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Oui, les cartes du mix énergétique sont bel et bien redistri buées. La nouvelle n’est pas bien accueillie par les construc teurs. Leur feuille de route de décarbonation est caduque. L’inattendu euro VII, en donnant de nouveaux objectifs aux moteurs thermiques, est venu jouer les trouble-fêtes.
Dans ce numéro, nous nous attardons sur l’euro VII, sur l’évolution de la norme pour les poids lourds qui va obliger les constructeurs à prendre en compte de nouveaux éléments, comme le freinage ou les pneumatiques via les mesures d’abrasion et d’émissions de parti cules fines. Un véritable casse-tête. Car, contrairement au moteur, les équipements s’usent plus vite et l’impact environnemental change rapidement. Le calcul des émissions va s’en trouver sensiblement compliqué, y compris, et c’est assez révolutionnaire, pour les véhicules électriques à batteries.
Nous constatons par ailleurs que le thermique n’a pas dit son dernier mot, comme l’a annoncé Bruxelles. Notre prise en main du Ford F-Max 500 démontre que le diesel a encore de beaux jours devant lui.
L’hydrogène fait parler de lui et risque aussi de perturber le mix éner gétique d’ici peu. Nous y revenons avec l’arrivée des premiers camions hydrogène en France via le rétrofit d’Hyliko. Ce sera une réalité courant 2023. Le rétrofit, une manière de parvenir à des solutions alternatives ? Réponse dans ce numéro.
Toute l’équipe vous souhaite d’excellentes fêtes de fin d’année, et ren dez-vous en 2023 avec 5 nouveaux eMAG, dont un supplément Solu trans. Au fil des numéros, vous êtes de plus en plus nombreux à nous suivre. Notre plus beau cadeau !
Plus de 400 personnes ont assisté le 17 novembre dernier aux Rencontres de la Filière 2022 à Lyon. Organisé par la FFC, ce rendez-vous d’échanges entre les acteurs du secteur du transport a lieu en alternance avec Solutrans. L’édition 2023 du salon a été présentée lors du dîner devant de nombreuses personnalités européennes.
La transition énergétique a été largement évoquée. L’euro VII annoncé par Bruxelles n’a pas suscité un grand enthousiasme de la part des constructeurs présents, tout en conve nant que l’avenir sera multi-énergie. Ils étaient tous convergents sur leur rôle dans la mobilité électrique « que celle-ci soit choisie ou contrainte ». Les Ren contres de la Filière présentaient aussi une expo sition de camions zéro émission. Le Hyundai Xcient était dévoilé pour la première fois en France au grand public. Autre curiosité : Iveco a présenté une première hydrocureuse gaz (Kaiser Moro), un S-Way NP 400. Le prix de l’Homme de la Filière a été remis à Luc Chatel, président de la PFA, lors du dîner.
Les Rencontres de la Filière, au travers de plusieurs tables rondes, ont permis de faire l’inventaire des sujets d’actualité. On remarque, en premier lieu, une forme d’unanimité des constructeurs présents (représentants d’Iveco, Scania, Volvo Trucks et la Chambre syndicale internationale de l’automobile et du motocycle – CSIAM) pour déplorer les ob jectifs d’Euro VII venant en plus de ceux liés à la mobilité électrique. En clair : leurs ressources hu maines et financières ne pourraient pas poursuivre tous les objectifs dans le calendrier demandé. S’ils s’accordent tous pour dire que l’électrique à bat teries sera à terme prépondérante, il restera une place pour le moteur thermique sur certaines mis sions où l’électromobilité serait inadaptée. Giandomenico Fioretti, directeur des propulsions alternatives du groupe Iveco, a été très optimiste pour les objectifs de réduction des émissions de CO2 transport en France. Outre le rôle du parc électronucléaire pour la production électrique, il a très fortement insisté sur le potentiel de décar bonation dont la France dispose via la biométha nisation. Cette approche est assez similaire à celle de Stéphane Raux, l’intervenant de l’IFP Énergies Nouvelles, qui a plaidé pour une approche par ren dement de filières et analyse de cycle de vie des différentes solutions technologiques. Il a conclu
Le prix de l’Homme de la Filière a été remis à Luc Chatel, président de la PFA, par Henri Paccalin, P.-D. G. de Daimler Truck France (à droite).
son intervention par cette phrase choc : « Il n’y a pas de solution unique ! »
Il a aussi été question des ZFE. Des intervenants comme Olivier Poncelet, délégué général de l’Union TLF, et de Jean-Yves Gautier, vice-président de la commission logistique de la FNTR, ont fait part d’un manque de visibilité, d’harmonisation et de cohérence. Unanimité entre représentants des transporteurs et des constructeurs, par l’intermé diaire de la CSIAM, représentée par son président de la branche véhicules industriels Henri Paccalin, également président-directeur général de Daimler Truck France, et de Christophe Martin, directeur gé néral de Renault Trucks.
Si le principe des ZFE est européen, comme l’a rap pelé Matthieu Viera, élu EELV de la métropole de Lyon et du Sytral, se pose le problème de leur har monisation transnationale, la France mettant une joyeuse pagaille avec sa hiérarchie de vignettes Crit’Air décorrélées des normes Euro. Hervé Rébillon et Jean-Philippe Pastre rebillon@trm24.fr – pastre@trm24.fr
L’
ACEA, l’Association des constructeurs euro péens d’automobiles, est la première à ap porter des critiques sur l’arrivée de l’Euro VII. Elle déplore le calendrier, jugé « irréaliste » en raison des délais nécessaires au développement et à l’homologation des véhicules. La Commission pourrait également s’attirer les foudres des lobbies pro-électriques à batteries, car elle reconnaît dans son texte : « […] la transition, significativement plus lente des véhicules industriels vers les technologies zéro émission. Camions et autocars avec moteurs à combustion interne devraient rester plus longtemps sur le marché de l’UE ». Un point confirmé indirecte ment par la note 18 page 19 de la proposition : « au cas où la Commission ferait une proposition d’inclure après 2035 de nouveaux utilitaires roulant exclusive
ment avec des carburants neutres en CO2, en dehors des objectifs sur les standards d’émissions de CO2 des flottes, et en conformité avec les lois de l’UE et les ob jectifs de neutralité climat, cette réglementation sera amendée pour inclure une homologation par type de ces véhicules ».
L’Union internationale des transports routiers (IRU) craint de son côté que « la rigueur des normes de la proposition Euro 7 puisse, dans certains cas, né cessiter une refonte complète des véhicules, avec de graves implications financières totalement dispropor tionnées par rapport aux avantages réels ». L’organi sation est également prudente quant à l’inclusion des pneus et des freins dans le champ d’applica tion des règles Euro VII. « Un opérateur de transport pourrait-il acheter un véhicule Euro VII
tard, le véhicule n’est plus considéré comme un véhi cule Euro 7 parce que des pneus usés ont été rempla cés par des pneus d’une qualité différente ? Cela signi fierait-il qu’un véhicule ne peut plus entrer dans une zone urbaine à faibles émissions en raison de l’usure de certaines pièces ? », s’interroge l’IRU.
Les tenants du tout électrique à batteries doivent également s’agacer d’une disposition assez révo lutionnaire : la mesure des particules non issues des gaz d’échappement, telles que celles en pro venance des freins ou de l’abrasion des pneus. Un sacré défi en perspective pour les équipementiers ! Et un gros souci pour les véhicules à batteries, net tement plus lourds que leurs pendants thermiques. En prime, les véhicules Euro VII électriques devront être en mesure de donner un état de santé de leurs packs de batteries de traction via l’OBD. Une me sure destinée à rassurer le marché de l’occasion. Une des préoccupations relevées par l’UE avec Euro VII est l’existence de systèmes annihilant les équipements de post-traitement et l’inviolabili té des compteurs kilométriques. La Commission considère la résolution de ces problèmes comme de la plus haute importance. Autre nouveauté, la masse des émissions de pol luants lors des phases de régénération des équipe ments de post-traitement (typiquement les filtres à particules) sera désormais prise en compte (en partant de la fréquence et de la durée des régé
nérations). Dans cette même logique, les seuils d’émissions de gaz tels que le protoxyde d’azote sont sévérisés (ils étaient déjà pris en compte de puis Euro VI-D, tout comme les émissions de CH4 issus des catalyseurs).
Pour clarifier les mesures, Bruxelles crée, fort perti nemment, un « budget » d’émissions pour les cycles équivalents à moins de 3 cycles WHTC, ainsi qu’un seuil pour les NOx en cas d’usage stationnaire. En lien avec Vecto, les impacts CO2 des semi-remorques et remorques seront également calculés. Il est aus si prévu l’introduction d’un OBFCM (on board fuel and energy consumption monitoring device), enre gistrant les données réelles d’utilisation pertinentes pour la détermination de l’énergie consommée (ap plicable aussi bien pour les véhicules électriques que thermiques). Ces données devront être trans mises via la prise OBD ou bien via radio à courte portée pour les contrôles routiers. Un dispositif venant en plus des calculs théoriques Vecto. Il est acté que les utilitaires lourds de catégorie d’homo logation N2, d’un PTAC compris entre 3,5 t et 4 t au ront un classement dit véhicule Euro 7ext (comme extended en anglais), dérivé de la norme automo bile Euro 7 (qui elle-même se scindera en plusieurs sous-classements en fonction des objectifs et des fonctionnalités des véhicules). En annonçant le maintien du thermique dans le vé hicule industriel, la Commission européenne va don ner la possibilité aux constructeurs de poursuivre leurs productions de poids lourds diesels. Ils devront surtout revoir leur feuille de route, certains ayant exclu le thermique de leur catalogue. Les cartes sont redistribuées et la transition énergétique reste dans une phase transitoire.
Jean-Philippe Pastre pastre@trm24.fr
L’étude réalisée par la FFC est désormais accessible via une plateforme numérique. Il s’agit d’un outil d’aide à la décision en ligne, notamment pour les gestionnaires de flottes de véhicules industriels de plus de 3,5 t.
Lancée lors de la dernière édition de Solu trans, l’étude paneuropéenne VIsion’AIR, por tant sur le mix énergétique européen des véhicules industriels et réalisée par la FFC et BIPE-BDO Advisory, devient un véritable outil de visualisation et peut être consultée sur une plateforme numérique. « Aujourd’hui, nous offrons aux utilisateurs une nouvelle expérience de l’étude, plus ergonomique et interactive », indique la FFC qui avait présenté dans un premier temps VIsion’AIR dans un ouvrage papier Road-book des nouvelles énergies VI-VU.
Une mise à jour est en cours de développement, se lon les évolutions de la réglementation et les pro grès technologiques. Plus concrètement, la plate forme VIsion’AIR simule l’évolution des coûts des motorisations selon différents usages, par catégorie de véhicules et par pays européen. L’outil projette également les parts de marché des différentes mo torisations à moyen terme par type d’usage, par ca tégorie de véhicule et par pays européen.
Ces résultats s’appuient sur de nombreuses hypo thèses techniques et économiques, alimentées par des représentants de la filière au grand complet, à savoir les constructeurs VI, les équipementiers, les énergéticiens, mais aussi les clients finaux trans porteurs, qui constituent clairement un paramètre
fondamental dans l’évolution du marché. Le tout est compilé, vérifié et analysé par les experts BIPEBDO Advisory.
La FFC donne quelques exemples, comme l’hy pothèse d’un investissement dans un utilitaire. VIsion’AIR met ainsi en avant 7 motorisations. Le véhicule à batterie aura l’un des TCO les plus avan tageux, selon la plateforme. Pour un usage munici pal, elle propose 9 motorisations alternatives dis ponibles en 2030. Cinq d’entre elles présenteront un TCO inférieur à celui du gazole, conclut-elle.
VIsion’AIR permet d’appréhender des choix pos sibles de motorisations, par usage ou par véhicule ; elle facilite la comparaison des TCO des différentes motorisations disponibles par véhicule ; elle pré sente les informations sous forme de graphiques simples et lisibles, accessibles en un coup d’œil ; elle offre une grande souplesse d’utilisation : interactivi té des indicateurs, information structurée, simplicité des menus déroulants ; elle permet d’exporter les graphiques pour les intégrer à un document ; elle fournit des indicateurs au plus près des besoins.
À l’époque, encore inconnu en France, le Ford F-Max 500 avait créé la surprise en 2019 lorsqu’il s’octroya le titre de Camion européen de l’année à l’occasion du salon Solutrans. Puis, la crise Covid-19 est passée par là, et il a fallu attendre 2021 pour le voir débarquer enfin sur nos routes de métropole. Patience récompensée, puisque nous avons pu rouler à pleine charge sur notre parcours en Nord Dauphiné. Une prise en main riche d’enseignements. Avis à la concurrence, pour la préservation de votre moral : ne lisez pas ce qui suit !
En apparence, rien d’original : châssis échelle de 8 mm d’épaisseur, pont rigide à simple réduction, essieu avant rigide, l’ensemble reposant sur les lames paraboliques avec coussins pneumatiques avec réglage en hauteur pour l’essieu arrière, boîte robotisée ZF TraXon 12 rapports avant à embrayage simple à friction, moteur diesel suralimenté à injection par rampe commune haute pression et suralimentation à géométrie variable, le tout avec l’enchaînement
classique de la dépollution Euro VI, à savoir EGR, catalyseur d’oxydation, filtre à particules et réduc tion catalytique sélective SCR avec réactif AdBlue. La cabine est en tôle d’acier à structure autopor tante reposant sur une suspension de cabine mixte mécanique et pneumatique. Que du classique on vous dit. Et pourtant, la satis faction est de mise. L’ensemble est incontestable ment homogène. On n’attendait pas les ingénieurs de Ford à ce chapitre, car oui, c’est bien un modèle
développé et produit en Turquie par Ford Otosan (coentreprise entre le groupe Koç – bien connu dans le monde automobile et dans l’autocar – et Ford Deutschalnd Holding en qualité de filiale de Ford Motor Company, chacun respectivement à 41 % du capital). Le moteur est entièrement produit à Es kisehir (Turquie) et le camion est assemblé, avec sa carrosserie produite sur place, à l’usine de Kocaeli (Turquie). Pour ce qui est des configurations, le choix proposé est pour l’heure limité. Nous étions, une fois chargés (grâce à l’assistance de BFT Location), quasi ment au PTAC maximal autorisé sur route (39 125 kg sans l’équipage). Notez que le tracteur seul fait son poids, avec 8 581 kg tous pleins faits.
Son couple plantureux tient peut-être à ses cotes d’alésage et de course (130 x 160 mm), qui en font un longue course très typé. Pour le reste, c’est du classique, avec un six cylindre en ligne, 4 temps, diesel suralimenté par turbocompresseur à géo métrie variable de 12 740 cm3, à refroidissement liquide, distribution par arbre à cames en tête et 4 soupapes par cylindre, injection par rampe com mune haute pression. La dépollution associe EGR et SCR avec réactif AdBlue, puis les traditionnels catalyseurs d’oxydation et filtres à particules. Mais quelle santé, quelle disponibilité ! Précisons que nous avons roulé tout le parcours en paramétrage de chaîne cinématique mode normal. Nous n’avons
pas testé le mode Eco bridant la puissance à 450 ch par limitation de la plage de régimes.
Le couple annoncé est de 2 500 Nm entre 1 000 et 1 450 tr/mn, et on veut bien croire que ces newtonsmètres sont bien réels tant ça pousse fort. Ce mo teur combine vigueur, disponibilité et un couple stupéfiant, le tout sans artifice du genre turbocom pound. En prime, il le fait avec bonne volonté et bonne éducation, sans vibrations ni grognements. Une révélation ! Encore du classique à ce chapitre, et comme pour l’ensemble du camion, c’est bien fait.
Ici, pas d’excentricités : Ford Otosan a recours actuel lement à une boîte robotisée ZF TraXon 12 rapports 12TX2620 à prise directe avec une ouverture de 16.69 à 1. Le rapport de pont, à bord du modèle de la prise en main, était de 2.47:1. La monte pneuma tique 315/70R22.5 est d’ailleurs la seule à laisser le choix des rapports de pont. En 315/80R22.5, le seul rapport de pont proposé est alors le 2.64:1. L’em brayage est monodisque à sec et, sur ses dernières générations de TraXon, ZF a modifié l’architecture de commande de l’embrayage afin de le préserver des surcharges éventuelles. Par précaution, on re passera au point mort (N) lors des phases d’arrêt ou d’attente pour préserver la butée d’embrayage. Sur cette définition, le ralentisseur hydrodynamique se condaire ZF Intarder 3 est seulement en option, ce dernier représentant une tare de 82 kg. La sélection des rapports se fait classiquement, via un levier in tégrant une bague sur la colonne de direction.
Comme trop souvent, la jauge à huile manuelle n’est pas accessible depuis la grille de calandre. Dommage…
La réactivité aux injonctions est bonne et l’ensemble a donné satisfaction, osant parfois des passages har dis mais qui se sont révélés payants.
Cette évolution est une constante sur tous les vé hicules diesels pris en main depuis 2020 : les stra tégies de sélection de rapport sont de plus en plus osées, mais finalement pertinentes face aux couples moteur disponibles. Seule bizarrerie observée après la barrière de péage de Saint-Quentin-Fallavier sur l’A43 en Isère : le F-Max 500 a privilégié le maintien sur le 11e rapport dans la montée, alors que la 12e était prenable. Une lacune du système de program mateur de vitesse adaptatif ? Pourtant, nous n’avons pas joué avec le rétro-contact à la pédale d’accéléra teur. Très franchement, nous n’en avons pas eu besoin sur le parcours, la course de la pédale gère très bien les consignes à l’ensemble moteur-boîte. La progres sivité de l’embrayage en manœuvre donne satisfac tion. Le véhicule ne rampe pas de lui-même dans les bouchons ou en circulation lente, il faut une action sur l’accélérateur pour le faire avancer. Précisons que nous avons sélectionné le mode Normal, sans ac tions manuelles de notre part, comme de coutume pour nos prises en main. Notez que le mode Eco pla fonne la vitesse à 85 km/h et la puissance à 450 ch par action sur le limiteur de régime moteur.
Un air de Ford Pour qui douterait de l’origine Ford de la concep tion, il suffit de prendre place au poste de conduite. Les afficheurs, les commandes d’éclairage, tout évo quera un univers familier aux utilisatrices et utili sateurs de Fiesta, Tourneo Connect et autres Focus
contemporaines. Ce qui déroutera davantage est l’usage d’abréviations pas toujours intelligibles en français ni conformes aux usages internationaux. C’est particulièrement vrai pour les indications de l’ordinateur de bord ou celles du programmateur de vitesse. Un petit passage et une relecture chez Ford Europe (voitures) résoudraient ces traductions hasardeuses ! La peinture mériterait une tension de vernis plus soignée, un effet peau d’orange étant visible sur notre véhicule de prise en main. Les ac costages des panneaux de carrosserie sont assez lâches, mais aucun bruit parasite, que ce soit de structure ou aérodynamique, n’est venu perturber le roulage. Le contrat est donc rempli, il manque ce pendant ce petit truc qui entraîne l’enthousiasme. Quant aux ajustages et à la qualité des plastiques à l’intérieur, ils sont absolument sans reproche. Ford a bien analysé la concurrence : l’accès en ca bine est facile grâce à des marches larges et à l’im plantation bien verticale, et les portes ouvrent très largement (à angle droit), ce qui assure un bon dé gagement. La cabine intègre dans ses flancs deux coffres de rangement en série. La rétrovision est bonne et fort conventionnelle. Les coques de ré troviseurs sont grandes et un brin encombrantes, mais les mâts bien écartés préservent le champ de vision à l’arrivée aux ronds-points. Pour le moment, Ford Trucks France ne prévoit pas de déclinaisons de cette cabine. Le choix est donc limité à une défi nition culminant à 3,918 m de hauteur pour 2,54 m de largeur hors-tout. Deux empattements sont tou tefois disponibles : 3 600 mm en définitions stan dards et 3 750 mm sur la version F-Max L.
côté gauche, devant l’un des deux réservoirs option (ou dans le pack Luxe).
Le moteur est bien développé par Ford et il est fabriqué en Turquie dans la co-entreprise Ford Otosan. Le turbocompresseur est unique et à géométrie variable.
Moteur : Ford Ecotorq, 12,74 litres ; alésage x course : 130 x 160 mm ; 6 cylindres en ligne suralimenté par turbocompresseur unique à géométrie variable. Refroidissement liquide. Injection haute pression à rampe commune. 4 soupapes par cylindre, arbre à cames en tête sur culasse monobloc. Couple de 2 500 Nm entre 1 000 et 1 450 tr/mn. Puissance de 500 ch de 1 450 à 1 870 tr/mn. Dépollution Euro VI-E avec recirculation des gaz d’échappement EGR et SCR avec réactif AdBlue. Catalyseurs d’oxydation et filtre à particules.
Transmission : boîte robotisée ZF TraXon 12 rapports 12TX2620 à prise directe. Ouverture de 16.69 à 1. Le rapport de pont (modèle de la prise en main) : 2.47:1 ou 2.64:1 suivant la monte pneumatique. Embrayage monodisque à sec piloté, diamètre 430 mm.
Liaisons au sol : pneumatiques 315/70 R 22.5 sur le modèle de la prise en main. Existe en 315/80 R 22.5. Continental Conti EcoPlus HS3 (indices 156/150 L) à l’avant et Continental Conti EcoPlus HD3 sur le pont moteur (indices 154/150 L). Jantes en alliage léger en option, ou avec pack Luxe. À partir de janvier 2023 : disponibilité de pneumatiques en largeur 385. Direction à assistance hydraulique. Pont arrière à suspension pneumatique à 2 coussins. Essieu avant à lames paraboliques de 7,5 t de capacité (modèle de la prise en main). Essieu avant de 8 t de capacité en série à partir de 2023. Ford F-Max LL (pour Low Liner) : pneumatiques taille basse de série 60 et sellette à 940 mm (contre 1 100 mm ou 1 200 mm en définition standard). Suspension pneumatique intégrale.
Les réservoirs sont ici les principaux bénéficiaires de cet allongement, avec 150 l de combustible supplémentaire. Notez que la définition de base (à 3 600 mm d’empattement) prévoit d’office pour la France les doubles réservoirs, soit 1 050 l de gazole, complété par un réservoir de 75 l d’AdBlue. La ver sion longue ne dispose pas des carénages intégraux. Pour la cabine, le choix se limite aux équipements, deux niveaux sont proposés : un standard départ usine et une définition Pack Luxe incluant éclairage intégralement à diodes LED, jantes en alliage léger, siège passager suspendu avec accoudoirs réglables, équipement TPMS – bientôt obligatoire –, carénages intégraux.
La semi-remorque était fort classiquement un four gon Kässbohrer à essieux BPW relevables montés en tridem. L’équipement de freinage de la semi-re morque était signé Wabco. La monte pneumatique de la semi était en Bridgestone R179 AS 385/65 R 22.5. L’accès à la plateforme arrière se fait unique ment via le côté droit. Le déflecteur gauche étant fixe, cela peut devenir gênant pour les métiers du transport sous température dirigée ou en benne. Un point à améliorer. Pour le montage d’une pompe hydraulique, une réserve sur le longeron est pré vue pour installer le réservoir en côté gauche der rière la cabine. Les prises de force optionnelles ont une capacité de 600 Nm ou 1 000 Nm. Les options usines prévoient la prédisposition ADR EX/II et FL.
Bonne tenue de route, cabine bien équipée La combinaison jantes en alliage léger, pneus taille basse en série 70 et essieu avant de 7,5 t a •••
L’accès à la cabine est très bien conçu. On apprécie l’emmarchement bien droit.
certainement dû jouer en faveur du ressenti de conduite. En effet, le filtrage s’est avéré pleine ment satisfaisant. En outre, l’ensemble a affiché de belles stabilité et insensibilité aux effets de roulis et de tangage. Nous avons évoqué précédemment la fermeté de la direction, mais une fois le volant tenu à deux mains, tout se contrôle avec aisance et précision. Dame, un volant de camion n’est pas une console de jeux vidéo ! Alors, on aurait envie de dire : ne changez rien ! D’autant que la démulti plication est très directe, ce qui ajoute à l’agrément et au bon « toucher de route ». En prime, l’épais seur et la matière recouvrant la couronne du volant sont agréables. Le revêtement cuir est ici propo sé en série. La suspension de cabine prévoit d’of fice un équipement mixte mécanique et coussins pneumatiques. L’amortissement, comme le contrôle des mouvements de la cabine, est très bon. Ce qui impressionne vraiment, c’est l’insonorisation, pro prement étonnante. Le confort lors du roulage en profite clairement, et l’ensemble s’est révélé parti culièrement docile et facile à mener.
Le volume habitable est fort satisfaisant et l’inso norisation excellente. Ce point est d’autant plus impressionnant que le modèle ne dispose pas de double vitrage. En termes d’équipement, c’est cor rect, et Ford a la générosité de jouer les Monsieur Plus en termes de dotation de base : 2 prises (une 12 V et une 24 V) sont prévues en face avant de la planche de bord, une seule USB (cachée sous la planche de bord). La lèvre porte-ticket est particu lièrement bien conçue. La climatisation a parfaite ment assuré son rôle lors de cette chaude journée d’automne. Son utilisation est facile. En revanche,
le chauffage additionnel air/eau demeure une op tion. Pour les maniaques de la connectivité, Apple CarPlay et Androïd sont accessibles depuis l’équi pement tactile de bord. L’équipement est plutôt complet, car il comprend d’emblée la trappe de toit vitrée avec coulissement à commande électrique. La position de conduite se trouve facilement et les amplitudes de réglages sont largement calculées. Quant à la circulation à bord, elle est facilitée par un tunnel central de faible hauteur. Liberté de cir culation et garde au toit en profitent. En fait, les seuls vrais griefs concernent les rideaux de cabine, vraiment trop perméables à la lumière, et les in terrupteurs de fonction aux pictogrammes un peu sous-dimensionnés, ce qui en rend la lisibilité et l’intelligibilité juste moyenne.
À ce jour, le réseau Ford Trucks France compte 15 distributeurs et le territoire de la France mé tropolitaine devrait être totalement couvert d’ici 2025. S’il y a encore des zones d’ombre, on peut tout de même saluer la performance des équipes du réseau qui, en un an (de septembre 2021 à sep tembre 2022), ont réussi à couvrir 75 % du terri toire. Quant aux rapports délivrés par la téléma tique Ford ConnecTruck, ils sont assez basiques, mais ils ont le bon goût d’être proposés en série sans abonnement supplémentaire tout en dispo sant des fondamentaux (comme la géolocalisa tion). Pour la périodicité de la maintenance, la boîte ZF TraXon a des intervalles de vidanges d’huile de boîte (13,5 l sans ralentisseur secondaire, 23, 5 l avec ZF Intarder 3) à 3 ans et/ou de 340 000 km (usages à 44 t de PTRA, vitesses moyennes réelles comprises entre 20 et 60 km/h) à 540 000 km
bien finie. L’ergonomie rappelle les voitures Ford. interrupteurs aient de petits symboles.
(usage autoroutier à plus de 60 km/h de moyenne effective, jusqu’à 40 t de PTRA). Sinon, c’est une vi site annuelle en atelier.
Un camion convaincant Soyons clairs : c’est une révélation ! Le constructeur ne s’étant plus frotté aux grands routiers depuis les temps lointains et héroïques du Ford Transconti nental, on ne s’attendait pas à un retour à ce ni veau d’entrée de jeu. Par son positionnement-prix et ses caractéristiques générales très classiques, ce n’est pas a priori un modèle à effet waouh. Oui, il y a deux ou trois points perfectibles en termes de télé matique ou dans l’épaisseur des rideaux de cabine. Pourtant, il nous a très favorablement impression nés et son homogénéité est remarquable. Le résul tat est extrêmement convaincant et donne fran chement le sourire au conducteur. Enfin un moteur Euro VI-e qui ne se retrouve pas anesthésié électro niquement ! Enfin un camion qui se conduit à deux mains et qui ne prétend pas prendre votre place ! Ce moteur incroyablement volontaire est combiné à une qualité d’insonorisation qui rend les parcours agréables. Sous son allure de « machine à rouler » façon Renault Premium, il recèle un vrai tempéra ment de grand routier prêt à affronter toutes les dé nivellations de notre réseau routier. Et puis, c’est as sez amusant de rouler dans un camion « exotique », surtout si cela ne se paie pas en désagréments au quotidien. On sent les équipes de Ford Trucks France (pas si novices que cela dans le monde du poids lourd lorsque l’on regarde certains curriculum vitæ) très motivées pour se faire entendre auprès de Ford Otosan afin de faire évoluer le produit et
remédier à ses (rares) menues faiblesses. Ce F-Max ne cherche pas à faire des effets, mais le bilan final demeure excellent. On est tenté de faire le parallèle avec les automobiles Dacia ou Skoda : positionné rapport prix-prestations, ce modèle finit par em porter l’adhésion tant l’ensemble est homogène et sans défaut majeur. Il en donne pour son argent, et même davantage grâce à un excellent moteur plein de vie et de bonnes manières. Il réussit le test ul time, le plus irrationnel peut-être : à l’issue de notre parcours, on a juste envie de refaire un tour et d’ac croître la difficulté pour voir jusqu’où il peut aller ! Chers concurrents, si vous avez lu cette prise en main, vous voilà désormais prévenus.
Jean-Philippe Pastre pastre@trm24.frLa prise en main dans son intégralité à découvrir sur :
La
Hyliko a acheté le brevet de la pile à com bustible hydrogène à GreenGT pour pou voir réaliser ces rétrofits. Son hydrogène SupergGreen repose sur de la thermolyse de résidus de biomasse. En chauffant la biomasse en absence d’oxygène, on obtient d’une part un mélange de gaz riche en hydrogène appelé syngaz, et d’autre part un produit solide appelé le biochar, indique Hyliko. Le syngaz est purifié pour ne re tenir que l’hydrogène. Le biochar séquestre, sous forme solide et stable pendant plus de mille ans, près de la moitié du carbone présent dans la bio masse, permettant ainsi une empreinte carbone
négative. Avec ses nombreuses propriétés, il peut être apporté en amendement des sols en agricul ture ou en horticulture.
L’alternative du mix énergétique Adrien Berto, membre du directoire du groupe Ber to, a cru dans la solution Hyliko dès le départ : « En 2021, nous avons choisi de franchir un nouveau cap avec la création de l’offre Flexy Green, visant à propo ser à nos clients un mix énergétique pour s’adapter à leurs besoins et aux contraintes ZFE. Aujourd’hui, nous faisons le choix du partenariat avec Hyliko, convaincus par son approche locale, sa solution
carbone négatif, mais égale ment par l’approche concrète et l’expertise de son équipe dirigeante sur les métiers du transport et de l’énergie ».
Pour Patrice Péricard, P.-D.G. de Bert&You qui va acquérir 3 camions hydrogène Hyli ko fin 2023 : « avec plus de 14 millions de litres de gazole consommés chaque année, notre groupe est conscient que les alternatives aux énergies fossiles sont deve nues prioritaires. C’est la raison pour laquelle nous avons décidé depuis 8 ans d’engager un travail de fond en vue de tester et d’utiliser toutes les pistes qui représentent des perspectives encourageantes. Cette contribution vise autant à répondre aux enjeux qui s’imposent à nous qu’à aligner nos actes avec nos en gagements RSE ».
Un réseau dédié production et distribution
Hyliko développera son propre réseau de stations de distribution d’hydrogène avec une production directement sur le site. La première station verra le jour dans le sud de Paris, lors du lancement du premier camion hydrogène en septembre 2023. Le prestataire a pour objectif d’ouvrir une quinzaine de stations en 2025. Une solution hydrogène poids lourd clé en main sera proposée. Le partenariat commercial vise à mettre en place des services de gestion incluant la maintenance et l’entretien des véhicules hydro gène et un réseau de stations d’avitaillement en hydrogène super vert. « La solution Hyliko s’impose comme l’atout majeur de la démarche RSE des trans porteurs. Parce que notre solution présente un bilan carbone négatif, 45 % de camions Hyliko dans un parc suffisent pour atteindre la neutralité carbone. Au-delà
de son intérêt environnemental, cet hydrogène super vert local est un facteur d’indépendance énergétique et de résilience des territoires, une réflexion essen tielle dans le contexte géopolitique actuel », souligne la start-up.
Hyliko a décidé de conclure des partenariats avec des équipementiers comme Plastic Omnium. Un contrat de 315 réservoirs hydrogène haute pres sion a été signé afin d’équiper 45 camions d’ici fin 2024. Le partenariat technique et commercial per mettra le développement de nouveaux systèmes de stockage hydrogène pour augmenter l’autono mie des poids lourds de près de 60 %, la portant à plus de 750 kilomètres. Pionnier de la mobilité hydrogène depuis 2015, Plastic Omnium, au travers de sa division New Energies, développe et produit des systèmes hydrogène complets adaptés à toutes les mobilités, du stockage jusqu’au système de ges tion, et intégrant les modules de piles à combus tible. « Nous nous réjouissons du fait qu’Hyliko ait choisi nos systèmes de stockage pour accompagner le développement de solutions très exigeantes de décarbonation Cette annonce confirme une nouvelle fois l’existence d’un marché porteur de la mobilité à l’hydrogène pour le transport commercial », a déclaré Marc Perraudin, directeur général de Plastic Om nium New Energies.
Hyliko a reçu des intérêts marqués de la part de ses clients pour plus de 350 poids lourds hydrogène, dont Point.P, Bert&You et Berto. Le prestataire se lance un véritable et grand défi : pour 2030, il vise la décarbonation de 1,5 million de tonnes de CO2 par an et 10 % du marché européen des poids lourds hydrogène, soit environ 15 000 poids lourds et une centaine de stations de distribution, prenant ainsi une longueur d’avance sur les constructeurs histo riques qui ne devraient pas lancer leur camion hy drogène avant 4 à 5 ans. Hyliko nous a révélé qu’il était toutefois en discussion avec les constructeurs pour vendre des véhicules hydrogène neufs pour fin 2024.
eMAG Transport : Hyliko fera rouler les premiers camions hydrogène en France dès l’an prochain, le rétrofit que vous avez choisi est-il la meilleure solution technologique et économique pour accéder à l’hydrogène ?
Lionel Bertuit : C’est en tout cas l’ambition d’Hyliko. Dans notre vision pour décarboner le transport routier de marchandises, l’une des solutions est de passer par l’hydrogène. Pour éviter le phénomène de la poule et de l’œuf, nous avons décidé d’assembler les premiers véhicules. Pour accélérer une filière qui est naissante, autant en France qu’en Europe, nous avons décidé de partir sur le rétrofit, sur la base de la loi de mars 2020 qui autorise à sortir une chaîne cinématique diesel et de mettre une pile à combustible hydrogène pour produire l’électricité sur le véhicule. Cela permet de réduire l’impact CO2, puisque nous allons émettre entre 60 % et 80 % de CO2 de moins sur le rétrofitage versus un véhicule neuf. C’est la double vertu. C’est un procédé simple pour le transporteur. Nous allons prendre le véhicule de son parc circulant qui correspond à son cahier des charges. Nous adaptons une chaîne cinématique hydrogène. Cela nécessite cependant une ingénierie assez complète pour intégrer le circuit électronique et le circuit de refroidissement, les piles à combustible et les batteries ou encore les réservoirs hydrogène. À partir du moment où le véhicule a cinq ans et un jour, tous les camions peuvent être rétrofités. Nous nous sommes focalisés sur les véhicules lourds de 26 tonnes, demain de 32 tonnes et tracteurs 44 tonnes. Nous sommes convaincus que l’hydrogène est pertinent sur ces segments. Nous avons fait un choix français, puisque nos études de rétrofitage se sont portées sur la gamme Renault Trucks.
eMT : L’hydrogène va-t-il devenir l’énergie pour le transport routier ?
L. B : L’hydrogène vert, renouvelable, va faire partie du mix énergétique. Nous restons dans le schéma qui va constituer à dire : il n’y a pas une solution unique devant les enjeux en termes d’énergie. Nous voyons l’hydrogène pour la mobilité avec
deux critères essentiels pour le choix du transporteur dans son mix énergétique. Le premier, le plus évident, que nous retrouvons dans l’hydrogène, c’est le besoin d’autonomie (les premières générations atteignent les 500 km, d’ici 2 ans les 1 000 km) et de charges utiles (équivalentes à celles d’un diesel).
Le second critère, que l’on retrouve en discutant avec les transporteurs et les gestionnaires de flotte, c’est la disponibilité insuffisante d’électricité dans certains endroits, en France et en Europe. Même si le choix se portait sur la batterie, les transporteurs nous disent qu’ils n’ont pas assez de capacités dans le réseau pour pouvoir installer 30 à 40 prises électriques. L’hydrogène ne sera pas uniquement pour la longue distance, contrairement à ce que l’on entend. Notre premier client est Saint-Gobain Distribution Bâtiment France (ex-Point.P) pour de la livraison en région parisienne. Saint-Gobain, qui utilise aujourd’hui du gaz et du B100, a réalisé des tests sur des électriques et a conclu que l’hydrogène pouvait lui apporter la polyvalence que l’on n’a pas avec la batterie. Avec l’hydrogène et la pile à combustible, ils peuvent terminer leur tournée chaque jour sans devoir trouver une prise pour recharger, comme avec l’électrique. Il y a comme un consensus qui dit que l’énergie de demain sera l’hydrogène pour le transport routier de marchandises. Après, il y a un débat plus large sur la quantité d’énergie qu’il va falloir pour décarboner l’industrie. Certains disent qu’il va falloir se concentrer sur l’industrie avant de s’occuper de la mobilité. En tout cas, concernant l’hydrogène, le gouvernement français a mis dans les usages prioritaires le transport routier de marchandises.
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eMT : En devançant les constructeurs historiques sur l’hydrogène (ils ne lanceront leur camion hydrogène que dans 3 à 5 ans), vous devenez un sérieux concurrent. Vous définissez-vous comme constructeur ?
L. B : De fait, nous devenons constructeur. Mais ce n’était pas notre ambition première. La réflexion que nous avions en 2020 était de dire : la décarbonation des secteurs les plus émetteurs de gaz à effet de serre que sont la production d’électricité et la mobilité au sens large passera par l’hydrogène renouvelable, autrement dit l’hydrogène vert. Quand l’analyse a été affinée début 2021, nous avons décidé de monter un réseau de stations pour la mobilité lourde, en l’ouvrant aussi aux voitures et aux utilitaires. Nous avons également convenu d’aller voir les constructeurs pour acheter les camions et les proposer au kilomètre. Sauf que les mêmes constructeurs qui disent oui à l’hydrogène ont prévu de lancer leur camion hydrogène d’ici 4 à 5 ans. À partir de ce constat, des partenariats ont été noués pour assembler des premiers véhicules et démarrer la filière de l’hydrogène verte pour le transport routier de marchandises.
eMT : Il y a un débat sur l’hydrogène, à savoir si sa production sera de l’énergie verte. Vous proposez de l’hydrogène vertueux ?
L. B : Nous avons fait le choix d’une technologie différente pour produire de l’hydrogène. Nous utilisons du résidu de biomasse avec un procédé de thermolyse, c’est de la pyrolyse. Nous faisons chauffer cette biomasse à 500 degrés sans oxygène. Il en ressort à la fois un gaz riche en hydrogène et le biochar, un charbon végétal qui aura séquestré durablement 50 % du CO2 contenu dans la biomasse. Cela nous permet d’annoncer que quand nous utilisons de l’hydrogène dans un camion, nous sommes dans la catégorie zéro émission puisqu’il ne va recracher que de l’eau.
eMT : Vous proposez non seulement un véhicule rétrofité, mais aussi une offre de distribution. L’idée est de mettre en place un réseau de stations hydrogène ?
L. B : L’offre va s’appuyer sur 4 piliers : le premier est de monter dans des stations d’hydrogène dédiées à la mobilité avec ce procédé local à partir de biomasse, le second est de fournir le véhicule et de proposer la solution de financement, le troisième pilier est d’assurer la maintenance de ces véhicules, la filière est naissante, et le quatrième, le plus important puisque l’ambition est de décarboner le transport routier, est de certifier, de tracer toute l’empreinte carbone en analyse de cycle de vie. L’objectif est d’annoncer une empreinte carbone négative, avec un crédit carbone pour le transporteur ou le chargeur. Nous partons du sourcing de la biomasse en passant par la production d’hydrogène, la construction de la station, la déconstruction de la station pour l’empreinte carbone, la construction du véhicule, la déconstruction du véhicule, la consommation de l’hydrogène dans le véhicule. Nous amenons la preuve, pour ne pas faire du greenwashing au travers d’un certificat qui s’appelle crédit carbone et montre que l’empreinte est négative.
eMT : Vous vous lancez un véritable défi : en 2030, vous visez 10 % du marché européen des poids lourds hydrogène et une centaine de stations de distribution. Le rétrofit va-t-il prendre le dessus de la production classique de poids lourds ?
L. B : Pour atteindre ces objectifs, nous avons déjà anticipé que le rétrofit ne sera pas suffisant. Nous sommes avancés en discussion avec les grands constructeurs pour qu’ils nous fournissent les châssis neufs et pour que nous puissions mettre notre ingénierie et notre powertrain hydrogène Nous aurons donc les 2 offres, puisqu’il y a une vraie demande pour les deux. Selon les prévisions marché et la capacité à se déployer en Europe, les 15 000 poids lourds en hydrogène sont la fourchette haute du marché. Aujourd’hui, effectivement, il y a une fourchette plus basse, aux alentours des 5 000-7 000 véhicules. L’approvisionnement va être l’élément clé, et nous dépendons de la production.
De plus, notre procédé, qui a séquestré 50 % du CO2 au travers du biochar (utilisé comme amendement pour l’agriculture), est tracé, certifié, jusqu’à l’établissement d’un crédit carbone. Les transporteurs et les chargeurs vont pouvoir annoncer une empreinte carbone dite négative.
Nous sommes une plateforme multimarque, même si nous allons produire des véhicules. Tout dépendra ce qu’il y aura sur le marché. L’enjeu aujourd’hui est vraiment la production. Dans notre stratégie, nous envisageons donc des partenariats avec les constructeurs.
Propos recueillis par Hervé Rébillon rebillon@trm24.fr
Les dernières Rencontres de la Filière VI organisée par la FFC à Lyon ont permis de mettre en avant la semi-remorque dans le contexte de la transition énergétique. Souvent oubliée, elle fait désormais partie de ceux qui vont contribuer à décarboner le transport routier.
Pendant des années, la semi était le parent pauvre dans l’industrie du véhicule indus triel. Bien que mise en avant sur les salons transport, elle est vite oubliée entre chaque édition. Pour preuve, la feuille de route de Bruxelles sur la décarbonation ne la cite même pas, alors que c’est elle qui transporte les marchandises. Il a fallu attendre l’arrivée des sociétés de télématique pour qu’elle existe vraiment. Ainsi, Ekolis propose une hybridation de la semi en tenant compte de l’évo lution réglementaire (voir l’interview de Guillaume Perdu pages suivantes).
Avec la plateforme Infinity d’agrégation des don nées, Ekolis n’a pas attendu pour intégrer la semi dans la transition énergétique. Infinity va dans le sens d’une télématique durable, responsable et autonome, et se tourne vers la gestion des flottes multi-énergies pour s’adapter à toutes les marques et tous les métiers. « La plateforme est le pivot tech nique des solutions télématiques pour remorque sur mesure, connectées au système EBS, autonomes, et désormais alimentées par énergie solaire », indique la société. Ekolis a en effet développé une nouvelle version de son boîtier télématique, doté de batte ries connectées à des panneaux solaires. Ce disposi tif allonge sa durée de vie et permet une remontée plus fréquente des données (toutes les 5 minutes au lieu de 30 minutes), sans surcoût pour les trans porteurs qui n’ont plus besoin d’installer ni de rem
placer les piles. L’alimentation par batteries solaires remplace l’emploi de piles jetables de plus en plus chères, polluantes, contraignantes et chronophages pour les gestionnaires de parc. Ils ont désormais la garantie d’utiliser des boîtiers toujours connectés.
Ekolis a lancé un outil d’écoconduite basé sur l’ana lyse de la consommation de carburant par rapport à la tonne transportée. Il s’agit d’un nouveau mo dule de son application existante, qui permet aux transporteurs de suivre les points de tension au ni veau de la conduite de leurs conducteurs en leur attribuant un score hebdomadaire d’écoconduite. Basé sur l’analyse du poids du véhicule et de son chargement, de sa vitesse et du comportement du conducteur tout en tenant compte du dénivelé de la route, ce score doit permettre de sensibiliser les chauffeurs à une conduite plus économique à tra vers des stages ou des formations, dans un contexte d’augmentation du prix du carburant et des éner gies. L’application d’écoconduite peut être utilisée de façon autonome ou interfacée à Infinity. Prochainement, Ekolis mettra en avant son offre de systèmes de mesure de la pression pneumatique (TPMS) et proposera aux transporteurs d’échanger sur l’intégration et les gains de cette technologie qui deviendra obligatoire sur les poids lourds à partir de 2024.
eMAG Transport : La semi a été le parent pauvre pendant de nombreuses années. La connectivité permet de la mettre en avant ?
Guillaume Perdu : Il est important de souligner que la semi-remorque est la source de revenu de l’entreprise. Quand on a parlé de connectivité et de télématique ces dernières années, on s’est intéressé aux sources de coûts de l’entreprise : le camion, sa consommation et son conducteur. Aujourd’hui, sous la pression des chargeurs, le lien avec la marchandise, sa traçabilité, sa qualité, sont devenus des éléments essentiels dans la relation avec le client. Le transporteur devient un transporteur de données en plus d’être un transporteur de marchandises. Ce phénomène de marché place la semi-remorque au centre de la relation client. Sa connectivité s’impose comme le moyen de fiabiliser la donnée et de fluidifier le partage des informations liées à la marchandise en amenant l’indépendance vis-à-vis du tracteur.
eMT : Quelles sont les principales et dernières innovations en matière de connectivité sur une semi ?
G. P : L’ajout de sources d’énergie renouvelables sur la semi-remorque est sans aucun doute la principale innovation vue sur les différents salons en 2022. Ekolis a d’ailleurs présenté une solution pour alimenter les balises de géolocalisation via des panneaux photovoltaïques souples et légers. Je suis convaincu que l’ajout de ces nouvelles sources d’énergie va ouvrir le champ à des innovations de rupture, notamment autour de l’identification de la marchandise. En 2024, le nouvel environnement réglementaire, qui oblige les constructeurs de semi-remorques à équiper leurs nouveaux véhicules de capteurs de pression des pneumatiques, va favoriser le déploiement de ces équipements, sur le parc existant d’une part, et favoriser le déploiement de la télématique remorque d’autre part.
Cette opportunité devrait favoriser l’intégration de nouvelles solutions de service pour aller au-delà des suivis de pression ou de température. Je pense notamment aux solutions de verrouillage à distance, de caméras embarquées et des équipements connectés comme le hayon ou le chariot embarqué.
eMT : La connectivité est mieux accueillie, mieux acceptée aujourd’hui par les transporteurs ? G. P : Il y a une prise de conscience croissante mais encore modeste de la part des transporteurs. En réalité, le dirigeant dans sa relation avec la semi-remorque n’a pas encore forcément identifié l’importance de la digitaliser pour des questions de gestion de parc comme il pouvait l’avoir fait sur le tracteur. La notion d’optimisation d’exploitation du parc n’est pas encore largement répandue. Le vrai accélérateur de la connectivité de la remorque est la réponse à un meilleur service offert au client chargeur donneur d’ordre.
et dirigeant d’Ekolis
«
Si la semi est capable d’être décarbonée, c’est l’ensemble du transport qui en tirera les bénéfices »
La valeur ajoutée se situe plutôt dans une approche de connectivité, de lien direct avec le suivi de la marchandise, que dans une approche de simple gestion de parc au sens véhicule.
eMT : On évoque une accélération de la digitalisation, elle devrait être plus grande encore d’ici peu ?
G. P : 2024 marque l’obligation pour les constructeurs d’homologuer les semi-remorques avec des systèmes de pression de pneumatiques. C’est la première marche vers la connexion des capteurs de pression avec Le système EBS qui va se charger de transmettre l’information au tracteur. C’est un déclencheur. De la même façon que pour les véhicules moteurs, les constructeurs ont intégré progressivement l’informatique embarquée en équipement d’origine, le parc semi-remorque sera intégralement équipé d’ici à environ 15 ans. Cette évolution va générer une accélération de la digitalisation et favoriser la mise en place d’équipements sur le parc existant. C’est pour cela qu’Ekolis propose dès maintenant une hybridation de l’équipement du parc, pour adapter le matériel à l’usage et favoriser l’arrivée de cette télématique remorque native.
eMT : Les innovations ne cessent d’évoluer dans l’industrie du véhicule industriel, y compris dans celle de la semi. Vous préconisez une hybridation de la semi, en quoi cela consiste ? G. P : L’âge moyen du parc de semi-remorque en France est de 15 ans. Nous avons des renouvellements entre 7 et 8 % du parc tous les ans. Le parc remorque d’une entreprise de transport peut être divisé en 3 catégories : des véhicules récents, des véhicules en cours d’exploitation et des véhicules qui vont sortir du parc dans les 3 ans. Nous proposons
l’installation de boîtiers adaptés à la durée de détention du véhicule, pour optimiser l’investissement tout en fournissant les données nécessaires à l’exploitation du parc. Ainsi, la gamme Ekolis 360° propose des boîtiers connectés à l’EBS, des boîtiers à alimentation solaire externe plus durable ou des boîtiers totalement autonomes. Nous avons présenté cette gamme Ekolis 360° à Technotrans en octobre dernier, et nous la proposons désormais dans nos offres commerciales.
eMT : Une synergie entre les fabricants de semi et les constructeurs permettrait une meilleure utilisation de la télématique. Est-elle réellement possible et sous quelle forme ?
G. P : Il y a un manque autour de l’harmonisation. Le transporteur est souvent pris entre le marteau et l’enclume dans le choix de ses fournisseurs à cause de la technologie. Et ce n’est pas normal. La norme de 2024 va accélérer l’obligation pour les constructeurs moteurs et semi-remorques de se mettre autour de la table et de s’entendre, de s’accorder sur l’utilisation de la norme existante de transmission de données entre le tracteur et la semi. On peut comprendre qu’avec les défis technologiques qui attendent les constructeurs moteurs autour de l’énergie, la compatibilité télématique ne soit pas la priorité. Néanmoins, c’est un point sur lequel le marché devra obligatoirement progresser.
eMT : Le fait de se rapprocher du tracteur ne risque-t-il pas d’entraîner la semi dans la réglementation de décarbonation très stricte, sachant que l’émission de gaz à effet de serre n’est pas la même ?
G. P : Ce n’est pas un risque, c’est une trajectoire. De toute façon, la semi-remorque doit être intégrée dans la décarbonation du transport. Et, au contraire, voyons-le comme une opportunité d’embarquer les efforts technologiques autour de la semi-remorque. C’est le transport que nous décarbonons, et le transport, c’est un tracteur et une semi. Certes, c’est le tracteur qui consomme de l’énergie, mais si la semi est capable d’être décarbonée, c’est l’ensemble du transport qui en tirera les bénéfices. En les liant l’un et l’autre, nous aurons forcément une réduction des émissions sur l’ensemble. Et c’est nécessaire. C’est aussi de notre responsabilité à nous, sociétés de technologie, de proposer au monde du transport des solutions dans lesquelles la semi est actrice de la décarbonation.
Propos recueillis par Hervé Rébillon rebillon@trm24.fr
Depuis quelques années les traditionnelles cartes pétrolières qui permettent aux professionnels de la route de payer leur carburant évoluent rapidement. Elles deviennent multiservices. C’est le cas de la carte C2A, qui propose, au-delà du règlement du gasoil, une série de services : réservation de ferries, parkings sécurisés.
Alors que la plupart des cartes pétrolières s’adaptent à la transition énergétique, en proposant par exemple le paiement du gaz, certaines ont décidé de multiplier les services au quotidien pour les conducteurs routiers. Elles deviennent non seulement le moyen de paie ment, mais aussi un accès facilité à diverses tâches et services. C’est le cas de la carte C2A, précurseur de la carte multiservice en France. Elle se présente sous la forme d’une Mastercard, paramétrable et adossée à la plateforme MyC2A, qui permet de gé rer l’ensemble des frais liés aux déplacements des salariés : péage, hôtel, parking ou encore ferry.
La carte C2A a tout d’abord une fonction de paie ment du carburant, pour régler par exemple le ga soil des routiers qui rejoignent régulièrement l’Ita lie. Pas moins de 300 stations ont adhéré à l’offre avec des tarifs négociés. Au 1er janvier, elle permet tra aussi de récupérer la carbon tax italienne sur chaque litre de carburant, ce qui représente envi ron 25 centimes par litre, comme nous l’indique dans l’interview pages suivantes Gilles d’Huiteau, le dirigeant de C2A. La carte est également utili sable en Espagne, Belgique, Autriche, Slovénie et au Luxembourg.
D’autres services sont proposés, comme la réserva tion de parkings sécurisés pour poids lourds grâce
à un partenariat avec Trucks’nB. Elle donne ain si la possibilité aux transporteurs de réserver en quelques secondes des places depuis l’espace en ligne MyC2A. Cette offre a été enrichie d’une fonc tion de localisation des hôtels situés à proximité des parkings sécurisés, partout en France, pour sa tisfaire aux dernières obligations européennes (Pa quet mobilité) et éviter au conducteur de dormir dans son camion le week-end. Parmi les autres ser vices, C2A donne accès à la réservation de près de 1 200 lignes de ferry à travers l’Europe et l’Afrique du Nord auprès d’un très large choix de compagnies maritimes, ainsi qu’à la réservation de l’Eurotunnel entre Calais et l’Angleterre. Le conducteur peut an ticiper sa traversée en se rendant directement sur la plateforme MyC2A pour la réserver. C2A ne s’arrête pas là et compte élargir ses offres de service. La société s’intéresse désormais aux véhicules d’occasion. « Nous nous apercevons que le marché de l’occasion est en nette augmentation. On peut déjà imaginer les produits qui peuvent être adaptés et payés par la carte C2A sur le marché VO », nous a révélé Gilles d’Huiteau. Bref, l’équipe de C2A ne manque pas d’inspiration, et sa carte devrait évoluer au fil du temps, en suivant les mutations du secteur du transport routier.
eMAG Transport : La carte multiservice C2A a évolué, que proposez-vous de nouveau ? Gilles d’Huiteau : La base de notre carte reste le paiement du carburant. Nous avons ajouté deux autres services, avec la réservation et le paiement de ferry (1 200 destinations en Europe, 100 compagnies de ferries) et de l’Eurotunnel. Nous avons aussi développé un partenariat avec Trucks’nB pour accéder aux parkings sécurisés en France. Nous avons fait évoluer le support de la carte en septembre 2022, profitant du changement de chef de file. En soi, le fonctionnement de la carte n’a pas changé, elle reste une carte de débit professionnelle, nous faisons uniquement du B to B. Le client peut toujours choisir les produits et les services qu’il souhaite utiliser. Nous avons également élargi notre offre en Europe. Après l’Espagne, la Belgique, le Luxembourg, l’Autriche et la Slovénie, nous avons démarré un réseau en Italie. D’ici fin 2022, nous aurons 300 stations italiennes connectées à notre carte de paiement. L’objectif est de 500 à 600 stations l’année prochaine. En 2023, nous pensons avoir 3 000 stations pétrolières connectées à notre carte, ce qui fera bénéficier nos clients d’une facture leur permettant de récupérer facilement la TVA et les différentes TICPE.
eMT : Le principe de carte à puces reste l’atout majeur ?
G. d’H. : La carte apporte dans un premier temps une véritable sécurité. Il s’agit d’une carte à puces et non d’une carte à bande magnétique, beaucoup plus vulnérable. Le nombre de litiges chez les transporteurs et les flottes à cause de cartes copiées avec des cartes à bande magnétique est vertigineux. Avec la puce, nous avons une sécurité de pratiquement 100 %, car, malheureusement, les voleurs ont encore de l’imagination. Contrairement aux paiements par Internet ou par téléphone, le fait d’avoir une carte physique dans la main rassure l’utilisateur, ça se matérialise.
Elle est à l’image du monde du transport. Tout est en temps réel, toutes les transactions réalisées par le conducteur sont tracées. Certaines petites entreprises font des virements sur la carte juste avant que leur salarié ne fasse un plein de gasoil. En B to B, les choses évoluent plus lentement, tout d’abord parce que toutes les personnes ne sont pas équipées de téléphone professionnel, et ensuite parce que les mentalités évoluent différemment chez les transporteurs routiers. C’est un problème de culture, dans un monde qui reste encore traditionnel. Mais les choses changent. Aujourd’hui, les conducteurs utilisent de plus en plus de TLS et ont un tableau de bord digne de celui d’un pilote d’avion. Le chef d’entreprise préfère une carte de paiement à des remboursements au conducteur qui peuvent être source de litige. Le plus grand frein à l’expansion de la carte C2A, c’est l’habitude. C’est compliqué de changer les habitudes des gens.
eMT : C’est aussi une facilité pour la gestion comptable de l’entreprise de transport ? G. d’H. : Tout à fait. Nous proposons un logiciel, Inpensa, qui reporte toutes les transactions C2A quand elles sont compensées. À partir de ce moment-là, le service comptable de l’entreprise peut enregistrer toutes ces opérations. Les notes de frais sont classées selon des catégories (réparations, amendes, etc.), ce qui unifie tous ces frais, c est le paiement par carte. C’est un outil qui centralise tous les règlements. À partir de là, on peut s’apercevoir facilement d’éventuelles dérives de la part de certains conducteurs.
eMT : Vous dites que le principe de la carte C2A est en phase avec les mesures du Paquet mobilité qui est entré en vigueur en Europe ? G. d’H. : Nous essayons de suivre l’évolution réglementaire au niveau européen dans le monde du transport routier. La carte C2A est un bon moyen pour, par exemple, mettre à l’abri le conducteur et le chargement de tout problème,
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La carte de paiement de demain sera une carte multiservice »
dans la mesure où nous proposons des parkings sécurisés. Nous nous apercevons aussi que le marché de l’occasion est en nette augmentation. On peut déjà imaginer les produits qui peuvent être adaptés et être payés par la carte C2A sur le marché VO. Nous sommes à l’affût de toutes les opportunités dans la profession, comme des partenariats avec Trucks’nB. Nous devons concevoir un produit qui peut être payé à distance, ce qui implique que notre fournisseur s’adapte à ce système de paiement.
eMT : Quel est le profil d’entreprise de transport ? G. d’H. : Notre client type possède entre 1 et 50 camions, même si nous avons parmi nos clients quelques grandes entreprises. Elles choisissent notre carte pour l’absence de garanties requises, pour les prix attractifs de nos partenaires et pour une question d’assurance, car nous avons une assurance chauffeur incluse dans la carte C2A. Normalement, elle coûte entre 150 et 200 € par an. Avec la carte C2A à 18 €, vous bénéficiez d’une assurance qui permettra, pour un client français, en cas de problème de santé du conducteur hors de France de le rapatrier. Il est possible aussi d’envoyer un chauffeur en remplacement. Vu la pénurie de routiers en Europe, nous essayons de donner des instruments de fidélisation aux transporteurs.
eMT : Avec la carte C2A, vous suivez pratiquement le conducteur dans son travail au quotidien avec plusieurs services, lesquels ? G. d’H. : Nous proposons depuis 6 mois des parkings sécurisés via le partenariat que nous avons passé avec Trucks’nB. Le conducteur peut acheter en ligne une place de parking, il est garanti de l’avoir au moment où il arrivera. Cette évolution va se poursuivre. On ne va pas continuer à avoir des chauffeurs qui s’arrêtent dans des parkings qui ne sont pas surveillés et où il n’y a pas un minimum de services comme des douches et des toilettes propres. Il faut que le transporteur se rende compte que la nouvelle génération de conducteurs a changé et accepte beaucoup moins de choses que les générations précédentes. Nous proposons aussi la réservation de ferries en amont de la traversée. Nous avons la ligne transmanche Calais-Douvres, la ligne Allemagne-Suède et Italie-Espagne. Il s’agit principalement de toutes les lignes qu’utilisent aujourd’hui les conducteurs routiers en Europe. Le client va sur notre site web et choisit sa destination. Il a alors le prix en temps réel, et pour certaines lignes, le paiement vaut réservation. Sur d’autres, il doit attendre la confirmation.
eMT : L’évolution des services va porter sur quoi ? G. d’H. : Les idées ne manquent pas, il faut ensuite les mettre en place. Nous travaillons actuellement sur l’Italie. Nous mettons en place le paiement avec la carte C2A dans plusieurs dizaines de stations. Le paiement permettra aux clients de C2A de récupérer la TICPE italienne (carbon tax). Le prix du gasoil à la pompe vaut actuellement en Italie 1,85 €, la carbon tax est intégrée dans ce prix jusqu’au 31 décembre 2022. Normalement, avant cette évolution, il fallait avoir une facture pour la récupérer. Avec la carte C2A, nous leur donnons la possibilité d’obtenir une facture qui leur permettra de récupérer le prix de cette taxe qui avoisine les 25 centimes par litre. Ce sera possible à partir du 1er janvier 2023, si le gouvernement italien ne change pas d’avis d’ici là. Nous projetons aussi de lancer une assurance pour les camions d’occasion qui, contrairement aux camions neufs ou en leasing, ne possèdent pas d’emblée une assurance. Cette offre concernera les entreprises de transport qui n’ont pas les moyens de s’acheter des véhicules neufs. Ils pourront bénéficier jusqu’à 9 000 € d’indemnités en cas de pannes ou d’avaries.
La carte de paiement de demain sera une carte multiservice. La carte de paiement en tant que telle n’aura plus d’intérêt d’ici quelque temps.
Si vous l’attribuez à des services qui vont permettre une facturation, elle sera utile. Avec une carte de paiement aujourd’hui, vous avez des limites de garanties et de plafonds. J’ai des clients qui me disent : je peux travailler trois semaines, et la quatrième, je ne peux plus rouler car j’ai atteint mon plafond. L’avantage de la carte C2A, c’est qu’elle est sans contrainte, sans caution ni garantie financière, et allie sur un même support les avantages d’une carte carburant et d’une carte bancaire. C’est ce qui va faire la différence entre une carte pétrolière et une carte multiservice, avec toujours le support carte. Dans le futur, je ne dis pas que nous ne passerons pas au paiement par téléphone, mais d’ores et déjà, le client peut loger la carte C2A dans un téléphone
Propos recueillis par Hervé Rébillon rebillon@trm24.fr