SoHo-ART (Lower Manhattan, New York 1965-1980) par Stephan Balthasar Müller
Philip Glass est revenu en 1972 à New York après un séjour à Paris (où il avait étudié la composition auprès de la légendaire Nadia Boulanger) et un long détour par l’Inde et le Népal. Pour financer son travail de compositeur, il a exercé plusieurs boulots : transporteur de meubles, chauffeur de taxi, plombier. À l’époque, de nombreux jeunes artistes new-yorkais vivaient dans un équilibre précaire entre leurs activités artistiques et leur source de revenus. Des célébrités internationales comme Richard Serra, Robert Wilson, Cindy Sherman, Chuck Close, Laurie Anderson, Patti Smith et Robert Mapplethorpe, pour ne citer qu’eux, vivaient alors à SoHo (le quartier de Manhattan au sud de Houston Street) en se débrouillant d’une façon ou d’une autre entre leur gagne-pain et leur vocation d’artiste. C’est ainsi que Robert Wilson a commencé en 1970, à côté de ses études d’architecture, son œuvre
de « magicien du théâtre », qui a tout de suite eu un effet enchanteur sur le monde artistique européen : un théâtre d’images s’étirant dans une lenteur ensorcelante, où des objets gigantesques et d’étranges sujets sans paroles glissaient, se balançaient, tourbillonnaient au travers de paysages de lumière scintillants. C’était l’époque des innovations révolutionnaires de la post-modernité. En ces tempslà, SoHo était un volcan qui ne cessait de cracher des masses de découvertes artistiques en fusion. Toute nouveauté artistique prend forme à partir de ce qui la précède – l’avenir dérive de l’origine : ainsi en fut-il des innovateurs étasuniens dans les domaines de la peinture, de la danse, du théâtre, de la musique. Le choc de la Deuxième Guerre mondiale avait alors donné naissance à des langages de formes qui s’étaient complètement distanciés de leurs antécédents traditionnels. La peinture abstraite (abstract expressionism), c’était du