Non, pas Sisyphe Quand on nous a parlé des perspectives qu’offriraient les nouvelles technologies – plus de temps, de liberté, le monde entier qui s’ouvre à nous – comme tout le monde, j’y ai cru. Ainsi, homme libre et nomade, je pourrais travailler quand je veux, comme je veux et où je veux. Depuis chez moi, ou au bord du lac, ou encore depuis Sestri Levante entre deux séances de bronzage… Je me voyais écrire mes mails et mes articles et les envoyer depuis ma plage préférée, un mojito à côté de mon laptop. Et comme tout le monde, je me suis vite fait rattraper par la réalité. Certes, on est plus nomades mais notre temps de travail s’est étalé autant que nos déplacements. Ce qui me rassure ou m’inquiète (ça dépend des moments) c’est de voir que je ne suis pas le seul à passer de plus en plus de temps devant mon écran. « Plus la modernité nous permet, en théorie, de gagner du temps dans nombre de nos actions, plus le « temps libre » semble se faire rare. Cette accélération permanente n’épargne personne, ni aucune sphère de nos vies. » Ça, c’est Hartmut Rosa, sociologue et philosophe allemand qui l’a dit. Dans notre cahier consacré au thème du travail, la sociologue Sophie Le Garrec, le confirme :« Un effet d’accélération et de court-termisme est observable dans tous les pans de notre quotidien. » Dans les années septante, Paul Virilio a été l’un des premiers à s’inquiéter de l’accélération du monde et à réfléchir à ses conséquences sur l'humain. Dans cette édition nous abordons la question du travail sous différents angles. La notion même du travail aujourd’hui, les nouveaux modes de travailler, les lieux, les tendances, les outils…. Ce qui m’a surtout frappé dans ce cahier Work, c’est cette phrase de Sophie Le Garrec : « Un travail agréable est avant tout un travail qui a du sens. » Maroun Zahar Rédacteur en Chef
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illustration Giorgio Pesce
édito ESPACES CONTEMPORAINS