local-contemporain 10 paysage en mouvements

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Paysage à l’échelle Extraits des notes d’Isabelle Raquin et Nicolas Lanier

Nicolas Lanier : Plutôt que « comment je regarde le paysage ? », « comment je suis regardé par le paysage ? », « comment, combien il me transforme, me touche, me change ? ». Le paysage est le sujet. Imposer le danseur comme sujet serait piégeux. Il serait vite avalé par la nature qui se suffit à elle-même, et qui est si vaste. Que le sujet soit pleinement le paysage nous permet de tirer des lignes, de jouer aussi avec notre ressenti. Il est nécessaire de passer beaucoup de temps à fermer les yeux et à écouter, juste écouter, pour prendre conscience de la temporalité de ce paysage, de là où l’on se trouve vraiment. Cette temporalité du lieu influence le rythme du spectacle, la progression du public. Cette écoute nous renseigne aussi sur les qualités auditives et les stimuli sonores. C’est intéressant d’avoir froid, de s’imprégner de sensations pour trouver les mouvements, inventer les apparitions, les déplacements, intégrer comment utiliser les creux, maîtriser les surplombs, jouer avec un public situé au-dessus de nous, ou au loin, ou très près. Ensuite, on découpe le site en petites parcelles, en qualifiant celles qui nous attirent, celles qui sont risquées. Quelles sont les temporalités de ce lieu lorsqu’on se trouve au milieu du champ, en bordure, sur la crête, avec l’horizon, dans le bois, sur la route, et aussi suspendu sur un escabeau hors sol ? Isabelle Raquin : Nicolas nous fait beaucoup arpenter le paysage, marcher : marcher pour nous faire réfléchir là où nous emmènent nos pas, ce qui « tout autour » se met en mouvement entre moi et cet environnement. Arpenter le lieu, le traverser, se perdre, se situer, s’arrêter, le tracer, le longer, le contourner, et puis marcher le lieu de nouveau.

Changement d’échelle Performance de plein air Compagnie Pas de loup Autrans, 27 et 28 janvier 2018

Nicolas Lanier : On s’y est pris très à l’avance, une année en amont, afin d’aborder ce paysage durant l’hiver et d’être en capacité de présenter le spectacle durant l’hiver suivant. Le fait de travailler un an à l’avance, donne des informations précieuses pour choisir finement les sites. Après, à la saison plus ensoleillée, nous avons alors le temps de rencontrer les gens du voisinage, de les faire parler, de les enregistrer, ce qui nous nourrit à propos de l’histoire de ce site. Isabelle Raquin : Le focus de départ c’est l’échelle, et la rencontre des corps de métier où l’échelle est au travail. On a rencontré des agriculteurs, des charpentiers, des spéléologues qui nous ont amenés sous terre, le capitaine des pompiers. C’est aussi approfondir la perception d’un territoire avec cette parole, sans se préoccuper de ce qu’on va en faire. Dans une création, il y a un moment de fouille archéologique. Récolter des témoignages des gens d’ici est essentiel, car le paysage c’est aussi un paysage humain. Cette longue durée de gestation nous donne le temps de les rencontrer, d’être sur leurs terres, de rencontrer tous les agriculteurs là où se déroulera la performance, de connaître leurs noms, de les inviter, de bâtir ainsi une profonde complicité.

Nicolas Lanier est metteur en scène, danseur et musicien de la compagnie Pas de Loup.

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Isabelle Raquin est chorégraphe, danseuse et plasticienne de la compagnie Pas de Loup.


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