Les Silos (part1)

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Les Silos

L’architecture industrielle, un patrimoine intemporel et adaptable, capable de répondre aux problématiques des sociétés qu’elle traverse.

Remerciements

A mon professeur encadrant Monsieur Boris WELIACHEW,

Pour sa disponibilité et son suivi assidu dont j’ai pu bénéficier. Pour son écoute face aux sujets que j’ai voulu aborder et aux valeurs que j’ai souhaité communiquer, et que je souhaiterais transmettre en tant que future architecte. Pour ses conseils expérimentés et bienveillants ainsi que ses remarques constructives qui m’ont permises de réaliser un travail appliqué.

Aux membres de mon jury,

Je souhaite adresser mes remerciements aux membres du jury pour l’attention qu’ils ont portée à mon sujet de mémoire, ainsi que du temps qu’ils m’ont accordé pour en discuter.

A ma mère,

Pour ses nombreuses relectures et ses précieux conseils.

A mes amis, futurs architectes,

Pour leur soutien sans égal qui m’a permise de mener à bien mon travail. Pour l’entraide dont nous avons fait preuve durant cette période de travail intense.

A mon école l’ENSA Paris Val de Seine,

Depuis 2018 mon cursus au sein de l’ENSAPVS à été riche d’enseignements et d’expérience projet. Grâce à la forme que mon cursus a pris, j’ai eu la chance de pouvoir partir à Copenhague avec mon groupe de projet de L2 en 2019. Ce voyage a évéillé chez moi cet attrait pour ces infrastructures.

Je remercie toutes les personnes qui m’ont accompagnées et apportées chacune à leur échelle leur soutien, grâce à qui j’ai pu présenter un travail abouti, le fruit de mes années d’apprentissage en études d’architecture et ma passion pour ce futur métier.

Introduction

I.Contexte du silo à grain

A. Naissance du silo à grains, une architecture inscrite dans une réalité économique.

a.Genèse et évolution du silo

b.Principes de fonctionnement

B.Nouvelle approche : artistes et architectes apprivoisent les silos

C.Patrimonialisation de l’architecture industrielle

II.Etudes de cas

A.Copenhague, The Silo, COBE

a.Contexte

b.Stratégies d’intervention

c.Limites et critiques

B.Marseille, le Silo d’Arenc, Eric Castaldi et Carta Associés

a.Contexte

b.Stratégies d’intervention

c.Limites et critiques

C.Wijnegem, Kanaal, Stephan Beel

a.Contexte

b.Stratégies d’intervention

c.Limites et critiques

D.Oulu, The Tervahovie Silos,PAVE architects

a.Contexte

b.Stratégies d’intervention

c.Limites et critiques

III. Le gain de la transformation

A.Historique et patrimonial

B.Concept

C.Technique, réglementations et normes

D.Empreinte environnementale et nouveaux critères d’habiter

Conclusion Table des Figures Bibliographie 1 27 53 Table des matières 72 74 68 5

INTRODUCTION

La France a été, grâce à ses fronts de mer, une grande puissance maritime, notamment lors de l’essor du commerce maritime et la période d’industrialisation. Ces événements ont beaucoup profité aux pays pourvus de bords côtiers. Les littoraux ont constitué la base des puissances historiques mondiales, et sont aujourd’hui animés par des organismes portuaires importants. La révolution industrielle a été le commencement d’un phénomène historique qui se poursuit de nos jours et qui a profondément marqué une grande partie de l’humanité. Les mutations récentes des économies et des activités maritimes, les évolutions des rapports de forces entre les grandes puissances, la place désormais réduite des marines de guerre dans les stratégies de défense nationale et européenne ont entraîné, dans les pays Européens, d’importantes restructurations de leurs espaces portuaires. En France cette ère de désindustrialisation a commencé dans les années 1970 et n’a cessé de se poursuivre, faisant apparaître dans le paysage des espaces portuaires en friche. Comment, pourquoi et pour qui garder un tel patrimoine ?

« Tout bâtiment est mortel. Le temps qui passe affecte l’enveloppe, mais plus encore l’usage.»1

Malgré l’extinction de l’activité industrielle en ces lieux, les contenants restent et témoignent de l’activité industrielle passée, c’est le cas des silos à grains. En 1962 (loi André Malraux) puis plus tard en 1984 (loi André Chastel) les lois font évoluer la conception du patrimoine architectural en pointant du

doigt la nécessité de le sauvegarder et incite à la rénovation se fondant sur le dépassement des principes d’une logique de préservation sélective. Laissées longtemps à l’abandon et sans intérêt, avant d’être finalement rasées, les friches portuaires ont dû attendre une révision des lois avant d’être sérieusement considérées et soumises à un autre destin fatal que celui de la démolition. Quand et comment la prise de conscience d’un potentiel patrimonial industriel s’est manifestée aux yeux des français ?

L’évolution de la législation sur la protection du Patrimoine Historique et esthétique Français donne un nouveau souffle aux friches industrielles portuaires en France qui font l’objet de restructurations urbaines croissantes. Cependant les infrastructures au cœur de ces friches se retrouvent confrontées à un paysage urbain différent de celui dans lequel elles sont nées. Elles se présentent alors comme des objets uniques à intégrer dans une société qui a évolué. Construits dans une logique purement fonctionnelle à leur époque, avec les défis techniques que cela suppose, ces bâtiments souvent monumentaux (silos, bunkers, bases sous-marine, halles etc.) doivent dépasser leur brutalisme apparent pour révéler leur aptitude à se transformer. Quelles sont les stratégies d’intégration des infrastructures industrielles pour le réaménagement des espaces portuaires aujourd’hui ? Comment composer un ensemble homogène dans un paysage urbain qui mélange deux échelles différentes, à savoir celle de l’industrialisation et celle de l’habi-

1Propos de Patrick Bloche

Adjoint à la maire de Paris dans Un bâtiment, combien de vie? Francis Rambert, février 2015

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tat (échelle domestique) ? Y-at-il une échelle de référence ? Si oui, laquelle ? Sur quelle échelle doit-on se baser : celle du silo, il faut donc s’adapter à ces objets uniques ou au contraire, celle de l’habitat, dans ce cas il faut adapter les silos aux futurs projets ?

De cette monumentalité est né le terme de « cathédrales industrielles» ou «châteaux de l’industrie» définissant ces architectures puissantes par définition. En dehors de la protection, c’est aussi la question du devenir de ce patrimoine qui se pose : Qu’adviendra-t-il des « cathédrales » du travail et du considérable patrimoine architectural, encore mal connus, hérités de l’ère industrielle ?

Ces ex-lieux industriels participent à la dynamique de reconquête des friches et présentent autant d’espaces capables qui se prêtent à de nouveaux scénarios. Quelles sont ses possibilités de valorisation et la nouvelle place qu’ils peuvent tenir dans le monde actuel ?

Pour faire face à ce qui est devenu obsolète, démolir fut longtemps une évidence, jusqu’au jour où elle fut contestée, laissant la place à l’hypothèse de la conservation. Ce n’est ni plus ni moins l’idée que l’on se fait de la modernité, elle-même en lien avec la prise de conscience des évènements marquants des périodes précédentes : Révolution Française, Guerres Mondiales, très dévastatrices, autant humainement que matériellement. C’est aussi parce qu’on a beaucoup démoli, qu’aujourd’hui on s’est mis à vouloir beaucoup conserver. Plusieurs pen-

sées se sont succédées avant d’en arriver à l’idée que nous avons de la reconversion aujourd’hui. Depuis le XVe siècle l’intérêt de la préservation-transformation des bâtiments est théorisé par Leon Battista Alberti (constructeur de la Renaissance) dans son traité «L’Art d’édifier»2 . La pensée moderne s’est principalement construite sur la nécessité de démolir pour bâtir, de débarrasser pour aménager. Cette conception a aussi permis à Haussmann de remodeler Paris dans la seconde moitié du XIX° siècle puis au début des années 1920 à Le Corbusier de proposer le Plan Voisin à Paris. Il s’agissait d’un nouveau plan urbain dans lequel il rêvait d’ériger des tours de quarante étages au cœur de Paris en se débarrassant des vieilles pierres, sans intérêt à ses yeux à l’époque, et si précieuses pour nous aujourd’hui (cette nouvelle urbanité inspirera plus tard les politiques de reconstruction des centres-villes anciens dans l’après-guerre). En 1982, lors de la XIIème Biennale de Paris, Jean Nouvel cherche ce dialogue renouvelé entre histoire et modernité, rappelant qu’« être moderne, c’est avoir le sens de l’histoire»3

« Le mouvement de transformation ne part pas de la table rase pour l’érection de grands bâtiments, mais part plutôt d’un paysage urbain qui va être requalifié et sur lequel on va porter un regard qui va avoir une certaine tendresse. Et cette espèce de relation aimante envers ce qui existe a quelque chose d’assez délicieux dans la transformation urbaine. »4

2De son titre d’origine «De re ædificatoria» en latin, ce livre est un traité d’architecture écrit par Leon Battista Alberti en 1452 et paru en 1485.

3 Propos de l’architecte Jean Nouvel en 1982 lors de la XIIème Biennale de Paris.

4 Propos de Dominique Perrault recueillis par Francis Rambert à la Cour de justice des communautés européennes à Luxembourg, le 11 décembre 2013, Un bâtiment, combien de vie? Francis Rambert, février 2015

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Si autrefois la modernité signifiait de tout raser pour rebâtir neuf, depuis quelques décennies, cette conception de la modernité s’épuise. L’illusion que seule la nouveauté est séduisante ne fait plus recette. L’air du temps a changé : plutôt que de démolir pour reconstruire, faire vivre ce patrimoine implique donc de le transformer. Le « déjà-là » et le « faire-avec » s’imposent à tous, c’est une autre façon de penser la modernité qui s’installe dans les champs de l’urbanisme et de l’architecture. Aujourd’hui se présentent à nous deux enjeux majeurs :

D’une part l’empreinte environnementale du fait des activités de l’Homme : Pour toute ville qui se développe et se modernise, densité et compacité sont synonymes de sobriété carbone. Ce point est un levier majeur pour lutter contre l’étalement urbain comme le rappelle le dernier rapport5 du GIEC6 : toute action effectuée émet du carbone. Guillaume Meunier, architecte DPLG depuis 2007 et spécialiste environnement depuis 2009 souligne : «la superstructure représente environ 20% du bilan carbone de la matière ». La prise en compte des émissions de carbone fait changer d’ère la construction. Dans les domaines de l’architecture et de l’urbanisme, à chaque moment de la production d’un matériau jusqu’à sa pose sur un chantier : les chutes, le gaspillage, la mise en déchetterie, le transport, parfois la réaction chimique (pour le ciment, par exemple) il y a émission de gaz à effet de serre. La reconversion a mis alors en évidence le fait que

le patrimoine industriel d’abord méconnu et inintéressant devient finalement un potentiel exploitable intéressant pour l’environnement. Mais qu’est-ce que cela signifie. Comment gérer l’habitabilité de ces bâtiments tout en contribuant à maintenir celle de la Terre ?

D’autre part la prise de conscience de nouveaux critères d’habiter : Ces dernières décennies nous avons été confrontés à de réels changements climatiques : nuits tropicales, inondations, avec un risque croissant de crues décennales, tempêtes, sécheresses, canicules etc. La multiplication de ces phénomènes extrêmes a eu des conséquences sociales notamment lors de la crise sanitaire 2019, et a souligné la nécessité de repenser l’habitat. Transformer les bâtiments questionne les normes, dont on sait qu’elles prolifèrent et s’appliquent strictement, sans laisser beaucoup de marge à l’interprétation et à l’intelligence architecturale.

« Les bâtiments anciens fournissent, dans le cas de leur transformation en appartements, la preuve que nous pouvons habiter autrement, que nous le méritons, ou plutôt que nous le devons quand il y a tant de bâtiments singuliers qui réclament d’être investis et présentent l’avantage d’offrir des alternatives aux lieux communs qui s’appliquent à la production des logements. »7

Ces constats indiquent alors que la transformation doit pouvoir conjuguer soutenabilité environnementale et utilité sociale. A la prise

5 Le dernier rapport d’évaluation rédigé par le GIEC fait parti des 6 rapports qui traitent, analysent et synthétisent les données scientifiques, techniques et socio-économiques relatives au réchauffement climatique

6GIEC : le Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat, évalue l’état des connaissances sur l’évolution du climat, ses causes, ses impacts

7 Propos de Dominique Perrault recueillis par Francis Rambert à la Cour de justice des communautés européennes à Luxembourg, le 11 décembre 2013, Un bâtiment, combien de vie? Francis Rambert, février 2015

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de conscience de la valeur patrimoniale de ce qui a déjà été bâti s’ajoute alors la nécessaire sobriété imposée par le nouveau régime climatique et environnemental. Une nouvelle attention se porte sur les projets architecturaux : celle due aux futurs usagers des bâtiments, mais aussi, et c’est plus nouveau, aux emprunts (que l’on souhaite à tout prix minimiser) faits à la nature pour permettre à ces architectures de perdurer.

Mais comment démontrer qu’il est possible d’allier défense du patrimoine, qualité de vie et performance environnementale ?

Face à cette question les réponses sont variées, avec des projets singuliers et iconiques. Les études de cas illustreront des façons d’aborder cette reprogrammation de la ville dans une démarche de sobriété et de qualité architecturale, via un travail de couture urbaine.

Dans un premier temps nous étudierons de près le silo à grain : le contexte de sa genèse, ses usages et fonctions, son influence, ses utilisateurs et son public pour comprendre la période de « vie » du bâtiment et comment celle-ci a été rythmée et quelles aventures le bâtiment a traversé.

Au travers de quatre études de cas européennes nous découvrirons les différentes façons dont la reconversion du silo à grains a été abordée. Enfin nous récapitulerons par le biais de 7 indicateurs le gain que permet cette transformation.

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I.CONTEXTE DU SILO A GRAINS

A. Naissance du silo à grains, une architecture inscrite dans une réalité économique.

a. Genèse et évolutions du silo

La silhouette mystérieuse du silo dissimule une technique passée et un principe de base consistant à la conservation des céréales (blé tendre, blé dur, orge, maïs, seigle, avoine, sorgho, et riz). Ce besoin a été présent dans nos sociétés les plus lointaines et très vite on lui identifie deux techniques de conservation : en atmosphère confinée dans des silos souterrain, et en aération et manipulation dans les greniers à blé. Ces deux formules sont très anciennes et finiront pas cohabiter l’une avec l’autre.

Des travaux sont publiés dès le premier quart du XIXème siècle hérités des observations antérieures.

En 1842 Joseph DART, négociant en grains, et Robert DUNBAR, ingénieur, introduisent la notion de « grain elevator » dans le port de

Buffalo (État de New York). Une machine consistant à mécaniser et accélérer le transbordement des navires à ceux des canaux afin de réduire la durée de leur immobilisation à quai, évitant alors les coûts supplémentaires à quai, et d’importants coûts de main-d’œuvre liés à la manipulation des sacs.

Les deux techniques de conservation vont faire naitre deux écoles, chacune au nom de celui qui la théorise au milieu du XIXème siècle :

- Doyère qui a expérimenté la conservation en atmosphère confinée (1853)

- Huart, négociant en grain à Cambrai, qui inventa le grenier Huart, où la conservation se fait par agitation et ventilation (1854).

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Même s’il n’est pas à l’abri de connaitre d’autres perfectionnements, l’invention d’Huart fait vite l’unanimité, car elle réunit pratiquement toutes les conditions nécessaires à la conservation des grains à savoir : économie d’établissement, faible dépense d’entretien, capacité considérable, mouvement périodique ou continu de toute la masse du grain, ventilation, nettoyage, entretien d’une température basse, dessiccation progressive et préservation des insectes et des animaux rongeurs.

Le silo fait l’objet de recherches innovantes là où le besoin s’en fait ressentir, c’est à dire dans un premier temps en Amérique, Canada et Argentine principalement. Étant des grands exportateurs ces derniers avaient besoin de centraliser rapidement, après la récolte, le blé de leurs cultivateurs, et de pouvoir l’expédier le plus rapidement encore.

Aussitôt que l’idée naît à Buffalo, elle se répand sur le continent américain d’abord sur les ports puis dans les terres le long des voies ferrées. Face à la progression du commerce maritime l’Amérique organise la commercialisation de céréales dans son intégrité, cherchant à se perfectionner sur tous les fronts : collecte de grains le long des chemins de fer et mécanisation des magasins pour accélérer encore la vitesse de chargement des wagons avec des objectifs concernant tous les acteurs de la filière (producteurs, exportateurs, transformateurs). Cette organisation fait

apparaitre deux catégories de silos : celui des terres (silos ruraux ou de transit) et celui des ports (silos terminaux ou de collecte). Si ce modèle a rapidement été adopté sur tout le continent américain, ce n’est pas le cas de l’Europe. En 1887, quelques années avant ·le développement soudain des silos modernes en béton armé, on remarque que les Européens utilisent les greniers à grains à planchers superposés alors contrairement aux américains. En France ce sont les minoteries qui servent a l’entassement et conservations du grains en sacs ou parfois même en vrac (sans sacs). En plus du travail a manuel que cela représentait la conservation dans ces conditions n’était pas optimale pour la qualité du grain. Comme vu plus haut l’elevator nait du perfectionnement des outils de leviers, mais en France cet outil n’est pas rependu. Dans les magasins les plus anciens l’élévation du grain se fait manuellement et au moyen de poulies.

Paul Pouzin est le premier à évoquer de la nécessité d’allier à ce grain elevator un élément permettant le stockage des céréales. Car si les pays exportateurs n’en présentent pas le besoin, pour les pays importateurs tels que la France il s’en fait ressentir. L’émergence d’une conscience permis de se rendre compte que le modèle du silo devrait s’adapter aux pays dans lequel il servait, dissociant les pays exportateurs des pays importateurs.

Devenue un business international, la réduction du coût du grain devient un leitmotiv pour tous les

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acteurs associés au stockage. Les propositions d’innovations continuent alors de faire surface cherchant toujours la meilleure installation.

L’architecte Emilie Vuigner, à la suite de ses déplacements dans les ports de Londres, d’Amsterdam et d’Anvers, édifie un magasin à grains à Paris pourvu d’un elevator auquel il ajoute l’idée d’y placer de godets et un distributeur horizontal. Avancée, déjà approuvée et utilisée en Allemagne dans les années 1887 mais qui ne se généralisera que plus tardivement en Europe.

On continuera à construire des magasins à sac après la Seconde Guerre mondiale en France, c’està-dire, bien après la construction des premiers silos de collecte des années 1930. Alors qu’il existe de très nombreuses solutions architecturales et techniques pour associer ces deux formules, stockage en sacs et stockage en cellules. Des esquisses de bâtiments apparaissent avec parfois le magasin qui jouxte le silo proprement dit, d’autrefois le magasin entièrement intégré à celui-ci, tant d’un point de vue fonctionnel qu’architectural, au sein d’un même corps de bâtiment. Certaines esquisses proposent de vastes espaces de circulation aménagés sous les cellules, munies d’un système d’ensachage fixe ou amovible, permettant le stockage temporaire et la manipulation des sacs, et ils traduisent un bon compromis entre le silo moderne américain et le magasin en sac de français, les deux formes de stockage.

Effectivement le système de sac ne disparait pas car il est pratique pour des petites livraisons occasionnelles entre agriculteurs, acheteurs, utilisateurs, transformateurs transportent. Le sac reste le plus petit dénominateur commun.

L’histoire de la technique et du principe de traitement du grain se rejoint rapidement d’un continent à un autre, ce qui n’est pas le cas des moyens employés car selon les pays le silo était utilisé à des fins différentes : en Amérique il était question de la manutention du grain, en France c’était son stockage et sa conservation.

Quel était ce principe de fonctionnement qui a fini par séduire et mettre d’accord le monde entier ?

b. Principes de fonctionnement

Dans la conservation des grains deux conditions permettaient la bonne conservation de celui-ci : la température et l’humidité, et face à cela la ventilation fut la solution universelle. Celle-ci permettait de refroidir et maintenir le grain à une même température relativement basse tout en les séchant progressivement.

Les magasins ou greniers à blé longtemps utilisés en Europe disposaient de planchers percés d’orifices qui permettent de faire chuter la matière au niveau inférieur pour la remuer et la ventiler.

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Figure 1 Principe du silo ventilé Figure 2 Travail à la main Figure 3
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Stockage en sacs

Dans les magasins les moins élaborés, le remuage du grain s’effectue à la pelle et utilise une main-d’œuvre abondante et coûteuse. La masse de grains soumise à ventilation se retrouve divisée en trois zones. (Figures 1 et 2)

Comme vu précédemment l’entassement des masses de céréales se faisait dans des sacs ou en vrac (Figure 3):

- zone refroidie (grains déjà refroidis)

- zone de transition (grains en cours de refroidissement)

- zone à refroidir (grains encore chauds)

Comme on peut le voir dans la figure 2 les magasins à grains sont pourvus de fenêtres pour permettre la ventilation dans les étages. Ce système doit constamment être contrôlé : la ventilation ne doit pas être arrêtée tant que les grains aux étages supérieurs n’ont pas atteint la même température que ceux des étages inférieurs, soit la température proche de celle de l’air de ventilation. Celle-ci doit être maintenue à un degré précis (entre 5 et 7 degrés) et sans variation ni écart de température qui risquerait de dégrader le grain.

Tous ces phénomènes liés à la température, l’humidité et la ventilation nécessitaient d’être régulièrement contrôlés ce qui rendait le processus complexe. C’est pourquoi ce contrôle est réalisé grâce à l’intervention d’une main d’œuvre spécialisée et coûteuse, tant dans la phase de l’étude que dans celle de

la gestion des installations.

L’apparition du « grain elevator» révolutionne la manutention du grain autrefois fait à la main. (Figure 4). Grâce à deux éléments nouveaux le traitement du grain est mécanisé : l’élévateur et le transporteur à bandes ou à chaines. L’élévateur permet le déplacement vertical des grains dans des petits sac fixés aux rails (godets). Le montage mécanisé est alors plus facile plus rapide, ils consomment et encombrent peu et permet d’aller plus haut. Le transporteur à bandes ou à chaines permet le déplacement horizontal du grain pour le distribuer ensuite vers les cellules de stockage. La mécanisation du déplacement du grain permet un travail continu avec une vitesse maintenue participant à l’amélioration du système de traitement de grains et notamment l’ensillage8. (Figure 5)

La substitution de l’Homme par la machine a permis une grande efficacité dans le traitement du grain et un soulagement notable pour les acteurs associés. Cependant l’intervention humaine est nécessaire pour l’une et l’autre des deux formules et demande beaucoup de vigilance et d’expérience.

Une fois dans les tubes bétonnés le grain n’est pas soumis à un système de ventilation c’est la raison pour laquelle il est indispensable qu’au moment du remplissage des silos, les grains soient bien secs, propres, et traités avec des insecticides de grande persistance d’action. Il est aussi nécessaire d’équiper les cel-

8Ensillage : procédé de conservation par le stockage dans un silo.

9 Le transillage est une action qui consiste à déplacer l’entièreté des grains d’une cellule de stockage à une autre.

10 Les as de carreau dans les silos en batteries cylidrique, les as de carreaux sont les espaces d’interconnexion entre les cellules. Ils sont non visibles car situés sous la galerie supérieure.

9
Figure 4 Le Grain Elevator Figure 5
10
Transporteur à bandes et à chaines

lules de sondes thermométriques pour permettre un contrite permanent de la température des grains.

Dans de très rares cas il arrive de devoir faire un transillage9. C’est à dire lors qu’il y a détection d’un signe d’éventuelles dégradations (exemple : une variation brutale de température) le contenu d’un silo est transvasé dans un autre silo vide et propre permettant ainsi de ventiler et d’homogénéiser les grains. Cette action est coûteuse et abîme la manutention des silos donc tout est fait pour que cela arrive le moins fréquemment possible.

Dans la version aboutie du silo les équipements qui le composent sont les suivants :

- Les équipements de manutention (élévateurs, transporteurs, vis, pendulaires...)

- Les équipements de travail du grain (nettoyeurs, tamiseurs, séparateurs, calibreur, détecteur de poussière)

- Les capacités de stockage (cellules, boisseau as de carreau11) pouvant être équipées de silothermométrie.

- Les dispositifs complémentaires (ventilation, filtration, désinsectisation)

- Et éventuellement les installations de séchage (séchoirs).

Chaque groupe d’équipements appartient à une unité :

- Le transport du grain (transporteur, élévateur)

- Le nettoyage et/ou le tri du grain

(nettoyeur, calibreur,…)

- Le dépoussiérage de l’air (système d’aspiration de type filtre ou cyclone)

- L’aide à la conservation du grain (sondes de silothermométrie 11 et ventilation). (Figure 6)

Selon les configurations les silos présentent des caractéristiques différentes : des interconnexions, plus ou moins d’espaces appelés « surfaces soufflables » (passages entre la tour de manutention et les cellules, galeries enterrées…) etc.

- Silo plat : hangar équipé de la manutention dans lequel le grain est manipulé à l’aide d’un engin de manutention équipé avec godet de type chargeuse, ou bien grâce à une galerie de reprise.

- Silo comble. Généralement ces silos sont équipés d’une tour de manutention (ou élévateur extérieur) relié à un transporteur d’alimentation et d’une galerie de reprise enterrée dans laquelle se trouve un transporteur de reprise. Les cellules sont ouvertes sous les combles, endroit par lequel se fait notamment l’ensilage de grain par passerelle.

- Silo vertical : une tour de manutention et une cellule de stockage.

- Silo en batterie : caractérisé par leurs cellules ou les « as de carreaux » (Figures 7 et 8)

Architecturalement parlant l’usage et les fonctions qui lui sont associées se sont traduits par cette dernière version du silo vertical classique et lui donneront le nom de silo moderne que nous connaissons. Celui-ci se présente alors comme

11 La silothermométrie est la mesure de la température des grains et autres produits conservés dans des silos.

11
Figure 8 Silo en batterie cirularie et Silo en batterie rectangulaire Figure 7 Les différentes configurations de silos Figure 6
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Shéma de principe abouti du silo Silo plat Silo combles Silo sucre Silo en batterie

une infrastructure bétonnée avec différents unités des fonctions dans des corps de bâtiments différents : la tour de manutention, les cellules de stockage (pouvant atteindre entre 20 et 40 m de hauteur) et les galeries de reprises au-dessus et au-dessous des cellules (ces dernières sont parfois au sol et parfois enterrées).

La dernière version du silo verticale classique est la version la plus optimale dans sa contenance et son efficacité de déplacement de grains. C’est aussi la version la plus intéressante car, dès lors qu’elle nait, cette silhouette du silo vertical classique est atypique et imposante et va devenir une marque inévitable dans le paysage urbain. Sans le savoir l’infrastructure du silo traversera les évolutions sociétales urbaines et continuera d’agir comme un marqueur urbain. (Figure 9)

Comme vu précédemment dans l’Histoire du silo, les pays d’Amérique organisent la commercialisation de céréales dans son intégrité et se procurent des silos dans les installations portuaires (silos portuaires1) et dans le milieu agricole (silo de transit2 et silo de collecte3 ou de proximité). Chaque silo répond à une fin précise et est caractérisé par des débits de manutention et des temps de fonctionnement différents:

en 3 mois (pendant la moisson)

De ces expérimentations et ajustements conjoncturels en découle finalement le modèle presque universel : celui du silo moderne. Le principe du grain elevator a été révolutionnaire car il s’est trouvé parfaitement adapté aux besoins de la société dans la commercialisation du grain englobant la collecte, le stockage et la conservation. L’invention de Joseph DART et Robert DUNBAR a répondu à une nécessité technique et financière : accélérer le transbordement du grain entre les navires et réduire le coût de l’opération. Les économies sur les coûts de séchage combinés à la qualité supérieure des grains obtenus ont contribué à augmenter les revenus du producteur et la rentabilité de la culture. L’architecture finale du silo est donc sérielle. Chaque “version” imaginée du silo est le reflet de la volonté d’innover et de trouver la meilleure conception à chaque fois. Mais celui-ci peine à trouver une version universelle car il s’adapte au pays dans lequel il s’implante et au domaine qu’il va servir (commercial aux Etats-Unis et industriel en France)

12 Les silos portuaires sont définis comme ayant la capacité de décharger le grain depuis les bateaux, de l’engranger et de l’envoyer par chemin de fer ou camion, jusqu’à l’intérieur du pays, et d’exécuter le processus inverse, de façon simultanée et répétitive.

- Silos portuaires 12 : 200 à 1200 t/h13 en 12mois

- Silos de transit 14 100 à 300 t/h en 12 mois (3 mois en réception et 9 à 12 mois en expédition)

- Silos de collecte 15 : 50 à 200 t/h

La culture du silo est née et s’est installée aux États-Unis, elle s’est peu à peu répandue dans les pays industrialisés jusqu’à venir toucher le monde de l’art. Le silo intrigue les artistes-peintres, architectes, théoriciens, plasticiens et photographes, et la vision de l’infrastructure utilitaire change totalement.

14 Les silos de transit sont préparés pour recevoir le grain des silos de collecte qui leur sont affectés et réguler le trafic du grain jusque dans les grands centres ferroviaires des zones productrices et consommatrices.

15 Les silos de collecte ont pour fonction la collecte du grain dans les lieux de production, en le conservant jusqu’au moment de l’expédition vers un silo de transit, portuaire, ou encore de réserve. Ils sont conçus de façon à faciliter la réception du grain qu’apportent les paysans mais en même temps ils devaient être bien reliés pour faciliter l’expédition par et pour les industriels.

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13 t/h : unité de débit massique en tonnes par heure.
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Figure 9 Forme aboutie sur silo

B. Nouvelle approche : intérêt des architectes et artistes à l’égard des silos

Ces nouvelles silhouettes qui s’élèvent et prennent place dans les paysages urbains n’échappent pas aux artistes qui y trouvent un potentiel plastique et esthétique. L’infrastructure audacieuse du silo du début du XXe siècle proclame haut et fort son engagement dans la modernité par la technique et suscite un nouvel attrait artistique de part sa source d’inspiration. La vision du silo, avant tout un bâtiment outil, change et devient un édifice, on parlera alors de “cathédrales du travail” ou “palais de l’industrie”.

En architecture, les formes audacieuses et les lignes pures du silo séduisent les architectes et cela justifie cette attirance au milieu du XXe siècle. Walter GROPIUS

(Figure 10) et Le Corbusier (Figure 11) s’appuient sur le silo pour dénoncer l’excès d’ornementation dans le domaine d’architecture. Cette fascination inspirera et impulsera le mouvement du Brutalisme en architecture qui atteindra son apogée à partir des années 1950.

(Figure 12 et 13)

En 1913 l’architecte Walter Gropius parle de “l’exigence de la beauté de la forme extérieure”. Le fondateur du Bauhaus est sensible à la monumentalité brutale de ces mastodontes en béton armé et voit dans ces silos un modèle à suivre pour l’architecture européenne.

« … Dans la patrie de l’industrie, en Amérique, de grandes constructions industrielles sont apparues, dont la majesté étonne d’autant plus qu’elle est inconnue des meilleures constructions allemandes. Les silos à céréales du Canada et d’Amérique du Sud, les silos à charbons des grandes lignes de chemin de fer et les ateliers les plus modernes des monopoles industriels d’Amérique du Nord ont une puissance monumentale dont l’expression soutient presque la comparaison avec les constructions de l’Égypte ancienne. Leur visage architectural est d’une telle fermeté que le spectateur saisit sans ambiguïté devant une force si convaincante le sens de ces édifices. L’évidence de ces bâtiments ne découle pas de la supériorité matérielle de leurs dimensions gigantesques – ce n’est pas dans cette direction qu’il faut chercher la raison de leur présence monumentale -, mais c’est bien davantage le sens de ces grandes formes exactes autonomes, claires et nettes de leurs constructeurs qui s’exprime. Il y a là une sorte d’encouragement pour nous à rejeter cette nostalgie historique et ces scrupules de type intellectuel qui encombrent la création artistique européenne et en contrarient la spontanéité ». 16

S’en suivra par la suite les propos de Le Corbusier dans son ouvrage

“Vers une architecture»17 en 1923 :

16 Propos de Walter Gropius en 1913 paru dans un article, source inconnu

17Vers une architecture, ouvrage paru en 1923 et rédigé par l’architecte Le Corbusier.

15
Figure 10 Walter Gropius Figure 11 Le Corbusier Figure 12 Façade Bauhaus, 1925 Figure 13 Façade La Cité radieuse 1952

«Ne poursuivant pas une idée architecturale, mais simplement guidés par les effets du calcul (dérivés des principes qui gèrent notre univers) et la conception d’un organe viable, les ingénieurs d’aujourd’hui font emploi des éléments primaires et, les coordonnant suivant les règles, provoquant en nous des émotions architecturales, faisant ainsi résonner l’œuvre humaine avec l’ordre universel. Voici les silos et usines américaines, magnifiques prémices du nouveau temps. Les ingénieurs américains écrasent de leurs calculs l’architecture agonisante”. « Voici des silos et des usines américaines, magnifiques prémices du nouveau temps. » 18

Ces prises de position idéalisant les “grain elevators” ont été très critiquées car, à cette époque les architectes, dont GROPIUS et Le Corbusier faisaient partie, portaient un avis sur des innovations qu’ils n’avaient jamais visité ni vu de leurs propres yeux. En effet, les prises de position des avant-gardes de la modernité en architecture sur les silos reposaient sur des idées qu’ils se faisaient du bâtiment au travers de photographies, ils n’avaient donc jamais visité ni découvert les silos modernes. Ils étaient alors pointés du doigt et critiqués notamment sur la méconnaissance totale des logiques fonctionnelles et technologiques auxquelles ces formes dépouillées correspondaient. En tous les cas, ces divergences de propos nourriront les médias et joueront incontestablement en faveur de la diffusion du silo en Europe.

La photographie a contribué à répandre l’image du bâtiment utilitaire autour du globe, et a été un support majeur pour véhiculer les nouvelles dans le monde lorsque les déplacements touristiques n’étaient pas encore répandus ou très peu courants.

En décembre 1991, à Beauce Centre, le FRAC19 lance une grande commande photographique sur les silos. Le patrimoine architectural est mis en avant au travers de ce support. (Cette commande n’est pas anodine, elle est même presque symbolique, car la région de Beauce Centre fut un des premiers producteurs céréaliers en Europe). Dans un premier temps, un travail de terrain permit de repérer les sites et de dresser une cartographie de l’implantation des silos. Dans un second temps, un partenariat avec l’Office National Interprofessionnel des Céréales, la Fédération Régionale des Coopératives Agricoles, et les représentants de la revue Silos fut organisé. Le tout pour permettre de passer une première commande en 1991 à Andreas Gursky, puis à Axel Hütte en 1994 et enfin c’est le photographe canadien Robin Collyer qui est chargé d’une troisième commande en 1997. Toute liberté est laissée aux photographes dans le choix et l’appréhension des silos. Y seront exposées quelques pièces majeures de cette commande, permettant d’immortaliser le fait que les développements de la filière céréalière ont fortement marqué, non seulement le paysage, mais aussi l’Histoire humaine, sociale, économique et architecturale de ce

18 Propos extrait de Vers une architecture, ouvrage paru en 1923 et rédigé par l’architecte Le Corbusier.

19 FRAC : Fonds Régionaux d’Art Contemporain.
17

territoire.

D’autres photographes partagent leurs travaux, c’est le cas d’un couple allemand Bernd et Hilla Becher. Ensemble, ils immortalisent à partir de 1959 des bâtiments industriels comme des puits de mine, des châteaux d’eau, des usines ou des silos à grains. Ils présentent leurs photographies sur des panneaux qui regroupent les photos en séries, avec le même angle, la même luminosité, le même cadrage. Ce support et cette façon de présenter leurs photos renforcent l’aspect de catalogue scientifique de leur travail, mais surtout, permettent de créer des typologies de ces constructions. Leurs travaux mettent en valeur à la fois leurs points communs et leurs différences.

Le silo est né d’une nécessité universelle, celle du stockage, il a donc été pensé à l’origine à des fins utilitaires. Dès lors que l’usage a évolué et le phénomène de désindustrialisation s’est enclenché, l’avenir du silo a été remis en question. Ce bâtiment a été conçu pour servir une fonction précise et n’était pas destiné à être beau. Or si le bâtiment ne sert plus, et qu’il n’a pas de valeur esthétique, s’est alors posée la question de sa conservation.

Mais n’est-ce pas le regard des artistes qui a permis de voir le silo sous un autre angle ? La vision du silo par d’autres personnes que les ingénieurs a-t-elle permis de rendre compte des qualités nouvelles et potentielles que pouvait présenter l’architecture du silo ? Les particu-

larités du silo ne constituent-elles pas des atouts uniques et inspirants pour les sociétés à venir ? Le monde de l’art n’aurait-il pas favorisé la prise de conscience d’une évidence patrimoniale ?

18
Figure 14
19
Panneaux de photographies 3 x 3 de Bernd et Hilla Becher Figure 14 Panneaux de photographies 3 x 3 de Bernd et Hilla Becher

C. Patrimonialisation de l’architecture industrielle

La notion de patrimoine a été établie depuis la révolution française de 1789 comme : « des biens appartenant à la collectivité du fait du lien privilégié qu’il constitue entre passé, présent, avenir. ». Le projet de modification de la loi du 31 décembre 1913 20 est mené par André Malraux en faveur de la préservation et de la mise en valeur du patrimoine. Pour protéger efficacement un élément du patrimoine la loi Malraux (1962) requiert une étude pour définir ce qui peut éventuellement être préservé :

- Inventaire et inscription du patrimoine (ce qui est répertorié n’est pas forcément classé)

-La concrétisation de la protection (classement ou inscription), avec des auteurs et des acteurs.

Le système traditionnel de protection du patrimoine est dynamisé par l’intervention d’une pluralité d’acteurs au cours du processus :

Intervenants publics prédominance :

- L’Etat

- Les collectivités territoriales

Intervenants privés nécessaires :

- Le secteur associatif : présente plus de six mille associations dont plus d’une centaine pour le patrimoine industriel. Son intervention peut être à l’échelle internationale (T.I.C.C.H.I.21), nationale

- Le secteur privé : propriétaires privés ou des sociétés commerciales; ils représentent plus de 50% du patrimoine à eux seuls et la quasi-totalité du patrimoine industriel. De ce fait, un effort d’association doit être engagé avec eux par les autres acteurs du patrimoine.

Les Trentes Glorieuses (19451975) correspondent en France à une période de forte croissance et de modernisation accélérée. A partir des années 1970 en revanche, la France fait face à un phénomène de désindustrialisation, entraînant la modification de son tissu industriel et l’émergence d’espaces désaffectés qui vont marquer progressivement le paysage. Ces lieux abandonnés désignés comme des espaces bâtis ou non, désertés par l’industrie depuis plus d’un an, et souvent dégradés par leur usage antérieur ou par leur abandon prolongé prennent le nom de friches industrielles.24

À l’origine, loin d’être perçus comme les précieux témoins d’une culture industrielle, les friches industrielles sont les révélateurs d’une rupture économique, voire d’un traumatisme social et véhiculent une image négative. La France ne voit pas l’intérêt de créer une politique spécifique pour le

20 Le 13 décembre 1913 le Sénat vote la loi qui constitue le socle fondamental de protection des monuments historiques en France. Elle continuera d’être au coeur des débats en France et sera modifée au fur et à mesure.

21the International Committee for the Conservation of the Industrial Heritage. En français : Comité international pour la conservation du patrimoine industriel

22 Comité d’information et de liaison pour l’archéologie, l’étude et la mise en valeur du patrimoine industriel .

23 Association pour la Sauvegarde et la Promotion du Patrimoine Industriel en Vaucluse

24Une friche industrielle est un terrain laissé à l’abandon à la suite de l’arrêt de l’activité industrielle qui s’y exerçait.

(C.I.L.A.C. 22), locale (A.S.P.P.I.V. 23).
21

traitement de ces espaces. Ils sont démolis, rasés puis les industries délocalisées vers les périphéries des villes. Sans statut vraiment défini ces lieux sont voués à disparaitre. Pourtant lorsque l’Etat prend la décision de les déconstruire, des réactions inattendues vont surgir et vont changer les mentalités vis à vis de la valeur de ces friches. En effet, la destruction de bâtiments industriels s’exécute peu à peu mais lorsqu’arrive le cas des Halles de Baltard en 1971, la société civile s’interpose. Considérées comme “le ventre de Paris” la démolition des Halles est un élément déclencheur de nouveaux débats. Alors que jusque-là, le traitement des espaces désaffectés ne faisait pas l’objet d’une politique spécifique, la manifestation de l’opinion publique sera un élément déclencheur de nouveaux débats.

Pourquoi la destruction des Halles de Baltard a provoqué cette réaction ? Comment expliquer cet attrait pour l’industrie passée ?

Il s’avérera que l’attachement au passé industriel du pays est pour les citoyens français important car il constitue une identité nationale, et la présence d’architecture industrielle participe à véhiculer l’Histoire de cette identité. L’architecture industrielle est une preuve et un support plus qu’authentique pour raconter l’Histoire industrielle du pays dans laquelle elle a été construite. Le bâtiment industriel sous-entend une richesse d’ordre historique de façon générale mais aussi d’ordre intellectuel, culturel

ou matériel.

Le côté intellectuel et culturel de cette richesse recouvre :

- un savoir-faire : forger le fer, souffler le verre,...les techniques dans l’art de réaliser ces opérations et la technologie des produits fabriqués

- les souvenirs : les témoignages, ceux de l’ouvrier (vision fractionnée) ou ceux de l’ingénieur (vision plus large de l’organisation du travail) doivent être enregistrés, avant qu’il ne soit trop tard, pour comprendre la vie à l’usine

- l’imaginaire : il s’agit de rechercher l’image que l’usine a donné d’elle, de voir comment elle a marqué l’esprit des citoyens (exemple : les bêtises de Cambrai ).

Le côté matériel recouvre essentiellement :

- les bâtiments qui sont les éléments visibles qui poussent les personnes à s’interroger sur leur avenir,

- les machines et l’outillage qui représentent une logique technique au sein de l’usine sans lesquels elle n’aurait pas beaucoup de sens,

- les collections de modèles, de prototypes et de produits finis qui permettent de retracer l’évolution d’une entreprise,

- les documents commerciaux et les archives qui retracent le pan de communication de l’usine.

Le caractère complexe de ces bâtiments les différencient des autres patrimoines architecturaux tels que les châteaux, cathédrales, églises, et autres édifices religieux. C’est pourquoi ils ne peuvent pas être une sous-catégorie dans la loi relative

22

au patrimoine, mais une nouvelle catégorie, nouvelle branche de cette loi.

Pour toutes ces raisons, y compris pour l’héritage que l’architecture industrielle représente, la catégorie “industrie” est associée à la notion de patrimoine de façon très légitime. Avant cela il n’a jamais été question d’associer le terme patrimoine à industriel car cette dernière renvoie à une image beaucoup moins idyllique que la première : l’époque en France du travail, de la production, la misère, l’exploitation et la pollution.

Les friches industrielles représentant désormais un patrimoine spécifique. On peut se demander si les mesures de protection de la loi Malraux (1962) sont adaptées aux caractéristiques et enjeux de ce type d’architecture patrimoniale ? Une réflexion sur un nouveau type de protection est alors portée après l’introduction de cette nouvelle notion qu’est l’industrie.

Parmi les mesures en cours de traitement pour faire évoluer la loi Malraux il y a celle du patrimoine mobilier, c’est à dire prenant en compte les appareillages métalliques associés aux bâtiments outils. Une extension est alors réalisée, celle du régime des travaux sur monuments classés à celui des inscrits, création d’une commission départementale du patrimoine qui aurait fonction d’instance d’appel au niveau départemental concernant les avis des architectes des Bâtiments de France.

C’est en 1983 sous l’impulsion

d’André Chastel, président de la commission nationale de l’Inventaire, qu’est créée une cellule spécialisée consacrée au «patrimoine industriel » au sein de la sous-direction de l’Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France. Cette nouvelle cellule permet la mise en place d’une équipe de recensement des patrimoines industriels avec une méthode particulière pour réaliser un inventaire, une sélection au peigne fin pour identifier les édifices en vue de leur future sauvegarde.

Cette nouvelle loi a permis deux choses :

- Réaliser sérieusement et profondément le travail de sauvegarde. Dès le milieu des années 1980, le nombre de bâtiments industriels inscrits et classés a augmenté même si le bilan n’est pas aussi fructueux et a connu des périodes plus difficiles que d’autres. En 2010, en France, sur 43 720 édifices protégés, 830 relèvent du patrimoine industriel (soit 1,9 %). Les ⅔ sont des moulins et manufactures, il y a très peu d’usines, quelques sites émanent de l’industrie des XIX et XXème siècle et principalement dans le secteur du textile. A partir de 2012, faute de disponibilités budgétaires financières de l’Etat, le nombre de protections ralentit, et ce, particulièrement dans le secteur du patrimoine industriel.

- Remettre en question des limites du patrimoine pour finalement élargir son périmètre. Le critère de protection n’est plus seulement esthétique (comme c’était le cas pour les châteaux, cathédrales, églises, édifices publics ou privés datant du XVe, XVIe, XVIIe, XVIIIe siècles pour la plupart) mais recouvre également tout ce qui, venant du passé, permet de comprendre le présent.

23

On retrouve alors la notion de patrimoine au pluriel, qui regroupe: le patrimoine urbain ou rural, le patrimoine photographique, le patrimoine des parcs et des jardins, patrimoine industriel et d’autres encore.

A la suite de cette prise de conscience, la vision de l’avenir du patrimoine architectural industriel a elle aussi changé, ouvrant les réflexions sur des modes différents de conservation, autre que la conservation passive : conserver pour conserver. Certains ont commencé à imaginer une reconversion et réhabilitation des bâtiments industriels.

« Protéger est une chose. Animer, faire vivre, supporter les charges d’entretien et de fonctionnement en est une autre ». 25

En effet une remise en question de la garantie de pérennité des bâtiments se fait après leurs inscription et conservation pour cause de dégradation avec le temps, car les lieux sont non réinvestis et non entretenus, parmi eux citons :

- La filature Godet à Elbeuf, inscrite au titre des monuments historiques en 1994, est détruite en 1999 suite à un arrêté de péril

- Le silo à céréales de Strasbourg, inscrit en 1995, est démoli en 1996,

- L’usine Renault de l’île Seguin (site non protégé mais fortement symbolique) est rasée en 2005

- La grande halle de la manufactured’allumettes de Trélazé en 2010, pourtant labellisée « Patrimoine du XXe siècle » par le ministère de la Culture.

Plus récemment, la conservation de la halle en béton de la gare d’Austerlitz construite par Eugène Freyssinet à la fin des années 1920 a fait polémique malgré l’inscription de

l’édifice au titre des monuments historiques en 2012.

Rappelons que la destruction des friches visait à une époque à s’affranchir des risques induits. L’accroissement des friches s’accompagnait d’une augmentation des dangers liés aux problèmes économiques, sociaux et spatiaux. La prise de position de Loiseau ainsi que la loi d’André Chastel visent à adresser chacun de ces points en misant sur les modes de conservation :

- Économique : les espaces libérés par les anciennes industries sont des potentiels lieux pour de nouvelles entreprises créatrices d’emplois.

- Spatial (et économique) : la pression immobilière et foncière. Les fermetures d’usines se multiplient ainsi que le stock croissant de friches, menaçant le stock d’espaces sur le marché, conduisant à de futures problématiques foncières. Les causes sont multifactorielles : indifférence des propriétaires, désintérêt des décideurs, méconnaissance architecturale et perception de la préservation du patrimoine comme une démarche passéiste et antimoderne. Le problème de financement des coûts d’entretien et de restauration ne peuvent être assurés en l’absence d’un véritable projet de reconversion.

- Social : l’augmentation de lieux abandonnés sur un territoire n’est jamais une bonne nouvelle car ces espaces sans statuts ne sont plus fréquentés, surveillés, contrôlés, et, ils finissent par devenir des espaces dangereux pour les habitants des villes alentours.

Face aux répercussions que les friches pouvaient engendrer l’Etat ne voyait pas d’autre solution que leur éradication. C’est suite à une prise de conscience de la gravité du 24

Propos du préfet Loiseau en 1995 extrait du rapport «Une politique pour le patrimoine industriel »

25

problème (loi André Chatel 1983) que l’Etat prit la décision d’officialiser le phénomène de désindustrialisation et d’induir la question de l’avenir des friches industrielles au cœur de la politique d’aménagement du territoire.

Enfin depuis sa création en 1962, la DATAR a pour rôle de créer des scénarios d’évolution possible de la France et de ses territoires et ainsi populariser la démarche de la géographie prospective. Elle a largement inspiré les politiques de rééquilibrage dans les métropoles, de régionalisation puis de décentralisation des années 1960-1990, tout en restant jacobine dans la verticalité de son fonctionnement et son approche des échelles nationale et infranationale. En 1985 elle dresse un état des lieux alarmant sur « les grandes friches industrielles » dans un rapport appelé Lacaze, et propose notamment des modes d’intervention différenciés tenant compte de la diversité et de la potentialité des sites :

- Les friches non réutilisables ou « hors marché » : à cause de leur délocalisation/décentralisation, ou de leurs spécificités techniques (comme celles générées par les industries lourdes) certaines friches ne présentent plus d’intérêt à être réinvesties en nouvelles entreprises, ou ne permettent pas la création de valeur dans le cadre d’une déqualification. Dans cette situation c’est le traitement paysager qui sera choisi comme stratégie d’intervention.

- Les friches réutilisables : au contraire, les friches situées en milieu urbain ont une meilleure garantie de déqualification et réintégration dans le tissu, à condition que les collectivités saisissent l’intérêt d’une telle opération et acceptent une révision des docu-

ments d’urbanisme. C’est le cas de la reconversion multifonctionnelle réalisée pour la filature Le Blan à Lille et sur l’usine Blin et Blin à Elbeuf, associant dans un même programme habitat, équipements et espaces verts.

Ces deux cas répondent aux mêmes prérequis : les valeurs urbanisantes de l’industrie et de son patrimoine bâti.

Dans l’ouvrage “Un bâtiment, combien de vies” Dominique Lyon questionne la valeur de la transformation en France ces dernières années. La France fait partie des pays qui construisent peu, où l’idée du patrimoine est maintenant chérie, et l’effort de préservation est constant. Alors aujourd’hui que peut-on reprocher à la transformation de l’existant ?

Ici se trouve le cœur du sujet. Conserver est un choix, transformer en est un autre et il est pertinent si cette opération produit de la valeur. La valeur produite peut être attribuée au bâtiment concerné pour des raisons historiques, artistiques, symboliques ou, plus rarement, économiques. Aujourd’hui beaucoup de contenant sont remplis de programme pour servir les institutions, la culture, l’événementiel et l’éducation. L’effort financier et l’investissement symbolique liés à ces programmations profitent d’abord à la ville « historique » et contribuent à distinguer le centre de la périphérie. Qu’en est-il alors du gain généré par cette transformation ? En dehors de la protection, c’est aussi la question de l’avenir de ce patrimoine qui se pose : quelles sont les possibilités de valorisation

26 Délégation à l’Aménagement du Territoire et à l’Action Régionale

27Rapport Lacaze du nom de son directeur de rédaction Jean Paul Lacaze, publié en 1986 portant su rla devenir des friches

25

du bâtiment de silo et quelle place peut-il occuper dans le paysage urbain du XXIème siècle ?

26

II.Etudes de cas

A. Copenhague, The Silo, COBE

a. Contexte

En 2008 l’agence d’architecture danoise COBE remporte le prix du concours pour le réaménagement urbain de Nordhavn, port au nord de Copenhague. Anciennement un port de déchargement de marchandises, Nordhavn est devenu une friche industrielle à haut potentiel urbain du fait de l’évolution du commerce. Depuis 2008, l’ancien port est en travaux pour radical changement urbain : l’élaboration d’un véritable nouveau quartier. La transformation est organisée en deux temps :

Dans un premier temps réalisation d’aménagements urbains dans la partie existante du port : dessin de routes, promenades piétonnes, places et espaces extérieurs, pistes cyclables, aménagement paysager jusqu’à des ouvertures permettant l’arrivée de lignes de métro vers le centre de Copenhague.

Dans un second temps réalisation extension dans la continuité de l’héritage portuaire existant afin de développer le projet et renforcer l’identité de ce nouveau quartier “sur l’eau”.

En 2013, dans le cadre de cette transformation urbaine l’agence COBE porte une attention sur les

infrastructures industrielles restantes de l’ancien port. Ils reconvertissent alors un ancien silo à grains en logements et fonctions publiques. Haut de 17 étages et 9 planchers, le silo ne passe pas inaperçu dans le paysage post-industriel de Nordhavn. Il est l’une des premières réhabilitations finalisées dans le cadre de la reconversion de Nordhavn avec les Portland Tower, anciennement deux silos de stockage de ciment reconvertis par Design Group Architect, et abritant depuis 2014 un programme de bureaux au bord de l’eau, ou encore Park’n Play de JAJA architectes en 2016, un bâtiment de parking coiffé d’une aire de jeux en roof top avec une vue à 360° sur la mer et le futur quartier.

Le silo se présente comme un monolithe en béton, type silo en batterie rectangulaire.(Figure 15) Il mesure 45m de long par 13m de large, et s’élève à plus de 45m de haut. On remarque distinctement ce qui était anciennement la tour de manutention, surplombant les cellules de stockage : 33 cellules de stockage reparties en 3 rangées de 11. Au pied du monolithe on remarque que galerie inférieure des silos n’etait pas entérrée et donne sur la rue. On peut voir la salle des mamelles per-

27
Figure 16 Projet The Silo Figure 15
28
Silo d’origine

mettant l’ensachage du grain dans des plus petits contenants (tels que les sacs).

“Les bâtiments et structures industriels de Nordhavn ont joué un rôle clé dans la définition de l’identité du port. En conservant l’identité et en réaffectant les structures en béton robustes et durables, nous avons pu préserver le patrimoine de la région et minimiser l’empreinte CO2.”28

b. Stratégies d’intervention

Lors de la reconversion du silo le cabinet COBE choisit de se débarrasser des appareillages métalliques pour laisser apparaitre la trame bétonnée de la structure primaire (4m x 4m). Cette trame révèle l’emplacement des cylindres de stockage à grains métalliques utilisés lorsque le silo était en activité. La définition des surfaces d’appartement s’appuie alors sur cette trame généreuse, permettant ainsi la réalisation de 39 appartements, allant de 73m2 à 305m2, simples ou à plusieurs niveaux, allant parfois jusqu’à 7m de hauteur sous plafond. (Figure 17)

Au rez-de-chaussée (RDC) se tient la salle de récupération de grains (salle des mamelles) avec les appareillages mécaniques permettant l’ensachage. (Figure 18). Les mamelles permettent la chute des grains en entonnoire pour les deverser dans de plus petits contenants pour que le transport automobile prenne le relais. Le RDC du silo était donc un espace prévu à la base pour permettre les échanges

avec la ville. L’agence danoise a alors choisi un programme public, salle d’exposition, pour réaliser un nouveau rez-de-ville du silo et apporter de l’activité et de l’interaction entre le nouveau bâtiment de logements et le futur quartier dans lequel il est réhabilité. Enfin la transformation est pensée jusqu’au sommet du silo. Pour compléter la forme du monolithe existant COBE propose de coiffer le nouveau bâtiment avec un restaurant. Pour cela l’agence rajoute 3 planchers prévus à cet effet, permettant d’accueillir ce programme ouvert au public, et de terminer et d’accentuer la forme monolithique du silo qui devient un véritable bloc et repère dans le paysage. (Figure 19)

Le cabinet d’architectes COBE habille la façade d’origine de panneaux préfabriqués d’acier galvanisés qui contribuent également à la réalisation d’espace extérieur des logements. L’isolation du bâtiment se fait également par l’extérieur par le biais de ces panneaux préfabriqués. (Figure 16)

La conservation de la structure béton du silo a été un élément important dans la stratégie de transformation. En effet en gardant la structure durable, COBE préserve l’héritage de l’ancienne zone industrielle et minimise son empreinte carbone.

“Dans le Silo 2 740m3 de béton ont été réutilisés, équivalent à 380 tonnes de CO2 économisés. Les restes de béton provenant de la création des ouvertures en façade ont été réutilisés pour fabriquer

29
28Extrait du site officiel de l’agence COBE traduit en français. Figure 17
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Plan R+14 / Plan R+10 / Plan R+6

des assises et autres aménagements dans le paysage urbain aux alentours du silo.”29

c. Limites et critiques

Ce projet de reconversion architecturale est déclenché en 2013 soit 5 ans après l’obtention du prix pour la transformation urbaine de Nordhavn. Il émane donc d’un projet de reconversion urbain. L’agence danoise jette son dévolu sur le silo à grain du site car après sa transformation ce dernier deviendra un bâtiment habité et il sera avant tout bâtiment repère dans le paysage. Le nouveau projet doit traiter les différents défis environnementaux à différentes échelles, c’est pourquoi sur le plan architectural, la reconversion du silo est à l’image du nouveau projet et s’y intègre parfaitement.

La structure bien conservée a permis aux architectes de faire des modifications architecturales moindre et minimiser leur empreinte architecturale.

Dans cette reconsversion le gigantisme de l’échelle du silo est retranscrit dans les logements. En se basant sur la trame originelle du silo, les logements sont constitués par l’assemblages de modules de 16m2 environ. De plus les logements sont en duplex ou triplex, les surfaces d’appartements sont alors généreuses. Pour reconvertir un bâtiment industriel des années 1930 en bâtiment de logements du XXIème siècle il est nécessaire de l’adapter aux normes énergétiques

et cela passe notamment par l’isolation. Dans ce projet, le façadisme permet de traiter l’isolation par l’extérieur, par le biais de la nouvelle enveloppe. De cette manière lles architectes laissent apparent le béton d’origine au sein des logements, et cela participe au charme de l’intérieur du batiment.

COBE nous font part de leur conscience écologique et donnent des chiffres sur l’avantage écologique de la réhabilitation dans leur projet. Ils présentent en chiffre l’impact énergétique de CO2 émis et économisés en fonction des m3 de béton détruits et conservés.

La transformation de The Silo est un bel exemple de réhabilitation industrielle à travers laquelle l’agence danoise a manifesté l’importance écologique et historique de la transformation. Et dans ce projet les architectes ont su s’appuyer sur ses atouts tels que : la forme rectiligne de la strucutre et l’épaisseur du bâtiment (13m de large)

Le volume du silo se rapproche alors beaucoup des bâtiments de logements que l’on retrouve actuellement et a permis aux architectes de s’affranchir de certaines problématiques consernant la reconversion de ce type de bati.

Figure 18
31
Salle des mamelles et ensachage. 29Extrait du site officiel de l’agence COBE traduit en français. Figure 19
32
Shemas concept explicatifs de The Silo

B. Marseille, le silo d’Arenc, Eric Castalidi et Carta Associés

a. Contexte

A Marseille, dans les Bouchesdu-Rhône se trouve la 4ème plus grande opération de rénovation urbaine française : Euro-méditerranée, après Eurallile à Lille, la Part Dieu à Lyon et la Défense à Paris.

La première phase du projet Euromed est lancée en 1995 à l’initiative du maire de l’époque (Robert Vigouroux) et de l’Etat, et définit une zone d’aménagement sur 310 hectares. La seconde phase, Euromed II prend le relais en 2007 et s’étend sur 170 hectares supplémentaires.

Dans une ville portuaire, les littoraux sont les espaces les plus attractifs. Marseille lance alors la reconquête du territoire de son port autonome dans un premier temps pour impulser le projet de rénovation urbaine de sa ville. Pour la capitale phocéenne française c’est une opération d’intérêt nationale : la rénovation de son port agira comme un accélérateur de croissance et d’attractivité pour à l’avenir, devenir une ville méditerranéenne et littorale de demain, durable et innovante.

Parmi les réalisations à l’initiative d’Euroméditerranée on trouve l’aménagement de la Place de la Joliette en 1998, la rénovation des Docks en bureaux entamée en 1992 et achevée en 2002, plus récemment le silo d’Arenc rénové en salle

de spectacle et inauguré en septembre 2011, la construction de la tour CMA-CGM de 33 étages livrée en 2011 et la tour La Marseillaise avec ses 136 m de hauteur livrée en 2018.

Pris dans le jeu des infrastructures, entre darses et autoroute surélevée, le bâtiment de silos de 16 000m2 est le symbole de modernité à la pointe de l’innovation du stockage car il disposait d’un circuit à grains quasiment automatique. Il fait partie de ces cathédrales industrielles restante du début du XXème siècle témoin de l’histoire de la ville. Construit sur pilotis en 1927 par l’ingénieur Maurice Vincent, le bâtiment se présente en batterie de silos cylindriques avec, comme dit ci-dessus, sur pilotis : la galerie inférieure se trouve alors au même niveau que la rue. Le silo étire sa masse sur 130 mètres de longueur et sa tour de manutention rajoutée en 1957 culmine à 50 mètres de hauteur. (Figure 20) Le silo à blé d’Arenc désaffecté à la fin des années 1980, a été un temps menacé, jusqu’au jour où son classement in extremis au patrimoine industriel du XXe siècle, en 2004, l’a placé dans une perspective de réutilisation.

En 2000 le Grand Port Maritime de Marseille lance un appel à concours pour reconvertir le bâtiment et c’est la Ville de Marseille qui se saisit du silo. Elle confie ensuite le projet au

33
Figure 20 Silo d’Arenc originel Figure 21
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Silo d’Arenc reconverti

maître d’ouvrage délégué SOGIMA qui attribue le projet de réhabilitation à deux architectes. C’est dans le cadre du projet Euromed que le silo fera l’objet d’une transformation dans un premier temps par l’architecte Éric Castaldi pour la partie privée de bureaux puis dans un second temps par l’architecte Roland Carta de Carta Associés (C+T associés) pour la conception d’une salle de spectacle de 2000 places.

(Figure 21)

b. Stratégies d’intervention

Depuis la rue, les 57 silos céréaliers du bâtiment s’affirment et modélisent la façade de la cathédrale industrielle. Pour créer un espace capable d’accueillir plus de 2 000 personnes, Roland Carta choisit d’évider le bâtiment et préserve ainsi l’esthétique extérieur des façades. La salle de spectacle est polyvalente, elle accueille depuis septembre 2011 aussi bien des one man shows que des concerts rock ou des comédies musicales. Elle mesure 100m de long et 30m de large et ce sont des poutres en croix d’origine qui participent à sa tenue. De l’extérieur il ne reste que des demi silos qui constituent la façade et préservent l’identité historique et industrielle du bâti. Carta Associés rajoute ensuite des planchers et des poteaux en béton laissés bruts, ainsi on peut voir à l’intérieur se confronter le béton d’origine non traité et les bétons nouveaux des dalles et des poteaux coulés sur place depuis la salle des mamelles. Les pilotis surélèvent de 10m ces fonds de cylindres au dessus du sol

et l’architecte profite de cette hauteur de plafond pour faire de cette galerie le hall d’entrée son programme culturel. (Figure 22)

Dans cette reconversion 200 m³ de béton type C35/45 ont été utilisés pour créer des poutres de renfort de 1,20m d’épaisseur ainsi que 18 poteaux périphériques dans l’amphithéâtre, de 16 à 18,50 m de hauteur, dont la tête évasée soutient le complexe de toiture.

La toiture elle, est à charpente métallique et bac acier : 25 cm de béton C25/35 ont été coulés afin de créer la masse propice à préserver l’acoustique de la salle de spectacle, une des contraintes majeures du projet. Enfin les parois intérieures du silo ont été recouvertes d’un plaquage de lamelle de bois de différente densité pour absorber les éventuelles réverbérations.

c. Limites et critiques

Comme Copenhague, Marseille est une ville portuaire et c’est le projet urbain, la rénovation du littoral, qui a permis de mettre en lumière le patrimoine industriel abandonné restant sur le port. Alors que l’un se presentait sous la forme de batterie de silos rectilignes, l’autre disposait d’une batterie de silos cylindriques. Contrairement à The Silo, qui était un monolithe rectangulaire, le silo d’Arenc s’apparente à un véritable nid d’abeille. Le défi architectural est alors technique et différent du cas de Copenhague.

35
Figure 22
36
Coupe et Plan de la salle de spectacle

Le nouvel usage du silo pose un double défi :

- Capitaliser l’architecture expressive de l’époque (57 fûts cylindriques de 18,50 mètres de haut) valable pour la majorité des patrimoines réinvestis, et,

- Passer du traitement du grain au traitement du son, défi propre à ce cas de reconversion en salle de spectacle polyvalente. Même si la reconversion ne se fait pas dans le cadre d’un programme résidentiel il est intéressant ici de voir comme la question des normes techniques a été traitée. Là où la question d’isolation thermique a été traitée pour le silo de Copenhague, Roland Carta aborde la question de l’isolation phonique et acoustique d’une salle de spectacle. D’après SYNAD, entreprise de matériaux de construction qui a contribué au choix du béton pour la rénovation du silo d’Arenc, la majorité du traitement acoustique s’est fait en toiture.

Enfin, comme COBE, Carta associés a exploité les avantages que présentait la salle des mamelles pour en faire un hall d’accueil de son espace culturel, à savoir : un espace généreux autant dans sa superficie que dans sa hauteur sous plafond, chargé d’histoire : avec les bétons bruts et les mamelles apparentes, situé en rez de chaussée, le tout se prêtant parfaitement au statut de rez-de-ville pour créer le lien entre le nouvel usage du bâtiment et la ville.

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Figure 24 Hall d’entrée et accueil des évênements publics
38
Figure 23 Salle de spectacle de 2000 places

C. Wijnegem, Kanaal

a. Contexte

Le long du canal Albert à Wijnegem (Belgique) est construit en 1847 un complexe de distillerie et maltage. (Figure 27). En 2017 le site est repéré et acheté par un investisseur peu commun, l’artiste et collectionneur Axel Vervoordt. L’ilot concerné entouré d’éléments clés séduit rapidement l’artiste de part : la proximité du canal Albert, la vallée de Groot Schijn en tant que ceinture de liaison verte entre Anvers et le quartier suburbain et le quartier résidentiel avoisinant composé de maisons individuelles. Par ces caractéristiques spatiales environnantes le site industriel abandonné inspire le collectionneur pour qui la récupération et la reconversion sont une réponse et une solution à l’étalement urbain. Le futur projet imaginé permettrait de redonner vie au site industriel tout en le mettant en valeur. Pour la transformation de cette friche il imagine l’élaboration d’un ilot mixte et autonome, accueillant un système avec des industries créatives, de l’entrepreneuriat culturel, de la collaboration, des petits budgets et de la croissance progressive, dans lequel on pourrait vivre et travailler. De plus, venant d’une famille de marchands d’art, Axel V. ( investisseur) et Dick V. (directeur de projet) voient l’art comme un instrument permettant la bonne entente et communication au sein d’une société. L’ensemble du projet intitulé “Kanaal” est donc porté et

influencé par la fibre artistique de la famille Vervoordt. Le projet urbain a des fonctions variées : logements, fonctions publiques, et espace publiques qui composent un sentiment de ville et dynamisent l’ilot. Kanaal comprend alors : a. des espaces d’exposition, b. la réhabilitation des silos en résidence ainsi que les bureaux d’Axel Vervoordt, c.la fondation d’Axel Vervoordt ainsi qu’un jardin privé, d. un restaurant, e. une galerie d’expositions permanentes, f. un bâtiment d’accueil/réception, g. une boulangerie en RDC d’un immeuble résidentiel conceptualisé, h. un ensemble de bureaux le projet “Cubes”, i. des entrepôts, habitations et ateliers d’artistes, j. un second espace de restauration. (Figure 28 )

Pour la conception des différents espaces typologiques le collectionneur a fait appel à divers agences et entreprises :

- Stephane Beel pour la réhabilitation des silos en résidence

- BOGDAN & VAN BROECK pour les projets h et j

- Coussée et Goris pour les projets f / g / i

- Axel Verdvoordt et Miki Tatsuro pour la propre Fondation.

b. Stratégies d’intervention

Stéphane Beel est l’architecte en charge du projet du programme de logements dans la parcelle et donc

39
Figure 25 Maquette du projet de l’ilot Figure 26
40
Photo du projet par Jan Liégeois

de la reconversion du silo. Pour sa transformation, il conserve la silhouette grise et massive des silos permettant de jouer leur rôle de balises dans l’environnement. (Figure 26). D’autre part, il l’adapte à l’échelle domestique du logement en perçant des ouvertures dans les fûts cylindriques pour les vues et la lumière dans les logements. Il traite les cylindres de bétons individuellement et choisit d’en démolir 2 sur 6. Pour cela il sélectionne celles qui sont le plus au centre, les moins voyantes lorsque l’on regarde la silhouette du silo. Ces cellules cylindriques sont remplacées par des tours carrées. En traitant les silos de façon indépendante il crée des unités de vie circulaires d’une superficie de 47m2 environ qui, reliées par des passerelles aériennes suspendues, constituent un appartement. De ce fait les logements sont en moyenne constitués de 3 silos d’origine et 1 tour carrée, celle-ci permettant d’accueillir l’espace de vie avec des plus larges ouvertures. Ces nouvelles tours sont le résultat d’une réflexion sur les ouvertures. Selon les types de pièces dans le logement, les ouverture sont différentes car répondent à des degrés et une hiérarchie d’intimité différente (Figure 29):

- Le salon, la cuisine , la salle à manger sont des espaces de l’appartement partagés par tous les membres du ménage qui y habitent. Ils disposent et nécessitent de grandes ouvertures pour beaucoup de lumière et de perspectives. Ces larges ouvertures permettent de voir et induisent réciproquement d’être vus.

- Les chambres : il est possible de donner des vues et de la lumière à une chambre mais il faut prendre en compte la limite de l’intimité. Contrairement au salon , dans une chambre on peut voir mais on ne souhaite pas être vus.

- Les salles d’eau : n’ont pas besoin d’ouvertures obligatoires mais s’il y en a la question de l’intimité est encore plus présente que pour les chambres.

De ce fait, percer un silo pour des espaces de vie tel que le salon remet en question la quantité de béton enlevée par rapport à celle laissée. Créer de larges ouvertures pour des espaces tels que le salon, la cuisine et la salle à manger reviendrait à fragiliser la structure. C’est pourquoi Stéphane Beel a consacré un nouveau bâtiment pour ce statut de pièces.

Enfin, les silos partagent une circulation verticale avec un autre bâtiment de logements, qui lui, est plus contemporain. Le statut de cette seconde partie nous est inconnu: est-elle un second coprs de bâtiment fonctionnant avec les 9 silos tel que la tour de manutention ? Ou est-elle une nouvelle construction complémentaire aux silos, permettant de proposer une diversités de logements au sein de la même résidence? Quoi qu’il en soit cette seconde partie contient deux logements suplementaires, aux dimensions plus standard communément utilisés.

41
Figure 27 Plan masse de l’existant Figure 28
42
Plan masse projet

c. Limites et critiques

A l’abandon, les infrastructures retrouvées sur cet ilot sont témoins qu’une activité industrielle s’exerçait en ces lieux. Mais en Belgique, le patrimoine industriel n’est pas vu comme un potentiel exploitable, les propriétaires et investisseurs préfèrent la démolition à la réutilisation car celle-ci est souvent aussi coûteuse (voir moins) que la restauration de l’édifice. Avec le projet Kanaal, les Vervoordt font le pari d’y réaliser un projet viable et utilisent le patrimoine industriel comme base architecturale. Pour faire un projet viable ils imaginent une mini ville autonome au sein d’un seul ilot, avec des services qui serviraient de locomotive financière pour couvrir les frais de restauration. Part ailleurs c’est le côté historique qui a touché les artistes, spécifiant que ces édifices ont des âmes, et qu’ils seront attractifs pour un certain public. Parce qu’il est rare de trouver des exemples de projet de réhabilitation de friches industrielles en Belgique, et parce que ce qui est rare est précieux, la famille Vervoordt a misé sur ce projet.

L’opération Kanaal fonctionne aujourd’hui très bien au point qu’elle a lancé une nouvelle tendance : elle a permis d’ouvrir les yeux sur les gains de la transformation et la réutilisation du patrimoine industriel.

La stratégie de restructuration urbaine à l’échelle d’un ilot peut sembler être un choix particulier et les marchands d’art expliquent pourquoi ils ont choisi de rendre autonome une surface à une échelle

si petite :

“De manière générale, nous pensons que l’idée de densifier au lieu d’étaler, de faire vivre plus de personnes dans les villes existantes et de transformer les bâtiments existants pour cette stratégie est d’une importance essentielle pour notre époque.” 10

La famille Vervoordt interprète le XIXème siècle comme une société de proximité, efficacité, instantanée. Aujourd’hui il est pratique et préférable d’avoir n’importe quel service à proximité, atout qui a su profiter aux personnes concernées lors de la crise récente : pandémie mondiale du covid 2019.

La proposition de Stéphane Beel est une façon intéressante de remettre en question de modes d’habiter. Il propose par exemple l’association obligatoire d’une salle de bain avec une chambre ou encore comme on peut le voir dans les plans, 4 unités (3 silos d’origine et 1 tour carrée) pour un ménage de 4 personnes, soit 188 m2 pour 4 personnes (47m2 x 4). Cette proposition transgresse les normes dimensionnelles du logement standard tel que nous le connaissons car un ménage de 4 personnes loge habituellement dans un T4 avoisinant les 82m2. L’architecte propose alors des espaces plus généreux, mais à quel prix ? (Figure 30)

Enfin, dans ce cas spécifique la surface des façades est gigantesque. Comme tout matériaux dans un

43
44
Figure 29 Plan R+3

bâtiment, la façade a un poids carbone et émet du CO2. Nous savons aujourd’hui que certaines typologies de façades améliorent l’impact carbone, et ce choix devrait donc dicter celui de l’apparence et de la forme, ici nous sommes dans des cas de réhabilitation de façades en béton. Si le choix des matériaux est déjà réalisé, nous pouvons agir sur

la forme. Il est facile d’apprécier le poids carbone d’un bâtiment simplement en regardant sa façade et sa forme : ses matériaux, sa complexité ou sa compacité sont en corrélation stricte avec son impact. De plus nous savons que les façades vitrées sont des points faibles en terme d’impacts, et ce tant en raison des déperditions d’énergie

Figure 30 Typologies et surfaces habitables des logements collectifs
45

que pour leurs émissions carbone. Cela concerne dans cette situation les passerelles vitrées aériennes, équivalents aux couloirs dans les logements standards.

Figure 31
46
Photos intérieures et exterieures du silo

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c. Limites et critiques

2min
pages 46-48

C. Wijnegem, Kanaal

3min
pages 42-45

B. Marseille, le silo d’Arenc, Eric Castalidi et Carta Associés

4min
pages 36-41

II.Etudes de cas A. Copenhague, The Silo, COBE

4min
pages 30-35

C. Patrimonialisation de l’architecture industrielle

9min
pages 24-29

B. Nouvelle approche : intérêt des architectes et artistes à l’égard des silos

4min
pages 18-23

INTRODUCTION

18min
pages 4-17

Remerciements A mon professeur encadrant Monsieur Boris WELIACHEW,

1min
pages 2-3

CONCLUSION

13min
pages 71-80

D. Empreinte environnementale et nouveaux critères d’habiter

7min
pages 64-70

C. Technique, réglementations et normes

3min
pages 62-63

B. Concept

5min
pages 58-61

III. Le gain de la transformation

2min
pages 56-57

c. Limites et critiques

2min
pages 52-55

D. Oulu, The Tervahovi Silos

1min
pages 50-51

c. Limites et critiques

2min
pages 46-49

C. Wijnegem, Kanaal

3min
pages 42-45

B. Marseille, le silo d’Arenc, Eric Castalidi et Carta Associés

4min
pages 36-41

II.Etudes de cas A. Copenhague, The Silo, COBE

4min
pages 30-35

C. Patrimonialisation de l’architecture industrielle

9min
pages 24-29

B. Nouvelle approche : intérêt des architectes et artistes à l’égard des silos

4min
pages 18-23

INTRODUCTION

18min
pages 4-17

Remerciements A mon professeur encadrant Monsieur Boris WELIACHEW,

1min
pages 2-3

CONCLUSION

13min
pages 71-73, 75-80

D. Empreinte environnementale et nouveaux critères d’habiter

7min
pages 64-70

C. Technique, réglementations et normes

3min
pages 62-63

B. Concept

5min
pages 58-61

III. Le gain de la transformation

2min
pages 56-57

c. Limites et critiques

2min
pages 52-55

D. Oulu, The Tervahovi Silos

1min
pages 50-51

c. Limites et critiques

2min
pages 46-49

C. Wijnegem, Kanaal

3min
pages 42-45

B. Marseille, le silo d’Arenc, Eric Castalidi et Carta Associés

4min
pages 36-41

II.Etudes de cas A. Copenhague, The Silo, COBE

4min
pages 30-35

C. Patrimonialisation de l’architecture industrielle

9min
pages 24-29

B. Nouvelle approche : intérêt des architectes et artistes à l’égard des silos

4min
pages 18-23

INTRODUCTION

18min
pages 4-17

Remerciements A mon professeur encadrant Monsieur Boris WELIACHEW,

1min
pages 2-3
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