjà les aéronefs grand public télécommandés d’une hauteur maximale de 400 pieds. Amazon et de nombreux autres intérêts commerciaux attendent toujours que cette FAA donne son autorisation et établisse des règles relatives à l'utilisation de drones. Car sans ces lois en place, il est difficile de prévoir l'évolution de cette technologie … Cependant, de nombreux cinéastes et amateurs ont prouvé qu'il était difficile d'appliquer ces réglementations, ce qui

63

Drone Romance - In The Robot Skies by Liam Young - Random Acts – Youtube - 2016

64

https://theconversation.com/heres-how-drones-will-change-cities

65

Drone City: How Unmanned Drones Will Change Urbanism For the Better - Phil Pawlett Jackson, The Architectural Review

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a amené les législateurs à réfléchir à la manière dont les dispositions pourraient être mises en pratique dans les années à venir.

Certains urbanistes ont déjà proposé des idées approximatives sur des lois de zonage possibles pour les drones. Un article sur son blog Humanitarian Space de Mitchell Sipus, un urbaniste ayant travaillé à Kaboul et à Mogadiscio, révèle une tentative précoce de créer un zonage possible de l'espace aérien dans lequel les drones voleraient.66 Sipus a développé des représentations de zones codées par couleur de Chicago : le vert étant un espace public ouvert et plat dans lequel les drones peuvent voler librement, et des zones orange, jaunes et rouges délimitant divers espaces restreints ou interdits. L'espace aérien au-dessus des espaces commerciaux, par exemple, peut être restreint aux drones de publicité et de télévision et interdit aux aéronefs civils.

Depuis ses premières spéculations, Sipus a déclaré à ArchDaily, que ses idées avaient été développée, notamment par des travaux récents avec la NASA, suggérant qu’elles étaient applicables pour une mise en œuvre dans le monde réel.

Qu'il s'agisse de la conception de façades de gratte-ciel, de surveillances étendues, d'une infrastructure urbaine invisible, pour le zonage gouvernemental ou pour simplement montrer de l’architecture, il est clair que la révolution technologique déclenchée par les drones aura des ramifications architecturales étendues. Les drones pourraient avoir de nombreux effets positifs et négatifs sur la manière dont nous vivons nos villes, et nous n’avons pas encore vu l’ampleur réelle de ces effets dans la pratique. Dans cet avenir multimodal complexe, les architectes devront relever le défi de travailler plus étroitement que jamais avec les industries de la technologie et les agences gouvernementales pour développer une conception urbaine véritablement innovante, respectueuse de l’environnement et intelligente.

"Nous maîtrisons la quasi-totalité des technologies nécessaires - miniaturisation, intelligence artificielle, connectivité, batteries électriques… - pour développer des véhicules aériens autonomes." - Tom Enders, le président d'Airbus Groupe.

66

Zoning and Urban Land Use Planning for Drones - Mitchell Sipus, Humanitarian Space

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II.2

La robotique avancée, tournant décisif pour nos méthodes de construction.

Les systèmes d'IA sont déjà intégrés dans l'industrie de la construction, des pratiques innovatrices comme l'architecture computationnelle (voir chap. I .2) travaillent avec des " robots artisans " pour explorer l'IA dans la technologie et la fabrication de la construction. Michael

Hansmeyer

Architecture

67

et

Benjamin

Dillenburger,

fondateurs

de

Computational

, étudient le nouveau langage esthétique que ces développements

commencent à générer. "L'architecture se trouve à un point d'inflexion, suggèrent-ils sur leur site web, la confluence des progrès des technologies de calcul et de fabrication nous permet de créer une architecture de formes jusqu'alors inimaginables, avec un niveau de détail inédit, produisant des sensations spatiales entièrement nouvelles".

La technologie d'impression 3D développée à partir de logiciels d'IA a le potentiel d'offrir aux architectes du 21e siècle un langage esthétique très différent et très innovant, catalysant peut-être la résurgence du détail et de l'ornementation. Sachant celle-ci est plutôt rare en raison du déclin des métiers traditionnels.

Fig 20 Source Hansmeyer et Dillenburger's Grotto Prototype.

67

http://www.michael-hansmeyer.com/talks

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Pour cette réalisation la forme même des grains de sable a été arrangée par une série d'algorithmes conçus sur mesure par le cabinet. Cette technique a permis de développer des formes très différentes de celles de la taille de pierre traditionnelle. L'objectif du projet était de montrer qu'il est désormais possible d'imprimer des pièces à l'échelle du bâtiment à partir de minéraux et que l'impression 3D peut également être utilisée pour des applications patrimoniales, telles que la réparation de statues anciennes par exemple. La robotique est également de plus en plus courante sur les chantiers de construction, surtout en ce qui concerne les ressources humaines et la logistique. Selon AEM68, leurs applications s'étendront bientôt à la maçonnerie, à la distribution du béton, au soudage et à la démolition. Un autre exemple de cette utilisation future pourrait être de travailler avec le BIM pour identifier les éléments manquants dans le processus de construction et de tout mettre à jour grâce à l’IA.

Fig 21 Source : Gramazio Kohler Research, ETH Zurich

Les projets à grande échelle, comme par exemple les projets gouvernementaux, seront surement les premiers à appliquer cette technologie, suivis par les projets de moyenne envergure du secteur privé, comme les bâtiments culturels (musées, R&D, HUB, clusters …). Les futurs défis du chantier de construction, feront probablement sortir la robotique et l’IA de ces environnements aseptisés pour en faire une réalité moins scénarisée.

68

www.aem.org – Association of Equipment Manufacturers

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Robert Saunders, chercheur en intelligence artificielle et en fabrication à l'Université de Sydney, a déclaré à New Atlas 69 que " les robots sont très doués pour les tâches répétitives et pour travailler avec des matériaux qui réagissent de façon fiable... ce qui nous intéresse, c'est de développer des robots capables d'apprendre à travailler avec des matériaux qui fonctionnent de façon non linéaire... comme de la cire ou de la mousse expansible ou, plus pratiquement, des matériaux de construction à basse qualité comme du bois à qualité inférieure ".

Fig 22 Source - Robot Science Museum

Imaginé par l’agence turque Melike Altınışık Architects, le futur Robot Science Museum (ci-dessus) de Séoul démontrera le potentiel des robots avant même son ouverture, en les faisant directement participer au chantier.

Au-delà des expositions classiques, le musée favorisera les interactions directes entre les visiteurs et différents types de robots. Tandis que des drones superviseront la cartographie et l’avancement du chantier, différents robots se relaieront sur place pour mouler, souder et polir les plaques métalliques de l’enveloppe externe. Pour manifester l’orientation technologique et futuriste du musée, cette nouvelle manière d’envisager la construction permettrait également de réduire les coûts et la durée des travaux selon les architectes. Aussi économe qu’ingénieux, leur dispositif s’illustrera à partir de l’année prochaine dans le nord de Séoul, au sein du Changbai New Economic Center. Un projet de rénovation urbaine dans le quartier de Chang-Dong, le Robot Science Museum qui ouvrira ses portes à l’horizon 2022.70

69

https://newatlas.com/creative-ai-algorithmic-architecture-robot-craftsmen

70

The Good Life – Robot Science Museum – Article par Rémi Bourbonneuxle - 2019

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La machine pourrait-elle remplacer l’Homme ?

II.2.a

Cette ascension des efforts que porte les GAFA à développer sans limites cette relation entre l’homme et la machine est obligatoirement lié à notre capacité de recherche en informatique, aujourd’hui nous arrivons aux limites physiques de la gravure sur circuit imprimé. Pour base d’exemple, un processeur public type Intel « Coffee Lake » disponible dans beaucoup d’ordinateurs grand public sont gravés en 14nm 71 . Or, sous les 8 nanomètres, les effets quantiques viendront perturber le fonctionnement des composants électroniques. Ceci induit de nouvelles approches technologiques grâce aux ordinateurs quantiques. Ces ordinateurs révolutionnaires ont pour but de faire perdurer la fameuse loi de Moore, en continuant à faire évoluer de façon exponentielle la puissance de calcul des ordinateurs. Les ordinateurs quantiques utilisent deux propriétés de la mécanique quantique : ‘’la superposition des états’’ et ‘’l’intrication’’ qui permet une étude bilatérale des « qubit »72 qui découlent des propriétés quantiques de la matière.

Fig 23 Source : Chi She – Archi-Union Architects - 2016

71

https://en.wikichip.org/wiki/intel/microarchitectures/coffee_lake

72

https://fr.wikipedia.org/wiki/Qubit

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Un domaine qui lie entre eux ces deux facettes de la technologie est la robotique. Même si celle-ci reste problématique concernant ses répercussions sur le travail des ouvriers dans les domaines de l’industrie et de la construction. D’après Cédric Villani, les experts sont unanimes pour considérer que l’IA va transformer profondément les tâches et les métiers dans les années à venir. Alors que certaines tâches répétitives pourront être automatisées, la plupart des métiers vont se transformer, de nouveaux vont apparaître, non seulement autour de la production de l’IA en tant que telle, mais également pour répondre à des besoins connexes (maintenance, médiation, création assistée, etc.). De nombreux emplois pourraient ainsi se créer sous l’effet de l’utilisation grandissante d’outils d’intelligence artificielle dans les domaines de la santé, du droit, de l’architecture, etc.73

En Asie notamment, elle remplace déjà beaucoup de personnes (en particulier) pour les tâches ingrates et répétitives. (Voir figure précédente) Mais cela ouvre de nouvelles possibilités dans le domaine de la construction architecturale. Le travail de Owen Hopkins 74 explique à juste titre que les limites entre le monde numérique et le monde analogique deviennent de plus en plus floues.

On pourrait parler de déshumanisation de l'architecture, cependant cela permet finalement, de reconnecter la pratique de l’architecture et de la construction, tout en remettant en avant la place de l'architecte dans le processus de fabrication de son projet. On constate aussi que l'homme, à défaut d’être remplacé, travaille en collaboration avec la machine ou le robot. Le projet SmartSlab75 de l’ETH Zurich en est la représentation concrète où homme et machine arrivent à produire des éléments innovateurs par le biais de la robotique et des nouvelles technologies. L’automatisation totale des chantiers est en progression même si elle ne reste pour le moment qu’une vision. Et elle devrait en toute logique le rester. D’une part, parce qu’il n’est pas si simple de robotiser tout un chantier. Les conditions, qu’il s’agisse de météorologie et de la présence de poussière, exigent

73

Rapport synthèse France – IA – CEDRIC VILLANI – page 17

74

http://www.owenhopkins.co.uk

75

«Smart Slab»: half as heavy as a conventional concrete slab – Youtube - 2018

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robots particulièrement résistants, tandis que les tâches ne sont pas strictement duplicables de chantier à chantier.

76

D’autre part, parce la robotisation du secteur s’entend d’abord en termes de collaboration et de multiplication des interfaces hommes-machines. Les robots et les drones seront progressivement amenés à prendre en charges les tâches les plus dangereuses, difficiles ou répétitives, notamment grâce au déploiement à grande échelle du BIM et du Big Data qui leur fournira les données nécessaires.

Fig 24 Source : Japan’s AIST (National Institute of Advanced Industrial Science and Technology)77

76

Ci-dessus : Spot par Boston Dynamics - 2019

77

【HRP-5P】Humanoid Robot【産総研公式】 - Youtube - 2018

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II.2.b

L’expérience : Humain et Robots, construire ensemble.

« À l'ère post-numérique, les architectes concevront en code et les robots construiront nos bâtiments » - Owen Hopkins78 79.

Nous sommes maintenant entrés dans l'ère post-numérique. Celui-ci décrit le flou des mondes numérique et analogique, lorsque les expériences réelles deviennent interchangeables avec les expériences virtuelles. C'est ce que l'on observe dans les systèmes de réalités augmentés, de santé et de suivi des activités, les iBeacons, les Géofences et l'Internet des objets, pour ne citer que quelques exemples.

A part quelques détournements vers le dessin post-numérique, l'architecture existe cependant toujours en dehors de ce monde. Pour l'essentiel, il reste fermement ancré dans l'ère numérique, utilisant un nombre illimité d'outils numériques, mais évitant surtout de s'attaquer à leurs implications culturelles.

Nous voyons très clairement que l'architecture s'oriente vers une chose lisse, dans la fluidité et la transparence, qui, dans ses gestes formels arbitraires, célèbre presque le fait qu'elle ne peut être conçue que sur ordinateur (Bilbao pour Frank Gehry, Bakou pour Zaha Hadid). Si les images générées par cette architecture se veulent séduisantes et futuristes, elles semblent déjà dépassées.

On en vient à se dire que les conceptions architecturales ne seront plus toujours médiatisées par l'industrie de la construction de bâtiments80.

Mais si nous mettons de côté ces visions simplistes, en marge de la profession, nous commençons à voir émerger un certain nombre de pratiques qui ouvrent la voie à une architecture post-numérique. Bien qu'encore à ses débuts, ce travail illustre déjà que cette architecture post-numérique sera brute, provisoire et façonnée, avec des implications radicales non seulement pour la conception et la construction, mais pour le rapport fondamental de l'architecture au temps, au lieu et à la machine.

78

https://www.dezeen.com/author/owen-hopkins

79

http://www.owenhopkins.co.uk/code-builder

80

https://www.dezeen.com/2018/12/12/post-digital-architecture-owen-hopkins-opinion

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Nous pouvons citer pour illustrer, l'atelier Hackney de Mamou-Mani81, l'un des praticiens à l'avant-garde de cette transformation qui le confirme déjà. Au lieu de longues séries d'ordinateurs que l'on voit dans la plupart des cabinets d'architecture, leur studio est rempli d'outils, de machines, d'imprimantes 3D, de différents matériaux et de prototypes à divers degrés d'achèvement. Pour beaucoup il pourrait s’agir de l'atelier d'un artisan.

Fig 25 Source : Instagram - @mamoumani

Mais ce que nous voyons sortir de l'atelier ne sont pas des objets architecturaux en soi, ni même des éléments de construction, mais, comme dans le cas du Polibot82, un prototype de robot de construction en câbles, proposant de nouveaux outils futuristes qui viendront redéfinir le travail de construction. A l’image de Quadcopter Assembled Tower au FRAC Centre en 201283.

L'implication la plus immédiate de ce changement est que, lorsqu'ils utilisent des technologies comme le Polibot, les architectes conçoivent maintenant en code. Cette information est transmise directement aux constructeurs de leurs projets, des robots plutôt que des humains. De plus, les clients ne seront plus tentés d'écarter les architectes de l’origine d'un projet au profit d'un contrat de conception et de construction prétendument moins cher et sans risque. Comme tout développeur de logiciel vous le dira, le moyen le plus sûr de retarder un projet est d'ajouter plus de codes.

81

www.mamou-mani.com

82

https://mamou-mani.com/project/the-polibot/

83

Drones can collaborate to build architectural structures – Youtube - 2016

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Le point critique est que tout cela sera fait par des robots. Que l'on considère les robots ou même les imprimantes 3D comme des remplacements pour le constructeur humain, ou comme des outils pour l'architecte qui éliminent en fait le rôle du constructeur, la conséquence sera de reconnecter la pratique de l'architecture au métier même du bâtiment.

Fig 26 MULE135 – construction robotics

D'une certaine manière, cela a une affinité intéressante avec le rôle prémoderne de l'architecte qui travaillerait en étroite collaboration avec toute une série d'artisans. Alors que le numérique sert essentiellement à cacher le travail, référence à l'immense toit d'acier de la piscine olympique de Londres84 qui a ensuite été recouvert de panneaux de bardage pour lui donner un aspect aérien, ou à la façon dont la planéité d'un écran masque le travail qui s'y déroule, le post-numérique révèle et célèbre l'acte de fabrication dans l'atelier et sur le chantier.

En même temps, le post-numérique remet en question le cycle de vie standard des bâtiments qui s'est maintenu depuis l'Antiquité jusqu'à l'ère numérique, en passant par le modernisme.

84

https://www.arch2o.com/london-aquatics-centre-zaha-hadid-architects

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II.3

Vers une méthode de construction 100% autonome, utopie ou réalité ?

A l’heure où notre société tend à devenir de plus en plus robotisée et autonome, une question se pose alors dans nos futures constructions architecturales, futur moteur dans l’industrie : l’automatisation devrait bientôt apparaitre dans le paysage des chantiers, déjà bien implanté sur les marchés américain, émirati et chinois.

En effet, selon la Fédération japonaise des entrepreneurs de la construction, il y aura 1,28 million de travailleurs de moins dans le secteur pour l’exercice 2025 par rapport à l’exercice 2014. Les Etats-Unis font face à une problématique similaire : 200 000 postes restaient non pourvus dans le secteur fin février 2017.85 Face à cette pénurie croissante de travailleurs, les entreprises se voient dans l’obligation de s’équiper en robots et drones. Mais le gain de productivité attendu s’appuie d’abord sur la complémentarité entre l’homme et la machine, souligne un expert auprès du Japan Times. Les métiers de la construction ne vont pas disparaître. Comme dans la plupart des secteurs, ils vont se transformer à la faveur d’une montée en compétences 86.

Fig 27 Source : SHIMIZU CORP

85

https://leonard.vinci.com/drones-robots-humains

86

www.japantimes.co.jp - Japan's labor-scarce building sites automating, turning to robots, drones

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Si nous faisons l’examen des technologies de construction en développement, ceci laisse entrevoir une révolution à court terme dans la façon dont nous construisons et exploitons nos installations. Quelques-unes de ces technologies résolument futuristes sont déjà disponibles sur le marché et utilisées aujourd'hui, notamment l'impression 3D, les drones autonomes (présentés p.42), les systèmes de construction robotique, et dernièrement les nanotechnologies.

Fig 28 Polibot – Source mamou-mani.com/project/the-polibot

L'un des domaines les plus réussi pour l'application de l'automatisation et de la robotique est celui de la façade du bâtiment. Certaines conceptions avant-gardistes d'enveloppe de bâtiment fonctionnent pratiquement comme une peau organique, en ajustant l’ombrage en prenant en compte les changements d'humidité ambiante, de la température et de la lumière.87

Le biomimétisme est une influence courante sur ces façades actives et/ou dynamiques, qui intègrent des pièces mobiles, des capteurs et des actions, souvent liés au système central d'automatisation du bâtiment. (Voir Chapitre : Gérer)

87

Al Bahr Towers - Abou Dabi - 2012

ENSAM – Mémoire Master – Loïck Maire - 2019 - 59 -


II.3.a

Impression 3D à l’échelle de la ville et du bâtiment.

La fabrication additive est présentée comme la nouvelle frontière de l’industrie. Cette révolution annoncée n’épargne pas le secteur de la construction, avec de belles promesses : réduction des délais, des coûts, de l’empreinte écologique, des risques mais aussi nouvelles possibilités techniques.

En 2019, les dépenses mondiales en équipements, logiciels et services dédiés à l’impression 3D devraient progresser de plus de 21%, selon IDC. L’impression 3D est un des moteurs de la quatrième révolution industrielle à l’œuvre. Le guide semi-annuel des dépenses mondiales édité par IDC dans ce domaine en témoigne. Cette année, les dépenses mondiales en équipements, logiciels et services dédiés à l’impression 3D devraient progresser de 21,2% par rapport à 2018. Le marché atteindrait ainsi les 13,8 milliards de dollars à fin 2019. 88

Fig 29 Source Additive Manufacturing en Millions d’Euros

Apparut en 2000, puis développée à partir de 2010, l’impression 3D frappe par son évolution. Elle est aujourd’hui au centre de l’innovation de la construction 3.0. Ainsi un seul chapitre ne pourrait pas amorcer un travail en profondeur sur cette technologie qui modifiera automatiquement les chantiers de demain. Nous ferons donc ici, un comparatif des points positifs et négatifs, et une courte présentation des dernières avancées technologiques essentiellement dans le domaine du BTP.

88

2019 Additive Manufacturing Market Outlook and Summary of Opportunities

ENSAM – Mémoire Master – Loïck Maire - 2019 - 60 -


Actuellement 3 grandes familles existent : l’extrudeuse à bras robotiques, la plus courante, est identique à son homologue de plus petite taille, les rails sont disposés de manière à laisser le bras robotique bouger ; et dans les limites des rails, le bras construira la maison couche par couche en extrudant le béton (ou autre) de la buse. Il s'agit de la technologie d'impression 3D la plus populaire utilisée pour construire des structures XL, notamment en Chine avec la société Winsun, qui est capable de produire une dizaine d’habitations en 24 heures. 89

90

Son utilisation nécessite peu d’ouvriers (2 ou 3 par machine), elle est

d’autant plus intéressante que son utilisation peut être couplée avec des matériaux plus respectueux de l’environnement, tel que le pisé ou les algues.

91

La première maison

totalement imprimée en 3D à base de terre, est le projet Gaia de l’entreprise WASP92 en 2018, qui laisse entendre un futur prometteur entre impression 3D et matériaux biosourcés.

Source : Gaia par WASP Fig 30 Source WASP – Projet Gaia

La technique 3D suivante s'apparente davantage à l'impression 3D industrielle telle que SLS ou Jet Fusion. Le pionnier qui l'a testée est l'architecte italien Enrico Dini, qui a construit son imprimante 3D D-Shape. La machine étale une couche de sable en poudre, puis durcit la forme de la structure avec un liant.

89

WINSUN 3D printed shanghai factory – Youtube - 2019

90

https://newatlas.com/china-winsun-3d-printed-house/31757

91

https://www.wazp.io/2019/08/15/sustainable-materials-used-in-additive-manufacturing

92

https://www.dezeen.com/2019/02/27/gaia-wasp-3d-printed-house-biodegradable-video

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Ces couches de sable sont déposées en fonction de l'épaisseur souhaitée avant qu'une tête d'impression ne verse des gouttelettes (le liant) pour durcir le sable. Cette machine de 4 x 4 mètres peut créer de grandes structures allant jusqu'à 6 mètres cubes. Cette technique à récemment était utilisé par le ETH Zurich pour produire leurs moules béton du toit Smart Slab.93 (ci-dessous)

Fig 31 Source : Smart Slab

La dernière technique étant l’impression par jet de métal en fusion, la société MX3D a mis au point cette méthode de construction unique, appelée WAAM (fabrication additive à l’arc filaire), qui permet d’imprimer en 3D des structures métalliques avec un robot à 6 axes permettant de déposer 2 kilos de matériau par heure. Fruit de la collaboration entre Air Liquide et ArcelorMittal, ce robot est équipé d'une soudeuse et d'une buse pour souder des tiges métalliques, couche par couche. Ce procédé est également compatible avec d'autres métaux tels que l'acier inoxydable, le bronze, l'aluminium et l'Inconel (alliage). La machine peut être assimilée à une sorte de fer à souder autonome géant. L’équipe a déclaré : « Nous avons combiné un robot industriel avec un poste à souder, pour le transformer en une imprimante 3D qui fonctionne avec notre propre logiciel interne." 94

93

Smart Slab – Youtube - 2018

94

MX3D Printed Bridge Update – Youtube - 2018

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Fig 32 Source : MX3D

Autre avantage à cette technologie, en termes d'utilisation de matériaux, l'impression 3D est économique. Avec des processus additifs plutôt que soustractifs, moins de matériaux sont utilisés qu’avec les procédés de fabrication traditionnels. Cela réduit évidement l'impact sur l'environnement car moins de déchets sont produits. Avantages : •

Nombreux matériaux utilisables.

Délais de fabrications courts : l'impression 3D ne nécessite pas d'étape de préfabrication.

Fabrication de formes qui peuvent être très complexes : formes intérieures non débouchantes, canaux ou logements étroits, profils complexe, design adaptatif, etc.

Fabrication sans frais fixes : il n'y a pas d'étapes de pré-industrialisation, de fabrication de moules, de gabarit ou d'outillage spécifique.

Cependant, une idée bloque, cette envie de construire en hauteur reste aujourd’hui à l’état d’embryon. Axel Théry de Constructions-3D explique que « les principales difficultés proviennent du fait que le processus d'impression 3D de bâtiments n'est pas aujourd'hui reconnu comme une méthode de construction par de nombreux organismes de normalisation et de codes. Les structures imprimées n'étant pas traditionnelles, les calculs de résistance et de pérennité dans le temps sont difficiles à réaliser. C'est pourquoi les travaux habitables devront être testés au cas par cas au début. »

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Ces organismes de normalisation se demandent si ces structures sont vraiment aptes à supporter de lourdes charges et si elles peuvent supporter leurs environnements bâtis. (Voir projet Ricciotti)

De plus, la plupart des procédés génèrent des états de surface relativement médiocres ; il est souvent indispensable de lisser les surfaces par des techniques de polissage plus ou moins complexes. Une étape de « Tribofinition » finale permet d'améliorer considérablement l'état de surface sur tous les volumes de la pièce.

Certaines techniques d'impression tridimensionnelle sont émettrices de particules « ultrafines » (nanoparticules). Les procédés métalliques basés sur la fusion de poudre donnent des pièces relativement nocives si la poudre est mal appliquée sur la pièce finale. Et pour aller plus loin, cette fabrication additive pourrait aussi être un moyen pour l'humanité d'explorer l’espace. La NASA a lancé le « 3D Printed Habitat Challenge »95, qui examine les technologies utilisées pour construire des maisons dans l'espace, comme sur la Lune ou Mars. Bien qu’ambitieux, il est trop tôt pour dire si cette « additive manufacturing » est une solution viable. Nous pouvons toutefois affirmer que l’impression 3D dans la construction doit devenir une véritable force mondiale. SmarTech Publishing96 a récemment publié un rapport prévoyant que les revenus mondiaux du secteur atteindraient 40 milliards de dollars en 2027. Passer de quelques millions de dollars à 40 milliards de dollars en 10 ans est surprenant. Par conséquent, nous devrions rapidement voir comment le monde réagira à cette technologie.

Fig 33 Source : NASA

95

https://www.nasa.gov/directorates/spacetech/centennial_challenges/M19-012.html

96

https://www.smartechanalysis.com

97

Ci-dessus : NASA – Virtual Construction of 3D-Printed Habitat Challenge

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III

CHAPITRE III – GERER gerere \ ʒɛs.tjɔn \ feminin

Action et effet de gérer, d’administrer. Diriger pour le compte d’un autre.

Les changements organisationnels, technologiques et sociétaux des villes actuelles sont induits par leur volonté d’être une partie de la réponse au changement climatique. La ville intelligente cherche, ainsi, à concilier les piliers sociaux, culturels et environnementaux à travers une approche systémique qui allie gouvernance participative et gestion éclairée des ressources naturelles afin de faire face aux besoins des institutions, des entreprises et des citoyens. Les nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC – domotique, capteurs et compteurs intelligents, supports numériques, dispositifs d’information, etc.) seront au cœur de la ville intelligente de demain. Le développement des NTIC permettra une meilleure gestion urbaine grâce à l’obtention et à l’analyse d’informations clés (fonctionnement des installations de production d’électricité renouvelable, état en temps réel des réseaux de distribution public, surveillance du trafic routier, mesure des niveaux de pollution, etc.) au travers d’un système d’exploitation urbain et d’une nouvelle infrastructure de gestion des connaissances.98 La ville intelligente est d’abord une ville mieux gérée grâce aux NTIC, cependant, cette utilisation ne crée pas en soi une ville intelligente. Ces technologies doivent être déployées en complément d’une stratégie plus globale pour la ville consistant à bâtir une cité répondant aux besoins des citoyens sur le long terme. Il s’agit d’une véritable mission de planification, à la fois pour les architectes et urbanistes, mais aussi et surtout pour les collectivités territoriales : les technologies devront être associées à des choix judicieux en matière de gouvernance.99

Cette gouvernance reposera sur une utilisation juste des informations recueillies, appelé Hard Data. À ce titre, certaines questions se posent. Jusqu’à quel niveau d’information aller ? À quel coût ? et qui sera en charge de la collecte et de l’analyse de toutes ces informations ?

98

https://fr.wikipedia.org/wiki/technologies de l'information et de la communication

99

Sciences & Technologie D – N°26, Décembre (2007), pp.43-50

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C’est la raison pour laquelle cette gouvernance renouvelée appelle à une plus grande transparence et une plus grande ouverture envers les citoyens-acteurs qui participent pleinement au développement urbain. Il s’agit de mettre le citoyen au cœur du processus de planification et, donc, de créer d’autres liens démocratiques entre les gouvernants et les usagés.

Ainsi, la ville doit être construite en fonction des préoccupations des habitants dans tous les domaines (forte demande sociale pour une meilleure santé, des modes de déplacement doux, plus de nature en ville, des circuits courts pour l’alimentation, une plus grande proximité entre les lieux de travail, de loisirs et d’habitation, une moindre vulnérabilité aux crises économiques mondiales et la création d’emplois locaux et durables).100 La ville intelligente est alors celle qui se reconstruit autour des besoins de ses habitants qui ne sont plus considérés comme des consommateurs des services mais comme des partenaires et des parties prenantes de son développement. Cette place nouvelle leur est accordée grâce à la démocratisation des moyens d’information permettant plus de participation.

La ville intelligente doit se définir donc, comme celle qui lie le développement urbain au développement humain. Cette planification urbaine : en particulier celle portant sur les infrastructures collectives reste ainsi déterminante pour la bonne évolution de la ville du futur.

Fig 34 Source : Google – Sidewalk Labs

100

Ci dessus : Sidewalk Labs / Google

http://europia.org/HyperUrbain1/HU1/paoli

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À l'heure de la Smart City, ce modèle est-il viable ? III.1.a

Data Learning et BigData, le pétrole du 21ieme siècle. Une décennie de stockage de donnés.

Cela fait maintenant près de 10 ans que l’IA récupère nos données par le biais d’internet et de nos objets connectés. Notre activité digitale génère une avalanche de données : à chaque minute 3,3 millions de contenus sont publiés sur Facebook, 3,8 millions de recherches sont lancées sur Google, 29 millions de messages envoyés sur l’application Whats App (source 2018)… Les experts estiment qu’en 2020 chaque être humain produira 1,7 mégabyte d’informations par seconde. 101

Les villes collectent toujours plus de données de tous types (sur les flux, les habitants, la consommation énergétique des bâtiments…). Cet amas de données constitue ce qu’on appelle communément le « Big Data ». Ce nouvel outil d’aménagement, de planification et d’organisation du futur urbain, une question se pose alors : le big data peut-il vraiment tout prédire en ville ? Quels sont les risques d’un tel stockage de données pour la ville et pour ses habitants ? L’aide des datas dans la compréhension de phénomènes complexes est importante. Ainsi, comme dans le domaine de la médecine où l’on capte toutes les informations sur le corps afin de diagnostiquer et contrôler sa santé, en ville ces différentes sources de données seraient un outil pour surveiller le bon état de son fonctionnement. Comme les corps des athlètes, les nouveaux bâtiments s’équipent de capteurs et mesurent leurs émissions, leurs consommations. Dans les rues, le mobilier urbain se modernise et accueille de multiples capteurs permettant de calculer le trafic et la pollution. D’ailleurs, en plus des stations d’Airparif, Paris a installé sur des voitures de fonction des micro-capteurs afin d’affiner les relevés. Les individus sont aussi, eux-mêmes, de plus en plus des sources d’acquisition de données par le biais des objets connectés, à commencer par le smartphone et ses multiples applications de mesure : localisation, nombre de pas, réservation de places de parking, etc. Autant de données potentielles pour mieux comprendre l’usage réel des citadins.

101

Intelligence artificielle, notre meilleure amie? – RTS – Youtube - 2018

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Le milieu urbain qui par sa nature est le lieu des flux et des échanges, représente une source gigantesque de données, propulsée par la multiplication des capteurs et des appareils connectés dans le quotidien des citadins. Depuis ces dernières années, l’avènement de l’ère numérique a généré un afflux massif de données dépassant les quantités compréhensibles.

Pour tenter de dessiner les villes de 2050, et malgré les incertitudes sur les sauts technologiques possibles, on peut tenter de cerner les évolutions à venir en fonction de contraintes déjà identifiables comme la démographie, la consommation énergétique, la localisation des logements et des emplois ou l’évolution du crédit. En revanche d’autres variables, comme le modèle géopolitique mondial, l’évolution des technologies, le coût du bâti ou l’avenir de l’agriculture sont moins bien identifiables.

Les technologies vont influencer aussi la manière de « faire la ville ». Déjà le GPS à partir des années 2000, et avec lui la révolution numérique, transforment les modes de déplacements des personnes et des marchandises. Mais dans le même temps, les exigences de mobilité dans les grandes conurbations se heurtent aux besoins budgétaires colossaux qu’exigent l’entretien des réseaux de transport qui ne peuvent, à terme, pour continuer à fonctionner, que s’appuyer sur une socialisation de leur coût. Le coût des matières premières, de l’énergie et du bâti va poser inexorablement la question de l’arbitrage entre l’habitat individuel et l’habitat collectif et aussi du choix de la vie à proximité de la nature ou de la ville.

Cependant, pour poser le pour et le contre, et pour faire le paradoxe de ce caractère pétrolier, ceci s’explique probablement par le fait que de nombreux commentateurs ont voulu faire du Big Data le « pétrole du XXIe siècle », montrant ainsi que les données occuperont une place centrale dans l'économie qui vient.

La comparaison est frappante, louable, mais elle est également erronée.

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D'abord, à l'inverse du pétrole, la data n'est pas une ressource non renouvelable. Au contraire, elle ne s'épuise pas et croît même à très grande vitesse : plus de 90 % des données disponibles auraient été produites dans les deux dernières années. 102 Dans un ouvrage sur les algorithmes103, Dominique Cardon rappelait que le monde génère en deux jours autant de données de communication qu'il en a créées entre son origine et l'année 2003. En 2015, 204 milliards d'e-mails étaient envoyés ou reçus chaque jour, engendrant autant de flux et d'échanges d'informations.

C'est donc un retournement conceptuel qui doit être opéré pour analyser cette ressource perpétuellement renouvelable. L'âge du pétrole a induit un écosystème d'opérateurs gigantesques, lui seul pouvant investir massivement dans un appareil industriel coûteux, capable d'assurer l'exploitation rentable de cette ressource finie.

La data, à l'inverse, est inépuisable et abondante à profusion. Elle peut être partagée et elle s'exploite sans coût fixe important.

Les dynamiques économiques qui en résultent sont donc fondamentalement divergentes. Là où le XXe siècle a vu émerger une industrie lourde avec de puissantes barrières, le XXIe entame son cycle de vie avec une économie fluide, rapide et dynamique. Comme l’explique Olivier Babeau, président de l'Institut Sapiens, confondre l'une et l'autre de ces ressources, c'est s'interdire de les penser vraiment, de les réguler correctement, de les développer ambitieusement. Mal identifier la richesse de demain, c'est aussi nous appauvrir.104 Il s’agit d’un enjeu énorme : la data est une source de croissance pour les entreprises d’Internet, mais également pour les industries traditionnelles qui y trouvent une connaissance plus fine de leurs clients, un suivi plus approfondi de leurs produits et de leurs usages.

102

AI Index 2018 Report – PDF – Disponible sur https://creativecommons.org/licenses/by-nd/4.0/legalcode

103

A quoi rêvent les algorithmes. Nos vies à l'heure - Dominique Cardon – 112 pages - Le Seuil - 2015

104

https://www.institutsapiens.fr/?s=big+data

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Fig 35 Source : AI Index 2018 Report – p.40

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III.1.b

Intégrer les systèmes d’IA dans notre ville contemporaine.

" Penser architecturalement, c'est imaginer et construire de nouveaux mondes, intégrer des systèmes et organiser l'information ". Christopher Alexander – 1964

Cette innovation consiste soit à intégrer le développement de technologies artificielles aux infrastructures existantes, soit à concevoir une architecture autour des systèmes d'IA. Et il y a beaucoup d'enthousiasme dans ce domaine, influencé en partie par le projet personnel de Mark Zuckerberg de développer des systèmes d'IA en réseau dans sa maison personnelle. Son souhait est de développer des systèmes d'IA simples pour faire fonctionner sa maison et l'aider dans ses tâches quotidiennes. A l’image de ‘Jarvis' dans le comics de super-héros « Iron Man ».

Cette technologie aurait la capacité de reconnaître les voix des membres de la maison et de répondre à leurs demandes. La société « Apple » a déjà développé un système similaire sur leurs smartphones, nommé SIRI. Il permet notamment de diriger des taches basiques par la voix, système co-développé par le français Luc Julia, qui reste très sceptique sur l’utilisation actuelle de l’IA.105 Les concepteurs relèvent le défi de concevoir des systèmes intégrés à la maison, comme le système Ori de mobilier sensible, ou des gadgets comme Elique pour la surveillance énergétique. Behnaz Farahi est un exemple de jeune architecte qui utilise ses recherches sur l'IA et les surfaces adaptatives pour développer des designs interactifs, comme dans son projet de mur "Aurora and Breathing".

Les chercheurs et les concepteurs travaillant dans le domaine de l'intelligence artificielle tentent de comprendre le potentiel de l'intelligence computationnelle pour améliorer ou même mettre à niveau des pièces dans le processus de conception, dans le but de créer un environnement de construction plus fonctionnel et optimisé pour l'utilisateur.

« L’intelligence artificielle est une débauche de données et d’énergie pour faire des choses très limitées» - l’Opinion – Interview – 2019 105

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Il a toujours été du ressort de l'architecte de prendre des décisions basées sur des ensembles complexes d'informations entremêlées et parfois contradictoires. Au fur et à mesure que l'intelligence artificielle s'améliore graduellement et permet de porter des jugements utiles dans des situations réelles, il n'est pas difficile d'imaginer que les processus se chevauchent et s'engagent les uns avec les autres.

Bien que ces développements aient le potentiel de soulever des questions en termes de propriété et, bien sûr, de protection de la vie privée dans la collecte et l'utilisation des données, l'essor des technologies d'auto-apprentissage modifie déjà la puissance et la portée des architectes tant dans les phases de conception que de construction. (Concevoir et Fabriquer).

Actuellement, de nombreux algorithmes d'IA sont encore relativement uniformes et il s'avère difficile d'automatiser (voir chapitre II) la prise de décision qui, à première vue, semblerait simple pour un esprit humain. Un certain nombre de laboratoires de recherche, comme le MIT Madia Lab, travaillent à résoudre ce problème.

Cependant, le langage architectural et les diagrammes ont fait partie intégrante de la programmation de systèmes et de logiciels complexes dès le début, et ils ont eu une influence significative les uns sur les autres.

Dès les années 1960, les architectes ont expérimenté des interfaces informatiques pour faciliter leur travail de conception, et leur réflexion a inspiré une grande partie de la technologie que nous utilisons aujourd'hui chaque jour.

En 1996 Christopher Alexander donne une conférence

106

à un auditorium de

programmeurs et informaticiens : (traduit de l'anglais) 107

Il a conclu en spéculant sur l'influence de l'informatique sur le futur environnement bâti.

« Vous savez que le langage de motif (celui de l'architecture) est constitué de ces objets intéressants et que vous essayez de créer. Mais il est possible d'avoir des processus ou des procédures qui iront beaucoup plus loin, générant réellement une structure vivante. En raison 106

http://www.patternlanguage.com/archive/ieee.html

107

Christopher Alexander - Patterns in Architecture – Youtube - 2013

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de la complexité de la situation mondiale et de l'évolution du logiciel, un logiciel conçu à cet effet pourrait très rapidement prendre le monde d'assaut. Pourquoi des informaticiens et des ingénieurs en logiciel seraient-ils soudainement responsables de la forme et de la structure de l'environnement bâti ? N'est-ce pas là le domaine des architectes, des urbanistes, des experts agricoles, des forestiers et des ingénieurs civils ? Ça devrait l’être. Mais les membres de ces professions n'assument pas la responsabilité de l'approche générative de la structure de vie - et ne peuvent donc pas la produire. Et, autant que je sache, ils ne la voient pas venir et ne se préparent pas à la prendre, mentalement ou professionnellement. Par conséquent, il incombera à quelqu'un d'autre de le faire leur place. Dans histoire, ce genre de changement inattendu est chose courante. Lorsqu'un changement de paradigme se produit, dans une discipline, ce ne sont pas toujours les membres de l'ancienne profession qui passent à l'étape suivante. Dans l’histoire de l’évolution technologique, très souvent, les personnes responsables de certaines spécialités sont suivies d’une innovation technique. Et puis les personnes qui deviennent responsables du domaine après l’innovation technique forment un groupe de personnes complètement différent. Lorsque l'automobile est arrivée, les personnes qui ont construit les chariots pour chevaux et l’hippomobile ne se sont pas transformées en Henry Ford. Henry Ford ne savait rien de l’hippomobile. Les personnes qui construisaient des automobiles sont venues du champ opposé, puis ils ont pris la relève - et le cheval et le chariot sont morts. »108

Fig 36 Source : A pattern Language - Christopher Alexander

108

Christopher Alexander - Conference on Object-Oriented Programs, Systems, Languages and Applications – Youtube – 2013 – 1h03

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III.1.c

Les problématiques du marché actuel.

Les promesses de l’IA, aussi belles soient-elles, découlent aujourd’hui d’un problème de société important, selon Eric Sadin, cet engouement populaire cache une sorte de féodalisation des pensées. Pour lui le techno-économique induit sur nos existences.109 Des berceaux des technologies numériques (Google, Apple, Facebook, Uber, Netflix...), la Silicon Valley incarne cette insolente réussite industrielle de notre époque. C'est aujourd’hui le lieu d’une frénésie innovatrice qui entend redéfinir de part en part nos existences à des fins privées, tout en déclarant œuvrer au bien de l’humanité. C’est là tout le danger. Car nous vivons aujourd’hui un moment de la technique qui voit ces développements, déterminés uniquement (dans leurs grandes majorité) par des intérêts économiques, des cabinets de tendance ou des départements de marketing de l’industrie … et cela pose une grande problématique à ce développement de l’iA. Cette pluralité de la technique est alors neutralisée au profit d’un développement qui s’inscrit dans une sorte de déplacement mono-directionnel, qui encore, selon Eric Sadin, ne pose pas les bonnes questions au sujet d’une entité aussi prépondérance que l’iA. D'après lui, l'IA telle qu'elle se développe aujourd'hui vient parachever l'ambition des grands acteurs du capitalisme numérique de s'infiltrer dans chaque interstice de notre vie privée pour y trouver de nouvelles sources de profit.110

Les engouements aveugles de la France dans ce milieu, doivent être réfléchis et calculés, afin de ne pas céder à une précipitation, pour limiter la transmission de données, intellectuelles et numériques à des entreprises superpuissantes qui sont totalement inféodées à leurs modèles économiques.111

109

Éric Sadin : l'asservissement par l'Intelligence Artificielle ? – Youtube - 2018

110

Eric Sadin : « Google ce n'est plus Internet. C'est la médecine, l'éducation... » - Youtube - 2018

111

La Silicolonisation du Monde – Eric Sadin – 291 pages - L'Échappée - 2016

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L'un des principaux obstacles à la mise en œuvre de l'IA est la disponibilité des données. Les données sont souvent cloisonnées ou incohérentes et de mauvaise qualité, ce qui pose des problèmes aux entreprises cherchant à créer de la valeur à partir de l'IA à grande échelle. Pour surmonter ce problème, vous devez d’emblée définir clairement votre stratégie en matière de recherche des données nécessaires à votre IA. Un autre obstacle majeur à l'adoption de l'IA est la pénurie de compétences et de disponibilité de personnel technique possédant l'expérience et la formation nécessaires pour déployer et exploiter efficacement des solutions d'IA. La recherche suggère que les scientifiques de données expérimentés sont en nombre insuffisant, de même que d'autres professionnels des données spécialisés compétents en apprentissage automatique, en formation de bons modèles, etc. 112

Autre problème, le coût est un facteur clé dans l'acquisition de technologies d'intelligence artificielle. Les entreprises dépourvues de compétences internes ou peu familiarisées avec l'intelligence artificielle doivent souvent faire appel à des agents extérieurs ou développer des services de R&D, ce qui pose des problèmes de coût et de maintenance. En raison de leur nature complexe, les smart technologies peuvent être coûteuses et cela fait encourir des coûts supplémentaires pour la réparation et la maintenance en continue. Le coût de calcul pour la formation de modèles de données, etc. peut également être une dépense supplémentaire. De plus, les logiciels doivent être mis à jour régulièrement pour s’adapter à l’évolution de l’environnement commercial (qui évolue vite) et, en cas de panne, présenter un risque de perte de code ou de données importantes. La restauration est souvent fastidieuse et coûteuse. Les autres limitations de l'IA concernent : 113 •

Le temps de mise en œuvre.

Les défis d'intégration et le manque de compréhension des systèmes de pointe.

Utilisabilité et interopérabilité avec d'autres systèmes et plates-formes.

112

McKinsey Quarterly - Confronting the risks of artificial intelligence - 2019

113

nibusinessinfo.co.uk

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Même si actuellement la question éthique de l’IA est assujettie à beaucoup de problématiques et d’inepties, il reste nécessaire d’en faire la quantification afin de proposer des axes de recherches plus pertinents dans les mois ou années à venir …

Il s'agit notamment : •

Le potentiel de la technologie de l'automatisation va entraîner des pertes d'emplois, notamment dans les métiers à forte pénibilité.

La nécessité de redéployer ou de recycler les employés pour les maintenir en poste.

Une répartition équitable de cette nouvelle richesse créée par l’IA et les machines.

L'effet et l'interaction des machines sur le comportement et l'attention de l'homme.

La nécessité de tenir compte du biais algorithmique provenant du biais humain dans les données.

La sécurité des systèmes d'IA (par exemple les armes autonomes) qui peuvent potentiellement causer des dommages.

La nécessité d'atténuer les conséquences involontaires ou inattendues, car on pense que les machines intelligentes apprennent et se développent de manière autonome.

Bien que nous ne puissions ignorer ces risques, il ne faut pas oublier que les progrès de l'IA et de la robotique peuvent, pour la plupart des cas, et si elle est mise en œuvre de manière responsable, avoir un potentiel immense et bénéfique sur la vie de l’être humain et dans sa manière de vivre.

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Les outils de gestion à l’échelle de la ville et du bâtiment. III.2.a

Ville connectée, quel sont les risques d’un BigBrother 3.0 ?

Référence évidente au roman 1984 de George Orwell, publié en 1949, la ville connectée effraie et interroge.

Quatre composants majeurs de toute smart city constituent une vulnérabilité pour les collectivités : les réseaux qui maillent les territoires ; les infrastructures qui aménagent les espaces et concernent les secteurs de la mobilité, de l’électricité, de la gestion de l’eau, etc. ; les objets connectés qui apportent de la connaissance et de l’intelligence ; les données collectées, stockées et analysées. La moindre faille de sécurité peut entraîner un dysfonctionnement, à l’image de la prise de contrôle d’un panneau d’affichage de la ville, une atteinte à la vie privée, comme le rappelait récemment la CNIL, voire un risque vital, si on imagine le sabotage d’un système de gestion de l’eau potable.

Afin de préserver ces technologies et ces données, éléments-clés des « Smart City », des mesures de sécurité doivent être mises en place ; et les responsabilités juridiques définies entre toutes les parties prenantes.

À qui appartiennent les équipements technologiques déployés dans la ville ? Qui doit en assurer la maintenance à long terme ? et qui possède réellement ces données ?

Autant de questions qui doivent servir de socle pour élaborer des contrats entre les collectivités et les acteurs privés, notamment les délégataires des services publics. Les NTIC et notamment l’Internet des Objets génèrent une masse formidable de données dont certains touchent à la vie privée et sont donc des données sensibles (données sur la santé et le transport, par exemple).

« Les objets connectés, même les plus simples telles les ampoules, renvoient énormément d’informations d’ordre très privé : quand est-ce que nous sommes chez nous, combien de personnes sont dans la maison, etc. Le niveau d’intrusion est très fort »

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Il y a donc un équilibre à trouver entre protection des données personnelles et progrès technologiques.

En tout état de cause, les informations recueillies et alimentant la plate-forme doivent demeurer privées, et en particulier : •

Ne pas pouvoir être transformées à l’insu de l’usager en données de type « marketing » exploitées par les grands groupes commerciaux du type GAFA (Google, Apple, FaceBook, Amazon)

Ne pas pouvoir servir à une surveillance et un contrôle des vies privées ;

Offrir une sécurité informatique maximale et protéger les utilisateurs des intrusions et des utilisations malveillantes (cybersécurité).

Il conviendra donc d’être vigilant sur : •

La typologie des données (data), qu’elles soient générées par l’habitant ou fournies par des acteurs extérieurs pour alimenter le « cerveau du bâtiment » (données météo, etc.…) ;

La sécurisation des échanges et des stockages d’information, notamment dans les « clouds ».

Le big data n’est donc pas tout rose. Les récents scandales de Facebook ont mis sur le devant de la scène toute la puissance qui peut être tirée de ces données et cela à des échelles sans précédent. Le problème majeur posé par le big data est celui de la récupération des données non anonymes : cette utilisation peut en effet conduire à la surveillance et la manipulation des individus. En Chine, le gouvernement tente de mettre en place un système de ‘’crédit social’’.114 Ce dernier est basé sur la récupération des données des citoyens à partir desquelles est élaborée une notation. Ainsi, comme dans les pires univers de science-fiction comme dans la série Black Mirror, il serait possible de connaître la “fiabilité” d’un citoyen en fonction de ses actions quotidiennes, puisqu’à partir de cette note l’accès aux transports ou l’acceptation dans les écoles pourraient être contrôlés.

114

” https://lumieresdelaville.net/chine-votre-comportement-dans-lespace-public-note-par-un-robot/

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Il s’agit aussi de veiller à ce que l’ensemble des services de « data » jouent le jeu en donnant accès à leurs données de manière transparente. Car aujourd’hui les “Data services”, autrement dit les services s’appuyant sur la donnée comme Uber ou Airbnb, se multiplient. Quelle gouvernance pour ces données ? Quels partenariats élaborer entre les puissances publiques et ces acteurs ? Les acteurs de la ville tentent de travailler de plus en plus avec ces fournisseurs d’informations, notamment pour analyser les usages, comme par exemple à Paris, où pour le réaménagement devant une de ces gares, Uber a fourni différentes données pour que les aménageurs saisissent mieux les problématiques de circulation et de mobilités.

Même lorsque les données sont anonymes, leur croisement peut parfois aboutir à l’identification d’individus et se pose alors la question de la protection de la vie privée. Face à la fuite de ces données et aux possibilités de retrouver des informations privées, des moyens de protection se mettent donc en place : on peut penser au Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD) 115 mis en application en 2016 en Europe qui contraint de nombreux sites à mettre à jour leurs paramètres de confidentialité. L’utilisation des données pour améliorer la vie des habitants de la ville passe donc non seulement par les outils de prédiction mais aussi par leur ouverture au public. Fournir des données sur la ville à ses habitants, c’est donner la possibilité à ceux-ci de prendre conscience de leur environnement et de leur donner des ressources pour agir. Une ville plus démocratique peut alors naître de cette masse d’information, à condition que ces données soient lisibles par tous et toutes. Car ce qui vient avec le big data c’est, comme son nom l’indique, un afflux massif de données qui ne sont pas compréhensibles dans leur état brut. « La ville est truffée de caméras et de capteurs qui enregistrent la température, le trafic, la consommation électrique… en temps réel. Tous ces appareils sont reliés à un « cerveau » central qui optimise la gestion de la ville minute par minute ». Cette description de la ville de Songdo, en Corée du Sud, est relatée par le chercheur coréen Frédéric Orjadas. Elle donne une idée de la ville « intelligente » et connectée de demain.116

115

https://www.economie.gouv.fr/dgccrf/nouvelles-regles-pour-confidentialite-donnees

116

https://www.maddyness.com/2016/09/28/ville-intelligente-futur-big-brother/

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III.2.b

Mobilité, la grande problématique actuelle.

Accroitre la mobilité, économiser de l’énergie, améliorer l’éclairage et mieux gérer ces déchets, telles sont les grandes problématiques des Smart City actuelles. Cependant une prévaut :

La mobilité urbaine est décrite comme l'élément vital des villes modernes et de la smart city, un facteur économique essentiel et un simplificateur au développement intelligent et durable. 117 La planification d'une ville intelligente offrant des solutions efficaces et équitables en matière de mobilité urbaine est l'un des problèmes les plus pressant pour les villes du monde entier. Dans ce chapitre nous donnons une perspective sur les défis de la mobilité et des exemples de solutions d’une mobilité urbaine intelligente de demain.

Fig 37 Source : tecdev cité par ERDF

Les villes intelligentes doivent fournir des solutions de mobilité intelligentes efficaces tout en encourageant l'innovation, en facilitant la création d'un « écosystème » collaboratif tout en respectant les objectifs de durabilité. Ces défis font partie du paysage en mutation rapide de la mobilité urbaine à venir, tel qu'il est perçu par un urbaniste 3.0. Les stratégies pour relever les défis de la mobilité urbaine et résoudre les problèmes de mobilité urbaine sont propres à chaque ville et impliquent notamment : •

Concevoir des systèmes de transport public efficaces, équitables, sûrs et sécurisés, intégrés aux plateformes de mobilité en tant que service (MaaS) et autres.

117

https://ec.europa.eu/transport/themes/urban/urban_mobility_fr

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S'adapter à l'innovation et à l'adoption de véhicules - autonome, connecté, électrique, partagé, sans station d'accueil – et sans pilotes.

Élaborer des politiques et des stratégies visant à promouvoir le respect des normes de qualité de l'air et d'autres mesures de qualité de vie

Développer des partenariats public-privé (PPP) et collaborer avec des institutions du « savoir » pour résoudre les problèmes de qualité de l'air, de congestion du trafic et de la durabilité.

Construire une infrastructure durable - physique et numérique - pour soutenir les solutions de mobilité innovantes des secteurs public et privé.

Facile sur le papier, cependant les problèmes de la mobilité de demain sont nombreux, comme McKinsey&Company l’affirme il existe peu d'endroits où cette réalité de la mobilité urbaine "correspond aux aspirations du public en matière de moyens sûrs, propres, fiables et abordables pour passer d'un point à un autre - et de revenir à la normale".118 Trouver des moyens d'améliorer la mobilité urbaine tout en "réduisant les encombrements, les accidents et la pollution est un défi commun à toutes les grandes villes d'Europe".119

Ainsi, prendre des mesures pour réduire et contrôler les niveaux de pollution est une priorité majeure. "La mobilité urbaine représente 40% de toutes les émissions de CO2 du transport routier et jusqu'à 70% des autres polluants provenant des transports" dans l'UE. Un rapport extrêmement critique de la Cour des comptes de l'UE indique que la plupart des pays européens ne respectent pas les normes de qualité de l'air. Cette pollution atmosphérique est désormais le "plus grand risque environnemental pour la santé publique en Europe, causant environ 400 000 décès prématurés par an […] mais l'impact

118

https://www.mckinsey.com/business-functions/sustainability-and-resource-productivity/our-insights/anintegrated-perspective-on-the-future-of-mobility - 2018 119

ttps://ec.europa.eu/transport/themes/urban/urban_mobility_en,

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considérable de l'air toxique ne s'est pas traduit par des mesures visant à en réduire les émissions."120 121

Bien que les villes reconnaissent les avantages des transports publics dans la réduction de la pollution et de la congestion, les efforts des autorités locales visant à en tirer parti peuvent se heurter à des modèles économiques perturbateurs tels que Uber et d’autres services de transport. La popularité de « la course » a "transformé le marché des transports dans plus de 600 villes"122 et, dans certains cas, Uber est considérée comme une menace pour celles-ci en augmentant la pollution et la congestion, tout en réduisant le nombre d'usagers des transports publics. Pour de nombreux citoyens (en particulier ceux des banlieues), les transports en commun sont une option peu attrayante si les arrêts de transport en commun sont trop éloignés de leur domicile ou de leur lieu de travail. C'est le problème du premier/dernier kilomètre des transports publics.123 Le portage et d'autres options de partage offrent la possibilité de compléter les transports en commun.124 Le défi consiste à surmonter le problème du premier et du dernier kilomètre pour permettre des trajets centrés sur le citoyen en intégrant les transports publics aux services de relance, de covoiturage, de partage de véhicules et de billetterie intelligente.

Malgré les mesures prises pour améliorer la sécurité de la mobilité urbaine, "les accidents de la route augmentent dans de nombreuses villes et représentent 37% du nombre total d'accidents de la route en Europe en 2017. 125 Cette densité urbaine, est associée aux voitures, camions et véhicules de transport en commun. Or, le fait de partager des rues surpeuplées, rend les usagers de la route vulnérables (piétons, cyclistes et motocyclistes) dans les faits, la tâche qui consiste à assurer une mobilité sure et multimodale est un défi complexe, faisant l’objet de nombreux travaux de chercheurs et d’étudiants. Faisant d’avantage appel aux technologies numériques, le secteur des transports est confronté à des risques croissants de cyber sécurité. (voir p.77)

120

https://www.independent.co.uk/environment/air-pollution-europe-uk-eu-commission-court-health-whotoxic-environment-a8533061.html 121

Air pollution: EU citizens’ health still not sufficiently protected, warn Auditors – PDF - 2018

122

http://individual.utoronto.ca/jhall/documents/Uber_and_Public_Transit.pdf,

123

Mobilités du dernier kilomètre – Transdev – PDF

124

https://www.sharedmobility.news/urban-mobility-ride-sharing-public-transit/,

125

https://www.itf-oecd.org/road-safety-annual-report-2018

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Les cybercriminels sont de plus en plus capables d’attaquer non seulement la technologie de l’information, mais également la technologie opérationnelle qui gère les systèmes de signalisation et de contrôle d’une ville."126 Les cyberattaques pourraient alors perturber les réseaux de transport urbain et provoquer des pannes dans les services de transport public. En développant des solutions innovantes de transport dans les smart city, les villes sont confrontées au défi de garantir la facilité d'utilisation et la continuité des services pour les citoyens à mobilité réduite et ceux qui vivent dans une "pauvreté de transport". Ainsi, il n’est pas seulement nécessaire de proposer un moyen de transport révolutionnaire et hors d’atteinte de la classe populaire, mais bien d’un système multimodal, écologique, intelligent et adaptatif, afin de proposer une expérience de mobilité urbaine plus saine et plus sure que celle qui existe déjà.

Fig 38 Source : UberAir – 2018

126

https://www.smartcitiesworld.net/special-reports/special-reports/the-cyber-security-threat-totransportation,

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III.2.c

IA et optimisation de la consommation énergétique du bâtiment.

La consommation énergétique des bâtiments est responsable de plus de 30% des émissions de CO2. A New York, ce chiffre s'élève à 70%, faisant ainsi des gratte-ciels la principale source de pollution de la ville. Dès lors, comment l’IA peut-elle nous aider à réduire l’empreinte énergétique des bâtiments ?

127

Parallèlement, l’urbanisation croissante et la digitalisation des échanges amèneront les villes à jouer des rôles de leaders dans la révolution énergétique ; il leur faudra relever des défis importants en termes de surveillance, de gestion des réseaux, de l’offre et de la demande en énergie. On parle aujourd’hui de ‘’smart grids’’ et de ‘’centrales électriques virtuelles’’ (Virtual Power Plant) : des systèmes intégrant tous les types de sources dans un cluster de générateurs distribués, ainsi que des capteurs multiples remontant des données sur l’offre et la demande, permettant ainsi d’optimiser les diverses sources d’énergie. Selon l’agence internationale de l’énergie, la demande mondiale en énergie augmenterait de 37% d’ici 2040. 128

En 2030, 50% des bâtiments présents sur les sols américains seront issus de construction ayant eu lieu avant les années 2000. Il est donc crucial d’être en mesure d’optimiser ces bâtiments existants (avec des infrastructures parfois vieillissantes).

Maxen Technology (start-up Québécoise) espère atteindre cet objectif en agissant sur des données complexes. La startup entraine ainsi son IA à optimiser l’efficacité énergétique d’un bâtiment en prenant en compte des données externes (la météo, environnement …) et internes (un plateau peut bénéficier de la chaleur produite par l’étage d’en dessous). L’IA peut également être utilisée pour augmenter la part d’énergies renouvelables utilisées par les bâtiments.

127

https://www1.nyc.gov/office-of-the-mayor/news/663-17/mayor-dramatic-drop-energy-use-carbonemissions-large-buildings-citywide 128

https://webstore.iea.org/statistics-data

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« Au Texas, on peut vous payer, notamment la nuit, pour que vous utilisiez l’énergie éolienne produite » David Hsu - Professeur de planification urbaine et environnementale au MIT Ce phénomène s’explique par un décalage entre l’offre d’énergies vertes et la demande d’énergie. Dès lors, l’IA, en prévoyant les pics de consommation (et de production d’énergies renouvelables) pourrait pallier ce problème.129

Le quartier connecté amène à la dernière étape dans la gestion énergétique des villes qui concerne la résilience des systèmes. L’inter-connection permet de gérer les crises après des tornades, des sinistres graves, ou des usages critiques et d’améliorer la capacité du système à se remettre en marche. Le réchauffement climatique et l’urbanisation des populations montre combien il est crucial de penser dès aujourd’hui la résilience de nos villes : les crises seront de plus en plus fréquentes et répandues. Pour autant, et en dépit de ces possibilités, l’IA est loin d’être une solution miracle. « On aura encore besoin d’énergies non-renouvelables. Ne serait-ce que parce que le vent ne souffle pas toujours et que le soleil ne brille pas à longueur de journées… » (D.H). Si cette technologie peut optimiser des modèles, il est de notre responsabilité de les questionner et d’en imaginer d’autres, plus durables.

129

Bâtiment responsable et Intelligence Artificielle - PDF - Groupe de travail « Réflexion Bâtiment Responsable 2020-2050 » - 2018

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L’enjeu est de faciliter la récupération des données afin de les rendre accessibles après des opérations de transformation pour les exploiter. En effet, beaucoup de bâtiments sont déjà connectés, mais la collecte des données est difficile et coûteuse. Les constructeurs ont chacun leur langage propre et les normes sur les capteurs et les protocoles de communication ne sont pas encore totalement établies. IntentOS, la solution logicielle d’Intent est vue comme un PAAS (Platform as a Service) et permet l’accès aux données de capteurs sur un grand parc de bâtiments afin de valoriser ces données. Si la pose de capteurs est déjà utile au niveau d’un bâtiment individuel pour permettre l’optimisation de la consommation d’énergie avec des gains importants, on ne pourra vraiment exploiter tout le potentiel du bâtiment connecté que dans l’interconnexion des systèmes. Le bâtiment connecté et les « Smart Grids » sont aujourd’hui des secteurs innovants et en construction. Cependant il est prématuré d’adopter une stratégie globale et une planification figée. La mise en place et l’évolution des systèmes sera très complexe et très progressive.130

De plus, les normes et les processus devront être décidés de façon souple et adoptés au fur et à mesure, autour d’un écosystème en perpétuelle évolution et extrêmement contraint. La seule manière de parvenir à un contrôle et une souplesse satisfaisante est la collaboration de tous les acteurs, bi ou tri-latérales dans un premier temps, au travers de projets innovants, puis de manière multilatérale, lorsque suffisamment d’expérimentations auront été menées pour fournir une connaissance plus globale, tirer des conclusions et prendre les décisions adaptées. L’occupant devra alors avoir la liberté de se déconnecter, de reprendre la main, d’interrompre les automatismes. La technologie doit être une offre de services que l’occupant a toujours loisir de refuser. L’usager ne doit pas avoir le sentiment de perdre le contrôle de sa vie face aux tout-puissants algorithmes et l’automatisation ne doit pas restreindre l’autonomie de l’individu.

- 130 Sciences et Avenir - L'intelligence artificielle au service des économies d'énergie dans le bâtiment 2018

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Le respect de la vie privée et la liberté d’agir sont des conditions sine qua non. Ces deux conditions recoupent de nombreuses questions d’éthique que soulèvent aujourd’hui de façon urgente certains développements de l’IA. A ces deux conditions s’ajoute une condition d’une nature autre : le Bâtiment Responsable intelligent doit se présenter comme une entité ludique, avec laquelle on a plaisir à interagir. Le Bâtiment Responsable intelligent est appelé à devenir un « être familier » avec qui on dialogue à partir de son smartphone, un « être » capable de reconnaître votre visage, vos mouvements, et qui apporte son intelligence pour plus de confort, de sécurité et de services, dans une perspective de développement durable. Avec l’IA et l’exploitation des données, le champ des possibilités va s’élargir. Ainsi, pour obtenir le réglage des systèmes de manière à assurer de façon optimale le confort souhaité, il est aujourd’hui envisageable de rapprocher : •

Des

données

extérieures :

données

météorologiques

instantanées

et

prévisionnelles, coût de l’énergie… •

Des données liées au bâtiment et contenues dans la maquette numérique [BIM Building Information Modeling] : caractéristiques de l’enveloppe (conductivité, inertie des matériaux), caractéristiques des équipements (chauffage, ventilation, ECS)…

Des données liées aux comportements et aux usages des occupants : horaires de présence, habitudes de confort…

D’ores et déjà, certains bâtiments actuels intègrent l’offre de ces services dans leur programmation, leur conception et leur fonctionnement, ce bâtiment devra être prêt à servir de support à cette offre de services de façon permanente, autrement dit être « prêt à être équipé ».

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Quelle que soit sa finalité (logement, tertiaire ou équipement), le bâtiment d’aujourd’hui se présente comme un ensemble de haute technicité. Actuellement, les TIC contribuent à une exploitation rationalisée et performante du bâtiment et de ses divers systèmes techniques, notamment dans les domaines de la gestion technique du bâtiment, la sécurité incendie, la sûreté…

Les TIC contribuent à : •

Recueillir des informations dans un bâtiment en cours d’exploitation (température, qualité de l’air, quantité de lumière…) ;

Transmettre ces informations ; les stocker ; les traiter ; les rapprocher d’autres données.

Développer un service de suivi des consommations énergétiques ;

Assister à l’exploitation, automatiser certaines tâches, gérer les incidents, optimiser la gestion dynamique des systèmes techniques (chauffage, circuit aéraulique, occultation des baies…).

Fig 39 Source SmartBuilding.com

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Les résultats sont : •

Réduction de la consommation et des coûts énergétiques ;

Réduction des taux de pannes, de l’usure, des délais d'intervention ;

Diminution du nombre d’interventions de maintenance inutiles ou inefficaces

Augmentation de la disponibilité du matériel et des personnes, de la qualité de service et de la réactivité.131

Ainsi, dans le domaine énergétique, les TIC sont d’un apport incontestable. Elles contribuent à l’efficacité énergétique de façon accessible, adaptable et pérenne, prenant en compte les comportements et les demandes des occupants. Pour tous ces services rendus, l’IA joue un rôle important. Le plus souvent, elle fonctionne sur le mode de la régulation experte basée sur des modèles physiques. Un exemple élémentaire est fourni par le thermostat, qui fonctionne selon une boucle de rétroaction et qui se substitue au réglage manuel auquel procéderait l’occupant. Aujourd’hui, l’IA permet le traitement des données recueillies, notamment par les objets connectés. Depuis les années 2010, l’IA s’est ouverte à l’apprentissage profond [deep learning] qui permet aux machines d’apprendre par elles-mêmes, sans avoir été explicitement programmées pour cela. Avec l’Intelligence Artificielle, le bâtiment gagne un « cerveau ». Ce cerveau acquiert une compréhension des usages, peut les anticiper, proposer de nouveaux réglages, en intégrant de nombreuses données, ce qui ne serait pas possible à l’occupant et/ou au gestionnaire. Le bâtiment se comporte de façon plus dynamique vis-à-vis de ses occupants. Dans ce domaine, l’IA devrait avoir de forts impacts. Ainsi, pour le commerce, la livraison des colis, essentielle pour le commerce numérique, pourrait être facilitée par une gestion intelligente de l’accès au domicile (autorisation et contrôle à distance). Autre exemple, pour les transports, les systèmes experts déjà utilisés (détermination d’itinéraires, optimisation dans le choix des modes…) pourraient être complétés par des systèmes intégrant plus de paramètres (recharge intelligente des véhicules électriques au domicile par exemple)

131

Bâtiment responsable et Intelligence Artificielle - PDF - Groupe de travail « Réflexion Bâtiment Responsable 2020-2050 » - 2018

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Bien entendu, les NTIC et les applications de l’Intelligence Artificielle peuvent être considérées comme ambivalentes par rapport à la transition énergétique actuelle : elles offrent des sources possibles d'efficacité, mais aussi des occasions de consommations supplémentaires de ressources (effet rebond), voire de gaspillage (utilisation de gadgets ou nouveaux usages énergivores). Il est donc impératif d’établir un bilan précis pour chacune de ces innovations afin de pouvoir estimer avec précision leurs impacts environnementaux. La notion de « cerveau » du bâtiment évoquée plus haut doit être considérée comme un concept ouvert, dont le but est de fédérer les innovations fondées sur l’Intelligence Artificielle et de les promouvoir. Une politique en faveur des apports de l’Intelligence Artificielle au Bâtiment Responsable devrait se fonder sur les multiples initiatives qui se font jour aujourd’hui. Cette politique devrait ainsi correspondre à une démarche bottom-up, favorisant les initiatives (innovations, offres de service…) et cherchant à éliminer les éventuels freins et blocages.

Présentation détaillée, d’un potentiel cheminement de DATA, dans une production architecturale de demain. 132

Fig 40 Source : Architecture and Urban Planning in the age of Artificial Intelligence par Rron Beqiri

132

http://futurearchitectureplatform.org/news/28/ai-architecture-intelligence/

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Le 3 Janvier 2016 133 , Mark Zuckerberg, PDG de Facebook annoncé son défi annuel. Concevoir une IA à l’image de JARVIS du film « Iron Man », qui pourrait entièrement gérer sa maison personnelle. Un défi de taille connaissant les attaques qui lui seront portées en 2018 pour revente de données illégales… Les aspects les plus difficiles du projet consistent à faire fonctionner cette IA sans intervention directe de sa part, là où celle-ci se différencie de la domotique classique. La maison pourrait devenir un membre à part entière de la famille. Elle filmerait et enregistrerait chaque fait et geste de celle-ci, afin d’apprendre leurs habitudes de vie, afin d’anticiper les demandes et besoins.

Source : Facebook Fig 41 Facebook – JARVIS TASK

En service depuis 2017 134, (au bout de seulement 100h de travail ) son IA personnelle (à l’image d’Alexa d’Amazon) est en mesure de résoudre une multitude de taches organisationnelles de la maison, là où un service de ce type serait plus intéressant que notre domotique actuelle vient principalement du fait de son anticipation, en parti gérée par le deep learning, des algorithmes de traitement du langage naturel, de reconnaissance vocale, de reconnaissance faciale et d’apprentissage par renforcement.

133

https://www.facebook.com/zuck/posts/10102577175875681

134

https://www.youtube.com/watch?v=ZGLPxEv_EWo

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La maison ne se contente plus d’être seulement connectée et automatisée, elle apprend et communique, car Zuckengerg a également couplé ce système à Messenger de Facebook pour directement discuter avec lui. Ainsi le PDG explique, « Etant au travail à l’autre bout de la ville, je peux demander à JARVIS de monter le chauffage, ou fermer les stores et d’être alerté lors de visites … » car il est également capable de reconnaître ses visiteurs, de les laisser entrer s’ils sont autorisés ou d’alerter Mark Zuckerberg de leur arrivée.

Cette « smart house » serait donc la suite logique de notre domotique actuelle, cependant cela pose de nouvelles difficultés, Dans un article, Mark Zuckerberg raconte que l’un des premiers challenges techniques a consisté à connecter les différents équipements de la maison, car chacun utilise son propre langage et son propre protocole de communication.

Le patron de Facebook explique également à quel point il est important pour une AI de comprendre le contexte. Il donne un exemple pour illustrer cette problématique : lorsqu'il demande à Jarvis de mettre la climatisation dans son bureau, cette demande ne signifie pas la même chose que lorsque sa femme fait exactement la même requête, puisque chacun a son propre bureau. Pour améliorer les capacités de son assistant virtuel, Mark Zuckerberg a donc adopté une approche d’apprentissage par renforcement. « Cette méthode ressemble au dressage d’un animal de cirque ou d’un animal de compagnie : on attend que l’animal fasse la bonne action et on lui donne une récompense. C’est ce type d’apprentissage qui a été utilisé pour entraîner le logiciel AlphaGO135. Au jeu de Go, lorsque la machine gagne, elle se dit qu’il faut refaire la même chose. A chaque essai, on donne finalement très peu d’informations à la machine » expliquait Yann Lecun, directeur du laboratoire d’intelligence artificielle de Facebook. 136 A l’avenir, le patron de Facebook aimerait trouver le moyen d’apprendre à Jarvis la capacité d’apprendre. Concrètement, cela signifie que la machine serait capable d'apprendre toutes les choses que nous apprenons en observant le spectacle du monde. Ce qui est au final, LE grand défi scientifique de l’intelligence artificielle.

135

Le monde - Intelligence artificielle : toujours plus puissant - 2017

136

https://www.industrie-techno.com/article/yann-lecun-facebook-l-apprentissage-predictif-est-le-grand-defiscientifique-de-l-intelligence-artificielle.43641

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Ce mémoire avait pour ambition de déterminer si le milieu de l’architecture était en train de vivre un changement majeur de son temps, en ciblant si malgré tout, même avec un outil aussi intuitif qu’est l’IA, le travail de l’architecte garderait tout son sens.

Nous sommes aujourd'hui confrontés à un défi fantastique : intégrer l'IA au monde de la conception, de la fabrication et de la gestion architecturale. Il ne fait aucun doute que l'intelligence artificielle ne pourra jamais automatiser l'intuition et la sensibilité de l'architecte, car à la vue des avancées actuelles, celles-ci restent trop complexes à étudier par un système informatique.

Du moins, selon Yann Le Cun, cela implique qu'il faudrait des progrès conceptuels qui sont du ressort de la science et non de la technologie, et cette singularité n’est pas pour bientôt. Malgré cela, il ne fait aucun doute que l’IA va automatiser le processus conceptuel des architectes dans leur pratique quotidienne. En parallèle à cette rigueur algorithmique, il est intéressant de poser la question du hasard et de l’imprévu, chose prépondérante à tout projet architectural, car la question de l’inconnue et de la recherche reste vitale pour le métier d’architecte. Comme l’explique Stanislas Chaillou, sur un plan conceptuel, il est préférable de croire à une approche statistique de la conception, qui façonnerait d’une meilleure manière le potentiel que possède l’IA envers l’architecture. Son caractère moins déterministe et plus holistique est sans aucun doute une chance pour notre domaine.

Plutôt que de voir un danger en l’intelligence artificielle, l’Homme pourrait utiliser les machines comme outil. Un outil ponctuel, puissant et intuitif, qui aurait la possibilité de créer de nouvelles philosophies et de nouveaux esthétismes, là où la capacité de l’humain ne serait plus suffisante : nous parlerons d’une collaboration entre humain et machine. Car, bénéficier d'un assistant intelligent, comme l’explique Mark Zuckenberg, est à notre portée et doit être étudié, testé et expérimenté.

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De plus, l'IA n'est pas le simple résultat d'une découverte soudaine. C'est le point culminant de 70 ans d'inventions et d'innovations. Suite aux développements des économistes Richard Lipsey and Kenneth Carlaw, l’IA est la dernière des general purpose technology. Or, le but même d’une technologie d'usage général est d’induire des ruptures dans notre modèle sociétal préétabli afin de proposer des améliorations et un changement de paradigme (comme l’électricité, l’automobile, les chaines de production …)

Dans la mesure où l'intelligence artificielle peut concilier efficacité et organicité tout en offrant une grande variété d'options de conception pertinentes, nous devons y voir la possibilité d'obtenir des résultats riches et variés, qui viendront compléter notre pratique et remédier à certains angles morts de notre discipline. Loin de penser à l'IA comme un nouveau dogme en architecture, nous devons concevoir ce domaine comme un nouveau défi, plein de potentiel et de promesses. Cependant aujourd’hui, et comme énoncé dans ce mémoire, la grande problématique actuelle de l’IA, reste le risque de faire disparaitre une grande partie des métiers de l’architecture, et ce dans les trois champs sémantiques présentés précédemment. Il est alors facile pour les détracteurs de parler de déshumanisation de l'architecture ; cependant cela permet, finalement, et contre toute attente, de reconnecter la pratique de l’architecture et de la construction, tout en remettant en avant la place de l'architecte dans le processus de fabrication de son projet.

On constate donc, après étude de propositions comme le SmartSlab (ETH) que l'homme à défaut d’être remplacé, travaillerait plus en collaboration avec la machine et le robot, afin de proposer un tout nouveau type d’architecture.

A l’image d’une continuité de l’architecture bionique mise en place dans les années 2000, il est intéressant de noter, qu’étonnamment, le côté « organique » ressort des propositions de design issues d’une Intelligence Artificielle. Alors que nous aurions tendance à présager quelque chose de rationnel, cartésien et finalement scientifique, nous voyons apparaitre des formes et des structures que nous pourrions retrouver dans la nature. Ces formes intelligentes et conscientes, répondent au seul besoin de l’utilisateur, sans surplus,

ENSAM – Mémoire Master – Loïck Maire - 2019 - 94 -


elles sont à considérer comme une mixité parfaite entre nouvel esthétisme et fonctionnalisme algorithmique. Ces nouveaux outils que propose l’IA sont évidemment sujet à de grandes spéculations. De nombreuses agences de recherche et développement sont actuellement sur le pied de guerre, pour devenir des pionniers, dans ce qui sera probablement l’un des enjeux les plus rentable et prépondérant des 20 prochaines années. Cela reste du ressort des collectivités publiques (une sorte de contre-pouvoirs) de commencer à limiter cette course effrénée à ce techno-capitalisme, pour devenir à leurs tours l’un des leaders mondiaux et de ne pas subir par la suite ces avancées technologiques afin que celles-ci ne deviennent pas une force contraignante et un élément de négociation.

Il serait alors nécessaire de mieux contrôler les grandes entreprises comme les GAFA, (Google, Apple, Facebook et Amazon), Autodesk ou Nvidia qui restent les entreprises privées les plus avancées dans ce domaine. Ces sociétés à la pointe des technologies liées à l’IA et à la robotique, ont une politique dite « mondialisée » qui pose le risque de voir naitre des monopoles encore plus puissants, voire exclusifs, si ce n’est déjà fait …

Ainsi, le risque est grand : il ne serait pas impossible d’assister à une réduction de la pratique architecturale à une simple vision capitaliste, régie par les lois de l’offre et de la demande. Ce techno-pouvoir grandissant est clairement expansif, (surtout en France) il est alors nécessaire qu’il fasse l’objet de plus de contrôles vis-à-vis des citoyens, politiques et des législateurs, et ce, surtout à l’international.

De plus, ceci pose clairement la question de la formation des architectes et des métiers liés à ce domaine d’étude, car nous sommes aujourd’hui dans une zone d’ombre ou des nouvelles problématiques et de nouveaux outils se posent au métier, ces difficultés apparaissent et questionnent le fondement même de l’architecture. Doit-on faire confiance en la machine ? Doit-elle avoir le dernier mot ? A-t-elle raison ?

Effectivement, cela est un peu prématuré en 2019 de dire s’il sera plus rentable pour l’architecte de faire appel à tous ces nouveaux métiers liés à l’IA (data scientist, data ENSAM – Mémoire Master – Loïck Maire - 2019 - 95 -


analyst, data engineer, robot programmer, drone pilot …), car aujourd’hui la formation n’est pas tellement ouverte à cette disruption, elle a probablement besoin de plus de temps pour s’étayer et proposer de nouvelles visions. Qui ne tarderont pas à se démocratiser par l’afflux et les recherches des nouvelles générations d’architectes, qui elles, auront été accompagnées depuis leur naissance par cet assistanat intelligent. Par ailleurs, l’autre question fondamentale de l’utilisation de l’IA dans notre métier devra être jumelée à la grande problématique actuelle de notre temps : le changement climatique et l’impact de l’élément construit sur notre planète.

Au vu du chemin emprunté par la société mondiale actuelle (dans ce domaine), il serait alors tentant de laisser les commandes à une IA, qui avec l’aide de l’impression 3D et de la robotique pourraient permettre de modifier la manière dont les architectes conçoivent les édifices de demain, en particulier si les modularités qu’apportent ces nouvelles technologies, nous permettent de voir apparaitre des manières plus neutres de créer la ville et l’architecture de demain. Leurs rapidité et efficacité d’exécution doivent permettre une nette amélioration en termes d’énergies grises et de pollution des chantiers, pour servir une remise en question rapide du cycle de vie du bâtiment.

Nous pouvons alors facilement imaginer qu’en raison de l’évolution de notre société et de ça complexification, l’humain ne puisse plus arriver à tout gérer avec les anciennes méthodes, celui-ci aura rapidement besoin d’une aide extérieure, plus rationnelle et plus impartiale, non assujettie à des crises égocentriques et au maniérisme du pouvoir. L’IA pourrait alors répondre à ce besoin, car nous avons ici l’opportunité de construire une nouvelle base solide pour le discours architectural. C’est une nécessité qui ramènera l’architecture à sa place : en tant qu’art et science, un produit de la sensibilité intellectuelle et de la rigueur technique.

Finalement, l’intelligence artificielle, serait pour l’architecte et l’architecture, une façon de se réinventer, dans une sorte de perspicuité et de simplicité.

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Bibliographie Ouvrages

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Ouvrage Collectif Architectural Drawings Recognition and Generation through Machine Learning, Hao Zheng Weixin Huang ACADIA 2018 Charniak, Reisbeck & McDermott, Artificial Intelligence Programming, PP, 1980, 554p CityScope: A Data-Driven Interactive Simulation Tool for Urban Design. Use Case Volpe – 261 pages – 2018 Faschingeder, Kristian, VIII. ARCHITECTURE, AN ARTIFICIAL INTELLIGENCE, 2019 PROSPECTIVE - Intelligence artificielle - État de l’art et perspectives pour la France – Rapport final – 333 pages – 2019 Robotics and automated systems in construction: Understanding industry-specific challenges for adoption - Journal of Building Engineering - Volume 26, November 2019

Articles Web https://syndicat-architectes.fr/actions - Pétition autodesk, 2018 https://www.ted.com – Maurice Conti / Tom Mayne / Mijay Kumar , 2015 https://www.architectes.org https://leonard.vinci.com/ https://leonard.vinci.com – villes du futur, 2017 https://www.espazium.ch/fr/actualites/vers-une-architecture-automatique https://www.arch2o.com/ - Construction assisté par drones, 2017 https://www.ethz.ch/de.html - Ecole de Zurich https://www.youtube.com/watch?reload=9&v=kPeKTFRUGZA – Iconem, 2018 https://vimeo.com/ - Hive: A Human and Robot Collaborative Building Process, 2016 https://www.youtube.com – Philipe Morel - Conférence / la Gaîté Lyrique, autour du nouveau Mastère Spécialisé® "DESIGN by DATA" – ParisTech, 2018 http://www.smartcitymag.fr – AI for SmartCity https://mx3d.com/ - Robotique , 2018 https://autodeskresearch.com – Projet Living, 2018 https://adsknews.autodesk.com/ - Projet Autodesk @ MaRS, 2015 https://www.architectmagazine.com/project-gallery/autodesk-mars-office_o https://www.smart-world.online https://www.machinedesign.co http://www.designatlarge.it/the-drones-files-1-will-drones-change-the-way-we-designcities/?lang=en

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Revues

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Filmographie Alex Garland, 2015, Ex Machina, UK, DNA Films Alex Proyas, 2004, I,Robot, USA, Davis Entertainment Christopher Nolan, 2014, Interstellar, USA, Paramount Fritz Lang,1927, Metropolis, Allemagne, UFA (Universum-Film AG) James Cameron, 1984, Terminator, USA, Hemdale Film Corporation Jon Favreau, 2008, Iron Man, USA, MARVEL Les Wachowski, 1999, Trilogie Matrix, USA/Australie, Warner Bros. Mamoru Oshii, 1995, Ghost in the Shell, Japon, Production I.G Neill Blomkamp, 2015 et 2013, Chappie & Elysium, USA, Media Rights Capital Ridley Scott, 1982, Blade Runner, USA, The Ladd Company. Spike Jonze, 2013, Her, USA, Annapurna Pictures Stanley Kubrick, 1968, 2001 : L'Odyssée de l'espace, UK/USA, Metro-Goldwyn-Mayer Steven Lisberger, 1982, Tron, USA, Walt Disney Productions Steven Spielberg, 2001, A.I. Intelligence Artificielle, USA, Warner Bros. Steven Spielberg, 2002, Minority Report, USA, Amblin Entertainment Steven Spielberg, 2018, Ready Player One. USA, Warner Bros. Wally Pfister, 2014, Transcendance, USA/UK/CHINE, Alcon Entertainment

ENSAM – Mémoire Master – Loïck Maire - 2019 - 99 -


TABLE DES ILLUSTRATIONS FIG 1 SOURCE : STANISLAS CHAILLOU - AI + ARCHITECTURE – P18-19 FIG 2 SOURCE : THE ANSWER COMPANY / AUTEUR FIG 3 SOURCE : PRONTO FIG 4 SOURCE : SKETCHPAD 1962 FIG 5 SOURCE : USAGE. UX AND DIGITAL EXPERIENCE FIG 6 SOURCE : A MODEL OF STADIUM N – BY LUIGI MORETTI FIG 7 SOURCE : IHS STATISTA 2019 FIG 8 SOURCE : AUTEUR FIG 9 SOURCE: AUTODESK MARS OFFICE FIG 10 SOURCE: AUTODESK MARS OFFICE FIG 11 SOURCE: AI + ARCHITECTURE - STANISLAS CHAILLOU FIG 12 SOURCE : MIT - CITYSCOPE FIG 13 SOURCE : DENSITE DE ROBOTS TRAVAILLEURS / PAYS FIG 14 SOURCE : HACKERNOON.COM FIG 15 SOURCE : « CITES MILLENAIRES » - EGLISE NOTRE-DAME DE L’HEURE - ICONEM - 2019 FIG 16 SOURCE : ELEVATION - YOUTUBE FIG 17 SOURCE : ICONEM.FR FIG 18 SOURCE : FLIGHT ASSEMBLED ARCHITECTURE - 2011 FIG 19 SOURCE HANSMEYER ET DILLENBURGER'S GROTTO PROTOTYPE. FIG 20 SOURCE : GRAMAZIO KOHLER RESEARCH, ETH ZURICH FIG 21 SOURCE : ROBOT SCIENCE MUSEUM FIG 22 SOURCE : CHI SHE – ARCHI-UNION ARCHITECTS - 2016 FIG 23 SOURCE : JAPAN’S AIST FIG 24 SOURCE : INSTAGRAM - @MAMOUMANI FIG 25 SOURCE :MULE135 – CONSTRUCTION ROBOTICS FIG 26 SOURCE : SHIMIZU CORP FIG 27 SOURCE : POLIBOT – SOURCE MAMOU-MANI.COM/PROJECT/THE-POLIBOT FIG 28 SOURCE : ADDITIVE MANUFACTURING EN MILLIONS D’EUROS FIG 29 SOURCE : WASP – PROJET GAIA FIG 30 SOURCE : SMART SLAB FIG 31 SOURCE : MX3D FIG 32 SOURCE : GOOGLE – SIDEWALK LABS FIG 33 SOURCE : AI INDEX 2018 REPORT – P.40 FIG 34 SOURCE : A PATTERN LANGUAGE - CHRISTOPHER ALEXANDER FIG 35 SOURCE : TECDEV CITE PAR ERDF FIG 36 SOURCE : UBERAIR – 2018 FIG 37 SOURCE : SMARTBUILDING.COM FIG 38 SOURCE : ARCHITECTURE AND URBAN PLANNING IN THE AGE OF ARTIFICIAL INTELLIGENCE FIG 39 SOURCE : FACEBOOK – JARVIS TASK

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LIGNE DU TEMPS Source Stanislas Chaillou AI + ARCHITECTURE THESE 2019

ENSAM – Mémoire Master – Loïck Maire - 2019 - 101 -


ANNEXES Diagramme Source Lucia Wang

Diagramme Source Auteur

ENSAM – Mémoire Master – Loïck Maire - 2019 - 102 -


Architecture and Urban Planning in the age of Artificial Intelligence – Rron Beqiri

ENSAM – Mémoire Master – Loïck Maire - 2019 - 103 -


Concevoir, Fabriquer, Gérer En quoi l’intelligence artificielle induit une disruption dans les métiers de l’architecture.

Mémoire de Master Loïck Maire

Sous la direction de Élodie Nourrigat, Architecte, Docteure en Architecture, Professeure à l’ENSAM.

06 Novembre 2019

ENSAM – Mémoire Master – Loïck Maire - 2019 - 104 -


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Articles inside

LIGNE DU TEMPS

1min
page 100

BIBLIOGRAPHIE

6min
pages 96-99

III.2.a Ville connectée, quel sont les risques d’un BigBrother 3.0

5min
pages 77-79

III.3 Vers une Smart Home plus intuitive

2min
pages 90-91

CONCLUSION

7min
pages 92-95

III.2.b Mobilité ; la grande problématique actuelle

5min
pages 80-83

III.2.d L’intelligence artificielle au service du bâtiment responsable

3min
pages 87-89

III.2.c IA et optimisation de la consommation énergétique

4min
pages 84-86

III.1.c Les problématiques du marché actuel

4min
pages 74-76

III.1.b Intégrer les systèmes d’IA dans notre ville contemporaine

4min
pages 71-73

III.1.a Une décennie de stockage de donnés

5min
pages 67-70

p

11min
pages 58-66

II CHAPITRE II FABRIQUER

10min
pages 35-41

I.3.b Machine Learning pour l’Architecture & l’Urban Design

5min
pages 31-34

II.1.c Comment cette adoption du drone va changer les villes

5min
pages 46-48

II.1.b Photogrammétrie et construction, le drone : outil du futur

5min
pages 42-45

p

3min
pages 52-54

II.2.b L’expérience : Humain et Robots, construire ensemble

3min
pages 55-57

I.3.a La « donnée » d’une IA pauvre

4min
pages 28-30

I.2.b Design Decision Making

4min
pages 24-27

I CHAPITRE I CONCEVOIR

2min
pages 14-15

INTRODUCTION

5min
pages 10-13

Glossaire

2min
pages 8-9

I.1.b Intuitive Design, vers une révolution de notre manière de concevoir

1min
page 17

Pétition de l’UNSFA

2min
page 7

Avant propos

2min
pages 3-4

I.1.c Le Generative Design en architecture, formidable avancée technique

3min
pages 18-21
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