Private Banking (mars 2023)

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Private Banking

Dans les coulisses de Puilaetco

La patience est la meilleure vertu des investisseurs en art

Ces cinq femmes d’exception qui gèrent votre patrimoine

Un plafond de verre? Pas dans les banques privées belges, où ce sont surtout les femmes qui mènent la danse. Nous avons rencontré Pascale Lommez (BNP Paribas Fortis), Joke Reynaerts (KBC), Nathalie De Taeye (ING), Isabelle Verhulst (Belfius) et Sabine Caudron (Degroof Petercam) pour une table ronde sur les marchés financiers, la digitalisation, l’investissement durable et la touche féminine. p8-11

Les frais de gestion cachés seront-il supprimés?

© JONAS LAMPENS Supplément de L’Echo l Jeudi 30 mars 2023
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Non, votre banquier privé ne vous coûtera pas plus cher

Les coûts des services fournis par les banquiers privés et les wealth managers ne devraient pas augmenter en raison de l’inflation, à quelques exceptions près. «Les banquiers réfléchissent à deux fois avant de répercuter certains coûts sur leurs clients», nous dit-on.

Combien les services d’un banquier privé ou d’un wealth manager pour les grands patrimoines, coûtent-ils? La réponse à ce e question est loin d’être simple, en témoignent ceux qui prennent le temps de passer au crible les sites internet des acteurs majeurs du secteur. Soit ils ne trouvent pas de liste de prix – «consultez nos conseillers» est la mention que l’on retrouve le plus couramment –, soit ils n’ont accès qu’aux tarifs d’une partie des services, soit ils accèdent à une description complète de plusieurs dizaines de pages. Sélectionner un banquier privé sur base des tarifs affichés n’est donc pas une sinécure, tout comme l’a este un responsable d’un des grands noms de ce domaine, qui souhaitait rester anonyme: «Les coûts appliqués dans ce secteur sont difficilement comparables. Si les clients veulent comparer, il leur faudra passer un mois avec un expert à leurs côtés.»

Très schématiquement, on peut dire que la rémunération des banquiers représente souvent un pourcentage des actifs gérés, combiné ou non avec un montant annuel fixe. Ce pourcentage, qui dépasse rarement 1% des avoirs – si l’on en croit les informations disponibles – baisse à mesure que les montants

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investis augmentent. Mais toutes sortes d’autres frais peuvent être facturés pour certains services supplémentaires.

Les quatre grands acteurs Quel est, dès lors, l’impact de l’inflation sur les tarifs bancaires des services réservés aux clients fortunés? À quelques exceptions près, on peut dire qu’il est inexistant, nous apprend un sondage que nous avons réalisé auprès des dix principaux acteurs du marché (basé sur un classement réalisé au printemps 2022 sur la base des actifs gérés). Il s’agit – par ordre d’importance – des quatre grandes banques BNP Paribas Fortis, KBC, Belfius et ING, suivies par Degroof Petercam, Delen, Deutsche Bank, ABN Amro, Puilaetco et Mercier Van Lanschot. Ensemble, elles représentaient en octobre plus de 400 milliards d’euros d’actifs sous gestion, soit la part du lion du marché belge. Mercier Van Lanschot est la seule banque à avoir refusé de nous fournir des informations sur ses coûts. «Nous suivons de près l’évolution du marché, la concurrence au sein du secteur de la banque privée et la rentabilité de notre banque. En ce e période de turbulences sur les marchés financiers, nous nous concentrons sur la qualité de nos services et nous tenons nos clients informés des changements éventuels», explique la responsable de la communication, Ilse Delcour. Le dernier tarif disponible sur le site internet de la banque date de mi-2021.

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«Les coûts appliqués dans ce secteur sont di icilement comparables.»
BERT BROENS
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Deutsche Bank et Puilaetco sont les seules banques à avoir augmenté leurs tarifs, quoique très légèrement. La porte-parole de Puilaetco, Laure-Eve Monfort, a fait savoir que ce e augmentation avait été décidée dans le cadre du lancement, l’an dernier, du nouveau service digital Richer Life Plan, qui donne aux clients un aperçu complet de leur patrimoine. «Pour couvrir en partie les coûts de ce nouveau service et suivre l’inflation, nous avons légèrement augmenté nos tarifs, c’est-à-dire d’environ 3%», explique-t-elle.

Chez Deutsche Bank, deux des cinq types de services ont été légèrement augmentés au début de l’année, explique le porte-parole Jean-Michel Segers. La hausse des tarifs oscille entre 5 et 10 points de base (0,05 et 0,10 point de pourcentage) par an, en fonction du montant des avoirs des clients. Rien ne change pour la majorité d’entre eux. «Après plusieurs années sans augmentation, nous avons décidé d’aligner davantage nos tarifs de banque privée sur le niveau et la qualité des services fournis. Mais nous avons fait en sorte que Deutsche Bank reste moins chère que la plupart de ses concurrentes, alors que nous avons continué à élargir notre offre», poursuit Jean-Michel Segers.

Le leader du marché, BNP Paribas Fortis, qualifie la décision de ne pas modifier ses tarifs de «geste en faveur des clients en période difficile». «Malgré la hausse des taux et l’impact de la baisse des marchés financiers, BNP Paribas Fortis a décidé, en septembre 2022, de geler les coûts des différentes formules et contrats en 2023. La banque a pris ce e décision pour aider ses clients à faire face à la situation économique et à l’inflation», explique le porte-parole Valéry Halloy.

«Malgré la hausse des taux et l’impact de la baisse des marchés financiers, BNP Paribas Fortis a décidé, en septembre 2022, de geler les coûts des di érentes formules et contrats en 2023.»

VALÉRY HALLOY

PORTE-PAROLE DE BNP PARIBAS FORTIS

Son confrère de chez KBC, Stef Leunens, indique que les tarifs ne suivent pas automatiquement l’inflation. «Une telle décision est toujours basée sur plusieurs paramètres.» Lander T’Sjoen, responsable de la gestion produits chez ABN Amro Private Banking Belgique, reconnaît que l’inflation a un impact important sur les coûts de la banque. «En outre, elle a un impact négatif sur les marchés financiers (y compris pour les clients, NDLR). Il est donc difficile d’augmenter nos coûts simultanément.» Jacques Delen, président de la banque privée éponyme, qui facture en général un pourcentage des actifs gérés, souligne qu’en cas de hausse de l’inflation, les bourses sont les premières à réagir négativement. «Mais, à terme, les cours s’adaptent et remontent. Par conséquent, notre rémunération suit. Nos marges se réduisent légèrement – quoique temporairement – et nos coûts augmentent, mais en règle générale, la situation finit par revenir à la normale. Espérons que ce soit également le cas ce e fois-ci. En outre, Delen est une banque bien gérée et nos coûts sont bas par rapport à nos revenus. Donc même si les marges se retrouvent sous pression, nous ne risquons pas de nous retrouver la tête sous l’eau.»

Une forte concurrence

Un haut responsable d’une grande banque privée, souhaitant aussi rester anonyme, indique que «les banquiers réfléchissent à deux fois avant de répercuter des frais à leurs clients», ajoutant que les banques privées et le wealth management sont les derniers segments où une banque est susceptible d’augmenter ses tarifs. Cela s’explique par la forte concurrence qui caractérise ce marché: ceux qui jouent avec les prix risquent de perdre des parts de marché.

Olivier Goerens, directeur des ventes et du marketing Private Banking et Wealth Management chez Belfius, renchérit: «On trouve de nombreux acteurs sur le marché et ce dernier est

La rémunération des banquiers représente souvent un pourcentage des actifs gérés, ce pourcentage étant combiné, ou non, avec un montant annuel fixe. © REUTERS

très concurrentiel. En cas de hausse des prix, vous risquez de voir vos clients se tourner vers un concurrent. Notre part de marché est aujourd’hui de 15% et nous ne cachons pas notre ambition de continuer à nous développer. Ce n’est donc pas le moment d’augmenter nos tarifs.»

Olivier Goerens avance un autre argument pour légitimer ce e hésitation: «Notre clientèle est vaste comparée à celle des banques de niche, ce qui nous permet de répartir nos coûts sur un nombre plus important de clients.» Filip Verstreken, responsable de Private Banking Investment Solutions chez Degroof Petercam, parle lui aussi de concurrence féroce. Il souligne, en outre, que la hausse des taux est positive pour les revenus des banques, «ce qui compense, en partie, l’inflation et l’augmentation des salaires.»

Il ajoute: «Nous essayons de nous organiser aussi efficacement que possible pour compenser la hausse des coûts. (…) En banque privée, nous développons des relations à long terme avec nos

clients. C’est pourquoi nous ne modifions pas nos coûts dès que l’inflation augmente. Dans la gestion discrétionnaire – la formule choisie par la majorité de nos clients – nous sommes passés à un tarif ‘all-in’. À l’époque, nous avons dû démontrer à nos clients que cela ne changeait rien pour eux, mais que c’était plus transparent». Le professeur Bruno Colmant, ancien CEO et responsable de la banque privée chez Degroof Petercam, met en lumière un autre aspect des frais facturés par le secteur: l’impact de la technologie. «L’intelligence artificielle, comme ChatGPT, devrait provoquer une ‘disruption’ dans le segment de la banque privée. Elle perme ra aux clients de se constituer plus facilement un portefeuille par eux-mêmes. À long terme, cela devrait avoir un impact sur les commissions facturées aux clients. La valeur ajoutée du banquier privée sera modifiée, en ce sens qu’il devra davantage se consacrer, par exemple, à la planification successorale au lieu de la ‘simple’ gestion des portefeuilles.»

COMBIEN VOTRE BANQUIER PRIVÉ GAGNE-T-IL?

En Belgique, les banquiers privés gagnent relativement bien leur vie, comme le démontrent les chi res du spécialiste en recrutement Robert Walters. Un banquier débutant, qui comptabilise entre cinq et neuf ans d’expérience dans le secteur financier gagne entre 70.000 et 110.000 euros brut par an. Si ce dernier a entre neuf et 15 ans d’expérience, sa rémunération se situe entre 80.000 et 130.000 euros brut par an. Au-delà de 15 ans d’expérience, un banquier privé peut même gagner plus de 200.000 euros par an. Ce dernier montant est surtout réservé aux gestionnaires d’équipes. «Les autres gagnent moins», explique Stephen Fournier, senior consultant chez Robert Walters et spécialisé dans le secteur financier. Stephen Fournier est arrivé à ces chi res sur la base des données d’environ 100 employeurs du secteur et de ses contacts avec les banques. Il ajoute cependant qu’il ne s’agit pas d’une science exacte. «Il s’agit plutôt des grandes lignes du secteur.»

Ces chi res concernent aussi bien les banquiers privés que les wealth managers. Ils datent de 2022 et comprennent une partie de l’inflation de l’an dernier. Selon Stephen Fournier, ils varient d’un employeur et selon le profil du collaborateur. «Les banquiers privés sont répartis entre les ‘farmers’ – qui s’occupent des contacts avec les clients existants – et les ‘hunters’ – qui cherchent à convaincre de nouveaux clients. Les ‘hunters’ gagnent généralement davantage que les ‘farmers’, car ils amènent des clients et des actifs. Ils sont cependant davantage sous pression. Mais ici aussi, il n’y a pas de règle universelle.»

En plus de leur salaire, les banquiers privés bénéficient d’autres avantages comme une voiture de société, des assurances, un ordinateur et un smartphone. De nombreuses banques fonctionnent également avec des systèmes de bonus qui dépendent des performances du banquier privé.

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«Les banquiers réfléchissent à deux fois avant de répercuter des frais à leurs clients.»

Quand Puilaetco sortira-t-elle de ses starting-blocks luxembourgeois?

La maison mère luxembourgeoise de Puilaetco, Quintet, a récemment annoncé une nouvelle restructuration de sa banque privée belge. Une annonce qui émerge alors que ces dernières années, de nombreux gestionnaires de fonds et stratèges ont qui é le groupe. Mais si l’on en croit Puilaetco, cela ne remet pas en question ses ambitions de croissance: «Nous sommes au contraire des précurseurs».

Il y a au moins une chose dont les collaborateurs de Puilaetco ne devraient pas s’inquiéter. Lorsque la banque privée s’installera, à la fin du mois de mai, dans le bâtiment iconique de la Royale Belge à Watermael-Boitsfort, à un kilomètre de ses bureaux actuels, ses voisins pourront lui prêter main-forte. Car dans le bâtiment de l’Avenue Hermann-Debroux, où le quartier général de Puilaetco est encore installé, se trouvent également l’European Elevator Association ainsi que l’European Lift Association, deux sociétés de lobbying pour qui le déménagement de mobilier et d’équipements de bureaux n’a plus aucun secret. Il y a deux ans, lorsque Puilaetco a annoncé son déménagement pour investir l’ancien siège de la Royale Belge –aujourd’hui «Le Souverain 25» – sa patronne, Ludivine Pilate, avait laissé entendre que ce e installation s’inscrivait dans l’image de dynamisme que la banque souhaitait refléter. Puilaetco, un groupe dont les origines remontent au milieu du XIXe siècle, essaie en effet, depuis plusieurs années, de se doter d’une nouvelle image. Il y a trois ans, la banque a abandonné l’appellation «Dewaay». Ludivine Pilate n’a pas caché qu’elle souhaitait également s’adresser à un public plus jeune, avec une gamme de produits adaptée et un nouveau réseau d’agences. Le déménagement à Watermael-Boitsfort devrait être l’aboutissement de ce e transformation. Pour développer sa présence sur le marché belge de la banque privée, Puilaetco dispose d’un autre atout. Depuis 2004, la banque fait partie du groupe luxembourgeois Quintet, l’ancienne KBL European Private Bankers, contrôlée par le fonds qatari Precision Capital. L’informatique et le réseau international de Quintet, actif dans six pays, doivent servir de catalyseurs à la croissance de Puilaetco, entièrement supervisée depuis trois ans par les autorités de contrôle financier luxembourgeoises. Malgré ce e opération de lifting, Puilaetco – qui comptabilise 11 milliards d’euros d’actifs sous gestion – est restée quelque peu à la traîne dans le classement des plus grandes banques privées du pays. Même si notre dernière enquête (octobre 2022) a révélé que les turbulences boursières de l’année dernière avaient eu moins d’impact sur les actifs gérés par Puilaetco que sur ceux de plusieurs de ses concurrents.

La maison mère Quintet est en pleine restructuration. En février, elle a annoncé qu’elle souhaitait supprimer 165 postes (sur un total de 2.000) pour augmenter son efficacité et renforcer la collaboration entre les différentes filiales. Pour Puilaetco, l’impact de ce e mesure devrait être plutôt limité. La banque privée belge compte aujourd’hui 179 collaborateurs. «Seuls quelques postes devraient disparaître, mais aucun licenciement sec n’est prévu. Cela se fera naturellement via des départs à la retraite et des départs volontaires», nous dit-on.

Des clients chevronnés

La restructuration devrait toucher toutes les entités de Quintet. «Au sein du groupe, nous sommes précurseurs sur de nombreux plans, notamment grâce à nos excellents résultats», explique Georges Nédée, responsable «Client Solutions» et membre du Comité de direction de Puilaetco. Non pas que la banque ait eu des mois faciles, poursuit Georges Nédée. «À l’instar de nos concurrents, les turbulences sur les marchés financiers ont eu un impact sur nos actifs sous gestion. Heureusement, de nombreux clients sont des investisseurs chevronnés et n’ont pas paniqué.»

Au même moment, la banque a profité d’une autre bonne nouvelle. «La nouvelle

politique de taux de la Banque Centrale européenne (BCE) nous a donné un énorme coup de pouce, car nous avons d’importantes liquidités inscrites à notre bilan», explique Georges Nédée. La décision de la BCE de resserrer sa politique monétaire n’est pas arrivée trop tôt. Tout comme d’autres banques privées, Puilaetco a vu ses revenus d’intérêts se réduire d’année en année, tandis que les lourds investissements dans la nouvelle stratégie, la digitalisation et la mise en conformité de la banque avec les nouvelles réglementations ont pesé sur les résultats. Selon les dernières données disponibles, Puilaetco affichait une perte de 479.000 euros en 2019, la dernière année avant que le groupe ne soit placé sous supervision luxembourgeoise. Mais si l’on en croit Georges Nédée, Puilaetco a toujours été rentable sur le plan opérationnel – c’est-à-dire sans tenir compte des évènements exceptionnels – et ce e rentabilité s’est même améliorée l’an dernier, grâce à la hausse des taux d’intérêt, mais aussi à l’introduction d’un nouveau mix de produits et à un strict contrôle des coûts. «Il y a quelques années, notre ratio coûts/revenus était encore de 90. Aujourd’hui, il se situe aux alentours de 60, avant prise en compte des coûts du groupe.» Selon Georges Nédée, ces résultats ont pu être a eints, non pas à coup de lourdes

La maison mère Quintet est en pleine restructuration. En février, elle a annoncé qu’elle souhaitait supprimer 165 postes sur un total de 2.000.

restructurations, mais parce qu’une partie des tâches administratives est déléguée à la maison mère luxembourgeoise, ce qui permet à Puilaetco de se concentrer sur les aspects commerciaux de son métier. Au même moment, l’offre de services a été simplifiée, ce qui a également réduit les coûts. «Il y a huit ans, au moment du rachat d’UBS Belgique, de nombreux clients de ce e banque ont opté pour la gestion-conseil. Entre-temps, nous avons pu convaincre une grande partie d’entre eux de se tourner vers la gestion discrétionnaire.» Pour rappel, dans le cadre de la gestion discrétionnaire, les clients délèguent à la banque la totalité de la gestion de leur portefeuille. Ce e méthode de travail est généralement moins chère pour les banques que la gestion-conseil.

Une volière?

Cependant, tout le monde n’est pas d’accord avec ce e grille de lecture. Il y a deux ans, Frank Vranken, Chief Strategist et Chief Investment Officer, a qui é la banque. L’été dernier, quatre gestionnaires de fonds lui ont emboîté le pas parce qu’ils ne se retrouvaient plus dans la nouvelle stratégie de la banque.

«Depuis que Puilaetco a été absorbée par Quintet, elle est devenue une volière», explique une source qui préfère rester anonyme. «De nombreux collaborateurs

sont partis parce qu’ils ne reconnaissaient plus leur banque. En outre, la mayonnaise ne semble pas avoir pris entre les différentes filiales du groupe Quintet. Les Qataris se sont rendu compte que les banques européennes qu’ils avaient rachetées avaient du mal à augmenter leur part de marché. Leur souhait de vendre Quintet n’est d’ailleurs qu’un secret de Polichinelle. Mais les candidats au rachat ne semblent pas se bousculer au portillon.» Le directeur de Puilaetco a déjà entendu ces bruits de couloirs. «Nous ne pouvons jamais exclure que le groupe soit vendu, mais nous bénéficions d’un engagement sans faille de notre actionnaire. Ces dix dernières années, il a d’ailleurs prouvé sa confiance dans le groupe. C’est un fait que plusieurs collaborateurs ont qui é Puilaetco, mais le turnover de nos employés n’est pas très différent de celui des autres acteurs du secteur. Le nombre de nos employés est resté stable par rapport aux années précédentes. Plusieurs personnes – pour la plupart des ‘généralistes’ – sont parties à la suite de l’intégration opérationnelle de Puilaetco dans le groupe Quintet.»

«La nouvelle politique de taux de la Banque Centrale européenne (BCE) nous a donné un énorme coup de pouce, car nous avons d’importantes liquidités inscrites à notre bilan.»

GEORGES NÉDÉE MEMBRE DU COMITÉ DE DIRECTION DE PUILAETCO

«Alors qu’auparavant Puilaetco se concentrait principalement sur la gestion d’actifs financiers, nous sommes aujourd’hui davantage un acteur qui accompagne ses clients dans la gestion de leur patrimoine», poursuit Georges Nédée. «L’an dernier, nous avons conclu un accord de collaboration avec la fintech belge Abbove, spécialisée en gestion patrimoniale. Nous nous intéressons également à l’immobilier, aux assurances, aux investissements dans l’art, etc. Des secteurs pour lesquels il faut disposer d’une expertise dans divers sous-domaines.» D’après Georges Nédée, la dernière réorganisation chez Quintet ne devrait pas freiner la croissance de Puilaetco. «Nous sommes en train d’accélérer notre croissance organique, notamment parce que nous avons aussi commencé à proposer des services à des clients institutionnels», explique le manager. «Nous cherchons activement des partenariats qui devraient nous aider à augmenter notre part de marché. Il peut s’agir d’une société fintech comme Abbove, mais aussi d’un assureur ou d’une société de private equity.»

La question de savoir si la banque poursuivra sa stratégie de croissance sous le nom Puilaetco reste sans réponse. Un changement de nom ne peut être exclu. «À court terme, nous n’avons aucun projet de changement de nom», explique Georges Nédée. «Nous voulons passer à la vitesse supérieure, en particulier en Flandre, où nous sommes en deçà de notre potentiel. C’est pourquoi nous réfléchissons aujourd’hui à une façon de nous positionner sur ce marché. Mais nous ne voulons pas perdre de vue notre histoire et la place que nous occupons sur le marché belge.»

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Private banking
©
PIETER SUY
PIETER VAN EENOGE
private banking asset management investment banking asset services degroofpetercam.com We understand the different sides of your wealth. Expand. Horizons. Éditeur responsable : Banque Degroof Petercam SA, rue de l’Industrie 44, 1040 Bruxelles I TVA : BE 0403.212.172 (RPM Bruxelles) - FSMA 040460 A. I Mars 2023

Private banker, un métier au cœur de votre intimité financière

de besoins et d’attentes spécifiques, se construit patiemment et doit reposer sur des bases solides.

La mission du private banker, c’est de perme re à ses clients de dormir sereinement avec leur patrimoine. Quelles sont les qualités requises pour gérer ces relations très personnelles?

MURIEL MICHEL

Le private banker exerce un métier extrêmement sensible, puisqu’il rentre dans l’intimité du client par la voie la plus secrète: l’argent. Le chargé de relation, comme on a également coutume de l’appeler, doit avoir une vue à 360 degrés sur la situation financière personnelle et familiale (et, dans certains cas, professionnelle) de son client. Il doit connaître les besoins de ce dernier sur le bout des doigts, pour lui garantir une gestion «tailor-made», un suivi personnalisé et une sérénité maximale.

Psychologie

On devine aisément que ça ne s’improvise pas. Pourtant, ça ne s’apprend pas non plus. Si ce e mission requiert un minimum de connaissances en économie, en finances, sur les marchés, ainsi que des capacités didactiques, la condition sine qua non d’une alchimie parfaite, ce sont les «soft skills». «Un état d’esprit, des compétences innées pour s’adapter à son interlocuteur», résume

Michael Harris, Head of Private Banking & Wealth Management à la Banque Nagelmaeckers. Des qualités humaines au premier rang desquelles le sens de l’écoute (des besoins et des souhaits), l’empathie et la confidentialité, pour une approche subtile. Chaque client qui va se dévoiler ayant son propre rapport à l’argent qu’il va falloir décoder, appréhender, analyser et gérer. Tout cela en tenant compte des interférences et des particularités de son environnement familial. «Le client advisor doit faire preuve de beaucoup de psychologie. Parfois, il m’arrive même de me sentir comme une sorte de psychologue patrimoniale», assure ainsi Isabelle Simon, Senior manager Private banking chez Puilaetco. «Dans un dîner ou une réception, lorsqu’on me demande ce que je fais dans la vie, je réponds ‘je suis réducteur d’angoisse’. Du coup, on pense que je suis psy et cela suscite beaucoup de curiosité», confie pour sa part Rémy Dercq, Head of Private Banking Brussels & Wallonia chez

Degroof Pertecam, qui compte, dans son entourage, des collègues historiens, informaticiens, économistes ou ingénieur de formation.

«Ce qui importe avant tout, c’est d’être multi-compétent».

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«Partner in life»

«L’enjeu, c’est d’être un véritable ‘partner in life’. Cela exige des contacts fréquents, de visu, pour créer la confiance», souligne Michel Buysschaert, CEO de Delen Private Bank. «Un bon chargé de relations doit avoir une passion pour la connexion avec son client, bien au-delà de son portefeuille», résume-t-il. C’est pourquoi les private bankers ont en général un portefeuille limité à 100 ou 150 relations familiales. «Il faut pouvoir leur accorder du temps, les voir régulièrement. Deux à trois fois par an, pour conserver le lien. Ou à la demande, pour ceux qui sont plus stressés», confie Isabelle Simon.

Lorsqu’une relation de confiance s’instaure, vu les enjeux, c’est souvent parti pour des décennies, sur plusieurs générations. Isabelle Simon évoque ainsi spontanément «ses familles», ce qui donne la mesure de son a achement et de la profondeur du lien qu’elle a établi avec elles. «La principale préoccupation des clients, ce sont leurs enfants et la transmission du patrimoine aux enfants.»

Les performances, sources de tension

Les principales sources de stress et de questions sont les conditions de marché et les performances. «Le client auquel on demande ‘comment

allez-vous’? vous ’répondra toujours ‘Cela dépend de vous (comprenez, des résultats du rapport de gestion)… », observe Rémy Dercq.

La majorité des clients veut éviter les tracas quotidiens de la gestion de son patrimoine. Elle délègue. L’ancienne génération est tout à fait dans cet état d’esprit. Chez Nagelmaekers le «dicton de la page 4» est célèbre. «90 à 95% des clients s’arrêtent à la page 4 du rapport de rendement de leur portefeuille. Ils se limitent au résultat, les détails ne les intéressent pas. Notre rôle est d’aller au-delà, donner un explicatif rationnel sur le contexte, les raisons pour lesquelles on a a eint ce résultat et de faire des projections à l’horizon de trois, six et douze mois.

Pour qu’ils puissent se projeter et réagir de la façon la moins épidermique possible le jour où ils seraient confrontés à un épisode compliqué», explique Michael Harris. «Lorsque les marchés sont contraires, il est indispensable d’être proactif. Il n’y a rien de pire, pour le client, que de découvrir son relevé de portefeuille à la fin du trimestre, de constater que les marchés ont baissé et qu’entretemps, il n’a eu aucun contact», estime Isabelle Simon.

La mauvaise appréciation du profil d’investisseur est un autre grand classique. Définir un horizon de placement et une sensibilité au risque, cela reste très théorique. Lorsque le risque se matérialise, perdre effectivement 10 ou 20%, pour certains, c’est insoutenable et provoque des réactions irrationnelles. Dans ces circonstances, le mot d’ordre est de tenir un discours positif et de recadrer. «Un contexte négatif peut aussi être source d’opportunités. Et que représentent quelques mois ou une année de volatilité dans la vie d’un portefeuille d’investissement», suggère Michael Harris. «L’objectif étant de démontrer que les options qui ont été prises initialement restent d’actualité. Et que même si les circonstances de marché ont évolué, il ne faut pas tout reme re en cause, pour autant que la logique de base ait été bien définie».

Le plus frustrant? Les clients qui prennent la

«Un bon chargé de relations doit avoir une passion pour la connexion avec son client, bien au-delà de son portefeuille.»

mauvaise décision, malgré les explications et les mises en garde, et qui, ensuite, se plaignent qu’on ne les a pas suffisamment prévenus ou empêchés de vendre. «On ne peut forcer un client à rester dans une situation qui le stresse». Si cela suscite un ressentiment ou de la frustration, s’il faut trouver un «responsable», il vaut mieux alors changer de private banker.

Scénarios familiaux

Pour Rémy Dercq, le plus complexe à gérer, cela reste les scénarios familiaux. «Par exemple, lorsqu’au sein d’une famille, le patrimoine a été tabou, qu’on n’en a jamais parlé et que les enfants découvrent subitement, lors d’un décès, l’existence d’une somme d’argent importante». Ou des épisodes malheureux comme une séparation, un accident de santé, un enfant handicapé qui conduisent à repenser complètement les choses.

L’entrepreneur, client atypique

L’entrepreneur est un client un peu atypique, observe Rémy Dercq. «Pour celui qui a créé et développé sa société, qui s’y est investi corps et âme et en maîtrisait tous les leviers, le fait de vendre, puis de déléguer la gestion de ce patrimoine est traumatisant. Il aura le sentiment désagréable de perdre le contrôle, il devra apprendre à faire confiance à d’autres, découvrir des concepts et un vocabulaire qu’il ne maîtrise pas». L’entrepreneur n’aura absolument pas la même a itude ni les mêmes besoins qu’une famille industrielle traditionnelle, qui exerce son activité depuis des générations. Ces gens-là ont l’habitude d’avoir du patrimoine, de le gérer et feront plus aisément le gros dos, lorsque la situation est compliquée».

Les jeunes sont très sélectifs

Les jeunes font partie des clients qui nécessitent le plus d’a ention et de suivi. Ils sont souvent très impliqués et regardants sur une série de points relatifs à l’idéologie de l’investissement. Privilégiant une approche qualitative, ils vont scruter de près les critères de durabilité, étudier la structure des coûts, chercher à comprendre les mécanismes et les outils utilisés. «On peut investir dans le contact avec ces jeunes clients, mais la clé, c’est que la solution d’investissement qu’on propose leur convienne. L’ancienne génération, elle, se laissera davantage porter et sera plus sensible au contact personnel», conclut Michael Harris.

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Cette relation qui charrie son lot de secrets de famille,
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Le lingot d’or, un placement refuge qui se fait rare

GILLES QUOISTIAUX

Arnaud Jamar, administrateur délégué de Pire Asset Management, est à la tête d’une des dernières sociétés de bourse du pays à proposer des lingots d’or à ses clients. «Notre métier, c’est le private banking. L’or est une activité très complémentaire à ce métier. 90% des clients qui viennent nous en acheter ont d’ailleurs un portefeuille titres. C’est une forme de diversification de leurs placements. L’or reste une valeur refuge, un placement de bon père de famille», explique Arnaud Jamar. Son bureau, basé à Charleroi, voit arriver tous les clients qui trouvent porte close du côté des banques traditionnelles et des banques privées. Ces dernières années, la plupart des établissements bancaires ont déserté le marché de l’or physique. Il reste généralement possible d’y acheter de l’or dématérialisé ou titrisé, mais acheter ou vendre des lingots et des pièces d’or est devenu beaucoup plus compliqué.

Ce e désaffection vis-à-vis de l’or physique s’explique par plusieurs raisons. La première est liée au «derisking» pratiqué par les banques. Elles tentent de minimiser leur exposition au risque, notamment au regard des

réglementations très strictes en matière d’anti-blanchiment. Acheter ou vendre des lingots est une activité difficilement traçable, comme l’échange de cash, ce qui peut éveiller la suspicion des autorités de contrôle. Les banques préfèrent du coup passer leur chemin et éviter ainsi d’être épinglées. D’autre part, le commerce de lingots nécessite des mesures de sécurité accrues et une logistique complexe pour encadrer le transport et le stockage de l’or. Cela pèse sur la rentabilité d’une activité qui, au fil des années, a eu tendance à diminuer en volume.

Risques et coûts de stockage

Chez BNP Paribas Fortis, les achats de métaux précieux (pièces et lingots) ne sont plus possibles depuis décembre 2021. Chez KBC, on ne propose plus non plus ce service depuis quelques années. Idem chez Belfius, qui privilégie des versions titrisées, «plus confortables pour le client», nous dit-on. «Les risques et les coûts de stockage rendent l’or physique peu intéressant pour le client», ajoute-t-on chez Belfius. Chez Degroof Petercam, «l’achat ou la vente d’or physique reste possible, mais ne concerne qu’une infime partie des transactions sur cet actif», nous indique-t-on. L’essentiel des transactions sur le marché de l’or se concluent

aujourd’hui de manière scripturale ou au travers de trackers dédiés.» Nagelmackers a abandonné toute activité dans l’or, même dématérialisé. Chez Puilaetco, l’achat/vente de lingots n’est plus pratiqué, même si la banque privée possède toujours un stock d’or au Luxembourg. Chez ING, on invoque «une demande très limitée» pour justifier l’abandon de ce e activité. Pourtant, il reste des clients intéressés par ce type de placement. «Ce sont plutôt les 50 ans et plus qui viennent nous voir», souligne Arnaud Jamar. Preuve que l’activité d’investissement décline: les clients viennent deux fois plus souvent pour vendre que pour acheter des lingots d’or. La plupart de ces ventes sont liées à des successions. «Il y a toujours de l’or qui circule en Belgique», confirme Arnaud Jamar.

Si la plupart des ventes portent sur des petites quantités, le patron de Pire Asset Management est parfois tombé sur de véritables trésors. Récemment, un client est venu le solliciter pour… plusieurs centaines de lingots d’un kilo chacun, découverts derrière un mur démoli à la masse. Les travaux de démolition se sont avérés lucratifs: un kilo d’or s’échange actuellement pour environ 60.000 euros.

Conscient que les acteurs pratiquant ce type

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d’activité se font rares, Sandro Ardizzone, CEO de Gold Forex International (GFI), a choisi de prendre le contrepied de ce e tendance. Sa société de courtage est spécialisée en achat et en vente de métaux précieux. Elle travaille avec plusieurs grandes banques privées du pays, qui lui sous-traitent les demandes de leurs clients désireux d’acheter ou vendre de l’or physique. «Nous voulons redynamiser l’or d’investissement. C’est un produit phare, mais encore trop peu connu. Moins de 5% des Belges en achètent», souligne Sandro Ardizzone. Le CEO de GFI cherche à a eindre de nouveaux segments de clientèle, notamment parmi les plus jeunes générations. «Je leur dis qu’ils peuvent commencer à acheter de l’or avec 120 euros. C’est un lingot de deux grammes», explique-t-il. Les lingots se déclinent dans plusieurs gabarits jusqu’à un kilo: 2, 5, 10, 20, 50, 100, 150, 500 grammes... «Cela permet de constituer une réserve à côté de l’épargne, qui prémunit sur la durée contre l’inflation», assure Sandro Ardizzone. Il croit dans le potentiel de croissance de son produit. «Les crises récentes, que ce soit le Covid, la guerre en Ukraine ou tout récemment la faillite de la Silicon Valley Bank, ont créé des réflexes d’accumulation d’or. Nous répondons à la demande des clients», explique le CEO.

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La plupart des banques privées proposent de l’or dématérialisé à leurs clients. Mais l’achat-vente de lingots est devenu une activité de niche, pratiquée par quelques rares établissements.
«C’est un produit phare, mais encore trop peu connu. Moins de 5% des Belges en achètent.»
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Dans le petit monde du private banking belge, ce sont souvent des femmes qui occupent des postes de haut niveau. La table ronde que nous avons constituée rassemble Sabine Caudron (Degroof Petercam), Joke Reynaerts (KBC), Isabelle Verhulst (Belfius), Pascale Lommez (BNP Paribas Fortis) et Nathalie De Taeye (ING).

Les femmes en tête du private banking belge

Il est un dicton populaire dans la «City» de Londres, qui dit que l’on y trouve davantage de gestionnaires de fonds masculins que féminins. En effet, les femmes restent minoritaires dans la plupart des branches du secteur financier. En Belgique, le private banking est une exception notoire, puisque ce sont souvent les femmes qui y occupent les postes les plus importants.

Nous avons rencontré cinq patronnes du secteur de la banque privée: Sabine Caudron (Degroof Petercam), Joke Reynaerts (KBC), Isabelle Verhulst (Belfius), Pascale Lommez (BNP Paribas Fortis) et Nathalie De Taeye (ING). Nous avons discuté avec elles de la bourse, de la digitalisation, des investissements durables, de la fiscalité belge et de l’importance de la «touche féminine» dans leur secteur.

Alors que les salles des marchés sont clairement dominées par les hommes, on trouve de nombreuses femmes à des postes clés dans le secteur de la banque privée. Comment expliquer ce e différence?

P.L: «La banque privée est un ‘people business’, où l’empathie joue un rôle important, alors que la salle des marchés est axée sur les produits et exige une expertise technique qui n’a ire pas les femmes. Nous le constatons également dans les résultats d’études récentes: 86% des gestionnaires d’actifs sont des hommes. Il faudrait davantage d’ouverture à la diversité des genres et l’origine des personnes pour a irer des talents et ainsi mieux servir nos clients.»

S.C: «Les services de banque privée demandent davantage d’empathie. Il faut écouter les clients, ce qui a ire davantage les femmes.»

Que pensez-vous des quotas de femmes dans les entreprises?

N.D.T: «Chez ING, nous n’avons plus besoin de quotas. Le nombre de femmes augmente naturellement. Mais dans d’autres entreprises et d’autres secteurs, il faut continuer à taper sur le clou. Pour moi, cela doit commencer sur les bancs de l’école, où nous devons continuer à insister sur l’égalité des genres afin qu’elle se reflète plus tard dans le monde du travail.»

P. L: «Nous avons mis en place un baromètre ‘Diversité et Inclusion’, qui nous permet d’agir de façon proactive. Nous avons, par exemple, pris plusieurs initiatives comme la charte ‘Jamais sans elles’, où 85 senior managers se sont engagés à refuser de participer à des panels de discussions si aucune femme n’en fait partie. Mais nous avons également des bonnes nouvelles: l’analyse des recrutements annuels révèle que nous recrutons de plus en plus de femmes chez BNP. En outre, nous constatons pour la première fois que les plafonds de verre se sont réduits chez nous par rapport aux autres années, ce qui signifie que de plus en plus de femmes accèdent à des postes de cadre et de top management.»

Sabine Caudron prend un stylo et un papier: «Je note les bonnes idées» (elle rit).

N.D.T: «La discussion sur les quotas n’est pas uniquement une question de femmes par rapport aux hommes. Il s’agit de nationalité, de culture, d’orientation sexuelle, etc. Les bonnes idées sont générées grâce à la diversité au sein d’équipes dont les membres se challengent en permanence, ce qui est essentiel.»

J.R: «En effet, dans notre métier, nous ne nous intéressons pas réellement au genre, mais aux relations avec les clients. Mais bon, c’est tellement

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PASCALE LOMMEZ DIRECTOR WEALTH MANAGEMENT SPECIAL SEGMENTS (BNP PARIBAS FORTIS)
«La banque privée est un ‘people business’, où l’empathie joue un rôle important, alors que la salle des marchés est axée sur les produits et exige une expertise technique qui n’a ire pas les femmes.»
© JONAS LAMPENS
LOUISE DE MOOR ET EVERT NERINCKX

SABINE CAUDRON

HEAD OF PRIVATE BANKING DEGROOF PETERCAM

C’est à l’âge de 16 ans que Sabine Caudron (57 ans) a déménagé aux États-Unis, où elle a étudié l’économie à l’Université de Californie. Dix ans plus tard, elle est revenue en Belgique et a travaillé deux ans pour l’entreprise de son père, qui fut ensuite vendue. Sur le conseil d’un Account Manager, elle a posé sa candidature à la Générale de Banque. «Je me suis retrouvée par hasard dans le secteur bancaire. Mon principal objectif n’était pas de devenir banquière, mais de travailler dans le secteur des ressources humaines.» Aujourd’hui, elle comptabilise plus de 30 ans d’expérience dans le private banking. Elle est restée pendant 18 ans à la Générale de Banque – devenue Fortis Banque et BNP Paribas Fortis – pour ensuite rejoindre une banque de niche, Puilaetco. «Pour moi, les grandes banques devenaient trop grosses.» Elle y est restée six ans, à la tête du département des ventes, pour ensuite franchir le pas vers Degroof Petercam. En mai, Sabine Caudron a été nommée Head of Private Banking. Durant son temps libre, elle aime faire de l’aviron. En 1992, elle faisait partie de la sélection pour les Jeux olympiques. Aujourd’hui, elle participe encore à des compétitions, avec les vétérans.

typique que tout le monde ici s’y reconnaîtra: les femmes ont parfois besoin d’être poussées dans le dos.» (Tout le monde approuve).

Est-ce vrai? Les hommes sont donc plus assertifs?

S.C: «Lorsque notre CEO m’a demandé si je voulais devenir responsable de Private banking, ma première réaction fut: ‘Suis-je véritablement la bonne personne pour ce poste ?’ Il a répondu: ‘Sabine, c’est tout de même incroyable. Un homme ne poserait même pas la question du contenu du poste et signerait le jour même. Tu as déjà tellement prouvé que tu en étais capable et malgré tout, tu me poses encore la question.»

P. L: «C’est pourquoi il est tellement important de former et de sensibiliser tout le monde à ce e problématique.»

I.V: «Mais il ne faut pas généraliser. De nombreux hommes ont également besoin d’être poussés dans le dos.»

Pensez-vous que les femmes sont de meilleures investisseuses? C’est en tout cas ce que révèlent plusieurs études.

I.V: «Cela dépend des enquêtes. Les tendances montrent qu’en général, les femmes ont des approches plus défensives et utilisent moins les plates-formes d’investissement. Le trading a ire davantage les hommes. Mais qu’est-ce

PASCALE LOMMEZ

DIRECTOR WEALTH MANAGEMENT SPECIAL SEGMENTS

BNP PARIBAS FORTIS

Pascale Lommez a 53 ans. Elle a entamé sa carrière il y a 26 ans à la Générale de Banque avant de rejoindre ensuite Mees Pierson, qui faisait également partie du groupe. Au fil des années, chez BNP Paribas Fortis, elle a gravi les échelons pour devenir directrice Wealth Management Special Segments, et diriger deux équipes au sein du Wealth Management Belgique: le Professional Wealth et le Private Institutionals. Pascal Lommez gère aujourd’hui les portefeuilles d’ordres monastiques, d’hôpitaux, d’ASBL, mais aussi d’avocats et de CEO de sociétés cotées. «C’est un travail très varié qui m’apporte beaucoup de satisfactions.»

Pendant son temps libre, elle aime se rendre à la Côte où elle s’adonne à divers sports comme le yoga, le golf et le padel.

NATHALIE DE TAEYE

HEAD OF PRIVATE BANKING WALLONIE ING BELGIUM

Nathalie De Taeye (57 ans), a commencé sa carrière de manière atypique. Elle a suivi une formation en économie en horaire décalé alors qu’elle travaillait déjà dans le secteur financier. «Ce fut un vrai défi, mais le master en cours du soir m’a appris à me discipliner.»

Elle travaille depuis plus de 30 ans chez ING, où elle a occupé de nombreux postes. «Je change de fonction tous les trois à cinq ans. Cela me permet de rester alerte.» Aujourd’hui, elle occupe, depuis trois ans, le poste de Head of Private Banking en Wallonie. «Ce que je trouve notamment intéressant est le lien entre les patrimoines privés et les entreprises. D’un côté, il faut faire fructifier les patrimoines privés, et de l’autre, il faut financer les entreprises.»

ISABELLE VERHULST

HEAD OF WEALTH ANALYSIS AND PLANNING BELFIUS

C’est à Gand, où elle a obtenu un Master en Droit, qu’Isabelle Verhulst (47 ans) a étudié. Elle a commencé sa carrière dans un grand cabinet d’avocats anglosaxon pour ensuite rejoindre Deloitte. Elle a rejoint Belfius il y a douze ans. Aujourd’hui, elle occupe le poste de Head of Wealth Analysis and Planning chez Belfius et siège au conseil d’administration de la Private Banking Association. En parallèle, elle a également obtenu un Master à la Vlerick Business School. Un parcours atypique, mais Isabelle Verhulst a trouvé sa vocation dans la gestion privée. «Vous êtes en prise directe avec ce que vous faites, proche des gens et du marché. Vous n’avez pas l’impression d’être dans une tour d’ivoire», avoue-t-elle.

JOKE REYNAERTS

GENERAL MANAGER KBC PRIVATE BANKING AND WEALTH

Joke Reynaerts a rejoint KBC il y a 16 ans. C’est là qu’elle a connu son premier coup de foudre professionnel: la gestion d’actifs. Elle a ensuite occupé plusieurs postes dans le domaine de la transformation digitale et de l’expérience client digitale. Joke Reynaerts aime voyager. Elle estime qu’il est important «d’élargir ses horizons». Elle a vécu jusqu’à l’an dernier avec toute sa famille en Irlande, où elle occupait le poste de Chief Commercial O icer. Elle utilise aujourd’hui son sac à dos, rempli d’expériences, dans sa nouvelle fonction de General Manager Private Banking et Wealth Management chez KBC. Ce qui lui plaît dans son travail? «Les contacts humains. Chaque client a sa propre histoire», confie-t-elle. Elle s’intéresse aussi à la transformation digitale, à laquelle elle a participé pour améliorer encore les services fournis par les banquiers privés. «Les technologies sont aujourd’hui au point, mais elles n’ont pas fini de s’améliorer.»

qu’un bon investisseur? Cela dépend du but recherché: quel rendement souhaitez-vous obtenir et à quel horizon de temps?»

N.D.T: «Nous sommes différents. Les femmes ont généralement d’autres priorités. J’ai rarement rencontré une femme qui ne se préoccupe pas de la planification patrimoniale pour ses enfants. Chez les hommes, en revanche, la planification patrimoniale est secondaire. Le rendement occupe la première place. Mais nous ne pouvons tirer aucune conclusion quant à savoir qui des hommes ou des femmes sont les meilleurs investisseurs.»

J.R: «Les données de notre plate-forme d’investissement Bolero (KBC) montrent que les hommes sont plus prétentieux. Les femmes reconnaîtront plus facilement qu’elles se sont trompées et prendront leurs pertes, tandis que les hommes s’obstineront à dire qu’ils ont raison et n’en démordront pas. En outre, les femmes optent aussi davantage pour les entreprises où elles se sentent bien.»

Si on compare avec d’autres pays, on peut dire que les Belges aiment dormir sur leurs deux oreilles et n’aiment pas prendre des risques. Sont-ils allergiques au risque?

S.C: «C’est particulièrement vrai si on nous compare avec le monde anglo-saxon. Les Américains investissent beaucoup moins

JOKE REYNAERTS GENERAL MANAGER (KBC PRIVATE BANKING

dans des obligations et beaucoup plus dans des actions. En règle générale, les Belges ont un profil plus défensif que celui de l’Américain moyen.»

J.R: «Pour la plupart des Belges fortunés, le rendement n’est pas le plus important, contrairement à d’autres pays. En Belgique, ce qui compte le plus est la protection du patrimoine familial. Cela fait partie de l’ADN des Belges, un peu comme la brique.»

Votre secteur est-il concurrentiel lorsqu’il s’agit d’a irer de nouveaux clients?

I.V: «Nous ne pouvons pas dire que nous ne sommes pas des concurrentes. Mais chaque institution a son propre ADN et ce dernier joue un rôle important. Un client doit pouvoir se retrouver dans sa banque.»

J.R: «La différence ne se situe pas tant dans ce que nous faisons que dans la manière dont nous le faisons. En outre, on trouve aussi des investisseurs qui sont clients auprès de plusieurs banques privées parce qu’ils souhaitent bénéficier d’approches différentes. Et ceux qui deviennent clients le restent souvent très longtemps, parfois même de génération en génération.»

Les investissements durables dans ce qu’on appelle les fonds ESG (Environnement, Société et Gouvernance) sont de

plus en plus populaires, mais ils sont sujets à discussion. Qu’en pensent vos clients?

P.L: «Chez BNP Paribas Fortis, la durabilité et les investissements durables sont inscrits dans notre ADN. De plus en plus de clients, y compris les jeunes, s’intéressent aux investissements ayant un impact positif. Il n’y a aucune contradiction entre un beau rendement et les objectifs ESG. Au contraire, la recherche démontre également que les investissements dans les entreprises durables obtiennent le même rendement, mais avec moins de volatilité. En tant que banque, nous voulons continuer à miser sur ce e tendance et nous travaillons activement sur des thèmes tels que la transition vers la neutralité carbone, la biodiversité, l’économie circulaire et l’inclusion.»

S.C: «Les premières personnes à m’avoir parlé d’ESG étaient des femmes. Aujourd’hui, il n’y a plus aucune différence. Mais nous sommes davantage proactives. Certains clients nous demandent ‘mais avec quoi venez-vous encore?’ Dans ce cas, nous devons leur expliquer qu’il s’agit d’une nouvelle obligation légale et beaucoup d’entre eux réagissent en disant que cela ne les intéresse pas. Que c’est à eux de décider et pas à la banque. En tant que banque d’investissement, nous estimons que nous

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«Pour la plupart des Belges fortunés, le rendement n’est pas le plus important, contrairement à d’autres pays.»
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Private banking

pas toujours le cas. Parfois le contenu d’un fonds est difficile à cerner et vous devez vaincre les réticences de vos clients, par exemple dans le cas d’un fonds de fonds ou lorsque la banque achète un fonds dans une autre banque. Comment gérez-vous ce e situation?

I.V: «Dans ce cas, vous devez disposer d’arguments solides. Vous devez être sur la même longueur d’onde que vos partenaires.»

N.D.T: «Sur ce plan, nous avons encore beaucoup de pain sur la planche. Une partie devra être imposée par la législation. Les données nous aident aussi beaucoup, mais elles ne sont pas encore entièrement au point. L’ESG est encore en plein développement. Nous constatons que les clients s’y intéressent de plus en plus et nous n’avons reçu aucune plainte sur le retrait des actions pétrolières. Plus nous y travaillerons, plus la situation s’améliorera. Nous sommes à la croisée des chemins. Nous devons faire confiance à ceux avec qui nous collaborons.»

Les clients ont-ils réagi différemment que lors de la crise bancaire de 2008?

S.C: «Les clients sont plus calmes aujourd’hui qu’ils ne l’étaient à l’époque. Lors de la crise bancaire, il y avait eu une rupture de confiance.»

Au vu des taux élevés, les marchés alternatifs – comme le marché de l’art, voire les NFT et les cryptodevises – sont aujourd’hui a rayants. Vos clients s’y intéressent-ils?

S.C: «Nous recevons de nombreuses demandes d’informations, mais cela ne va pas plus loin. Nous sommes là pour protéger le patrimoine de nos clients à long terme et nous estimons que les investissements dans les cryptodevises ne font pas partie de notre mission. Avec les cryptodevises, vous risquez qu’un client obtienne un rendement minimal au lieu de maximal (elle rit). L’art est une autre affaire. Nous pouvons conseiller et aider nos clients dans ce domaine. Ce n’est pas notre cœur de métier, mais nos clients apprécient ce service.»

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avons un rôle à jouer et que nous devons les accompagner dans ce processus. De nombreux clients gèrent aussi directement certaines de leurs lignes. Il s’agit d’ailleurs souvent d’hommes (elle rit) qui souhaitent absolument avoir certaines actions dans leur portefeuille. Et lorsque nous excluons des actions, cela conduit parfois à des discussions enflammées.»

J.R: «Chez KBC, nous voyons les choses autrement. Chez nous, l’ESG occupe une place importante. Les clients s’y intéressent davantage, notamment grâce à notre offre plus large. C’est une combinaison de ‘push’ et de ‘pull’. Cela fait partie intégrante de notre stratégie. Depuis 2017, nous excluons systématiquement tous les

carburants fossiles de nos investissements durables.»

S.C: «Comment réagissent vos clients?»

J.R: «Ils se disent ravis de notre transparence, mais, l’an dernier, à cause de la guerre en Ukraine, les produits pétroliers et gaziers s’en sont bien sortis en bourse – ce qui leur a fait perdre une partie du rendement. Certains ont bien entendu réagi. La plupart des clients acceptent l’ESG tant qu’ils ont la garantie que le rendement social s’accompagne d’un rendement financier. Si vous pouvez le démontrer, vous n’avez aucun problème, mais le rendement financier continue à être considéré comme essentiel pour certains de nos clients.»

Les fonds durables comprennent différentes actions et plus les banques sont proches d’un fonds, mieux elles le contrôlent. Mais ce n’est

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PATRIMOINE EN TOUTE CONFIANCE.

J.R: «Le défi consiste à rendre les choses tangibles. Chez KBC, les clients pourront par exemple bientôt suivre sur l’app si un fonds durable réussit à a eindre les objectifs fixés. C’est relativement nouveau et nous n’en sommes qu’au début.»

En 2022, beaucoup de choses ont changé sur les marchés financiers. La guerre a éclaté en Ukraine et, à cause du resserrement de la politique monétaire des banques centrales, les taux obligataires ont beaucoup augmenté. Quelles en sont, selon vous, les conséquences?

S.C: «Aujourd’hui, les clients nous demandent des portefeuilles purement obligataires. Cela faisait longtemps que nous n’avions pas eu ce type de demande.»

N.D.T: «Nous n’avons pas a endu pour contacter nos clients. Lorsque la guerre s’est invitée à notre porte, nous les avons contactés proactivement pour leur expliquer la situation.»

MÊME PAR TEMPS INCERTAIN.

I.V: «Il est important de diversifier ses avoirs, mais les actions et les obligations continuent à représenter la majeure partie des investissements. Dans la presse, on entend beaucoup parler de succès avec les cryptodevises, mais elles continuent à poser problème en matière de transparence et de sécurité. Ce n’est donc pas un domaine auquel nous nous intéressons. L’immobilier est un autre secteur important. On ne dira jamais assez que les Belges ont une brique dans le ventre. Et c’est le rôle des banquiers de donner des conseils avisés dans ce domaine. L’immobilier coté a déjà baissé et l’immobilier ‘réel’ devrait suivre.»

P.L: «La diversification est en effet importante. Ce sont rarement les mêmes catégories d’actifs qui excellent année après année. Nous continuons également à miser sur le Private Equity étant donné qu’il offre la possibilité d’investir très tôt dans des entreprises en croissance ou qui sont susceptibles de créer de

L’environnement économique et financier actuel est particulièrement complexe. Prendre les bonnes décisions pour la gestion de votre patrimoine ne s’improvise pas. Depuis plus de 100 ans au Luxembourg et plus de 10 ans en Belgique, nos experts vous accompagnent dans la préservation, la valorisation et la transmission de votre patrimoine.

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la valeur grâce à une expertise spécifique. En outre, nous estimons que les fonds immobiliers cotés ont trop baissé par rapport à l’immobilier physique et qu’il y a de bonnes affaires à faire à long terme.»

Les ETF – ou trackers – perme ent aux investisseurs de se constituer un portefeuille diversifié à coût réduit. Les ETF pourraient-ils à l’avenir remplacer un gestionnaire patrimonial ou un banquier privé?

S.C: «Non, les clients nous posent de nombreuses questions sur les ETF parce qu’ils sont bon marché. OK, pas de problème, mais lequel choisir? Pour cela, vous avez besoin de conseils. »

J.R: «Nous avons plusieurs types de clients. Certains n’ont pas beaucoup de temps à consacrer à la gestion de leur argent et nous demandent de gérer leur portefeuille à leur place. D’autres souhaitent être tenus au courant de tout. Mais les trackers ne remplaceront jamais les banquiers privés.»

Quel sera selon vous l’impact de la technologie sur votre profession?

P.L: «L’intelligence artificielle et la digitalisation prendront bien entendu de plus en plus d’importance et modifieront en profondeur le paysage bancaire. Un des objectifs de l’IA est d’automatiser les processus afin que les conseillers disposent de plus de temps pour offrir des services sur mesure à leurs clients.

Parmi les impacts concrets de la technologie sur le métier de banquier privé et de wealth manager, on trouve bien entendu les outils digitaux et le soutien qu’ils apportent dans la gestion du patrimoine des clients. Un des exemples est l’app Pax Familia, une plateforme digitale très sécurisée qui fournit un aperçu précis de la situation personnelle et du patrimoine des clients.»

Pouvons-nous nous montrer optimistes envers la nouvelle année boursière?

N.D.T: «Beaucoup dépendra de la politique monétaire qui sera mise en œuvre. La moindre erreur pourrait avoir des conséquences importantes.»

J.R: «2023 promet d’être une belle année boursière. Les investisseurs parlent généralement de marché ‘bull’ (haussier) et de marché ‘bear’ (baissier). Nous parlons aujourd’hui de marché ‘kangourou’. Nous constatons d’importants mouvements, avec de fortes fluctuations de cours dans les deux directions, mais heureusement il est possible d’obtenir de beaux rendements en investissant intelligemment.»

Dans son projet de réforme fiscale, le ministre des Finances, Vincent Van Peteghem (CD&V) prévoit un doublement de la taxe sur les comptes-titres. Quelles en seraient les conséquences?

I.V: «On peut se poser la question. Si l’on veut que les gens investissent leur argent dans l’économie, ce doublement de la taxe n’est pas un bon signal. Cela pourrait, en outre, encourager les citoyens à laisser leurs économies sur un compte d’épargne au lieu de le faire ‘travailler’ via la bourse. D’un autre côté, il ne faut pas exagérer l’impact de ce e décision. Ce n’est d’ailleurs jamais une bonne idée d’investir en fonction de la taxation.»

S.C: «Nous constatons que les grands patrimoines n’ont plus confiance dans les décisions prises en Belgique. Les clients ne sont pas hostiles aux taxes, mais ils demandent de la stabilité sur le plan fiscal. C’est pourquoi une partie des patrimoines part à l’étranger et je crains que ce soit loin d’être terminé.»

N.D.T: «La fiscalité ne peut en aucun cas être le moteur de certaines décisions. La recherche d’optimisation fiscale est compréhensible, certes, mais ne doit pas être la principale motivation. Le projet en lui-même et les objectifs qu’on souhaite a eindre sont bien plus importants.»

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4 perceptions erronées sur les investissements durables et ESG

La demande d’investissements ESG (investissements sur la base de critères environnementaux, sociaux et de gouvernance) et d’investissements durables est en hausse: de plus en plus d’investisseurs veulent un rendement social en plus d’un rendement financier. Pourtant, de nombreuses perceptions erronées subsistent. Entretien avec Joachim Aelvoet, Country Executive chez ABN AMRO en Belgique à partir d’avril.

1Les investissements ESG et durables sont synonymes de rendements plus faibles.

Joachim Aelvoet: “On pense encore souvent, à tort, que les investissements ESG et durables génèrent des rendements plus faibles. Nous voyons dans nos propres résultats, qui remontent à plus de 10 ans, que cette hypothèse ne tient pas la route. Le long terme, dans le cadre de certains investissements, est évidemment primordial. En effet, il est logique que le rendement ne soit pas nécessairement inférieur à long terme.

Un exemple? L’accord de Paris sur le climat nous impose de réduire drastiquement nos émissions de CO2. Par conséquent, les compagnies pétrolières, qui ont une certaine quantité de combustibles en stock, pourraient ne jamais être en mesure de les utiliser. Cela aura un impact sur leurs bénéfices futurs et sur leur valorisation. À court terme, on peut affirmer que les compagnies pétrolières se portent très bien. Mais à plus long terme, leur avenir ne sera probablement pas aussi rose. Ce sont les entreprises qui ont la meilleure vision de l’avenir qui présentent le meilleur potentiel.” 2

Les investissements ESG et durables ne font pas réellement la différence.

Joachim Aelvoet: “Que cela vous plaise ou non: les investissements ont un impact. Toujours. Ce que vous décidez, en revanche, c’est si cet impact est positif ou négatif. C’est la raison pour laquelle nous investissons beaucoup de temps dans les discussions sur la partie non financière avec nos clients. Nous vous donnons non seulement un aperçu de votre rendement, mais aussi de l’impact de votre portefeuille. Quelle quantité d’émissions de CO2 vos investissements compensent-ils? Votre portefeuille est-il conforme aux objectifs climatiques? Nous ne nous concentrons pas uniquement sur les aspects écologiques, mais examinons aussi les Objectifs de développement durable des Nations Unies.”

3 Les investissements ESG et durables offrent peu d’opportunités financières.

Joachim Aelvoet: “Comparez la situation à la quatrième vague industrielle ou, plus récemment, la numérisation: ces transitions ont généré un potentiel inestimable pour les entreprises qui ont pu prendre les devants. À l’inverse, les entreprises qui ont manqué ces transitions ont fait faillite. Nous nous dirigeons vers un scénario similaire avec la transition vers la durabilité. Notre banque s’appuie sur

son expertise pour sélectionner les bonnes entreprises, à savoir celles qui obtiennent déjà de très bons résultats en matière d’ESG et les entreprises innovantes qui contribuent à un ou plusieurs thèmes de développement durable tournés davantage vers l’avenir, tels qu’un mode de vie sain, l’eau, les déchets et le recyclage, l’efficacité énergétique et la sécurité. La transition énergétique est également sur toutes les lèvres, notamment en raison de la guerre.

La majorité des entreprises sélectionnées sont dans le peloton de tête. Elles ne sont certainement pas encore les meilleures de la classe, mais ont l’ambition de participer pleinement à cette transition. Il y a là un réel potentiel économique et c’est à ce niveau que nous attendons les plus belles progressions. Nous sommes convaincus que

l’évolution technologique, l’innovation produit et l’optimisation des processus entraîneront davantage de rentabilité, une accélération de la croissance des bénéfices et par conséquent, une valorisation plus importante sur les marchés.”

4 Les investisseurs n’osent pas (encore) opter pour des investissements ESG et durables.

Joachim Aelvoet: “Il y a sans conteste une prise de conscience, mais aussi de la prudence et des doutes. Nous avons constaté une accélération significative, principalement due à l’impact de la nouvelle génération. Quand votre enfant fait l’école buissonnière pour manifester pour le climat, en tant que parent, vous vous posez des questions. Faut-il, par exemple, investir dans

l’énergie nucléaire? Il n’y a pas de réponse claire. Nous voulons néanmoins vraiment mener cette discussion avec nos clients. Le message le plus important est le suivant: trouvez le bon partenaire pour en parler, pour vous guider.”

L’ECHO JEUDI 30 MARS 2023 11 Private banking
«2023 promet d’être une belle année boursière.»
JOKE REYNAERTS GENERAL MANAGER (KBC PRIVATE BANKING AND WEALTH)
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Joachim Aelvoet, Country Executive chez ABN AMRO en Belgique à partir d’avril.
Mertens
© Marco

Après la tempête de la hausse des taux, les banques privées misent sur les obligations

La hausse des taux d’intérêt a affecté les portefeuilles des clients des banques privées. Dans la poche obligataire, les dégâts ont été limités grâce à des stratégies visant à réduire la sensibilité aux taux. Depuis la fin de l’année dernière, les gestionnaires augmentent l’exposition des portefeuilles aux obligations parce qu’ils sont convaincus

Les clients des banques privées n’ont pas échappé à la très mauvaise année boursière 2022. Les gestionnaires de portefeuille le reconnaissent: il était très difficile, voire impossible, d’éviter des pertes. «Pour la première fois en plus de 40 ans, les taux d’intérêt ont fortement augmenté, faisant chuter la valeur des obligations. Il était dès lors inévitable que les portefeuilles d’obligations soient impactés», reconnaissent Nicolas Sopel, senior macro strategist chez Quintet, et Marc Eeckhout, senior portfolio manager chez Puilaetco, la filiale belge du groupe luxembourgeois. «Les investisseurs en actions ont également été impactés, les actions devenant relativement moins a rayantes par rapport aux actifs moins risqués. En dehors du secteur de l’énergie, de l’or et du dollar américain, aucune classe d’actifs n’a généré des rendements positifs. Il n’y avait pas de refuge possible.» «Le fait de voir les marchés d’actions et d’obligations chuter de manière concomitante est un phénomène qui ne s’était produit qu’à trois reprises depuis les années 1920!», souligne Geoffroy Vermeire, managing director de Lombard Odier Belgique. «Il est particulièrement frappant de constater que les portefeuilles conservateurs privilégiant les obligations se sont effondrés autant que les portefeuilles plus équilibrés ou plus exposés aux actions.»

Clients inquiets

La déroute des obligations, actifs financiers censés être défensifs, a inquiété les clients les plus réticents à la prise de risque dans la gestion de leur patrimoine. «Beaucoup de clients se sont évidemment inquiétés de la soudaine hausse des taux», confie Jérôme van der Bruggen, chief investment officer chez Degroof Petercam. «Nous avons été très souvent sur le pont pour l’expliquer et nous continuons à le faire aujourd’hui, car l’inflation, qui a provoqué ce mouvement des taux, n’est pas derrière nous.»

«Le caractère exceptionnel de l’ampleur et de la rapidité de la hausse des taux a inévitablement suscité des inquiétudes chez certains de nos clients, d’autant plus qu’elle s’est produite dans un contexte de grande incertitude liée notamment à la guerre en Ukraine», précise David Schmidt, managing director de Banque de Luxembourg Belgium. «Cela nous a incité à communiquer davantage afin de rassurer nos clients.» «Nous n’avons pas dû essuyer de reproches particuliers, mais plus dédramatiser une mauvaise surprise de taille pour les détenteurs de portefeuilles plus défensifs», explique Geoffroy Vermeire (Lombard Odier Belgique). «L’effort de vulgarisation et de mise en perspective historique était important.»

Les pertes sur les obligations ont été limitées grâce à des stratégies visant à limiter la sensibilité aux taux. «La forte hausse des taux d’intérêt a eu un impact sur la valorisation des portefeuilles de nos clients investis dans nos mandats de gestion les plus défensifs, mais fort heureusement, leurs portefeuilles étaient très largement sous-pondérés en obligations depuis bien avant l’année 2022», indique David Schmidt (Banque de Luxembourg Belgium). «Ce e sous-pondération obligataire a été compensée par des investissements dans les stratégies alternatives, l’or et les liquidités.»

«Nous redoutions depuis longtemps une augmentation des taux», explique Jérôme van der Bruggen (Degroof Petercam). «Depuis au moins cinq ans, nos portefeuilles étaient donc gérés avec des sensibilités aux taux sensiblement inférieures à celles des indices traditionnels qui suivent les marchés obligataires. Ça ne veut pas dire que les portefeuilles des clients n’ont pas du tout souffert, mais ce e prudence les a bien protégés. Avant 2022, ce e stratégie nous a coûté: la poche obligataire de nos portefeuilles équilibrés performait moins bien que les indices obligataires. Mais ces derniers mois, ce e approche prudente a été récompensée, car les portefeuilles ont moins souffert.»

Retour vers les obligations

Les banques privées ont aussi cherché à limiter la casse côté actions. «La hausse des taux a eu un effet négatif sur la performance des actions en 2022, ce qui nous a obligés à adapter notre stratégie de gestion», signale Guillaume Duchesne, responsable de la gestion chez Banque Transatlantique Belgium. «Pour faire face à ce changement de paradigme, nous avons, très rapidement, protégé les portefeuilles de nos clients en réduisant l’exposition aux actions et en augmentant le cash.»

Après le gros de la tempête marquée par la forte progression des taux d’intérêt l’an dernier, les gestionnaires de portefeuilles ont commencé à s’intéresser à nouveau aux obligations. «Nous avons, début 2023, profité de la remontée des taux, en augmentant notre allocation d’actifs vers les obligations de grande qualité, telles que les obligations souveraines», disent Nicolas Sopel et Marc Eeckhout (Quintet/Puilaetco). «Même si les prix de ces obligations baissent sur le court terme, nous bénéficions de coupons élevés qui contribuent à la bonne tenue des performances de nos portefeuilles.»

«L’augmentation sensible des taux d’intérêt a considérablement amélioré le profil rendement/ risque des actifs obligataires», confirme David Schmidt (Banque de Luxembourg Belgium).

«Nous en avons profité pour repondérer progressivement les obligations au sein de la partie défensive des portefeuilles de nos clients en mandat de gestion.» «Depuis la fin de l’année 2022, nous avons commencé à investir à nouveau progressivement dans des éme eurs obligataires», confie Guillaume Duchesne (Banque Transatlantique Belgium). «Le contexte a évolué.

Les obligations sont à nouveau un actif a rayant. La hausse des taux est toujours en cours, mais une grande partie du chemin a été réalisée. La désinflation sera graduelle, mais est en place. Il y a des opportunités à saisir sur les marchés obligataires.» Mais «nous restons convaincus que les actions ont du potentiel et restent un bon investissement contre l’inflation dont, notamment, les titres qui offrent un rendement sur dividende intéressant», nuance-t-il.

Baisse de l’inflation a endue Jérôme van der Bruggen (Degroof Petercam) souligne quant à lui l’évolution fondamentale dans l’arbitrage entre actions et obligations: «Les rendements obligataires se retrouvent de nouveau au-dessus des rendements sur dividendes, surtout aux États-Unis, alors que pendant très longtemps, ça a été le contraire. Quand on est un allocateur d’actifs tel que nous, ça change la donne et il faut agir. Après avoir été sous-pondérés en obligations, nous avons racheté des obligations dans les portefeuilles et nous avons augmenté légèrement leur sensibilité aux taux pour bénéficier de ce changement. Nous partons du principe que le combat contre l’inflation sera mené à bien. La réaction des banques centrales a été rapide et virulente.»

Geoffroy Vermeire (Lombard Odier Belgique) abonde en ce sens: «Nous anticipons une décélération de ce e inflation lors des prochains trimestres. Dans ce contexte, nous continuons de privilégier les obligations de haute qualité et maintenons notre positionnement sur le crédit de qualité, compte tenu de son rendement toujours a ractif.»

Malgré la chute boursière de 2022, les clients

«Les rendements obligataires se retrouvent au-dessus des rendements sur dividendes alors que pendant très longtemps, ça a été le contraire. Quand on est un allocateur d’actifs tel que nous, ça change la donne et il faut agir.»

des banques privées semblent rester disposés à investir dans des actifs risqués. «Nous avons sondé l’intérêt de nos clients sur leur a itude par rapport à la prise de risque en 2023», indiquent Nicolas Sopel et Marc Eeckhout (Quintet/ Puilaetco). «Le résultat fut quelque peu surprenant dans le sens où nos clients ne sont pas apparus réticents à la prise de risque, par exemple, en souhaitant rester exposés aux actifs plus risqués tels que les actions. Nous en détenons bien évidemment toujours dans nos portefeuilles diversifiés. Mais en ce début d’année, nous estimons que les obligations de qualité, souveraines notamment, marquent leur grand retour, en offrant notamment une diversification et une protection, ce qu’elles n’ont pas pu faire en 2022.»

Pour les clients des banques privées, l’autre avantage de la hausse des taux est que les liquidités sont à nouveau rémunérées, après des années des taux d’intérêt négatifs. «Nous n’avons pas appliqué d’intérêts négatifs sur les dépôts de nos clients, bien que ce cash nous coûtait relativement cher», assure Guillaume Duchesne (Banque Transatlantique Belgium). Mais «aujourd’hui, la situation est très différente puisque nous sommes en mesure de rémunérer les liquidités de nos clients, que les dépôts à terme ont retrouvé de l’intérêt et que les sicav monétaires sont à présent en territoire positif. Nous investissons dans ce type de produits en a endant des opportunités en actions et en obligations.»

Et des opportunités, les gestionnaires de portefeuilles des banques privées sont tous d’accord pour affirmer qu’il y en aura dans les prochains mois.

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banking
que l’inflation finira par diminuer.
«Le combat contre l’inflation sera mené à bien. La réaction des banques centrales a été rapide et virulente», estime Jérôme van der Bruggen (Degroof Petercam). PHILIPPE GALLOY
JÉRÔME
BRUGGEN CHIEF INVESTMENT OFFICER CHEZ DEGROOF PETERCAM
VAN DER
© REUTERS

Équilibrez votre amour pour l’art et sa place dans votre portefeuille

«Le rôle majeur joué par les personnes qui investissent dans l’art est de protéger le patrimoine artistique et de soutenir les artistes», estime Eugénie Dumont, conseillère en art chez Degroof Petercam. Au-delà de ces objectifs, l’art peut aussi être un bon outil de diversification.

DIRK SELLESLAGH

En 2022, plusieurs grandes collections d’art privées ont été vendues aux enchères. L’événement le plus notoire fut la vente de la collection du cofondateur de Microsoft, Paul Allen, décédé en 2018, chez Christie’s. Ce e dernière a rapporté 1,62 milliard de dollars, un record absolu.

À Paris, Christie’s a vendu la collection du styliste Hubert de Givenchy, décédé la même année, pour 114 millions d’euros, alors que la collection avait été évaluée à la moitié. En 2022 également, le milliardaire japonais Yusaku Maezawa a vendu, via la maison d’enchères Phillips, une toile de Jean-Michel Basquiat pour 85 millions de dollars. Il l’avait acquise en 2016 pour 57 millions de dollars.

Flair et patience

Ces ventes records ne peuvent toutefois conduire à la conclusion qu’investir dans l’art mène tout droit à des gains importants. Il faut bien connaître la demande et faire preuve de suffisamment de patience pour laisser fructifier ses investissements.

Depuis 2000, l’Artprice 100 Index, un des principaux indices du marché de l’art, fait beaucoup mieux que le S&P 500. Il a enregistré en 2022 un rendement de 3%, tandis que l’indice phare américain cédait 19%. Cet indice ne reprend que la crème du marché de l’art, c’est-à-dire les 100 artistes ayant obtenu les plus importants revenus de ventes aux enchères au cours des cinq dernières années. En outre, ils ne sont repris dans l’indice que si au moins dix de leurs œuvres sont mises aux enchères chaque année. Si l’on s’en tient à ces critères, il ne reste que les artistes susceptibles d’a irer des collectionneurs fortunés,

comme Picasso – qui continue à caracoler en tête de l’indice – et d’autres grands noms comme Monet, David Hockney et Banksy.

L’indice Artprice Global – plus large – ne s’en sort pas aussi bien et a enregistré l’an dernier une baisse de 18%.

Un outil imparfait

Eugénie Dumont, Art Advisory Manager chez Degroof Petercam, souligne les lacunes de ces indices. «Ces indices sont basés sur les prix des ventes aux enchères et ne disent rien de la probabilité de trouver un acheteur pour une œuvre individuelle. En outre, ils n’indiquent pas si une œuvre a perdu de la valeur au cours des années précédentes.»

Par exemple, «La montagne Sainte-Victoire» de Paul Cézanne, qui faisait partie de la collection de Paul Allen, a trouvé acquéreur l’an dernier pour 137,8 millions de dollars, ce qui représente une plus-value importante par rapport aux 38,5 millions de dollars déboursés par Paul Allen. Au cours de la même période, un autre Cézanne, «La maison au chou à Pontoise», s’est vendu chez Christie’s à New York pour 3,7 millions de dollars. Ce e peinture avait été achetée en 2007 pour 6,8 millions de dollars. Un Cézanne n’est donc pas l’autre.

Selon Eugénie Dumont, il ne faut pas trop se laisser influencer par les indices, qui donnent une image imparfaite de l’évolution des prix. «En marge des ventes publiques, il y a aussi un

marché privé», explique-t-elle. «Lorsqu’un collectionneur est déterminé à acheter une œuvre, il fait appel à des intermédiaires qui la trouveront dans les collections privées. Ces transactions ne sont pas reprises dans les indices. Les données sur les ventes d’œuvres d’art dans les nombreuses galeries sont peu nombreuses et/ou ne sont pas rendues publiques. Le marché de l’art est très opaque et complexe.»

Tendances

Ceux qui souhaitent investir dans l’art doivent absolument se faire conseiller sur les tendances. Aujourd’hui, les artistes contemporains s’en sortent de mieux en mieux. Il s’agit d’un segment très dynamique, entièrement basé sur l’offre et la demande. De plus en plus d’artistes contemporains se retrouvent dans l’Artprice100 Index, de Basquiat à Gerhard Richter, en passant par Jeff Koons et Georg Baselitz. Il n’empêche que les impressionnistes français du XIXe siècle occupent toujours une place importante sur le marché de l’art. Mais la plupart de ces œuvres se trouvent dans des musées ou dans des collections privées, et représentent aujourd’hui une partie très illiquide du marché.

«Dans le cas d’œuvres d’artistes vivants, il faut tenir compte de l’existence, en plus du marché secondaire, d’un marché primaire, c’est-à-dire directement chez les artistes», poursuit Eugénie Dumont. «Au vu de l’existence parallèle de ces

deux marchés, il est important de les comparer pour éviter de payer trop cher sur le marché secondaire. Mais le marché primaire est tellement fermé qu’il est difficile d’y accéder. Il faut travailler avec des conseillers qui connaissent bien le secteur et sont en contact avec les artistes.»

Ceux qui souhaitent obtenir des garanties en matière d’investissement dans l’art se retrouvent en général avec les chefs-d’oeuvre des noms les plus célèbres. «Ces types d’œuvres d’art ont généralement déjà beaucoup circulé et affichent un historique qui permet d’évaluer plus facilement leur évolution future», précise-t-elle. «Cela réduit le risque mais implique que vous vous retrouvez alors avec des œuvres de grande valeur qui ne sont accessibles qu’aux grands patrimoines.»

Investir dans l’art en passant par une galerie a pour inconvénient que la plupart des œuvres proposées n’ont pas d’historique – ou alors un historique très bref. «Ce type d’investissement est très risqué», prévient-elle. «Avec ces œuvres, le côté émotionnel est plus important. Il faut apprécier l’œuvre et se demander si on l’aimera encore dans dix ans.»

«Lassitude»

Même les œuvres célèbres ne peuvent être vendues à tout moment. Les chefs-d’œuvre contemporains sont en moyenne proposés aux enchères tous les neuf ans. «Plus une œuvre reste longtemps aux mains d’un collectionneur – et est éventuellement exposée dans un musée – plus sa valeur augmente», assure Eugénie Dumont. «Si une œuvre change trop souvent de propriétaire, sa valeur n’augmentera pas aussi rapidement, car elle pourra être victime d’une certaine ‘lassitude’ de la part des collectionneurs.»

Enfin, il faut éviter d’appliquer la logique des marchés financiers au marché de l’art. Il est intéressant d’investir entre 5 et 10% de son patrimoine dans l’art parce que ce segment est décorrélé des autres actifs, ce qui en fait un outil de diversification. Mais pour Eugénie Dumont, «le principal rôle d’un investisseur dans l’art est de protéger le patrimoine artistique et de soutenir les artistes. Aucun artiste ne peint pour devenir une sorte d’action dans laquelle on investit.»

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Vers une suppression des frais de gestion cachés des fonds d’investissement?

La Commission européenne envisage de supprimer définitivement les frais de distribution cachés des fonds d’investissement. L’impact sur les clients des banques privées devrait cependant rester limité.

d’une stratégie qui fonctionne pour tout le monde, qui ne laisse pas les petits investisseurs sur le bord du chemin et qui ne complique pas l’accès au conseil des groupes vulnérables», explique Carolina De Giorgi, conseillère en règlementation à l’Efama. Selon la fédération, 17 États membres ainsi que les parties prenantes des banques et des assureurs ont fait part de réserves identiques à la Commission. Il faudra a endre le mois de mai, lorsque la Commission européenne dévoilera son projet.

Banques privées

On peut se demander si l’interdiction des rétrocessions aurait un impact important sur les clients des banques privées. La réponse à ce e question diffère d’une banque à l’autre. Depuis 2018, les institutions financières sont obligées de mentionner séparément les rétrocessions sur le relevé de frais qu’elles envoient chaque année à leurs clients. Les rétrocessions ne sont donc plus entièrement cachées. En outre, les banques doivent, selon les règles de conduite MiFID, se montrer beaucoup plus strictes sur ce plan. Si le client a signé un contrat de gestion discrétionnaire – en d’autres termes, s’il délègue totalement la gestion de son portefeuille à la banque – celle-ci ne peut facturer des rétrocessions. Si le gestionnaire investit malgré tout dans des fonds avec rétrocession, celle-ci doit être reversée au client. Dans de nombreux cas, les banques optent dès lors pour les variantes «clean share» en gestion discrétionnaire. Par conséquent, la suppression des rétrocessions n’aurait aucun impact sur les clients ayant signé un contrat de gestion discrétionnaire.

Malgré la popularité des fonds indiciels cotés, les fonds d’investissement classiques restent un instrument important dans la gestion des portefeuilles des clients des banques privées. Et même si les règles européennes exigent plus de transparence, les frais liés à la gestion des fonds restent une affaire complexe pour de nombreux investisseurs.

Tous les fonds facturent des frais de gestion annuels. Ces frais, qui varient en général entre 1 et 2% sur base annuelle, sont déduits quotidiennement (et proportionnellement) de la valeur d’inventaire des fonds, ce qui les rend pratiquement invisibles. Parmi ces frais, on trouve notamment la rémunération du gestionnaire du fonds, celle du distributeur ainsi que les frais administratifs et de marketing.

Rétrocessions

La rémunération du distributeur, aussi appelée «rétrocession», est considérée comme une compensation pour les conseils et le suivi fournis par les banques lors de la vente du fonds. Ce e «rétrocession» peut représenter la moitié des frais annuels. Ces rétrocessions font l’objet de discussions depuis un certain temps. Le Royaume-Uni et les Pays-Bas les ont interdites, respectivement en 2012 et 2014, ce qui signifie que seules les variantes «clean share» des fonds – qui ne prévoient aucune rémunération pour

Cette mesure pousserait les petits investisseurs dans les bras de courtiers bon marché qui ne fournissent aucun conseil.

les distributeurs des fonds – peuvent être commercialisées. Si les banques souhaitent facturer leurs conseils, elles doivent le faire séparément afin que ces frais soient visibles pour leurs clients.

«Une interdiction pure et simple ne tiendrait pas compte des di érences entre les pays en matière de distribution des fonds.»

La Commission européenne élabore actuellement un plan visant à interdire les rétrocessions partout en Europe, arguant que ces compensations cachées peuvent influencer les conseils des banques. Selon la Commission, ces dernières pourraient être tentées de vendre les fonds les plus rémunérateurs. Si les honoraires de conseil sont facturés séparément, on pourra s’a endre à davantage d’objectivité de la part des banques, estime-t-on à la Commission européenne. Mais ce plaidoyer se heurte à une forte opposition. Certains se réfèrent à l’expérience du Royaume-Uni et des Pays-Bas, où les distributeurs de fonds facturent séparément des honoraires de conseil à leurs grands clients, certes, mais où ce modèle est difficilement applicable aux petits investisseurs. Ce e mesure les pousserait dans les bras des courtiers bon marché qui ne fournissent aucun conseil. Résultat: ils seraient totalement abandonnés à leur sort.

La Fédération européenne des gestionnaires de fonds, l’Efama, a également fait part de son opposition à ce projet, estimant qu’il n’apportait pas de preuves suffisamment convaincantes de changements positifs sur le marché. «Une interdiction pure et simple ne tiendrait pas compte des différences entre les pays en matière de distribution des fonds. Nous avons besoin

Chez Delen Private Bank, on ne parle même pas de rétrocessions dans les mandats discrétionnaires. «Chez nous, les mandats de gestion discrétionnaire ne travaillent qu’avec des fonds à profils. Nous ne faisons jamais appel à des fonds de tiers. En d’autres termes, tous nos fonds sont des fonds maison, sans rétrocession», explique Ma hieu Corne e, membre du Comité de direction de Delen Private Bank. Certains clients optent pour la gestion-conseil, c’est-à-dire qu’ils prennent eux-mêmes leurs décisions en matière d’investissements avec l’aide des conseils de la banque. Dans ce type de mandat, d’autres règles s’appliquent en matière de rétrocession. Si la banque fournit des conseils indépendants, elle ne peut pas percevoir de rétrocession ou doit les reverser. Dans le cas contraire, elle peut percevoir des rétrocessions de ses partenaires. En Belgique, la majorité des banques a opté pour ce type de conseil. Chez KBC Private Banking, les clients se voient donc facturer des rétrocessions. «Selon les règles européennes MiFID, les rétrocessions ne sont pas remboursées en cas de conseils non indépendants et les clients n’ont pas accès aux variantes ‘clean share’», explique-t-on à la banque. Certaines banques s’écartent cependant de ce e règle. ABN Amro Private Banking, par exemple, a décidé de rembourser les rétrocessions à ses clients. «Qu’il s’agisse de mandats de conseil ou de gestion discrétionnaire, nous privilégions toujours les variantes ‘clean share’. Lorsque ce n’est pas possible – la plupart de ces variantes ne sont en effet pas enregistrées en Belgique et ne peuvent donc pas être proposées aux clients – nous remboursons systématiquement les rétrocessions», explique Lander T’Sjoen d’ABN Amro Private Banking.

Tout ceci démontre qu’une suppression pure et simple des rétrocessions n’aurait qu’un impact limité sur les clients des banques privées. On s’a end à ce que la Commission européenne apporte des éclaircissements sur ses intentions début mai.

1 à 2%

Dans la plupart des fonds, les frais de gestion annuels se chi rent entre 1 et 2% par an.

L’ECHO JEUDI 30 MARS 2023 15 Private banking
CAROLINA DE GIORGI CONSEILLÈRE EN RÈGLEMENTATION À L’EFAMA
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