TRUCK & BUSINESS 279 (décembre 2021)

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TRUCK & BUSINESS

PARAÎT 4 FOIS PAR AN : MARS, JUIN, OCTOBRE ET DÉCEMBRE - BUREAU DE DÉPÔT : 3000 LEUVEN - AUTORISATION : P205027

Comprendre. Entreprendre. Surprendre.

TRAÇABILITÉ EN TEMPS RÉEL

Votre camion vous trahit-il ? NOUVELLE CLASSIFICATION DES FONCTIONS ET NOUVELLE ÉCHELLE DES SALAIRES TRUCK & BUSINESS BAROMETER #33 : L’HEURE DE VÉRITÉ POUR LES TARIFS DE TRANSPORT LE MEILLEUR DE SOLUTRANS 2021

#279 Décembre 2021


Offrez de la visibilité à votre entreprise ! Le succès de l’événement dépend de vous, transporteurs et prestataires logistiques.

Posez votre candidature et succédez à TTC comme Transporteur de l’Année ou à CHC / Hospital Logistics comme Logistics Project of the Year.

Après une année 2021 record, avec plus de 180.000 téléspectateurs en access primetime sur Canal Z, les prix les plus convoités du secteur seront bien sûr de retour en 2022. Une chose est déjà sûre : nous nous réjouissons de vous revoir ailleurs que derrière un écran !


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TRUCK & BUSINESS

Décembre 2021 #279 S

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Comprendre. Entreprendre. Surprendre.

7 CARTE BLANCHE

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à Philippe Degraef (directeur de la Febetra) : « Vive la Journée du Chauffeur ! »

TTS : trois lettres qui cachaient cinq frères, tous passionnés de transport et de camions.

9 EDITORIAL

23 RH

Pareto, au secours !

Sept ans que le dossier était dans les limbes : la nouvelle classification des fonctions sera d’application au 1er janvier 2023.

1 0 TA B L E A U D E B O R D – ECONOMIE

Les ennuis judiciaires de GLS, PostNL et consorts s’aggravent + interview de Jan Pfenninger (Planzer) + le chiffre et le graphique du trimestre et les principales news en bref.

20 EXPERTISE

La 33e édition du Truck & Business Barometer montre que la reprise économique pourrait s’affaiblir, mais aussi que les hausses de tarifs n’ont pas encore été généralisées.

12 DECISION MAKER

Group De Wolf, en deux ans, a vécu un MBO, revu son portefeuille d’activités et racheté Bellekens. Pas mal pour une nouvelle équipe dirigeante… 1 6 I N T E R N AT I O N A L DECISION MAKER

Trois transporteurs européens partagent leur vision de la pénurie de chauffeurs et des recettes qu’ils appliquent avec plus ou moins de succès.

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25 PROFESSION

Les logisticiens de l’automobile sont encore plus soumis aux ruptures de chaînes d’approvisionnement que dans d’autres secteurs. 26 PROFESSION

En attendant que la deuxième vague de mesures liées au Mobility Package entrent en vigueur, ce sont les nouvelles règles sur le détachement qui impactent le plus le marché. 28 SHIPPER

A l’occasion de l’inauguration du nouveau centre de distribution de BarryCallebaut, nous nous sommes penchés sur l’organisation des transports du groupe chocolatier.


La route en toute sécurité Nous sommes TVM. Impliqués auprès de nos clients. Nous roulons le regard tourné vers l’avant. Sans nous laisser distraire. C’est pour ça que nos chauffeurs font partie des plus sûrs d’Europe. Et nous en sommes fiers ! Tous ensemble, nous travaillons pour assurer un avenir sain à notre secteur.


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Comprendre. Entreprendre. Surprendre.

30 TEST

Cette fois, le Turbo Compound, ça marche ! La preuve avec le test du Volvo FH460 I-Save qui a réalisé un excellent résultat en consommation.

DELAY 11 minutes

ETA 11:34

32 EVENT

Le Truck & Business Summit a permis d’y voir un peu plus clair sur les technologies qui feront partie du mix ‘zéro-émission’ dans les années à venir. 40 TRAILER 37

Organisé juste avant que tout ne s’annule à nouveau, le salon Solutrans est vraiment passé entre les gouttes. Mais cela valait la peine.

DOSSIER

La digitalisation du transport progresse, mais pas au même rythme partout. Il est vrai qu’il subsiste beaucoup de questions relatives à la propriété et à l’utilisation des data.

46 TRUCK & BUSINESS I N N O VAT I O N C E N T E R

Nouvelle rubrique où la rédaction sélectionne les innovations les plus intéressantes du trimestre et les commente. Au menu : Lamberet, CMB.Tech, DKV, Webfleet, Maxus et bien d’autres. 4 8 TA B L E A U D E B O R D – INDUSTRIE

Scania présente bien plus qu’un nouveau moteur de 13 litres, plus tous les chiffres du marché belge à fin octobre 2021, une interview de Carla Detrieux (Volta Trucks) et les principales news du trimestre en bref. 50 BLOG

42 TRAILER

Chez Fliegl, l’innovation se manifeste partout, mais toujours avec beaucoup de bon sens.

Johan Tielemans (Scaldis Conseil) : « Lisez les petits caractères de vos contrats ‘data’ ! »

43 TOOLS

Quel est l’avenir des huiles et lubrifiants en cette époque digitalisée et de plus en plus électrique ?

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GREEN TRUCK AWARD, DIGITAL TRUCK AWARD, TRUCK SAFETY AWARD ET TRANSPORTEUR DE L'ANNÉE 2022 C'est le moment de vous inscrire comme candidat !

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claude.yvens@transportmedia.be


All ready Electric Charges lourdes. Zéro émissions. Les camions Volvo FM, FMX et FH Electric éliminent les émissions de CO 2, réduisent le bruit et la pollution atmosphérique et permettent d’effectuer des transports régionaux de grande capacité dans des zones où les niveaux sonores et les réglementations en matière d’émissions sont stricts. Pour simplifier la transition vers l’électromobilité, les camions sont proposés avec des solutions pour la recharge, la planification des itinéraires et de l’autonomie, le statut énergétique et plus encore.

Volvo Trucks. Driving Progress


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CARTE BLANCHE

Vive la ‘Journée du Routier’ !

Avec un an de retard sur l’agenda initial, Febetra a organisé sa première ‘Journée du Routier’ le 9 décembre. Nous nous sommes inspirés des Pays-Bas, où l’Institut sectoriel Transport & Logistiek avait déjà déployé avec succès le concept en 2019 en collaboration avec un partenaire médiatique. Nous avons été tellement séduits par l’initiative de nos voisins du nord que nous avons immédiatement décidé de leur emboîter le pas lors d’une édition suivante.

Les pouvoirs publics, eux aussi, feraient bien de traiter nos héros silencieux avec davantage de respect.

En général, les routiers sont des personnes passionnées qui font leur travail avec beaucoup d’enthousiasme. Trois chauffeurs de poids lourd sur quatre se disent fiers de ce qu’ils font. A juste titre, car sans chauffeurs routiers, l’économie - Covid ou pas Covid - ne peut pas fonctionner.

Il est beaucoup moins plaisant de constater que seulement 18 % des chauffeurs routiers disent être appréciés. Et ils ne parlent pas tant de l’aspect financier. Évidemment, ils ne diraient pas NON à un salaire plus élevé. C’est une aspiration très humaine, qui vaut d’ailleurs pour presque toutes les catégories professionnelles. Mais leur plus grande frustration est de ne pas recevoir le respect qu’ils méritent sur les quais de chargement et de déchargement, dans les terminaux à conteneurs ou, plus généralement, dans leurs relations quotidiennes avec les clients. Par exemple – et c’est plus fréquent qu’on ne le pense - les chauffeurs n’ont pas toujours accès aux sanitaires sur le lieu de chargement et/ou déchargement ou se font balader d’un endroit à l’autre. Les pouvoirs publics, eux aussi, feraient bien de traiter nos héros silencieux avec davantage de respect. La grande pénurie de parkings où les chauffeurs peuvent prendre leurs pauses obligatoires en toute sécurité et avec le confort nécessaire constitue sans doute l’exemple le plus frappant de ce qu’il ne faut pas faire. Sans parler des autres usagers de la route. Au mieux, ils considèrent les routiers comme un mal nécessaire. En signe d’hommage, ce 9 décembre, les chauffeurs ont été mis à l’honneur aux quatre coins du pays. De nombreuses entreprises des secteurs les plus divers leur ont déroulé le tapis rouge et réservé une petite attention : un café revigorant, un croissant tout juste sorti du four, un massage apaisant, un sac plein de goodies… etc. Toujours avec le même message sous-jacent : « Merci, nous vous apprécions ». Ceux qui pour une raison quelconque n’ont pas pu participer cette année pourront se rattraper l’année prochaine. Nous continuerons jusqu’à ce que les chauffeurs routiers se sentent respectés et valorisés chaque jour de l’année. C’est notre ambition ultime.

Philippe Degraef Directeur Febetra

RÉAGISSEZ ! claude.yvens@transportmedia.be


L’avenir est Super. Et il sera meilleur de 8 %. Bien que personne ne puisse dire avec certitude ce que l’avenir nous réserve, nous sommes convaincus qu’il sera brillant. La nouvelle chaîne cinématique Scania Super est non seulement considérée comme le plus douce sur la route, mais aussi la plus efficace que nous ayons jamais construite. Cela établit une toute nouvelle norme de l’industrie en termes de chaînes cinématiques et de moteurs à combustion, avec une économie de carburant d’au moins 8 %. Prêt aujourd’hui à relever les défis de demain. Un avenir qui sera 8 % meilleur. fr.scania.be/super La nouvelle chaîne cinématique Scania Super, avec le moteur à combustion comme pièce maîtresse, offrira une économie de carburant d’au moins 8 % par rapport au moteur de 13 litres actuel de Scania. Comparaison réalisée pour les opérations longue distance.


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TRUCK & BUSINESS Comprendre. Entreprendre. Surprendre.

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PA R E T O, A U S E C O U R S !

En Allemagne, 80 % du surcoût d’un camion électrique est couvert par l’état.

C’est à l’économiste italien Vilfredo Pareto que l’on attribue la loi des 80/20. Une loi selon laquelle environ 80 % des effets sont le produit de seulement 20 % des causes. Appliquée à la gestion d’un projet, cela signifie que 20 % des efforts contribuent à 80 % des réalisations. En Belgique, on est plutôt les spécialistes du principe inverse : à force de complexifier l’état, on est obligé de fournir 80 % d’efforts pour obtenir 20 % du résultat. En matière de politique climatique, on a vu ce que cela donnait lors de la Cop26 à Glasgow. Le transport routier a sa part de responsabilité dans les émissions de CO₂ et il est prêt à jouer son rôle dans sa propre décarbonation. Mais, bon sang, que les diverses autorités de ce pays ne lui rendent pas la tâche facile. On s’en rendra encore compte à la lecture de l’article consacré à Group De Wolf dans ce numéro. Le résultat de toutes ces tergiversations, de tous ces petits retards accumulés, c’est que 2021 n’aura pas permis, et de loin, de tenir les promesses en matière de mobilité électrique. L’an dernier, après avoir interrogé toutes les marques de poids lourds, nous estimions que le marché belge absorberait entre 40 et 60 camions électriques cette année. Un an plus tard, le compte s’établirait plutôt entre 4 et 6. Voilà un zéro pointé qui fait toute la différence. Chez nos voisins, par contre, les choses bougent beaucoup plus vite. On roule ‘électrique’ aux Pays-Bas, une visite au salon Solutrans montrait bien l’enthousiasme que peut créer un engagement public fort en faveur de l’hydrogène et en Allemagne, le surcoût lié à l’achat d’un camion électrique est couvert à… 80 %. Avec une mesure qui n’a certainement pas demandé beaucoup plus que 20 % d’efforts. Tout n’est cependant pas perdu : la Chambre des Représentants a approuvé un projet de loi qui introduit le principe d’une déduction fiscale majorée pour les entreprises qui investissent dans des camions sans émission de carbone et dans des infrastructures de recharge électrique et de ravitaillement en hydrogène. L’effort des Régions sera-t-il à la hauteur de l’enjeu ?

@ClaudeYvens be.linkedin.com/in/claudeyvens

CLAUDE YVENS, R É D A C T E U R E N C H E F.

É D I T E U R R E S P O N S A B L E / M A N A G I N G D I R E C T O R Christophe Duckers - TRANSPORTMEDIA - Half Daghmael 1K, 3020 Herent - tél +32 (0) 16 22 11 31 - info@transportmedia.be - www.transportmedia.be • R É D A C T I O N : R É D A C T E U R E N C H E F Claude Yvens - claude.yvens@transportmedia.be • A S S I S T A N T E D E R É D A C T I O N / M A N A G E M E N T A S S I S T A N T Christel Cluyten - christel.cluyten@transportmedia.be • F O N D A T E U R Jean-Marie Becker • C O L L A B O R A T E U R S Frédéric Willems, Arnaud Henckaerts, Yeelen Möller, Erik Roosens, Hendrik De Spiegelaere, Philippe Van Dooren, Michel Buckinx, Jean-Michel Lodez, Pierre-Yves Bernard, Michaël Vandamme et Yeelen Möller • P H O T O G R A P H I E Erik Duckers, Jeroen Peeters • S A L E S & M A R K E T I N G : P R O J E C T M A N A G E R Bram Crombez - tél +32 (0) 16 22 11 31 - GSM +32 (0)472 45 60 90 - bram.crombez@transportmedia.be • M A R K E T I N G Frédéric Willems - frederic.willems@transportmedia.be D E S I G N Eff ective Media nv www.eff ectivemedia.be •


TABLEAU DE BORD ECONOMIE

GLS et PostNL dans le viseur de la justice Trois spécialistes de la livraison de colis sur le dernier kilomètre semblent particulièrement visées par l’auditorat du travail : après l’ouverture d’un procès contre GLS, PostNL et plusieurs de leurs sous-traitants, de nouvelles perquisitions ont eu lieu chez DPD (à Lummen), GLS (à Puurs) et PostNL (à Wommelgem, Malines et Ardooie). Deux dépôts au moins ont été temporairement mis sous scellés (GLS à Puurs et PostNL à Wommelgem). Les infractions constatées chez les uns et les autres ont toutes trait à la manière dont la livraison de colis est exclusivement confiée à des sous-traitants, avec parfois une sous-traitance en cascade. Chez PostNL à Wommelgem, les inspecteurs ont par exemple relevé des infractions en matière de travail au noir et de travail à temps partiel. Chez GLS, des cas de travail au noir ont aussi été constatés, y compris dans le chef d’une personne en séjour irrégulier en Belgique. Dans les deux cas, les dépôts ont été réouverts après quelques jours, mais ces actions spectaculaires ont déjà incité certains grands chargeurs à cesser toute collaboration avec l’une ou l’autre société de colis. C’est notamment le cas d’IKEA qui a suspendu sa collaboration avec PostNL. Le tempo de la justice, quant à lui, est plus lent : le procès qui s’est ouvert le 16 septembre ne devrait pas se clôturer avant l’été 2022 au plus tôt.

PERSONNALITÉ DU TRIMESTRE

VIDÉO DU TRIMESTRE

Après 43 ans de carrière, Philippe Van Dooren a écrit son dernier article pour Flows.be le 30 novembre dernier. Mélange de pertinence et d’impertinence, il restera néanmoins actif dans le secteur du transport et de la logistique pendant quelque temps encore.

Deux débats organisés conjointement par Transportmedia ont réuni transporteurs et experts autour de l’avenir des modes de propulsion : le Truck & Business Summit et le débat tenu dans le cadre de la journée Best of Wallonia sont tous deux à visionner sur notre channel Youtube.

EN BREF

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50 tonnes en Flandre : la mauvaise histoire belge Meers Transport conteste avec succès un ‘abus de pouvoir’ du fisc DHL Express roule à l’hydrogène pour Apple Gosselin reprend Verhuizingen Meys L’ITLB prévoit une forte augmentation du prix de revient en 2022 Le diesel professionnel progressivement supprimé Trans Polonia reprend J. Deckers & Zn Le Benelux passe à 45/46 tonnes pour les propulsions alternatives Jost reprend Be-Trans Corneel Geerts gagne Raben comme partenaire du réseau Distri24 Galliker développe un camion électrique à autonomie élevée S.M. le Roi Philippe visite H.Essers et met l’accent sur le marché du travail Une bande criminelle roumaine mise sous les verrous 44 tonnes : l’UPTR au Conseil d’Etat français ISI renouvelle sa flotte et ses équipements Les prix du transport à un niveau ‘historiquement haut’

DÉCOUVREZ TOUT LES INFOS AUSSI SUR WWW.TRANSPORTMEDIA.BE


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JAN PFENNINGER (PLANZER)

Le transporteur suisse Planzer a commandé ses cinq premiers utilitaires légers entièrement autonomes (sans cabine, donc) auprès de la société américaine Udelv. T R U C K & B U S I N E SS : DA N S Q U E L CO N T E X T E VO U L E Z-VO U S U T I L I S E R CES VÉHICULES AUTONOMES ?

« Nous voulons emmagasiner de l’expérience avec les véhicules autonomes »

Jan Pfenninger : Nous voulons lancer un projet-pilote de livraison de colis entièrement autonome, où le destinataire viendrait chercher son colis dans un casier dans le véhicule même. Puisque les véhicules ne seront pas livrés avant 2023, nous avons donc deux ans pour avancer avec l’office fédéral des routes Astra sur le volet législatif. T& B : C ’ E ST AU SS I U N INVESTISSEMENT DE MARKETING ?

Jan Pfenninger : Oui, dans la mesure où nous ne savons pas encore exactement jusqu’où peut nous mener cette nouvelle technologie. Notre première ambition est d’emmagasiner de l’expertise, mais nous n’avons pas l’intention de remplacer un jour nos chauffeurs par des machines. En tant qu’entreprise familiale, nous voulons

alléger le travail de nos chauffeurs ; les véhicules autonomes viendraient donc les suppléer sur des tournées plus compliquées à réaliser à cause des embouteillages sen ville par exemple. Avec ce projet, nous voulons aussi avoir un impact positif sur l’environnement puisque les véhicules d’Udelv sont électriques. Rappelons que nous utilisons des camions électriques depuis 2014 ! T& B : R E G A R D E Z-VO U S D É JÀ P LU S L O I N , V E R S L ’A R R I V É E D E C A M I O N S AUTONOMES ?

Jan Pfenninger : Il faudrait d’abord que le cadre législatif soit défini, ce qui est encore loin d’être le cas. Mais en ce qui concerne les camions sur route ouverte, cela semble pour l’instant encore très difficile à imaginer. UNE INTERVIEW DE CLAUDE YVENS

LE CHIFFRE DU TRIMESTRE

-50 millions EUR

Le gouvernement fédéral a décidé de supprimer progressivement l’avantage fiscal dont bénéficient les transporteurs routiers au titre du diesel professionnel. Dans un premier temps, le secteur y perdra 50 millions d’euros.

LE GRAPHIQUE DU TRIMESTRE

Les prévisions du prix de revient publiées par l’ITLB pour l’année 2022 n’ont jamais été aussi élevées. Aux facteurs de coût traditionnels comme le carburant et l’amortissement des véhicules s’ajoute pour la première fois la diminution du montant récupérable des accises au titre du diesel professionnel. Part

Evo 2021 > 2022

Personnel roulant

35,55%

6,12

Carburant

21,67%

7,72

Frais généraux

9,19%

2,35

Amortissement véhicule

8,60%

12,06

Coûts spécifiques

6,68%

1,69

Coût de congestion

4,10%

0

Financement

3,80%

10,15

Assurance véhicule

3,68%

11,79

Réparation,révision,entretien

3,01%

4,57

Pneumatiques

2,37%

2,77

Assurance CMR/exploitation

0,87%

10,47

Autres coûts directs véhicule

0,46%

0,72

40 % 35 %

Transport général national

+6,12%

30 % 25 % 20 %

+7,72%

15 % 10 % 5% 0%

+2,35% +12,06% +1,69% +0% +10,15% +11,79% +4,57% +2,77% +10,47% +0,72%


DECISION MAKER

Group De Wolf

Rome ne s’est pas refait en un jour Ce qui était une société de transport très traditionnelle est en train de se transformer sous l’impulsion de cinq nouveaux actionnaires. En moins de deux ans, Group De Wolf s’est doté d’une nouvelle structure, d’une nouvelle identité et a racheté un ancien Transporteur de l’Année.

En deux ans, Group De Wolf s’est donné une nouvelle identité et a développé sa palette de services.

La nouvelle a été officialisée quelques jours avant le salon Transport & Logistics d’Anvers auquel, justement, Group De Wolf participait : le transporteur de Turnhout reprenait Bellekens, la société de Heist-op-den-Berg qui avait été Transporteur de l’Année en 1998. L’occasion de faire le point avec Didier Potters (CEO) et Luc De Koninck (CCO) sur deux années bien agitées. MBO EN JANVIER 2020

Truck & Business : Les grandes manœuvres avaient déjà commencé avant votre arrivée à la tête de Group De Wolf… Didier Potters : En effet. En 2019, Group De Wolf avait arrêté ses activités de transport de patients vers les hôpitaux (une activité rachetée en 2016, NDLR). En janvier 2020, cinq associés se sont regroupés pour rache12

ter les parts aux actionnaires de l’époque : moi-même, mon père Pascal, Jef et Fons De Wolf et Luc De Koninck. Nous voulions insuffler une nouvelle énergie dans la société, en faire une nouvelle version de nous-mêmes. T&B : Quels ont été vos premiers axes d’action ? D. Potters : A l’époque, la part du transport de charges complètes était trop importante. Nous avons d’abord cherché à rééquilibrer la part du transport de lots partiels et du transport express, ce dernier étant d’ailleurs à l’origine de Group De Wolf. Dans le même temps, nous avons commencé à exploiter une partie de l’ancien entrepôt d’Aldi à Rijkevorsel et nous avons mis en service un tout nouveau système de gestion des transports. Cette année, nous y avons ajouté un nouveau logo et nous avons donc repris Bellekens.

T&B : Bellekens, c’était un gros morceau… D. Potters : Oui, puisque cela doublait d’un seul coup notre capacité de transport. Cela nous a permis de créer de belles synergies entre le transport international et le transport dans le Benelux. Nous étions de toutes façons à la recherche d’économies d’échelle. Aujourd’hui, nous avons refait passer tous les véhicules ex-Bellekens sur plaques belges et nous avons remis tous les chauffeurs sous contrat belge. Cela représente une cinquantaine de véhicules et, en ce qui concerne le transport international, nous ne faisons plus appel à aucun sous-traitant. Pour la partie Benelux, qui est exploitée par Red Line Services, nous avons aujourd’hui 35 véhicules en propre et environ 25 véhicules de sous-traitants.


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T R O P D E B U R E A U C R AT I E

T&B : Ces changements surviennent précisément au moment où les prix de transport évoluent fort… D. Potters : Il y a plusieurs raisons qui expliquent que les tarifs de transport doivent augmenter : les nouvelles règles qui découlent du Mobility Package, la pénurie de chauffeurs et l’augmentation du prix de revient. Donc, les prix de transport doivent augmenter et les marges bénéficiaires aussi, structurellement. T&B : Pourquoi les marges bénéficiaires doivent-elles augmenter de la sorte ? D. Potters : Parce qu’on exige de plus en plus de notre part. Le principe des réservations de slots, par exemple, ou les efforts que les clients nous demandent de faire pour un transport plus vert. Aujourd’hui, nous avons vraiment l’impression que les clients nous demandent de les soutenir dans leurs efforts écologiques. Très bien, mais cela va modifier fondamentalement notre structure de coûts. Cela dit, je pense que les clients sont majoritairement conscients que ce transport plus vert va coûter plus cher, mais il reste beaucoup de questions liées à l’infrastructure. T&B : Qu’avez-vous déjà entrepris pour rouler plus vert ? D. Potters : Nous avons mis en service quatre camions au LNG. Mais où en serons-nous dans cinq ans ? Rouler à 100 % à l’électricité sera impayable. L’autre problème, c’est la bureaucratie : depuis des mois, nous voudrions utiliser une technologie encore jamais vue en Belgique, mais nous n’arrivons pas à faire avancer le dossier… T&B : Pourriez-vous nous en dire davantage ? Luc De Koninck : Il s’agit de trois semi-remorques sous température contrôlée avec un groupe frigo électrique alimenté par un essieu à récupération d’énergie (Valx E2 HD, NDLR) et par des panneaux solaires. Sur le papier,

« Pour les prix de transport, c’est le moment de vérité. »

De g. à dr. Luc De Koninck (CCO), Didier Potters (CEO), Fons et Jef De Wolf.

Le nouveau logo est déjà bien visible sur les matériels le plus récents. GROUP DE WOLF EN BREF

• Siège principal : Turnhout • Entrepôts : Turnhout (21.000 m2), Rijkevorsel (9000 m2) • Spécialités : transport express, transport de lots partiels et de charges complètes, transport frigorifique, walking-floors, transport de déchets • Flotte : 100 tracteurs, 10 porteurs, 10 utilitaires légers, 194 semi-remorques dont 155 tautliners, 25 fourgons, 10 frigorifiques, 4 walking floors. www.groupdewolf.com


DECISION MAKER

ces semi-remorques coûtent deux fois plus cher qu’une semi-remorque frigo classique. Depuis le mois de juin, nous déposons des demandes de subsides auprès des cabinets concernés, mais nous n’avons toujours reçu aucune réponse alors que la technologie que nous voulons utiliser est bien mentionnée dans la liste du VLAIO. Il y a aussi un problème d’homologation pour les essieux moteurs qui n’est pas encore réglée. D. Potters : C’est d’autant plus rageant que nous avons le client qui est prêt à nous suivre. Avec ces semi-remorques, nous pourrions rouler sous la barre des 60 dB et être homologués PIEK, ce qui nous permettrait de livrer de nuit. Ce serait aussi bon pour notre image, mais en attendant que le cabinet daigne nous répondre, le client attend…

INTERVIEW VIP

Quelle autre profession auriez-vous aimé exercer ? Didier Potters: Musicien. Quand j’étais petit, j’enregistrais chaque semaine le Top 50 avec mon magnétophone. Aujourd’hui cet intérêt se manifeste sous la forme de ma collection de 33 tours. Malheureusement, je n’ai jamais eu le temps d’apprendre un instrument. Pour vous, être heureux signifie... D. Potters: Pour moi, la clé du bonheur et de la réussite, c’est le bon équilibre entre le travail et la vie privée. Quel sportif (-ve) admirez-vous le plus ? D. Potters : J’ai toujours eu une très grande admiration pour Michael Jordan. Son dynamisme et ses énormes compétences en basket, mais aussi son attitude et sa détermination à réussir sont des choses pour lesquelles j’ai beaucoup de respect.

BIEN FAIRE ET LE FAIRE SAVOIR

T&B : Souffrez-vous particulièrement de la pénurie de chauffeurs ? L. De Koninck : Pour le moment, ça va. Nous n’avons pas dû mettre un seul camion à l’arrêt. Je pense que depuis quelques mois nous sommes à nouveau perçus comme un employeur dynamique. La reprise de Bellekens a doublé la capacité de transport de Group De Wolf.

T&B : Et comment voyez-vous la situation économique évoluer ? L. De Koninck : Jusqu’à la fin du premier trimestre 2022, je ne me tracasse pas. Pour la suite, c’est plus compliqué à dire. Pour l’instant il y a des stocks de matières premières partout, mais après ? Jusque là, tout le monde, même le grand public, est bien conscient que les prix vont augmenter. Toute la presse en parle, donc ça rend les choses un peu plus faciles pendant les négociations avec les clients. C‘est un peu le moment de vérité… T&B : A quoi ressemblerait Group De Wolf dans cinq ans ? D. Potters : Je pense que nous allons continuer à grandir au même rythme, tant dans le transport que la logistique. Le transport 14

frigorifique, par exemple, est une activité que nous avons lancée en 2020 et qui occupe déjà 12 véhicules. On va aussi continuer à se développer dans les fonds mouvants. T&B : Y a-t-il des synergies entre ces différentes activités ? D. Potters : Pas nécessairement. Nous avons par exemple lancé le transport de déchets avec un seul véhicule et nous en sommes aujourd’hui à dix. Quand il y a une opportunité de croissance, nous y allons et nous apprenons aussi à le faire savoir. T&B : C’est un peu ça, le nouveau style de Group De Wolf ? D. Potters : Exactement. N’oubliez pas que nous avons réali-

sé pas mal de projets en pleine pandémie. Nous avons aussi rationalisé les plannings entre la branche Benelux et la branche internationale, et il nous reste à passer à une organisation sans papier qui nous permette d’informer nos clients en temps réel. Je voudrais aussi installer des panneaux solaires. Comme vous le voyez, il y a encore beaucoup de projets à mener… CLAUDE YVENS


PUBLIREPORTAGE

Webfleet / Bridgestone Le meilleur de deux mondes

Depuis trois ans, Webfleet Solutions fait partie du groupe Bridgestone. La combinaison des expertises de ces deux leaders permet maintenant de contrôler à distance et en temps réel la pression des pneus. Ce système TMPS apporte une énorme valeur ajoutée à la gestion de la flotte.

Les solutions télématiques de Webfleet Solutions permettaient déjà de gérer et de contrôler à distance la planification des ordres de transport, la mesure de la température dans la semi-remorque ou l’identification du chargement. A cela s’ajoute désormais un nouveau module de contrôle de la pression des pneus (TPMS). « Une pression correcte des pneus a une incidence sur la sécurité et sur les coûts », explique Sjors de Kruijf, directeur des ventes Benelux & Nordics chez Webfleet Solutions. « Une mauvaise pression des pneus augmente le risque d’accident. Dans 90 % des cas où un véhicule est immobilisé à cause d’un problème de pneu, c’est une pression incorrecte qui est en cause. Une mauvaise pression des pneus entraîne également une usure plus rapide, une consommation accrue et donc des émissions de CO2 plus

élevées. En outre, le maintien de la bonne pression permet aussi de réaliser des gains d’efficacité, puisque le véhicule n’est jamais immobilisé de manière inopinée. »

à tout moment la pression de chaque pneu d’une flotte en mouvement et peut ainsi agir à temps en cas de perte de pression lente ou anticiper certaines anomalies. »

LES CAPTEURS FONT LE BOULOT

Le système TPMS de Webfleet / Bridgestone concrétise donc le rapprochement entre les deux entreprises : « Il y a une bonne raison pour voir se rapprocher une société de logiciels de haute technologie et un fabricant de pneumatiques. Les clients exigent de plus en plus de flexibilité. Ils n’achètent pas une quantité de pneus, mais ils paient pour un kilométrage et c’est le fournisseur de pneus qui leur fournit les pneus nécessaires. Lorsqu’on s’engage dans un tel partenariat, il faut avoir une vision et un suivi, ce n’est qu’ainsi que chaque partie peut se faire une bonne idée des coûts réels et de la rentabilité », résume Sjors De Kruijf.

« En pratique, on place sur la valve un capteur qui transmet toutes les informations », explique de Kruijf. « L’avantage, c’est qu’il n’est pas nécessaire de démonter le pneu s’il y a un problème avec le capteur. » Les informations transmises par les capteurs sont analysées en temps réel par le centre de contrôle Webfleet et mises à disposition du chauffeur et du back-office de l’entreprise de transport. « Nos systèmes facilitent également la communication directe avec le chauffeur sur les mesures à prendre », explique encore de Kruijf. « Le back-office peut ainsi connaître

www.webfleet.com


INTERNATIONAL DECISION MAKER

Pénurie de chauffeurs

Les recettes qui marchent La pénurie de chauffeurs touche toute l’Europe, même si ce n’est pas dans les mêmes proportions partout. L’IRU organisait le 1er décembre un séminaire qui réunissait notamment trois transporteurs bien connus. Ils ont tous leur recette, mais certaines tendances se dégagent quand même.

Manvesta Logistics a beaucoup travaillé sur la formation et la qualification de ses chauffeurs.

Cela fait des années que l’IRU pointe le risque d’une pénurie de chauffeurs routiers, et rien ne semble pour l’instant l’empêcher de s’aggraver. Le dernier remède imaginé est une charte écrite par les organisations représentatives des chargeurs, des transporteurs et les syndicats autour du ‘service minimum’ auquel les chauffeurs ont droit (accès aux sanitaires p.ex.) pendant leur travail. D’autres chantiers visent à augmenter la capacité des parkings pour poids lourds, mais on reste là dans le domaine général. Chaque entreprise, en fonction de sa situation particulière, conserve la responsabilité d’attirer (et de conserver) un maximum de chauffeurs. Voici quatre exemples concrets…

16

Pour Andrea Condotto, les jeunes chauffeurs sont beaucoup plus attentifs au matériel avec lequel ils roulent. C’est entre autres pour cela que Gruber s’engage résolument sur la voie des propulsions alternatves.

NERINGA JASIULIONIENĖ

ANDREA CONDOTTO

DIRECTEUR DE LA DIVISION FVL

P U B L I C A F FA I R S &

(FINISHED VEHICLES LOGISTICS)

I N N O VAT I O N M A N A G E R

C H E Z M A N V E S TA L O G I S T I C S

GRUBER LOGISTICS

LITUANIE

I TA L I E

« Nous sentons la pénurie de chauffeurs comme tout le monde, mais je pense que nous avions bien anticipé le problème. Il y a des points sur lesquels nous ne pouvons pas agir, et c’est une raison de plus pour agir là où nous pouvons avoir un impact. Notre flotte continue de grandir, et nous avons donc besoin de plus de chauffeurs. Il y a plusieurs années, nous avons donc lancé un plan d’action axé sur la formation de jeunes chauffeurs et de personnes sans emploi. Nous nous assurons qu’ils ont bien les qualifications et les savoir-faire nécessaires pour le job. L’autre axe de notre action est lié à l’environnement dans lequel nos chauffeurs travaillent. Nous pouvons essayer de le rendre aussi confortable que possible, et c’est dans ce contexte que nous avons signé la charte de l’IRU. »

« Entre 2020, où nous avons perdu 4 % de chiffre d’affaires et 2021, où nous connaissons une très forte croissance, nous avons dû complètement revoir notre gestion des transports. Nous avions déjà notre propre Académie, mais nous avons encore plus accentué nos efforts pour accompagner le développement de chaque chauffeur individuellement. Chaque chauffeur est maintenant suivi via un dossier digital complet qui reprend tous les modules qu’il a suivis et les tests qu’il a réussis. Ces efforts, avec d’autres, ont été reconnu par Forbes qui nous a attribué le label d’employeur attractif dans la catégorie ‘services’. »


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L’accompagnement personnalisé du chauffeur tout au long de sa carrière est aujourd’hui un must dans toute l’Europe.

ET LE SALAIRE ?

Nolan Transport a réussi assez rapidement à allonger la carrière effective de ses chauffeurs de plus de six ans.

SHANE FITZGERALD NOLAN TRANSPORT IRLANDE

“Honnêtement, nous ne souffrons pas de pénurie de chauffeurs. Il y a cinq ans, nous avons complètement revu notre politique HR, en nous concentrant d’abord sur la rétention du personnel. A l’époque, nous perdions trop de chauffeurs âgés de plus de 55 ans. C’était surtout une question de style de vie. Nous avons mis sur pied une politique de santé au travail, en accompagnant chaque chauffeur individuellement sur des questions de santé, de consommation d’alcool etc… En quelques années, nous avons pu augmenter le ‘cycle de vie’ d’un chauffeur de 6 à 7 ans. Pour cela, il a aussi fallu investir dans de nouveaux dépôts pour mieux recevoir les chauffeurs en Angleterre et sur le continent européen et aussi former les planificateurs pour qu’ils tiennent mieux compte de l’accès à des parkings sécurisés

pour les chauffeurs. Récemment, nous avons aussi lancé un nouveau programme de formation de jeunes chauffeurs : sur les six chauffeurs qui ont été engagés, quatre sont des femmes… » CLAUDE YVENS

“Sur les six nouveaux chauffeurs que nous avons engagés grâce à notre nouveau plan, quatre sont des femmes.” (Shane Fitzgerald)

Etonnés de voir qu’aucun de ces transporteurs ne parle de conditions salariales, nous leur avons demandé si le sujet était tabou… « Non, répond Neringa Jasiulionienė, nous savons qu’il faut offrir un bon salaire quand les conditions de travail ne sont pas faciles ou, comme dans le cas du transport de véhicules finis, le chauffeur a de grosses responsabilités. Le salaire est important pour attirer les jeunes, mais par la suite cela ne suffit plus. C’est alors à nous de leur donner des formations et des possibilités d’évolution dans la société. » Le son de cloche est un peu différent chez Gruber Logistics : « Pour moi, le salaire est surtout important en fin de carrière. Aujourd’hui, pour attirer des jeunes vers le métier, il faut montrer que l’entreprise est engagée dans la voie de la durabilité. Les jeunes d’aujourd’hui ont une vue bien plus holistique qu’avant. Ils veulent faire partie de la solution, pas du problème. » Comme quoi, entre la vieille Europe et les pays d’Europe centrale, les attentes ne sont pas les mêmes, fût-ce sur le plan salarial…


RETRO

TTS

Une grande famille en bleu C’était un des plus grands transporteurs belges jusqu’à son rachat par Jost Group en 2015 : TTS (Transporteur de l’Année 1995), c’était l’histoire de cinq frères qui avaient perpétué l’entreprise fondée par leur père. Avec un bleu reconnaissable de loin et une flotte qui a atteint les 400 véhicules. Le premier camion : un Scania 110 avec remorque à benne basculante (pour le vrac) et bâche (pour les palettes). Il est au nom de ‘s Heeren & Fils, avant l’utilisation de la dénomination TTS.

En 1975, Célestin ‘s Heeren, marchand de grains, crée TTS (Transports Travaux ‘s Heeren) à Meeffe après avoir repris la licence de Mr Mousset. La société se développe d’abord dans le transport de produits agricoles, mais aussi dans le vrac en général. En bâchées, les premiers clients sont Coca-Cola et Spontin. La société vit deux moments difficiles avec la faillite de Prayon, son plus important client, et avec le décès inopiné du fondateur le 12/12/84. Grâce au soutien notamment de Scania et de LAG, les cinq frères Josy, Philippe, Vincent, Dominique et Frédéric assurent cependant la continuité de l’entreprise, avec le soutien indéfectible de leur maman. A partir de là, TTS va se faire connaître par de multiples reprises : Langevin (spécialisée dans l’acier), Hody (citernes de bitume et citernes acide), Beaumont (carburant), Delvenne (grand volume sur l’Italie), Vermeire (transport de déchets animaliers), puis le département des bennes céréalières grand volume de De Dijcker et même toutes les sociétés du groupe GOD (Gustin, Orban, Demonty). Parallèlement, TTS se développe à l’international avec une première 18

filiale en France, à Ribeaucourt. Le multimodal devient un axe de développement fort : participation de 55% dans Tipes en Italie, création de TTS Multimodal Italia et France…. Avec l’élargissement rapide de l’Union Européenne, une autre filiale est aussi créée en Slovaquie. En 1998, le site de Hannut, exploité depuis 1983 et qui peut pourtant accueillir 120 camions, est devenu trop petit. TTS se construit une infrastructure sur 15 hectares à Liege Logistics, où l’entreprise fait ses premiers pas en logistique. Alors que TTS arrive à un parc de près de 400 moteurs, les cinq frères

voient leurs chemins se séparer : en 2005, Frédéric crée sa société ‘s Heeren Frédéric Transport. L’année suivante, Dominique lance Tradova Logistics (qu’il vendra fin 2020 au groupe luxembourgeois TLW). Fin 2015, les frères ‘s Heeren décident de vendre TTS, tenant compte de la difficulté de transmettre cette grande entreprise à la troisième génération. C’est le groupe Jost qui reprend l’ensemble du groupe, mais le virus du camion reste bien présent chez chaque frère, notamment au travers d’oldtimers. JEAN-MARIE BECKER

er

s dont des Scania 110 Sup

e de tracteur son familiale, une vingtain A Meeffe, à côté de la mai . F88 o Volv n qu’u i ains et LB 110 Super,


19

s, sport de produits chimique A ses débuts dans le tran vers. d’An ATT par rété aff est TTS

En 1983, TTS acquiert des terrains à Avin (Hannut). Vue partielle des véhicules rangés par type de semi-remorques.

à Un tracteur Scania T 113 H une cabine couchette, tractant ne semi-remorque LAG ben récolte pendant la campagne de des betteraves.

Un des premiers Scania 111 à cabine avancée, avec une cite rne à carburant provenant d’une reprise .

Les semiremorques pour le transport de bitume seront l’une des grandes spécialités de TTS.

Tipes, spécialiste TTS acquiert une majorité dans le transporteur italien odale. de l’acier lourd et fer de lance de l’activité multim

Une belle rangée de Mercedes Powerliner, en 1983.

A Liege Logistics, les dirigeants de TTS ont l’habitude de ranger impeccablement les cen taines de véhicules. Ici, une rangée de 30 Scania Topline.

La rubrique Retro est réalisée avec Walter Ceulemans, Jean-Paul Cammaerts, Claude Chabeau, Lode Goossens et Jean-Marie Becker.

Pour le transport grand volume, en camion-remorque, TTS roulait aussi avec les Renault Magnum.


EXPERTISE

Truck & Business Barometer

Trop beau pour être vrai ? Rarement les réponses à certaines questions aurontelles été aussi peu nuancées : la période que nous vivons est jugée suffisamment exceptionnelle pour ne pas s’embarrasser de périphrases : il y a trop peu de chauffeurs, il y a trop peu de camions et les prix doivent – vont – remonter de manière significative.

Alors que les bilans financiers de l’exercice 2020 montrent que les transporteurs ont plutôt mieux tiré leur épingle du jeu que le reste de l’économie, les six mois qui viennent de s’écouler les ont largement bousculés dans leurs certitudes. En quelques semaines, ils se sont retrouvés avec trop de demandes, pas assez de chauffeurs et un prix de revient qui explose. Comme nous allons le voir, la réaction du secteur a été assez lente, et une partie des transporteurs estime qu’elle se sortira moins bien de l’exercice 2021 que prévu. Globalement, l’indice de satisfaction reste pourtant à un niveau élevé (6,88/10, soit une légère baisse de 0,17 point), mais cette moyenne ne dit pas tout : il y a certes 39 % d’entreprises qui estiment que leur rentabilité progressera en 2021 (+ 5,5 %), mais 20

il y a aussi 15,2 % d’entreprises à estimer que leur rentabilité va se dégrader fortement cette année (+ 4,9 %). L A H A U S S E D E S TA R I F S S E FA I T AT T E N D R E

L’explication de cette évolution contrastée tient à plusieurs facteurs. D’une part les volumes de transport ont augmenté comme jamais auparavant (+ 8,44 % en six mois, alors que les pronostics étaient de 5 % il y a six mois), mais la logique des contrats ‘à l’année’ n’a pas encore permis de répercuter la hausse du prix de revient, à l’exception des clauses diesel. Par conséquent, le pourcentage de répercussion du prix de revient sur les prix de vente est retombé à 34,2 %. C’est un chiffre qui correspond à la moyenne des années

2010-2014, mais qui ne correspond pas du tout à une période de forte activité comme celle que nous connaissons. Et malgré le manque de ‘roues’ disponible sur le marché, 10,9 % des transporteurs disent toujours de voir accepter des baisses de prix imposées par leurs clients. Tout pointe pourtant vers une hausse significative des tarifs de transport : huit transporteurs sur dix estiment que l’offre est inférieure à la demande, soit une nouvelle progression de 34 points par rapport à avril 2021 et alors même qu’il y a 18 mois, 87 % des transporteurs estimaient que la demande était inférieure à l’offre. On a rarement connu retournement de situation plus spectaculaire. L’heure est donc à la négociation. Comme le soulignent plu-


EXPERTISE

CHIFFRES-CLÉS

6,88/10 le taux de satisfaction baisse un peu par rapport au printemps (- 0,17 par rapport à avril 2021)

+8,44 % la hausse moyenne des volumes transportés en six mois (+ 4 points)

+4,79 % la hausse estimée des volumes de transport pour les six prochains mois (-0,34 point)

sieurs participants à l’enquête, ce sera le moment de vérité : soit le chargeur accepte la hausse de tarifs, soit il devra aller chercher ailleurs. Tous les transporteurs ne sont cependant pas dans une telle position de force, justifiée ou non : un transporteur sur cinq dit avoir essuyé un refus de la part de ses clients durant les six derniers mois.

La future échelle barémique pour 2023, pour l’instant, ne convainc pas.

L’autre incertitude a trait au caractère durable de l’embellie économique. Au-delà du premier semestre 2022, la visibilité est faible et la crainte est surtout grande de voir les volumes de transport très mal répartis, et donc difficiles à organiser. Les pronostics sur l’augmentation des volumes de transport sont donc un peu plus mesurés qu’il y a six mois.

2021/2022 ne laissait pas beaucoup de marge de manœuvre aux employeurs, mais la perspective de la nouvelle échelle barémique, couplée à la nouvelle classification des fonctions, ne les fait pas particulièrement saliver : ils ne sont que 10,4 % à estimer qu’elle permettra, même partiellement, de rendre la profession de chauffeur plus attractive et 64,5 % à penser le contraire. Le solde, soit un quart des entreprises sondées, n’est pas encore au courant de cette nouvelle échelle barémique ou ne se prononce pas encore.

UNE DÉCEPTION : LA FUTURE ÉCHELLE BARÉMIQUE

68 % des transporteurs souffrent à nouveau d’une pénurie de chauffeurs (7 points)

4,5 % des transports sans répercussion possible de la taxe kilométrique (- 0,2 %)

80,8 % des transporteurs estiment que la demande est plus forte que l’offre en transport dans leur spécialité (+ 34,5 points)

48,9 % des transporteurs veulent étendre leur flotte

Dans ce contexte compliqué, la pénurie de chauffeurs était jusqu’à présent le principal facteur d’inquiétude. Elle le reste, et dans des proportions qui s’aggravent puisqu’elle touche aujourd’hui presque sept transporteurs sur dix. Cette pénurie s’inscrit aussi dans un mouvement qui ne concerne certes pas tous les transporteurs, mais tout de même 29 % d’entre eux : est-ce la peur des contrôles ou l’effet du Mobility Package, mais 29 % des transporteurs sondés déclarent avoir relocalisé certaines activités en Belgique ou envisagent de le faire. Il y a donc fort à parier que de très nombreux chauffeurs étrangers se voient proposer un contrat belge pour le moment. Quant aux chauffeurs en général, ils font l’objet de toutes les attentions : ils se voient offrir de nouveaux avantages extra-légaux (dans 54 % des cas, + 10 %), de meilleures conditions de travail (44 %, + 2 %), voire un salaire plus élevé (33 % des cas, + 2 %). La question du salaire mérite que l’on s’y attarde un peu. On sait que l’accord inter-professionnel

Q U E L L E C A PAC I T É D E T R A N S P O R T EN 2022 ?

Avec une demande en transport qui s’annonce en pointillés, des effectifs chauffeurs toujours plus difficiles à fidéliser et des délais de livraison qui s’allongent toujours pour les nouveaux véhicules, il est remarquable de constater que l’heure est toujours à l’extension des parcs : 2,7 % seulement des participants envisagent de réduire la voilure alors que 48,9 % des participants veulent étendre leur flotte. Cette volonté d’investir comporte cependant un risque : si cette capacité de transport supplémentaire arrive sur le marché au moment où l’économie ralentit, l’effet ‘ciseau’ sur les prix de transport pourrait être redoutable. CLAUDE YVENS

21


EXPERTISE

INDICE DE CONFIANCE

7,5 7

6,54

6,5 6 5,5 5 4,5

11/21

04/21

10/20

04/20

10/19

04/19

10/18

10/17

04/18

04/17

09/16

09/15

03/16

03/15

03/14

09/14

03/13

09/13

09/12

09/11

03/12

03/11

09/10

03/10

09/09

03/09

03/08

09/08

4

EVOLUTION DU PRIX DE REVIENT ET DU PRIX DE VENTE

12

80

10

70

8

60

6

50

4

40

2

30

0

20 10

-2 -4

2008

2009

2010

Evolution prix de revient

2020 10,3%

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Evolution prix de vente

2019

2021

2,5%

15,2%

Forte progression

8,6%

17,4%

Faible progression Stabilité

30,8%

2021

Pourcentage de répercussion

E VO L U T I O N AT T E N D U E D E L A R E N TA B I L I T É

33%

2020

30,4%

Faible dégradation Forte dégradation

28,2%

15,4%

EQUILIBRE ENTRE L’OFFRE ET LA DEMANDE

100%

80%

60% 40%

20% 0%

10/2019

22

04/2020

10/2020

04/2021

04/2021

Il n’y a pas assez de capacité de transport

L’équilibre entre l’offre et la demande est correct

Il y a trop de capacité de transport

Il y a trop de capacité de transport, et cela pousse les tarifs à la baisse

0


RH

Classification des fonctions

Les salaires pourraient augmenter à partir de 2023 La nouvelle classification des fonctions des chauffeurs entrera en vigueur le 1er janvier 2023. En 2014, les négociations avaient déjà abouti à un accord de principe entre les représentants des employeurs et des salariés. Mais à l’époque, l’accord ne portait pas encore sur la transition des anciennes règles vers le nouveau système.

« Nous avons développé une stratégie de rémunération progressive qui ouvre une voie réaliste vers des augmentations de salaire. Cela devrait rendre la profession plus attractive par rapport à d’autres secteurs qui n’ont pas cette perspective », explique Lode Verkinderen, directeur de TLV. « Au cours des sept dernières années, il y a eu des négociations sporadiques pour traduire la nouvelle classification des emplois dans cette réalité, mais aucun accord n’a jamais été conclu. En été et en automne de cette année, nous avons enfin pu trancher. Cet accord sera bientôt officiellement transformé en règles officielles », déclare L. Verkinderen. R É M U N É R AT I O N C I B L É E

Grâce à une classification plus fine des tâches du chauffeur, les transporteurs pourront rémunérer leurs salariés de manière beaucoup plus ciblée. Les chauffeurs qui savent conduire un chariot élévateur ou qui sont actifs en zone de chargement recevront plus de points et intègreront donc une catégorie supérieure. Le nombre de points correspond à l’une des quatre catégories de salaire. « À long terme, le système permettra aussi une augmentation progressive des salaires. L’introduction du

Le rapport entre le travail effectué et le salaire sera plus direct.

« Notre stratégie de rémunération progressive offre un processus réaliste vers des augmentations de salaire. » (Lode Verkinderen, TLV)

régime en 2023 sera un premier pas vers une politique de rémunération moderne dans le secteur des transports », poursuit L. Verkinderen. Avec un tel délai, il est possible de bien se préparer. « Il s’agira alors de conclure de bons accords avec nos propres chauffeurs. Je connais un certain

nombre d’entreprises qui avaient déjà élaboré leurs propres règles et qui prévoyaient une rémunération supplémentaire pour des tâches spécifiques. Dans ce cas, l’arrangement peut ne pas correspondre entièrement aux catégories de fonctions de la convention collective de travail », explique L. Verkinderen.

23


RH

SOLUTION À LA PÉNURIE DE CHAUFFEURS ? C E N ’ E S T PA S E N CO R E F I N I

« En tant que secrétariat social, nous ne sommes pas directement impliqués dans les négociations et nous attendons de voir comment cela va évoluer. L’accord actuel contient déjà des éléments concrets, comme la suppression des deux catégories salariales les plus basses du système actuel. Les deux barèmes les plus élevés seront alors les plus bas dans le nouveau système. En tout cas, cela entraîne une augmentation de salaire pour de nombreux chauffeurs. Mais les négociations sont toujours en cours au sein de la commission paritaire pour détailler le reste. Ces discussions doivent être achevées d’ici le 30 juin 2022. Si le groupe de travail ne parvient pas à un nouvel accord, la nouvelle classification des fonctions sera de toute façon introduite selon les modalités qui figurent désormais dans le protocole d’accord », précise Dieter De Weert, conseiller juridique payroll service de Liantis. « C’est exact », confirme Luk Dockx, conseiller juridique de SD Worx. « La liste des fonctions et des grilles salariales est fixée depuis 2014. Si les entreprises veulent être prêtes à démarrer le 1er janvier 2023, elles devront repositionner correctement chaque chauffeur l’an prochain. Les discussions qui sont toujours en cours au sein de la commission paritaire ne portent plus que sur les montants liés à chaque barème. Ils peuvent en effet encore changer, mais si les négociations échouent, il existe encore une alternative. En principe, cela signifie une augmentation des salaires, mais il faut dire qu’il s’agit ici des salaires minimums. Il y a probablement des entreprises qui paient déjà mieux que ce qui a été convenu. » EN PLEINE TEMPÊTE

Le nouvel accord arrive à un moment critique pour les entreprises qui ne parviennent pas à 24

« L’augmentation des salaires ne supprime pas la pénurie de chauffeurs », Louis De Wael, managing director de Van Dievel Transport.

Louis De Wael, managing director de Van Dievel Transport, n’est pas convaincu qu’une augmentation de salaire aura beaucoup d’effet. « Nos chauffeurs gagnent déjà bien leur vie. Avec notre entreprise, nous visons davantage à revaloriser le métier, par exemple avec le projet ‘Vrachtwagenpiloot’. Nous réussissons assez bien à recruter régulièrement de nouvelles personnes. »

attirer suffisamment de chauffeurs. « Nous sommes donc en pleine tempête dans laquelle divers facteurs interagissent et se renforcent mutuellement. Le facteur le plus important est qu’une grande partie des chauffeurs approchent de l’âge de la retraite et quitteront la profession dans les années à venir », explique L. Verkinderen. Cette tendance à long terme coïncide aujourd’hui avec une reprise économique qui booste encore plus la demande. Jamais le secteur des transports n’avait employé autant de personnes en Belgique

et dans toute l’Europe. A cela s’ajoutent les effets de l’introduction du Paquet Mobilité, qui rendra les entreprises étrangères moins actives en Belgique. « En parallèle, on peut aussi dire que les chauffeurs ne quittent pas massivement la profession avant leur retraite. On voit en outre qu’une carrière de chauffeur attire de nombreux lycéens. Mais nous devons toutefois conclure que tout cela ne suffira pas à combler la pénurie », explique L. Verkinderen. PETER OOMS

N O U V E AU S A L A I R E M I N I M U M À PA R T I R D U 1 / 1 /2 0 2 3

+2,4%

12,768 EUR/h 12,618 EUR/h

12,468 EUR/h 12,046 EUR/h 11,781 EUR/h 11,3425 EUR/h

12,468 EUR/h +6,2%

12,046, EUR/h


PROFESSION

Conférence annuelle ECG

Une crise atypique Les logisticiens de l’automobile ont le cuir épais, mais toute résilience a ses limites, estimait leur association représentative lors de sa conférence annuelle qui était de retour en mode présentiel. Les entreprises vont en effet devoir faire face à des investissements gigantesques.

Le secteur automobile est particulièrement touché par la crise des semi-conducteurs alors qu’il se remettait à peine de la crise du Covid. Les ventes n’ont pas encore retrouvé leur niveau de 2019, et le secteur aura perdu 11 millions d’unités en 2021 à cause des difficultés d’approvisionnement. Pour les transporteurs de véhicules finis, c’est la double peine, même s’il semble que la période la plus compliquée ait culminé au troisième trimestre. DOUBLE PEINE

Les fermetures d’usines ont été brusques et les logisticiens en ont parfois appris la nouvelle… par la presse. Cela souligne la nécessité d’un meilleur dialogue entre l’industrie et les transporteurs, d’autant plus que, comme l’indique Wolfgang Göbel (Mosolf), « lorsque nous devons mettre un camion à l’arrêt, le risque est grand que le chauffeur aille travailler ailleurs. » En période de pénurie de chauffeurs, la perspective d’une hémorragie supplémentaire est donc bien réelle. Le transport de véhicules finis est en outre à la croisée des chemins. Dans les dix prochaines années, il va devoir s’adapter à de tout nouveaux concepts commerciaux de la part des constructeurs. Volvo, par exemple, veut réduire le délai

Les transporteurs de voitures craignent de voir partir leurs forces vives.

de livraison de ses futures voitures électriques de 45 à moins de 20 jours et vendre davantage sur stock. Cela va fortement augmenter la pression sur les compounds et sur les transporteurs, d’autant plus que Volvo voudra faire livrer ses voitures par des camions ‘zéro-émissions’. Autre tendance forte : le basculement vers les solutions multimodales. Wolfgang Göbel en est persuadé : les transferts sur longue distance ne se feront plus par la route d’ici dix ans. C’est important car cela aura un impact sur le type de camion à zéro-émissions dont le secteur

aura besoin. Toyota, par exemple, a déjà annoncé qu’il misera sur le spiles à combustible. Mais à partir de quand et à quel prix ? La question reste ouverte… CLAUDE YVENS

Les transporteurs qui n’investissent pas dans les nouvelles technologies seront hors du marché. Björn Svenningsen, ECG

QUELLE INFRASTRUCTURE DE RECHARGE EN EUROPE ?

Dario Dubolino (DG Mobilité) a détaillé le plan de développement d’infrastructures de recharge pour toutes les énergies alternatives en Europe : • pour les camions électriques, une station tous les 60 kilomètres le long des axes TEN-T avec de 1400 kW de capacité d’ici 2025 et 3500 kW d’ici 2030 • pour les camions à hydrogène, une station tous les 150 km le long des axes TEN-T avec 2 tonnes de capacité et 700 bar de pression + une station à hydrogène liquide tous les 450 km.

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PROFESSION

Obligation de retour des poids lourds

Une mesure pour rien ? Avec la publication mi-2020 du Paquet Mobilité, l’Europe a envoyé un signal clair de son implication dans la lutte contre le dumping social et la concurrence déloyale dans le transport. La décision la plus frappante est l’obligation de retour des poids lourds. Pas sûr que cela puisse changer grand’chose…

On est encore loin d’un ‘level playing field’.

Le ‘Paquet Mobilité’ comprend trois volets : de nouvelles règles sur les temps de conduite et de repos, sur les licences et le cabotage et enfin en matière de détachement. Le deuxième volet implique notamment que le poids lourd doit retourner dans le pays d’immatriculation toutes les huit semaines. Aujourd’hui, les véhicules des pays à bas salaires – principalement des États membres d’Europe centrale et orientale – ne reviennent en pratique qu’une fois par an pour le contrôle technique. Cette mesure entrera en vigueur le 2 février 2022. Elle vise à lutter contre le dumping social, mais vise également un mouvement de relocalisation de l’Europe de l’Est vers l’Europe de l’Ouest. « Ce n’est pas le moyen le plus efficace de lutter contre le dumping social, mais c’est l’un des plus faciles à contrôler », explique Frederik Vanden Bogaerde, spécialiste des transports chez TL Advocaten. « Du point de vue de l’Europe de l’Est, c’est une mesure d’intimidation, qui suscite beaucoup de ressentiment chez les transporteurs 26

des pays périphériques comme la Lituanie, la Roumanie ou le Portugal ». Il donne l’exemple de la Roumanie. « On estime que 80.000 camions roumains circulent en Europe et ne reviennent en Roumanie qu’une fois par an. Pour les entreprises roumaines, l’obligation de retour représente donc un coût énorme, car il y a peu de marchandises à transporter entre l’Europe occidentale et ce pays ». Un certain nombre de pays (principalement d’Europe de l’Est) se sont tournés vers la Cour de Justice européenne pour contester cette obligation. Cependant, ils ont peu de chances de renverser la vapeur, estime Vanden Bogaerde. CONTRÔLES

Par le passé, les règles européennes restaient parfois lettre morte car insuffisamment contrôlées. Ce risque existe également avec l’obligation de retour du poids lourd. « Cela fait partie de la législation sur les licences. Le contrôle doit donc être effectué dans le pays qui délivre le permis.

Des pays comme la Roumanie ou la Bulgarie risquent d’être laxistes à ce sujet : si un transporteur perd sa licence, cela aura des conséquences pour l’emploi et l’économie », déclare-t-il. « Il y aura aussi des contrôles en Belgique. Mais comment les tribunaux vont-ils se positionner si des infractions sont constatées ? », nuance-t-il. C’est aussi la crainte de Roberto Parrillo, responsable de secteur pour CSC/ACV Transcom. « On se demande si les contrôles seront effectifs. Le premier volet du Paquet Mobilité, et le droit de

« L’obligation de retour fait l’objet de beaucoup d’attention, mais le vrai problème réside dans les règles de détachement. »


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retour du chauffeur en particulier, n’est pratiquement pas contrôlé. Quelques mois à peine après l’entrée en vigueur du deuxième volet, les règles européennes n’ont pas encore été intégrées dans le droit belge. Un projet a été rédigé par le SPF Mobilité, mais sans concertation avec le patronat et les syndicats, qui ont unanimement exprimé leurs inquiétudes. Cette conception présente d’énormes lacunes. » R E L O C A L I S AT I O N

La mesure vise, entre autres, à encourager la relocalisation vers les États membres d’Europe occidentale. « Mais cela arrivera-t-il ? Théoriquement, les transporteurs belges deviennent un peu plus compétitifs, ou plutôt un peu moins non-compétitifs », explique Philippe Degraef, directeur de Febetra. « En pratique, on suppose que les transporteurs ayant un siège en Europe de l’Est vont déménager vers l’Allemagne ou le Luxembourg afin de parcourir moins de kilomètres à vide ». « L’Allemagne est au cœur de l’Europe et il y a beaucoup de trafic en provenance et en direction de ce pays. Le retour du poids lourd sera donc beaucoup plus facile à organiser que vers et

depuis la Bulgarie ou la Lituanie. En Allemagne, les coûts salariaux sont raisonnables, certainement en comparaison avec la Belgique, et cela joue aussi un rôle », dit-il. Vanden Bogaerde acquiesce. « D’après nos simulations, le coût salarial en Allemagne est à mi-chemin entre le bulgare et le belge. L’écart est donc trop important pour ramener les camions en Belgique. Mais tout le monde n’a pas la possibilité d’ouvrir un siège en Allemagne. Il faut y créer une entreprise, disposer d’un parking, d’un accueil, etc. » « Ce seront principalement les grandes entreprises qui franchiront le pas. Vous ne créez pas d’entreprise en Allemagne pour 10 poids lourds. Vous ne le faites pas non plus si vous roulez principalement en Espagne ou en France. Ça n’a aucun sens. Il n’est pas non plus possible de créer une boîte postale en Allemagne, car les contrôles y sont plus stricts qu’en Bulgarie ou en Roumanie. D’ailleurs, la période des boîtes aux lettres est révolue. Les risques juridiques sont trop importants. Les nombreux dossiers de ces dernières années le prouvent », ajoute-t-il.

R È G L E S D E D É TAC H E M E N T

L’obligation de retour du poids lourd aura donc un effet majeur sur le secteur des transports en Europe. Pourtant, Vanden Bogaerde relativise : « Le vrai problème réside dans les règles de détachement. Il s’agit du principe ‘à travail égal, salaire égal’ et cela aura un impact économique bien plus important », estime-t-il. « Jusqu’à présent, cette règle suscite peu de controverses, mais elle aura pour effet qu’un chauffeur aura droit au salaire du pays où il roule. En outre, les États membres pourront le contrôler sur le modèle qui existe déjà en Allemagne pour le Milog, par exemple. C’est pourquoi je m’attends à ce que les contrôles se concentrent à l’avenir sur cela et non pas tant sur l’obligation de retour du poids lourd », conclut-il.

PHILIPPE VAN DOOREN

« Les contrôles se concentreront d’avantage sur le détachement que sur l’obligation de retour. » (Frederik Vanden Bogaerde)

Pour les entreprises lituaniennes par exemple, l’obligation de retour représente un coût énorme, car elle implique de nombreux kilomètres à vide.


SHIPPER

Barry-Callebaut

L’électrification est en route

En ouvrant sa ‘Chocolate Box’ à Lokeren, le groupe suisse Barry-Callebaut a voulu marquer les esprits. Ce qu’il qualifie de plus grand entrepôt de chocolat au monde se distingue en effet par des accents environnementaux forts, mais l’organisation des transports ne peut pas être en reste.

Le nouveau centre de distribution de Lokeren ne tourne pas encore à pleine capacité.

Ce qui a mené à la construction de cet entrepôt de 60.000 m2, c’est une croissance industrielle qui n’avait pas été accompagnée par une logistique de même niveau. En Belgique, BarryCallebaut dispose de deux usines à Wieze et à Halle, mais les opérations logistiques étaient réparties dans la région d’Alost. L’entrepôt principal de 25.000 emplacements-palettes était plein depuis des années et il y avait jusqu’à huit entrepôts satellites. Quand on exporte cette production dans plus de 140 pays, cette infrastructure n’est plus performante. MONTÉE EN PUISSANCE

Dans le nouveau Global Distribution Centre, la majorité des produits sont stockés dans 28

un entrepôt entièrement automatisé de 41 mètres de haut, mais les opérations logistiques plus complexes nécessitent aussi une préparation de commandes manuelle. Trois mois après le début des opérations, le centre de distribution ne tourne pas encore à pleine capacité, mais il a été dimensionné pour faire face à des perspectives de croissance estimées entre 5 et 7 % par an. Willy Raemdonck se trouve à la tête de la Chocolate Box. Il nous en explique les principales caractéristiques et la manière dont Barry-Callebaut envisage de faire évoluer l’organisation de ses transports. Le choix de Lokeren s’est imposé par une combinaison de facteurs : proximité des usines Barry-Callebaut, mais aus-

si de quelques ‘assembleurs’ qui travaillent à façon pour le groupe suisse, très bonne connectivité routière et proximité avec le port d’Anvers : « Nous travaillons avec un produit frais et Lokeren nous permet de livrer entre 60 et 65 % de notre clientèle potentielle par la route » explique Raemdonck. Des volumes de transport importants (80 millions de tonnes par an) qui sont gérés en interne et qui sont autant que possible organisés en charges complètes. « L’entrepôt de Lokeren livre par exemple les usines belges en ingrédients de base et se fait livrer les produits finis de ces mêmes usines. De cette manière, le taux de remplissage des camions est optimal. » Les flux de transport sont donc de trois ordres : les navettes


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Beau comme un slogan…

LA LOGISTIQUE DE B A R R Y- C A L L E B A U T EN CHIFFRES

• 1500 références (SKU) différentes • entre 75 et 80 millions de tonnes par an • entre 120 et 150 mouvements de camion par jour (entrants et sortants) • entre 20 et 30 conteneurs expédiés chaque jour via Anvers (export)

entre Lokeren et les usines du groupe d’une part (une activité qui ‘tourne’ 24 heures sur 24), les lignes de transport routier vers l’étranger et le fret maritime à partir du port d’Anvers, où les marchandises sont transportées en conteneurs reefer à une température comprise entre 12 et 18 degrés.

du matin. Nous utilisons donc au maximum les heures creuses pour faire partir nos navettes et nos lignes de transport. », explique Raemdonck. Dès que possible, Barry-Callebaut compte aussi utiliser des écocombis. « Nous sommes en train de regarder comment nous pourrions utiliser des écocombis sur le trajet entre l’usine de Halle et Lokeren. Par contre, c’est inenvisageable pour l’usine de Wieze parce qu’elle se situe au milieu du village. Nous allons donc demander la création d’un trajet-branche entre la sortie de l’autoroute à Lokeren et notre nouvel entrepôt. Le problème est que nous devons parler avec les trois régions pour organiser ce type de trajet. » Lors de la conception du bâtiment, on y a aussi intégré des bornes de recharge. Est-ce un premier pas vers un transport neutre sur le plan énergétique ? « Aujourd’hui, nous avons 24 bornes de recharge pour voitures

électriques, ce qui est largement surdimensionné par rapport à nos besoins actuels. Nous regardons donc plus loin : il devrait être possible de faire effectuer les navettes entre Wieze et Lokeren avec des camions électriques. Le jour où un constructeur me propose une alternative électrique rentable, notre infrastructure sera prête. Pour les plus longues distances, je pense par contre qu’il faudra attendre un peu plus longtemps. » Reste la question qui fâche (un peu) : ce futur transport neutre en CO₂ peut-il coûter plus cher ? La réponse de Willy Raemdonck est évasive : « Il faudra trouver un équilibre entre l’écologie et la valeur ajoutée économique. Nous en avons déjà parlé avec des transporteurs comme Sitra. S’ils sont capables de nous proposer un transport neutre en CO₂ sur de longues distances, nous sommes prêts à en discuter. » CLAUDE YVENS

Barry-Callebaut voudrait utiliser des écocombis entre Halle et Lokeren.

« En ce qui concerne tant le transport de chocolat liquide que le transport de produits finis palettisés, nous travaillons avec des appels d’offre qui durent en général deux ans, que ce soit pour le transport routier ou le transport maritime », explique Raemdonck. BREEAM… ET APRÈS ?

Le bâtiment de Lokeren a obtenu le plus haut niveau de certification environnementale Breeam. Grâce à de multiples équipements, il est neutre en carbone. Mais en quoi l’organisation des transports contribue-t-elle aux objectifs écologiques du groupe BarryCallebaut ? « Tout d’abord, il faut savoir que l’immense majorité des camions qui passent par Lokeren sont chargés entre 4 et six heures 80 % des marchandises sont traitées dans la partie automatisée du centre de distribution.


TEST

Volvo FH460 I-Save

Turbo Compound : exploitation maximale

Avec le prix exorbitant qu’atteint le diesel, il est de bon ton d’être parcimonieux avec le précieux liquide. Toutes les solutions étant les bienvenues, mêmes des solutions anciennes sont remises au goût du jour. En témoigne ce Volvo FH équipé du Turbo Compound.

Et si l’innovation passait par des techniques éprouvées ? C’est précisément ce que Volvo a réalisé en lançant en 2019 son FH I-Save, destiné aux longues distances et dont la principale nouveauté était le nouveau moteur D13TC et des fonctionnalités d’économie de carburant actualisées. D13TC

Ce nouveau moteur se base sur une technologie Turbo Compound qui a déjà fait ses preuves. Par rapport au D13 Euro 6D, le nouveau venu possède des pistons d’une nouvelle forme qui améliorent la combustion et augmentent l’efficacité via un guidage de la chaleur et de l’énergie au 30

centre des cylindres. L’énergie excédentaire contenue dans les gaz d’échappement est utilisée pour alimenter le moteur par le biais d’une turbine supplémentaire dans le flux d’échappement. Ce qui est marquant, c’est la valeur de couple qui prend de l’ampleur : pour une même puissance de 460 ch, le D13TC en produit 300 Nm de plus, passant ainsi de 2300 à 2600 Nm. La finalité du système est de diminuer le nombre des phases d’accélération et de maintenir plus longtemps une vitesse constante. En complément, les ingénieurs ont également conçu de nouveaux essieux arrière. Mais ce n’est pas tout : ce moteur à haut rendement énergétique inclut aussi une coupure

Le FH s’est offert une nouvelle face avant plus expressive.

de ralenti moteur, un I-Cruise avec I-Roll qui ajuste la vitesse pour réduire la consommation de carburant et une pompe de servodirection à cylindrée variable. Cabine. La dernière version de la cabine FH se démarque visuellement de la précédente par de nouvelles optiques et une nouvelle calandre. Chez Volvo, les rétroviseurs classiques sont toujours de mise, mais il n’y a plus de pare-soleil, sobriété passive oblige ! Trois marches sont à gravir pour accéder au poste de conduite, ce qui induit la présence toute relative du tunnel moteur. La planche de bord arbore un design un peu avant-gardiste, avec des tons parfois surprenants, tandis que les


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La planche de bord est toujours un peu avant-gardiste.

commandes sont modernes et esthétiques. Rien de bien neuf ici, à l’exception de certaines commandes supplémentaires qui font leur apparition au travers de boutons poussoirs. Il y a quatre boutons qui reprennent les commandes de la boîte I-Shift, et cela limite les interventions que le chauffeur peut réaliser. Le passage en manuel n’est par exemple plus possible lorsque l’on roule au Cruise Control. La commande de l’assistance au maintien de la trajectoire, directement lié au Volvo Dynamic Steering, corrige momentanément la trajectoire en cas de déviation constatée par le système. RÉGLAGE ASSISTÉ DE LA HAUTEUR DE CHÂSSIS

Les commandes I-Shift sont aussi plus modernes.

Enfin, il faut parler d’une grande première : le bouton qui permet de gérer la hauteur de la suspension pneumatique. Optionnel, il permet dès que la vitesse de 60 km est atteinte, d’abaisser le châssis de 10 à 30 mm pour diminuer la consommation. Le bouton est indispensable car il permet justement d’éviter que le système ne se déclenche de façon automatique si le sol n’est pas adéquat pour le faire. Impressions de conduite. Les qualités du FH étant déjà connues, on se bornera à en mettre deux en exergue : la visibilité et le confort de conduite en lien direct avec le VDS. Au chapitre du freinage, le véhicule était équipé du frein moteur renforcé VEB+, d’une puis-

sance de retenue de 380 kW (517 ch) à 2300 tr/min. Un potentiel qu’il s’agit d’utiliser correctement. Performances et consommation. C’est la troisième fois que nous testions un moteur Turbo Compound, mais la première fois avec la cabine la plus récente. La première fois, il s’agissait d’un 460 ch ‘sortie usine’, fait rare au niveau des tests presse. Nous avions réalisé le parcours avec l’I-See et en profitant de l’abaissement du châssis. Le rapport de pont de 2.31 était plus que favorable, et au final, le FH460 avait tenu une cadence moyenne de 84 km/h pour une consommation de 27,63 l/100 km. C’était déjà un très bon résultat, surtout si on le comparait aux chiffres réalisés avec d’autres FH 460. Cette fois, nous n’avons pas pu rééditer la même moyenne horaire à cause des nombreux chantiers sur l’E25), mais la consommation est bluffante : 25,40 l/100 km. C’est tout simplement le meilleur résultat jamais obtenu avec un FH. La technologie Turbo Compound semble donc se montrer à la hauteur mais il faut aussi souligner les prestations de l’I-See qui est enfin performant. Conclusion. Avec le temps, certains concurrents avaient pris de l’avance au niveau consommation, mais avec la technologie Turbo Compound remise au goût du jour, on peut parler d’un retour au premier plan pour le FH. PIERRE-YVES BERNARD

Des rétroviseurs oui mais plus de pare-soleil. F I C H E T E C H N I Q U E V O LV O F H 4 B - 4 6 0 T C I - S AV E

B O N À S AV O I R

• Pour une même puissance, 300 Nm de plus • Retour au premier plan au niveau consommation • Un logiciel gère la hauteur du châssis

• • • • • • • • • • •

Type : tracteur 4x2 Cabine : Globetrotter Sleeper Cab Cylindrée : 12,8 litres Désignation moteur : D13K TC 460 Empattement : 3 700 mm Freins auxiliaires : VEB+ 380 kW / 2300 tr/min Puissance maxi : 460 ch (338 kW) 1250 - 1600 tr/min Couple maxi : 2 600 Nm entre 900 - 1300 tr/min Niveau d’émission : Euro 6 / Step D Boîte de vitesses : I-Shift AT2612F Rapport de pont : 2.31


EVENT

Truck & Business Summit

La route ‘verte’ n’est pas toute droite

Au salon transport & Logistics d’Anvers, le Truck & Business Summit a abordé la problématique du changement climatique et des changements que cela implique pour les transporteurs. Autant dire que les choix technologiques ne sont toujours pas faciles à faire, mais l’heure des exclusives est probablement passée. C’est déjà une bonne nouvelle.

Les plans et objectifs fixés par l’Europe sont aujourd’hui clairs (Green Deal, Fit For 55), reste à chaque entreprise à effectuer au bon moment les bons choix technologiques, en fonction de son profil d’activité. Depuis deux ans, le débat avait tendance à se cristalliser autour du camion électrique. Depuis quelques mois, le lobby de l’hydrogène contre-attaque mais les entreprises n’y voient toujours pas très clair. C’est la raison pour laquelle nous avions invité un ‘supporter’ de chaque technologie au Truck & Business Summit du 19 octobre à Anvers : Chris Lefrère (Project Manager HyTrucks chez waterstof.net) défendait donc les avantages de l’hydrogène et Michael Van Bercklaer (Sales & Business Development chez Helexia) les atouts de la propulsion électrique. 32

LE CAMION ÉLECTRIQUE, I M M É D I AT E M E N T AC C E S S I B L E

« A plus long terme, je pense que le transport aura besoin d’un mix de technologies, mais à court terme, le camion électrique est beaucoup plus réaliste », commence Michael Van Bercklaer. « D’abord, les véhicules à batterie sont beaucoup plus efficaces car vous perdez beaucoup d’énergie pour produire de l’hydrogène. Deuxièmement, les bornes de recharge sont les mêmes pour les voitures particulières et pour les véhicules utilitaires. Je ne dis pas qu’il y a aujourd’hui assez de bornes pour les camions, mais la technologie est au point. Si on regarde ce qu’a coûté la station à hydrogène de CMB à Anvers, le prix d’une borne de recharge n’en représente qu’une fraction.

Le Truck & Business Summit se tenait dans le cadre de la soirée des Gazelles Transport & Logistics.

Le troisième point est qu’il y a déjà des cas précis où un camion électrique est rentable aujourd’hui. Il n’y a donc aucune raison de ne pas les mettre à l’épreuve dès maintenant. » L’HYDROGÈNE

EN

PHASE

D ’A C C É -

L É R AT I O N

Du côté de Chris Lefrère, le discours est tout aussi mesuré : « Chez waterstof.net, nous sommes partisans de l’apprentissage sur le tas et nous ne voulons donc pas attendre 2030 pour rouler à l’hydrogène. Or, à l’heure actuelle, le TCO d’un camion à hydrogène est toujours deux fois plus élevé que celui d’un camion diesel. Il faut donc que le rythme s’accélère et l’Europe y met les moyens, tout comme l’Allemagne ou la France. La Flandre fait aussi


EVENT

« Il y aura assez d’argent pour développer l’écosystème autour de la conduite électrique et de l’hydrogène en même temps. » Tom George, IAV

De telles stations à hydrogène seront installées le long des grands axes européens, mais au-delà ?

des efforts pour passer du stade de la recherche au stade commercial. Avec le projet Hytrucks, nous voulons financer 25 stations à hydrogène entre la région de la Ruhr en Allemagne et les ports d’Anvers et de Rotterdam. D’ici 2025, nous voulons atteindre les 1000 camions à hydrogène sur la route dans ce triangle. D’ici là, il faudra que le TCO des technologies propres baisse, mais tant que la technologie diesel et le diesel lui-même ne deviennent pas plus chers, il faudra encore ‘boucher le trou’ financier et cela demandera des efforts tant des autorités que du secteur privé. Nous espérons arriver ainsi à une parité de TCO pour 2024. »

UN MIX DE SOLUTIONS

L’heure n’est donc plus au ‘moi contre le reste du monde’. Du côté des constructeurs, même Scania reconnaît que les deux technologies devront cohabiter. Lors du Summit, notre expert neutre était du même avis. Tom George, directeur du développement technique chez IAV : « Le transport a besoin à la fois de camions à batteries et de camions à hydrogène. C’est juste une question de profil d’usage : le camion électrique s’imposera en ville et en transport régional, alors que le camion à hydrogène sera la meilleure solution pour les longues distances et les charges lourdes. »

Il est dommage que les nouvelles stations de recharge ne soient pas dimensionnées pour les poids lourds.

Tom George croit à la fois à la pile à combustible et à l’utilisation de l’hydrogène dans un moteur à combustion : « Ce dernier a l’avantage de pouvoir être mis sur le marché à court terme. En ce qui concerne la pile à combustible, il faudra encore un peu de temps pour que cette technologie soit suffisamment robuste et qu’elle réponde aux besoins des transporteurs. » En d’autres termes, Tom George ne croit pas à une solution unique et estime ET LE MOTEUR THERMIQUE LÀ-DEDANS ?

Tom George, directeur du développement technique chez IAV : « En 2030, on vendra toujours des camions à moteur à combustion, que ce soit au diesel ou au gaz. On en vendra moins qu’aujourd’hui, mais la flotte sera encore largement thermique. Ces moteurs thermiques seront encore plus efficaces qu’aujourd’hui et surtout utilisés sur les longues distances. De par sa robustesse, le moteur diesel restera dominant par rapport au moteur à gaz. Les biocarburants comme le HVO ou le BioLNG ne s’imposeront que s’il existe un cadre législatif clair pour les considérer comme des carburants à zéro émissions. »

33


EVENT

qu’il faut, au stade actuel, rester ouvert à toutes les technologies pour répondre au mieux aux besoins des transporteurs. Quant à la question de l’infrastructure, elle n’est pas encore résolue. « Il est dommage que les sociétés qui installent des stations de recharge n’aient pas dès le départ dimensionné leurs stations pour accueillir des camions », regrette Michael Van Bercklaer. « Il faudra aussi trouver des solutions pour l’entretien de ces stations automatiques. Ceux qui roulent en voiture électrique voient très bien de quoi je parle. » Le défi est tout aussi grand pour l’hydrogène. Dirk Franssens en est persuadé : il y en aura le long des grands corridors de transport, mais au-delà ? Chris Lefrère ne se fait pas trop de soucis à ce sujet, tant il y aura d’argent disponible pour produire et distribuer l’hydrogène vert : « L’Europe a l’ambition de produite 40 gW d’hydrogène vert d’ici 2025, et avec les projets qui sont déjà financés, on sera au-delà. Et l’argent continue à arriver, en particulier des grands groupes mondiaux qui ont gagné leur vie avec le pétrole. » Dans le même temps, la propulsion électrique va continuer à renforcer ses arguments. « Il y a déjà eu d’énormes progrès dans les batteries, et les batteries conservent leurs qualités bien mieux que ce que l’on pensait. Et cela va continuer à évoluer dans ce sens. », affirme Michael Van Bercklaer. Laissons le mot de la fin à Dirk Franssens : « Toutes ces nouvelles technologies sont très prometteuses. La grosse question c’est de savoir si elles seront toutes prêtes et utilisables à temps pour nous permettre de répondre aux objectifs de réduction des émissions de CO₂. En attendant, à quoi pourrait donc ressembler la flotte de H. Essers en 2030 ? « Ce sera un mélange de tout ce qui existe déjà aujourd’hui. Pour la mort du diesel, on a déjà réservé l’entrepreneur de pompes funèbres, mais il ne sait pas encore quand il pourra passer », conclut Dirk Franssens. CLAUDE YVENS 34

H . E S S E R S : « B E A U C O U P D ’ O B S TAC L E S »

En attendant, c’est la multimodalité qui permet à H. Essers d’attendre 80 % de ses objectifs de réduction de CO₂.

Dirk Franssens, CTO chez H. Essers, a exposé le point de vue du (grand) transporteur lors du Truck & Business Summit : « Notre objectif est de réduire nos émissions de 5 % par an, tant en transport qu’en logistique. En transport, nous y arrivons par le transport synchromodal qui contribue pour 4 % par an et pas de nouvelles techniques qui apportent le pourcent restant. Nous espérons maintenant renverser ces chiffres et faire contribuer la technologie pour une plus grande part. » Les premiers tests n’ont pourtant pas été faciles : « En 2011, nous avons testé un camion électrique et ça m’a coûté pas mal de cheveux gris », explique Franssens. « Les obstacles ont été si nombreux que notre business case ne tenait plus la route. Donc nous en sommes restés là. » Le chemin vers l’hydrogène aussi est long. « Nous avons essayé d’installer une petite station mobile sur un de nos sites dans le Limbourg, mais nous n’y sommes pas parvenus », regrette-t-il.

L’écosystème de l’hydrogène doit se mettre en place pour 2025 au plus tard.


PUBLIREPORTAGE

Visibilité du transport en temps réel

Plus qu’un ‘nice-to-have’ Pour les expéditeurs, les prestataires de services logistiques et les transporteurs, project44 est la première plateforme de visibilité avancée au monde pour accroître l’efficacité, réduire les coûts et fournir des informations en temps réel.

Après deux années de perturbations très médiatisées de la supply chain mondiale, la demande croissante de visibilité de la chaîne d’approvisionnement a entraîné une énorme croissance pour project44. En 2021, l’entreprise a ouvert de multiples bureaux à travers l’Europe, s’est étendue à de nouveaux marchés, notamment la Chine et le LATAM, a acquis trois entreprises et bénéficie de la confiance de grandes marques comme CEVA Logistics, PepsiCo ou AbbVie. project44 est le plus grand réseau de transporteurs sur le marché : plus de 100.000 transporteurs utilisent ses données pour augmenter leur efficacité, réduire les temps d’attente et les retards, donner de la visibilité à leurs clients et améliorer leur satisfaction des clients. Sjoerd Eekelaar, Vice-président Benelux & UK/I, déclare : «Notre plus grande force est l’ampleur, la profondeur et la qualité des données que nous fusionnons à partir de plusieurs sources, telles que les systèmes télématiques embarqués, le trafic, la météo ou les données historiques. Nous créons ainsi de la valeur pour tous les participants de

la supply chain. Grâce à des données précises et actualisées, les organisations peuvent suivre leurs expéditions et savoir exactement quand, par exemple, le camion arrivera pour le déchargement, ce qui leur permet de gagner du temps et de l’argent. Ce n’est pas le seul avantage pour le transporteur. S’il y a encore un temps d’attente inattendu, tout le monde le sait et peut se préparer en conséquence.» UN SYSTÈME OUVERT project44 est un système ouvert qui s’interface facilement avec plus de 800 applications télématiques et TMS. « Cela rend la mise en place très facile, d’autant plus que le transporteur peut toujours travailler dans sa langue », explique Sjoerd Eekelaar. Les données sont donc au cœur de project44. Avec des données propres, complètes et précises, le traitement des données par project44 est entièrement conforme au règlement GDPR. Il n’y a vraiment aucune raison de ne pas faire le grand saut dans la visibilité en temps réel !

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AVANTAGES POUR LES TRANSPORTEURS De plus en plus de transporteurs profitent des avantages de project44 en interne, pour un investissement minimal : • digitalisation de processus manuels • gain de temps • réduction des conflits • facturation plus rapide • suivi facile des sous-traitants • réduction des kilomètres à vide

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PUBLIREPORTAGE

La plateforme de pilotage collaborative et connectée de Dashdoc

L’eCMR rapide, fiable, écologique

« La technologie au service des professionnels du transport », tel est le crédo de la société Dashdoc. Elle entend accompagner la transformation numérique du secteur pour augmenter son efficacité et donc sa rentabilité. Parmi les outils proposés par Dashdoc pour y arriver, il y a l’eCMR. La preuve de son utilité avec le témoignage de la société de transport Vincent Logistics. Maxim Vincent, pleinement convaincu par Dashdoc.

Vincent Logistics est une entreprise familiale qui existe depuis près de 50 ans. Elle emploie 280 personnes pour 160 véhicules moteurs et est active dans le transport international de machines et engins agricoles, le transport classique de marchandises palettisées sur le Benelux et l’ouest de l’Allemagne. Ils font également de la logistique. Maxim Vincent, responsable des transports nationaux et de la logistique, complète : « Nous avons mis en place l’eCMR début 2021 avec Dashdoc. Nous avons choisi Dashdoc car il nous fallait une meilleure traçabilité de nos transports et un feed-back plus rapide vers nos clients. Avant Dashdoc, nous avons fonctionné pendant 50 ans quasiment de la même façon avec des lettres de voiture classiques. Mais la rapidité de la réponse au client ne correspondait plus aux exigences actuelles. Grâce à Dashdoc, la traçabilité se fait en temps réel. Enfin,

nous économisons désormais une masse colossale de papier, environ 500.000 pages par an. » COMMENT ÇA MARCHE ? Les commandes sont encodées dans Dashdoc et attribuées aux chauffeurs. Lorsque ceux-ci prennent un chargement ou un déchargement, ils vérifient l’état de la marchandise et la quantité. Une fois le transport validé, les informations (quantité, qualité, heure d’arrivée) remontent automatiquement sur la plateforme Dashdoc. « Le système est très facile à utiliser, même pour les chauffeurs plus âgés. De plus, nous pouvons traiter et classer les CMR quasiment en temps réels. C’est un point fort de Dashdoc et nos clients apprécient la vitesse avec laquelle ils ont un retour d’info sur les transports effectués », explique Maxim Vincent.

dashdoc.eu

Le projet eCMR a été mis en place début 2021 avec Knauf. Vincent Logistics effectue 500 livraisons par semaine pour le producteur de matériaux de construction qui bénéficie d’une remontée instantanée d’infos. Si le client final a des questions, il peut directement s’adresser à Knauf qui aura toutes les réponses concernant le transport. « C’est une énorme facilité pour Knauf et cela engendre un taux de satisfaction très élevé de notre client et de ses propres clients », se réjouit Maxim Vincent.

CONTACTER DASHDOC Sami Dandache sami.dandache@dashdoc.eu +32 471 57 64 46


DOSSIER

Traçabilité en temps réel

ID 11B245 ETA 14:11 ON SCHEDULE

ETA 11:34 DELAY 11 minutes

Votre camion est un mouchard L’heure est au ‘real time’. Plus personne ne veut attendre pour rien. C’est en tout cas ce que ‘vendent’ les nouveaux apôtres de la traçabilité. Avec une agilité remarquable, ceux-ci se sont imposés auprès des chargeurs, mais tous n’ont pas eu la délicatesse d’expliquer aux transporteurs à quel jeu ils jouaient.

On entend souvent les chargeurs critiquer les transporteurs (et inversement) pour leur manque d’ouverture d’esprit ou d’innovation. Prenez le CMR électronique : cela fait cinq ans qu’on en parle, la technologie est aujourd’hui éprouvée mais elle n’a pas encore réellement percé.

porteurs réticents, c’est que les chauffeurs n’y arriveront pas. Or, si votre plate-forme est ouverte, interopérable et facile à interfacer, cela se passe très bien. Et lorsqu’un transporteur se voit refuser le paiement d’une facture parce qu’un de ses chauffeurs a perdu un CMR au format papier, le pas est vite franchi. »

2 0 2 2 , L ’A N N É E D E L ’ E - C M R ?

« Sur 400 millions de CMR en transport international et 4 milliards en national, il y en a peutêtre 10 qui sont au format électronique », indique-t-on ainsi chez Transfollow. En 2016, l’eCMR était surtout l’affaire de quelques transporteurs plus innovants que les autres. Les choses sont toutefois en train de changer. « Le Covid a donné une claque à tout le monde », reconnait Coline Vignon, responsable marketing chez Dashdoc. « Sur 400 clients, nous avons 350 PME », explique son collègue Guillaume Cochois. « Le message que l’on entend le plus souvent de la part des trans-

L’autre facteur d’accélération se trouve du côté des chargeurs. « Beaucoup de chargeurs qui travaillent avec plusieurs transporteurs ne veulent plus qu’une interface, et ils se mettent alors à imposer l’eCMR à leurs transporteurs », explique-t-on ainsi chez Transfollow. « Le problème est qu’il existe bien un standard des Nations Unies pour l’eCMR lui-même, mais pas sur l’interfaçage. Or, les TMS et les ERP fonctionnent souvent en silos parce que ce sont des systèmes propriétaires. » D’où l’intérêt pour les transporteurs (et les chargeurs aussi d’ailleurs) de travailler avec une plate-forme eCMR ouverte et

Le calcul prédictif de l’heure estimée d’arrivée de chaque envoi devient la norme.

facile à interfacer. Dans ces conditions, l’année 2022 sera peut-être celle de la véritable percée. LE ‘TEMPS RÉEL’, À QUEL PRIX ?

La digitalisation a récemment pris des formes beaucoup plus riches. Au printemps 2020, au moment où les frontières se fermaient, une société allemande s’est fait connaître en diffusant des cartes où l’on voyait évoluer en temps réel les temps d’attente à chaque poste-frontière en Europe. Cette société s’appelle Sixfold et elle a été depuis reprise par Transporeon, une plate-forme qui vise surtout les chargeurs. Sixfold est loin d’être un cas unique : parme les leaders de cette nouvelle traçabilité en temps réel, on peut citer Project44, Shippeo ou Fourkites. Mais comment ces start-ups ontelles réussi à s’imposer aussi vite et, surtout, à fournir un service d’une telle précision aux chargeurs ? Kirill Kamenetsky (Senior Digital Supply Chain Consultant

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DOSSIER

N E PA S J E T E R L E B É B É AV E C L ’ E A U DU BAIN

Qui est propriétaire de toutes les données générées par un camion connecté ? La question n’est pas encore tout à fait tranchée. E P R I VA C Y P O U R L ’A P R È S - G D P R

Le règlement GDPR n’était qu’une étape. Même si son parcours législatif a été ralenti par le Covid, la proposition de règlement ePrivacy finira par aboutir. Ce règlement devrait clarifier (définitivement) la question du transfert et de l’utilisation des données personnelles dans toute l’Union Européenne. chez Shippeo) lève un coin du voile : « Il suffisait de trouver un accord avec les sept principaux constructeurs de camion pour avoir accès aux données de localisation de chaque véhicule connecté. C’était beaucoup plus rapide que de devoir contacter individuellement chaque transporteur. » Et voilà le nœud du problème : comme l’explique Johan Tielemans (Scaldis Conseil), les constructeurs se considèrent de facto comme propriétaires des données que génèrent leurs véhicules connectés, en s’abritant derrière l’argument selon lequel les données sont ‘anonymisées’ et qu’ils sont donc en règle avec le règlement GDPR. FLOU JURIDIQUE

« Il existe à ce sujet un réel vide juridique auquel devraient s’attaquer sérieusement les fédérations, explique Tielemans. Sous le couvert d’anonymisation, les données appartiendraient donc à tout le monde. Or, le seul propriétaire des données devrait être 38

le chauffeur qui est lié à un camion. En 2016, la Cour de Justice Européenne a jugé que les données provenant des véhicules doivent être considérées comme des données à caractère personnel pour toute entreprise ayant accès aux données et capable de relier ces données à un particulier. Même si vous rendez ces données anonymes, tant que la référence à un individu existe, ces données sont qualifiées comme des données personnelles. En particulier, le transfert de données d’un utilisateur d’un véhicule connecté à un serveur d’entreprise aboutit logiquement à la qualification des données comme ‘personnelles’ et non comme ‘anonymes’. » Tielemans conseille donc aux transporteurs de se plonger dans les petits caractères de tous leurs contrats et de vérifier s’ils précisent dans quelles conditions les données sont ou non transmises à des tiers. « Les seuls partenaires avec lesquels un transporteur devrait travailler sont ceux qui précisent en toutes lettres que le transporteur reste propriétaire des données », affirme Tielemans.

Un des développeurs qui semblent s’inscrire dans cette voie vertueuse est FourKites. « Nos contrats indiquent clairement que c’est le transporteur qui est propriétaire des données. », explique Scott Johnston (responsable de la communication). « Ces données sont anonymisés avant de servir à affiner nos prévisions d’ETA (Estimated Time of Arrival). Notre client (le chargeur, NDLR) n’a accès qu’aux données et aux ETA des chargements dont il nous a donné les coordonnées. Nous ne lui donnons pas accès à davantage, et il ne sait donc pas ce que fait le transporteur en dehors des marchandises qu’il transporte pour lui. Le traçage commence quatre heures avant le chargement et il s’arrête dès que le chargement a été livré. » Dans ces conditions, Roy van der Heijden, analyste commercial chez Int. Transportbedrijf Van der Heijden aux Pays-Bas, se montre satisfait du système : « Au début, nous ne voulions pas partager nos données, mais notre client a insisté et la qualité supérieure du service est importante pour nous. La plateforme FourKites a été opérationnelle en un mois et notre client a pu profiter de l’accès à des informations détaillées et en temps réel sur les expéditions, leur statut (en retard, en avance, à l’heure) et les heures d’arrivée prévues. De notre côté, nous avons pu dépasser les attentes de notre client.”

La visibilité en temps réel peut aussi être un atout pour le transporteur (ici avec DKV Live).


DOSSIER

« Chez nous, les transporteurs décident à tout moment quelles données ils partagent avec quel client », indique Aaron Eucker pour Sixfold. « De notre côté, nous faisons en sorte que le chargeur n’a accès qu’aux données relatives à ses envois et non à toute la flotte du transporteur. » Project44 certifie aussi que tous les transferts et analyses de données sont entièrement compatibles avec le règlement GDPR. B I G DATA

A partir du moment où la question de la propriété et du transfert de données est réglée, il n’en reste pas moins vrai que les systèmes de traçabilité en temps réel offrent aussi une plus-value au transporteur. Comme l’explique Sjoerd Eekelaar (vice-président Benelux chez Project44), le transporteur bénéficie ainsi d’une solution de track & trace pour ses propres véhicules, mais aussi pour

ceux de ses sous-traitants à bon compte. Si le service choisi est facile à interfacer avec les autres logiciels de l’entreprise (TMS, ERP…), le transporteur est donc gagnant, estime-t-il. L’autre élément de différenciation entre les systèmes est leur capacité à générer de la valeur en combinant différentes sources de données. « Nous traçons plus d’un milliard d’expéditions par an, avec une couverture de 95 % sur le fret conteneurisé et plus de 3,5 millions de camions connectés. Nous croisons ces données avec des données liées au trafic routier, à la météo ou aux chantiers en cours, et nous analysons le tout avec notre ‘sauce Project44’, notre Business Intelligence à nous qui nous permet d’offrir un service prédictif plus performant. Nous sommes aussi capables d’aider les entreprises à analyser leurs performances au niveau de chaque itinéraire et d’identifier les points à améliorer par exemple. »

DE NOUVELLES PERSPECTIVES POUR RÉINVENTER LA LOGISTIQUE DE LA CHAINE DU FROID.

Notre nouveauté : CELSINEO. Une idée révolutionnaire bouleverse les concepts antérieurs de la logistique du froid. Avec sa technologie brevetée, CELSINEO représente une nouvelle catégorie de systèmes de refroidissement pour semi-remorques. Trois modules de refroidissement indépendants définissent de nouvelles normes en termes de disponibilité, une facilité de service et la sécurité à l’avenir.

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Ces plates-formes permettent aussi d’analyser la performance réelle de chaque itinéraire.

Au bout du compte, les platesformes de visibilité en temps réel finiront toutes par se conformer aux règles. Elles représentent juste un nouvel outil conçu prioritairement pour les chargeurs, mais dont les transporteurs peuvent tirer profit. CLAUDE YVENS

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TRAILER

Solutrans

La France met le paquet sur l’hydrogène Il fallait une dose d’inconscience pour mettre sur pied un salon international en 2021… et une solide dose de chance pour qu’il se tienne juste avant que les mesures antiCovid ne se resserrent. Patrick Cholton et ses équipes ont donc réussi leur pari.

Solutrans était l’occasion de découvrir pour la première fois de nouveaux constructeurs de camions électriques comme Irizar, Volta Trucks et BAX (nous y reviendrons) et de remettre entre autres le prix du camion de l’année au nouveaux DAF XF, XG et XG+. Mais s’il fallait retirer du salon une tendance majeure, ce serait l’électrification à tout va. L A F R A N C E M E T L E PAQ U E T S U R L’HYDROGÈNE

Chereau présentait ainsi un prototype de semi-remorque frigorifique combinant panneaux solaires et essieu à récupération d’énergie. Ce véhicule peut être alimenté sur secteur ou par un pack batterie qui se recharge grâce à un essieu à récupération d’énergie (E-Axle 24 Kw) ou grâce aux 27 m2 de panneaux solaires installés sur le toit. Grâce à la nouvelle génération de matériau isolant VIP (Vacuum Insulated Panels), le groupe frigorifique est moins sollicité (jusqu’à -25%). Chereau exposait aussi une semi-remorque Hydrogen Power H2 équipée d’une pile à combustible. Ce concept s’approche de la production puisque 40

A l’instar de Fruehauf, les carrossiers français développent beaucoup de projets autour de l’hydrogène.

les tests menés dans le cadre du projet de recherche Road ont permis de répondre à des questions importantes relatives à la sécurité et même au coût d’utilisation. L’autre grand spécialiste français des véhicules frigorifiques n’était pas en reste : Lamberet y allait de son prototype SR2 FresH2, une semi-remorque multi-température dont le groupe Carrier Transicold est alimenté directement par une pile à combustible Bosch. Cette solution est plus légère qu’une solution faisant appel à un pack de batteries tampon. Une solution que Lamberet propose également avec la SR2-e qui est équipée d’un pack rechargé soit sur le secteur soit avec un essieu récupérateur d’énergie TRAK’r fourni par SAF.

Le troisième carrossier français à travailler sur la récupération d’énergie est Fruehauf. La HydDrive combine un essieu électrique, une pile à combustible Symbio et une batterie à haute tension : celle-ci alimente l’essieu électrique qui assiste le moteur du tracteur routier au démarrage et à l’accélération. En phase de freinage, l’essieu récupère de l’énergie qui est stockée dans la batterie. Il reste à voir ce que le concept permet de conserver en termes de charge utile. Ces trois exemples témoignent cependant du grand dynamisme de la filière ‘hydrogène’ en France. L’hydrogène ‘vert’ y est maintenant quasiment élevé au rang de grande cause nationale, et Renault exposait d’ailleurs le premier prototype de son Master H2Tech en version châssis-cabine.


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L’hydrogène est devenu une priorité absolue en France.

La pile à combustible Bosch permet d’alimenter un groupe frigorifique.

Allison présentait ainsi un essieu à moteur électrique conçu pour le marché européen, l’eGen Power 130D (qui peut supporter une charge de 13 tonnes). Il est doté de deux moteurs électriques, avec une puissance combinée en pointe de 648 kW. Quant au 100S (charge à l’essieu de 10,4 tonnes), il utilise un seul moteur pour générer une puissance de pointe de 324 kW et se destine aux configurations 4x2 et 6x4.

tonnes. Ces essieux constituent la base d’une nouvelle marque de camions que BPW va lancer en Europe en 2022 : BAX. Le BAX 7.5 résulte d’une collaboration entre le fabricant d’essieux et la société Paul Nutzfahrzeuge. Il pèse 3,5 tonnes à vide et BPW annonce une charge utile nette de 3 tonnes dans la version de 7,5 tonnes de MMA, avec une caisse légère, un hayon élévateur Palfinger et un système télématique propre à BPW, puisqu’il est développé par sa filiale Idem Telematics.

Chez BPW, on exposait un essieu eTransport qui existe en différentes configurations pour porteurs de 5,5-7,5 tonnes et 18-26

BPW collabore aussi avec Thermo King : un essieu électrique ePower est combiné avec une batterie-tampon et un groupe

ESSIEUX ÉLECTRIQUES

frigorifique Thermo King pour fournir une solution appelée AxlePower sans émissions de CO₂. Enfin, toujours au rayon ‘frais’, Daikin profitait de Solutrans pour dévoiler ses premiers groupes frigorifiques depuis la reprise de Zanotti en 2016. La nouvelle gamme s’appelle Exigo et débute avec le E1500, un groupe entraîné par le moteur du tracteur. Daikin promet un faible niveau sonore (certification PIEK en option), des intervalles d’entretien de 3000 heures et une consommation d’énergie abaissée grâce à un gros travail sur les flux d’air. CLAUDE YVENS

N O U V E A U X A S S I S TA N T S A N T I - A N G L E M O R T

Les systèmes de détection d’usagers faibles dans l’angle mort devront équiper tous les nouveaux camions en 2024, mais ils existent aussi en solution ‘post-usine’: • le Dometic PerfectView BVS 71000 utilise une caméra et un moniteur en cabine et distingue les objets en mouvement tels que les piétons des objets statiques • le RightViu de Continental utilise un radar dont la portée s’étend à quatre mètres et un capteur d’angle de direction pour distinguer lui aussi objets foies et objets mouvants. En cas de danger, il génère un signal auditif et visuel en cabine. (photo) • le SideScan Predict de Brigade est le plus avancé : il s’appuie sur six capteurs à ultra-sons fixés sur le côté droit du véhicule et sur une intelligence artificielle qui anticipe le comportement des objets mobiles. Le système ne fonctionne pour l’instant que sur un véhicule de 5,2 mètres de long au minimum (et donc pas encore sur un ensemble tracteur-semi).


TRAILER

Fliegl

Innovation tous azimuts Le carrossier allemand Fliegl est un petit joyau d’innovation qui cache bien son jeu. Cette entreprise 100 % familiale commence à se développer en Belgique et une visite d’usine en apprend beaucoup sur les multiples inventions qu’elle propose.

C’est en 1991 que Helmut Fliegl a installé sa production de matériel tracté à Triptis, dans le land de Thuringe. L’entreprise emploie aujourd’hui 500 personnes et produit 4500 unités par an, et Helmut Fliegl veut en faire le numéro 1 en termes de réputation. DES SYSTÈMES SIMPLES, MAIS EFFICACES

Cette réputation se construit sur la fiabilité, mais aussi sur l’innovation. Certains de ces concepts innovations ne peuvent pas être commercialisés en Belgique, comme la semi-remorque de 15,03 mètres qui représente aujourd’hui 40 % de la production de bâchées, ou le dolly pour écocombis CLG avec timon articulé. Voici par contre quelques exemples de brevets commercialisés en Belgique : • Le Safe-Lock est un système tout simple dont les ouvertures coniques permettent une fermeture facile des portes même quand la semi-remorque est en dévers ; • Le système Drive-On est un stabilisateur anti-basculement pour bennes basculantes qui transfère jusqu’à 2,8 tonnes sur l’essieu moteur du tracteur lors du basculement, et même jusqu’à 6,7 tonnes au démarrage. Léger (26 kg seulement), il remplace avantageusement, dans de nombreux cas, un système de propulsion hydraulique sur le tracteur. 42

Les bennes Fliegl sont de 300 à 400 kg plus légères.

• La tête de châssis arrondie des bennes, combinée à la forme conique de la benne elle-même, a permis d’alléger la benne sous les 4000 kg sans rien céder en stabilité ni en résistance. • Sur les semi-remorques à bâches coulissantes, Quick-Lock permet de gagner en moyenne 23 secondes par opération, soit 50% du temps à l’ouverture et 33% à la fermeture. Le système est entièrement mécanique et est donc peu sujet à la panne. • Le système Free Load, combinable avec un toit relevable, rabat tout le système de bâche coulissante au-delà de l’arrière de la semi-remorque, ce qui libère entièrement les 13,6 m pour le chargement ou le déchargement. • Le toit coulissant Blitz se répare par membrure, sans devoir enlever tout le toit ; d’où un gain de temps appréciable.

Helmut Fliegl en est persuadé, c’est cet esprit d’innovation permanente qui permettra à société de tenir debout : « Il y a déjà beaucoup de faillites chez les constructeurs du sud de l’Europe. Il ne restera bientôt qu’un constructeur sur dix, mais nous serons de ceux-là. » CLAUDE YVENS

D E U X I M P O R TAT E U R S EN BELGIQUE

• Ludo Pauwels (Lokeren) se concentre surtout sur les bennes et les porte-engins en Flandre et aux Pays-Bas ; • B-Trailers (Herstal) se concentre sur la gamme routière, avec un accent plus prononcé sur la Wallonie.


TOOLS

Les lubrifiants à l’heure de la numérisation

Un service plus rapide et flexible devient possible Le marché des lubrifiants est en mutation à plus d’un égard. Plus que jamais, il faut veiller à l’adéquation entre l’offre et la demande. Ce qui n’est possible qu’en anticipant les besoins de demain. L’ère numérique semble déjà amorcer le virage vers un service plus flexible.

L’électrification implique l’émergence de nouveaux besoins en matière de lubrifiants.

Les fabricants de lubrifiants n’ont d’autre choix que de suivre la voie tracée par les constructeurs. « Ce sont eux qui déterminent quels moteurs arrivent sur le marché, et nous adaptons notre offre en conséquence. Et nous voyons aussi le marché évoluer. Les huiles minérales et synthétiques d’il y a 20 à 30 ans sont aujourd’hui totalement dépassées. Et d’autres changements majeurs sont à attendre dans les prochaines années », explique Koen Verdruye, Account Manager Automotive Benelux chez Fuchs Petrolub Group. « Nous nous trouvons à un carrefour intéressant. On nous demande de commercialiser des huiles avec une plus faible viscosité, toujours dans une volonté de réaliser des économies de carburant. Le contrôle des

émissions fait aujourd’hui l’objet d’une grande attention. Nous suivons la tendance, mais cela nous place devant un autre défi : l’huile doit garder un pouvoir lubrifiant suffisant, ce qui est essentiel pour la durée de vie du moteur. Nous constatons aussi que les constructeurs élaborent des spécifications pour chaque modèle. Pour nous, la réponse aux exigences des équipementiers constitue une difficulté supplémentaire », analyse Stephan Dergent, Head of Market France and Benelux chez Petronas Lubricants. É L E C T R I F I C AT I O N

Même s’ils reconnaissent que l’électrification va arriver, les fabricants de lubrifiants apportent quelques nuances. « Le marché des poids lourds continue à mi-

ser en majorité sur les moteurs à combustion. On ne peut pas comparer cette situation à celle des véhicules particuliers, où l’électrification va bon train », indique Koen Verdruye. « Exactement, mais il n’empêche qu’il faut anticiper. On peut voir cela comme un avantage, qui nous laisse un peu de marge. Nous devons être conscients que la poursuite de l’électrification entraînera une baisse de la demande d’huiles moteur. Les volumes chuteront, et des produits alternatifs seront nécessaires. Dans les véhicules électriques aussi, on trouve des points de graissage », ajoute Stephan Dergent. « C’est ce qui montre la flexibilité de notre secteur, comme avec l’émergence des boîtes automatiques et le besoin en huiles ATF qui en découle », complète Koen Verdruye.

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TOOLS

Les fournisseurs d’huile anticipent le passage aux moteurs électriques.

I M PAC T D E L A N U M É R I S AT I O N

Quel est l’impact de la numérisation sur les acteurs du lubrifiant ? « Comme beaucoup, nous constatons l’importance croissante de la connectivité et tous les avantages qu’elle implique. Les concessionnaires restent connectés à leurs véhicules. Ils sont informés du statut du camion à distance. Les entretiens peuvent être planifiés. Mais ces données ont aussi des répercussions sur la façon dont les stocks sont gérés, ce qui a à son tour un impact sur les commandes. Et c’est ici que nous intervenons. Plutôt que de commander de grandes quantités, on achète en fonction des besoins concrets. C’est une façon pratique de garder son fonds de roulement sous contrôle, mais cela nous oblige à rester vigilants », affirme Stephan Dergent. « À cet égard, nous proposons aussi un système qui permet tant aux gestionnaires de flotte qu’aux concessionnaires de suivre le niveau de leurs réservoirs. En dessous d’un certain seuil, une alerte est envoyée et une commande peut aussi être passée automatiquement. Cela montre bien la valeur ajoutée de

la numérisation », poursuit Stephan Dergent. « Le prélèvement d’échantillons d’huile reste important. Et il ne faut pas le confondre avec l’analyse du moteur. Il permet d’évaluer la situation réelle. Par exemple, y a-t-il trop de poussière ou d’eau dans le moteur ? Quelle est la capacité résiduelle de l’huile ? Comme les vidanges sont moins fréquentes, le nombre d’échantillons nécessaires diminue. Grâce à la numérisation, la communication avec le client à ce sujet est plus rapide et efficace. Alors qu’avant, on utilisait des cartes, des fax, etc., tout passe aujourd’hui en ligne », indique Koen Verdruye.

source d’énergie a un impact sur les points qui doivent être lubrifiés ».

MICHAËL VANDAMME

« Nous savons que la part des huiles moteur va diminuer. »

« MOINS DE GARAGES, PLUS DE GROUPES »

AT T I T U D E R É S O L U M E N T P O S I T I V E

« Ce qui me frappe, c’est qu’il n’y a pas de négativité dans notre secteur. Presque tout le monde surfe sur la vague de l’innovation. Le principal défi consistera à nous adapter en permanence à la réalité du marché et, si nécessaire, à nous réinventer systématiquement », conclut Koen Verdruye. Stephan Dergent partage cet avis : « Le marché ne disparaît pas, il évolue, nous devons en être conscients. Tout comme le changement d’une

« Pour nous aussi, les consolidations au niveau des concessionnaires ont des conséquences. Les achats seront de plus en plus souvent effectués au niveau du groupe. Notre portefeuille de clients va donc se comprimer, mais les clients eux-mêmes seront plus importants. Moins de garages et plus de groupes, telle sera la réalité du marché à l’avenir », souligne Koen Verdruye.

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TRUCK & BUSINESS

Innovation Center

Commande vocale chez Lamberet

CMB.Tech construit son premier camion à hydrogène

Webfleet en Bridgestone développent un TPMS pour poids lourds

Le carrossier français Lamberet innove avec une application Multiplex Connect qui intègre la commande vocale du hayon, de l’éclairage, etc. et avec un système d’immobilisation automatique. Ce système utilise la technologie RFID (installée sur le quai de chargement et sur la remorque) pour empêcher le camion de démarrer si un chariot élévateur travaille encore à proximité.

Le camion à hydrogène de la société belge CMB.Tech est basé sur un Ford F-Max et ne nécessite pas de pile à combustible. L’hydrogène sert de carburant dans un moteur à combustion classique qui peut, si nécessaire, également fonctionner entièrement au diesel. Grâce à cette technologie ‘dual-fuel’, il a une autonomie de 500 km avec un plein d’hydrogène et est également plus léger. En principe, cette technologie est également beaucoup moins chère que la pile à combustible.

La nouvelle solution TPMS de Webfleet permet une gestion prédictive en surveillant en permanence la pression et la température des pneus de poids lourds. Les capteurs peuvent être installés sans démonter le pneu. Cette solution TPMS est intégrée à la plateforme de gestion de flotte Webfleet. Lorsqu’un problème (basse pression ou haute température) est détecté, l’information est envoyée à la plateforme de services télématiques Webfleet pour analyse.

Pour autant que la fiabilité soit garantie, c’est un concept qui facilitera le travail du chauffeur. A combiner, pourquoi pas, avec des caméras et des écrans dans la cabine ?

Une initiative belge pour décarboner le transport est toujours bonne à prendre. Les premiers tests effectués chez Van Moer vont d’abord permettre de voir quel pourcentage d’hydrogène peut réellement être utilisé. A suivre donc…

Bridgestone a réalisé un coup de maître en acquérant Webfleet. C’est avec des solutions comme celle-ci que l’on commence à en réaliser tout le potentiel.

Un camion à hydrogène, énergie incluse ?

La société française Hyliko se fait fort de fournir aux transporteurs une solution complète basée sur la propulsion à hydrogène : le véhicule, le service après-vente, l’hydrogène lui-même et les crédits carbone. Tout l’écosystème construit par Hyliko est en effet basé sur la production d’hydrogène vert en France à partir L’émission et le transfert de crédits carbone reposent d’une biomasse qui a séquestré du carbone pendant sa certes sur des bases pas encore stabilisées, mais cette croissance. Le sous-produit de cette biomasse, outre initiative montre bien comment les nouvelles propulsions l’hydrogène, est un engrais utilisable en agriculture. alternatives risquent bien de bouleverser complètement les business modèles actuels.

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Maxus ose le changement de batteries

Des empreintes digitales pour repérer les traces de drogue ?

Le nouveau portail DKV Live permet d’affiner les pleins de carburant en combinant, en temps réel, les données GPS du véhicule, les données du tachygraphe digital (et donc les temps de conduite restants) et les prix à la pompe. Il faut pour cela installer un boîtier dans le véhicule, mais c’est un moyen pratique pour commencer à fournir des ETA (Estimated Time of Arrival) à ses propres clients..

Le Maxus H6, qui vient d’être lancé en Amérique du Sud, est un camion électrique dont la principale caractéristique est de fonctionner avec des batteries ‘phosphate-ferlithium’ placées à l’arrière de la cabine et échangeables. La maison-mère SAIC Motor affirme qu’un échange complet de batteries ne prend que cinq minutes, ce qui rendrait le H6 aussi facile à utiliser qu’un camion à moteur thermique.

Au Royaume-Uni, John Hacklings Transport Ltd utilise des tests de dépistage de drogues par empreinte digitale développés par Intelligent Fingerprinting. Par rapport aux méthodes salivaires et urinaires traditionnelles, ces tests de dépistage sont plus rapides et plus faciles à utiliser. Les résultats sont connus en 10 minutes avec un lecteur portable et des cartouches de test jetables.

DKV Live est un croisement hybride entre un service de track & trace et un système digital de gestion des pleins. Le potentiel du système est toutefois bien plus large que cela : d’autres fonctions devraient être ajoutées pour un faire un outil global.

En Allemagne, Meyer & Meyer teste ce principe depuis deux ans, et cela fonctionne. L’infrastructure à mettre en place pour déployer le système à grande échelle serait toutefois immense (opérateurs + chariots élévateurs) et les défis en termes de sécurité également.

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Ce type de mesure est fréquent au Royaume-Uni, où les dashcams sont aussi entrées en usage courant. La réglementation belge est par contre beaucoup plus restrictive…

Logistics

Acheter ou vendre une entreprise de transport ou de logistique ?

Transport

DKV lance son portail DKV Live


TABLEAU DE BORD INDUSTRIE

Scania présente son nouveau moteur de 13 litres

Scania a dévoilé une toute nouvelle chaîne cinématique pour ses camions les plus vendus : un nouveau moteur de 13 litres, une nouvelle boîte de vitesses pour applications légères et une nouvelle gamme de ponts arrière. Le nouveau moteur CD13 était annoncé depuis deux ans et Scania annonce, non sans fierté, qu’il franchit une barre symbolique : une efficacité thermique d’environ 50 %, soit un niveau très difficile à atteindre pour un moteur à combustion interne. Par rapport à la génération de moteurs précédente, il récupère une solution technique déjà utilisée sur le récent moteur V8 de la marque (Twin SCR, soit une double injection d’AdBlue au niveau du turbocompresseur et à l’intérieur du système de post-traitement), mais il en inaugure deux autres : un double arbre à cames en tête combiné à la culasse à quatre soupapes par cylindre et un nouveau frein à compression (Compression Release Brake, en option) qui doit permettre de se passer de ralentisseur dans de nombreux cas. Le nouveau moteur est pour l’instant disponible en quatre niveaux de puissance (420, 460, 500 et 560 ch), tous homologués pour rouler au HVO. Les 460 et 500 ch peuvent fonctionner avec du biodiesel FAME. Tous les autres éléments du moteur ont été revus pour, au final, obtenir une durée de vie allongée de 30 % et contribuer de manière significative à une nouvelle réduction de la consommation. Sur ce plan, Scania avance le chiffre de – 8 %, un résultat obtenu en combinant le nouveau moteur avec une nouvelle boîte de vitesses GC25 et une nouvelle gamme de ponts arrière.

LE MARCHÉ AU 31/10/2021

PORTEURS (> 3,5 T) Marque MAN Mercedes Volvo DAF Iveco Scania Renault Volkswagen Fuso Ford Autres TOTAL

MARCHÉ TOTAL 2021 635 613 475 455 435 286 232 50 20 15 124 3340

% 19,0 18,4 14,2 13,6 13,0 8,6 6,9 1,5 0,6 0,4 3,7

2020 730 559 573 552 401 298 270 50 6 15 96 3550

% 20,6 15,7 16,1 15,5 11,3 8,4 7,6 1,4 0,2 0,4 2,7

TRACTEURS Marque DAF Volvo MAN Scania Mercedes Iveco Renault Ford TOTAL

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Marque MAN Volvo DAF Mercedes Scania Iveco Renault Volkswagen Ford Fuso Autres TOTAL

2021 1294 1212 1195 1015 849 661 441 50 28 20 132 6897

% 18,8 17,6 17,3 14,7 12,3 9,6 6,4 0,7 0,4 0,3 1,9

LA TENDANCE 2021 740 737 659 563 402 226 209 13 3557

% 20,8 20,7 18,5 15,8 11,3 6,4 5,9 0,4

2020 588 591 204 424 242 204 201 0 2677

% 22,0 22,1 7,6 15,8 9,0 7,6 7,5 0,0

Porteurs Tracteurs En hausse/en baisse Mercedes MAN Scania Iveco DAF Volvo Renault

-3,99 34,45

214 140 127 56 55 48 -30

2020 1154 1164 1140 801 722 605 471 50 15 6 99 6227

% 18,5 18,7 18,3 12,9 11,6 9,7 7,6 0,8 0,2 0,1 1,6


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C A R L A D E T R I E U X ( V O LTA T R U C K S ) : « N O U S AV O N S D É J À 2 5 0 0 V É H I C U L E S E N C O M M A N D E F E R M E . »

reprend une partie des lignes de production qu’utilisait MAN. Le fait d’utiliser une expertise et une infrastructure existante est pour nous moins exigeant en capital, mais ça nous donne aussi beaucoup de crédibilité vis-à-vis de nos clients. On s’inscrit dans le paysage des constructeurs sérieux, mais avec beaucoup plus d’agilité. T& B : Q U E L L E E S T VOT R E C A PAC I T É

Carla Detrieux : Nous avons une stratégie ville par ville. Nous n’avons pas la capacité de créer un réseau européen du jour au lendemain. Donc nous allons commencer par les grandes métropoles comme Londres et Paris où nous allons acquérir du foncier pour développer le service. Certains aspects du service, comme les pneus, les essieux ou les batteries, seront délégués à des partenaires.

DE PRODUCTION ?

T R U C K & B U S I N E S S : V O LTA T R U C K S V I E N T D E F R A N C H I R U N E É TA P E I M P O R TA N T E DA N S L ’ I N D U S T R I A L I S A TION DE SON CAMION ÉLECTRIQUE ZERO…

Carla Detrieux : Nous avons validé notre chaîne de production avec Steyr Automotive en Autriche, on

Carla Detrieux : Nous avons déjà vendu la moitié de ce qui sortira des chaînes au quatrième trimestre 2022, soit 2500 véhicules. Chez Steyr, nous avons une capacité de 10.000 véhicules par an mais à mesure que nous ouvrirons de nouveaux marchés, nous ouvrirons aussi d’autres sites de production. T&B : COMMENT ALLEZ-VOUS VOUS

T& B : B R U X E L L E S A -T- E L L E L A TA I L L E VO U L U E P O U R E N T R E R DA N S VOTRE CONCEPT ?

Carla Detrieux : Oui, mais ce n’est pas notre première priorité. Ce n’est pas seulement une question de population, il y a aussi les zones à basses émissions et la pression qui pèse sur les opérateurs. UNE INTERVIEW DE CLAUDE YVENS

ORGANISER EN BELGIQUE ?

LA VIDÉO DU TRIMESTRE

Van Moer Logistics explique pourquoi et comment il utilise le premier camion à hydrogène développé par CMB.Tech. A découvrir sur notre channel Youtube !

EN BREF

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LA PERSONNALITÉ DU TRIMESTRE

Fraikin Benelux a un nouveau capitaine. Le PDG Jan Van de Perre a quitté l’entreprise après cinq ans et est remplacé par Cyriel Vrijders, qui travaille pour Fraikin depuis 12 ans.


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L’impact du GDPR sur la propriété des données de véhicules connectés « Quels droits un transporteur qui achète un véhicule connecté conserve-t-il sur la propriété des données qui sont générées pendant son utilisation ? Le règlement GDPR oblige les entreprises à faire preuve de la plus grande prudence lors du traitement des données à caractère personnel. Il couvre toutes les informations qui permettent d’identifier directement ou indirectement des personnes, y compris les données générées par la télématique embarquée. Le règlement GDPR, qui est entré en vigueur dans les États membres de l’Union européenne le 25 mai 2018, a renforcé la souveraineté de la personne concernée sur ses données, en particulier sur le droit de recevoir et transmettre ses données à des tiers. En attendant le futur règlement européen e-Privacy, qui limitera la quantité de données qu’un constructeur peut partager avec d’autres organisations sans obtenir le consentement de l’utilisateur, la plupart des entreprises de transport devraient cependant s’inquiéter de la propriété des données liées par exemple à la géolocalisation ou à la gestion opérationnelle et commerciale de l’entreprise. Ces données présentent donc un grand intérêt pour des entreprises, voire des criminels.

Toutes les entreprises télématiques que je connais stipulent que le transporteur reste propriétaire de ces données. Les constructeurs, par contre, avancent les aspects liés à la sécurité et à la responsabilité en cas de défaillance pour justifier la gestion exclusive des données provenant de véhicules connectés. De facto, la plupart des données provenant des véhicules sont donc aujourd’hui la propriété des constructeurs, alors même qu’elles sont considérées comme données personnelles dès qu’un lien peut être établi avec un individu. Ceci a été fixé par un jugement de la Cour de Justice Européenne en 2016. Le lien technique entre les données et un véhicule implique également un lien vers l’opérateur du véhicule, qu’il soit un individu ou une entreprise. En conséquence, les données des véhicules connectés sont presque toujours considérées comme personnelles, du moins lorsqu’il s’agit d’entreprises collectant directement les données des véhicules respectifs. Le plus souvent les équipementiers mais également les prestataires de services télématiques ou des concessionnaires. Dans tous ces cas de figure, la loi sur la vie privée s’applique. »

Johan Tielemans, Scaldis Conseil

RÉAGISSEZ ! claude.yvens@transportmedia.be

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Les transporteurs devraient s’inquiéter de la propriété des données liées à la géolocalisation.



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