Paperjam octobre 2021

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NUMÉRO 216

OCTOBRE 2021

Business zu Lëtzebuerg

Sam Tanson, la justice durable 5 453000 074017 10 5€


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Édito #Logement

Notre pierre à l’édifice Crise ou bulle. Passion ou placement. Rêve ou cauchemar. La relation viscérale qui nous lie au logement ne laisse pas la place à la demi-mesure. Que l’on soit jeune candidat acquéreur ou investisseur expérimenté, chacun a son avis sur un marché qui, s’il reflète le dynamisme économique rassurant du Luxembourg, inquiète tout autant par son risque d’exclusion d’une certaine partie de la population ou des nouveaux venus. Faisant l’objet de commentaires politiques récurrents et d’annonces de la part du gouvernement, qui a fait sortir de terre des chantiers au long cours, le logement est souvent qualifié autour de deux paramètres intrinsèquement liés : ce qui est disponible et les prix pratiqués. Et en la matière, la loi de l’offre et de la demande s’applique inexorablement. Alors que le nombre EN PRATIQUE de nouvelles construc­TABLE RONDE – CRISE DU LOGEMENT : QUI FREINE ? tions peine à suivre Le 13 octobre à partir de les arrivées sur le sol 18 heures à Luxexpo. Avec la luxembourgeois, les participation de Sara Noel Costa de Araujo (architecte gérante prix se hissent mécadu studio SNCDA, co-auteur niquement à des du pavillon luxembourgeois à la 17 Biennale d’architecture niveaux interpellants de Venise), Olivier Bastin au vu des efforts bud(CEO d’Immobel Luxembourg), Jacques Brauch (directeur génégétaires qu’ils deman­ ral de Soludec), Marc Giorgetti dent à un ménage au (gérant de Félix Giorgetti), Max Leners (avocat et activiste) revenu moyen. Pas de et Antoine Paccoud (research doute, la crise latente scientist au Liser). Cet événement est régi sous que connaît le logele régime du CovidCheck. ment est un enjeu INFOS ET INSCRIPTIONS  d’intérêt national. club.paperjam.lu e

Rareté des terrains à viabiliser, retenue de certaines parcelles constructibles par leurs propriétaires, procédures admi­ni­stratives obsolètes, manque de maind’œuvre pour les entreprises du bâtiment aux carnets de commandes surbookés… Nombreux sont ceux qui pensent détenir l’explication à une équation aux paramètres multiples et complexes. Engagé pour la modernisation du Luxembourg et son rayonnement à l’international, Paperjam thématise de longue date ce sujet qui influe directement sur l’évolution du pays et sur son image. Dans la perspective des élections législatives de 2023, nous avons choisi d’y consacrer une grande table ronde le 13 octobre prochain. « Qui freine ? », c’est la question à laquelle nous répondrons avec des acteurs de ce secteur et des experts. Et en public ! Les interventions serviront de matière à la publication d’un livre blanc destiné aux responsables politiques, en prélude à la composition des program­mes électoraux. Sans tomber dans l’écueil des débats stériles, nous nous devions d’apporter notre pierre à l’édifice du « logement pour tous » qui ne se construira pas en un jour. Mais dont il devient urgent de poser les fondations.

Auteurs CÉLINE COUBRAY ET THIERRY RAIZER

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Octobre 2021

Ristretto

Conversations

10 #POLITIQUE 12 GILLES BAUM

26 SAM TANSON

« La justice n’est qu’un miroir de la société »

« Rien ne peut remplacer la présence en classe »

38 LOLA VALERIUS

« Il y a un vrai marché à conquérir dans le chocolat »

14 #ENTREPRISES 16 GUY CASTEGNARO

«Aucune loi n’impose la vaccination »

44 PHILIPPE SEYLL

« Nous ne voulons pas accompagner le changement technologique, mais l’initier »

18 #PLACEFINANCIÈRE 20 SINOR CHHOR

« L’investissement responsable est dans notre ADN»

p.  38

Data Dada 24 #JEUNESSE

La jeune chocolatière Lola Valerius pense ses créations comme une orfèvre, sans pour autant délaisser l’essentiel : le goût.

La garde d’enfants, un business évolutif

50 FLORIAN CRAEN

« La clientèle luxem­bour­geoise est une très belle clientèle » –

54 CHRISTIAN MOSAR

« Critiquer la culture pendant 15 ans c’est bien, mais à un moment il faut la faire ! » –

60 FRÉDÉRIC GILLEN

« Je crois au futur de l’imprimerie » –

64 BERYL KOLTZ

Photos

Andrés Lejona, Matic Zorman

«  Notre mission est de placer le pays sur la carte » –

70 CHRISTOPHE SCHILTZ

p.  4 4 Philippe Seyll, le CEO de Clearstream Banking, aborde la transformation digitale du secteur des fonds avec pragmatisme, mais ambition.

« Souvent, les gens connaissent le nom du Conseil d’État, mais…  » OCTOBRE 2021

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Octobre 2021

14.000 millions d’euros 1.386 mios € 12.000

1.074 mios €

10.000

80 Enjeux

Exporter  : une question d’identité

COMMERCE EXTÉRIEUR DU LUXEMBOURG PAR PAYS (EN MILLIONS D’EUROS) 1995-2020 Hors Europe

9.485 mios €

8.000

6.000

ays de l’Union P européenne, dont : Belgique France Allemagne

4.000

82 TOILE DE FONDS

L'économie face au défi de l'exportation

utres pays A d’Europe (Angleterre, Suisse…)

2.000

0

1995

86 EXPO 2020

2000

2005

2010

2015

2020

p.  80

« Notre présence à Dubaï apparaissait comme une évidence »

Petite économie ouverte sur l’international, le Luxembourg a l’export dans la peau. Des marchés limitrophes aux partenaires lointains, le business réalisé en dehors des frontières est vital pour maintenir sa croissance.

88 PAROLES D’EXPORTATEURS Jouer la carte des partenariats

90 PAROLES D’EXPORTATEURS

Les défis des marchés de proximité

94 PAROLES D’EXPORTATEURS « Plus on veut aller loin, plus il faut innover »

114

Lifestyle

96 PAROLES D’EXPORTATEURS

122 MA MAISON 124 MON ARGENT 126 MON STYLE 128 MA COLLECTION

L’exportation, un cœur de métier

102 Portfolio

Io sto bene

Business Club

130 MA RECETTE p.  102 Ilario et Simonetta Mosconi, deux visages de la communauté italienne au Luxembourg, mise à l’honneur dans ce portfolio et dans le prochain film de Donato Rotunno, Io sto bene.

132 MON MENTAL 136 La liste

6 dirigeants qui feront Esch2022 Débat public 08 NATHALIE OBERWEIS 76 JEAN-LOUIS ZEIEN

Advertoriaux

Photos

Matic Zorman, Andrés Lejona

22 DEGROOF PETERCAM

LUXEMBOURG Quand la succession patrimoniale se fait internationale

36 LAZARD FUND MANAGERS L’analyse fondamentale, socle de la performance p.  1 22 Musique, lecture ou conversation avec des amis... Françoise Kuth se sent bien dans son appartement, qu’elle nous fait découvrir.

78 SPUERKEESS

Du Grand-Duché à la Grande Région et vice versa OCTOBRE 2021

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Débat public Depuis des mois, nous baignons dans une fausse sécurité. À chaque discussion, interview, échange autour des mesures anti-Covid, la ministre de la Santé Paulette Lenert (LSAP) nous rappelle que la seule incertitude restante, ce sont les variants. Le virus circule donc, mais pas seulement au Luxembourg. Nous avons beau discuter toutes les semaines de mesures nationales anti-Covid, aussi longtemps que nous n’aurons pas de solution mondiale pour cette pandémie, le virus et ses variants circuleront. En fait, il s’agit d’une question de principe : permettre à tout un chacun de se faire vacciner. Que le vaccin soit un bien commun et pour le bien commun. Déi Lénk plaide depuis plusieurs mois pour la suspension des brevets sur les vaccins anti-Covid. Il n’y a rien de choquant là-dedans ; le contexte récent d’une pandé­mie inédite le justifie largement. L’argent public injecté, là aussi, sans précédent dans les industries pharmaceutiques le justifie également. Une soixantaine d’États membres de l’Organisation mondiale du com­merce (OMC) l’exigent. Or, des discussions sont en cours depuis des mois au niveau de l’OMC, sans résultat apparent.

Nathalie Oberweis Députée déi Lénk C’est une chance ratée, encore une fois. Une chance ratée de sauver des vies. Une chance ratée pour un multilaté­ ralisme au lieu du chacun pour soi. Une chance ratée pour l’Union européenne qui aurait pu se situer internationa­ lement comme acteur qui s’engage vraiment et concrète­ ment pour un humanisme et des valeurs que nous aimons tant défendre. Une chance ratée de rééquilibrer la relation avec les industries pharmaceutiques qui, elles, ont trop de pouvoir sur les décideurs politiques. Une chance ratée pour une coopération interétatique dans le domaine de la santé. Une chance ratée également de surtout tirer des leçons de cette pandémie qui n’est pas la première et qui ne sera pas la dernière. Surtout si nous continuons à vouloir foncer à toute vitesse vers un état de normalité apparente que nous avons connu avant le Covid-19. Mais n’oublions pas que c’est cette réalité qui a engendré la pandémie. Une chance ratée donc de ne pas oublier. De ne pas reproduire les erreurs de l’Histoire. En conformité avec le principe de rotation mis en place par déi Lénk, Nathalie Oberweis fait partie, avec Myriam Cecchetti, des deux nouvelles députées qui ont pris au mois de mai dernier la relève de Marc Baum et David Wagner. Ce débat public, en principe mensuel, est un rendez-vous qui donne la parole aux représentants élus au Parlement. Photo ANTHONY DEHEZ

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NOVEMBRE MARS 2020 2021

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Ristretto #Politique Sélectionné par IOANNA SCHIMIZZI

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SURPRENANTE

« Je me vois d’abord derrière le comptoir d’un bistro sympa dont je serais propriétaire. »

C’est la réponse – plutôt inattendue – de la ministre de la Santé, Paulette Lenert (LSAP), à la question posée par le magazine Victor de la Fédération des jeunes dirigeants d’entreprise : « Où vous voyez-vous dans trois ans : Premier ministre au Luxembourg ou au conseil d’administration de Pfizer-BioNtech ? » À suivre. SOLIDAIRE

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LUCIDE

« Je savais très bien que mettre des agents de sécurité dans la rue n’allait pas résoudre l’ensemble du problème.  »

Le 6 septembre, la bourgmestre de la Ville, Lydie Polfer (DP), a réagi à la publication, sur les réseaux sociaux, d’une vidéo (devenue virale) sur laquelle on voit un homme se faire mordre pendant plusieurs secondes par un chien d’une patrouille de la société privée G4S.  4

RÉALISTE

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ENGAGÉE

« Nous devons tout faire pour faciliter, à l’ensemble de notre population, la participation aux élections communales et l’engagement dans la politique locale.  » La ministre de l’Intérieur Taina Bofferding (LSAP) a confirmé, le 2 septembre, la fin du délai de 5 années de résidence au Luxembourg pour que les étrangers puissent voter aux élections communales. Les prochaines auront lieu le 11 juin 2023.  6

ALERTÉ

« Nous voulions attirer l’attention de la population pour dire que, probablement, le cours de l’histoire allait changer. Cette phrase s’est avérée être exacte.  »

20 ans après, Jean-Claude Juncker (CSV), qui était Premier ministre à l’époque des attentats du 11 septembre 2001, se souvient très bien de ce moment : « C’était une journée remplie, avec un peu d’angoisse, et on ne savait pas vers où on allait se diriger. Lorsque j’ai vu le 2e avion percuter la tour, il était devenu évident que ce n’était pas un accident, mais un attentat terroriste ».

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Photos

La modernisation tant attendue de la ligne ferroviaire Bruxelles-Luxembourg s’est invitée en marge des discussions de la réunion dite Gaïchel des gouvernements belge et luxembourgeois. Ces rencontres ayant lieu depuis 2004, celle de cette année était organisée au Luxembourg, le 31 août. L’occasion, pour le Premier ministre Xavier Bettel (DP), de qualifier le dossier de « monstre du Loch Ness. »

Nader Ghavami (archives), Matic Zorman (archive) et SIP / Jean-Christophe Verhaegen

« On s’est transformé un peu en triangle des Bermudes des transports rapides dans la région belge et allemande. »


CLOSE UP

on Belgian contemporary art

Chez Degroof Petercam en collaboration avec le Musée d’Ixelles Journées Portes Ouvertes sur inscription

2 / 10 / 16 / 24 OCT. 2021

www.events-degroofpetercam.lu Banque Degroof Petercam Luxembourg S.A. Cloche d'Or 12, rue Eugène Ruppert L-2453 Luxembourg

Méduse Orpheline, Marcel Berlanger, 2012. Tous droits réservés. Collections Musée d‘Ixelles, Bruxelles.

EXPOSITION D’ARTISTES BELGES


Ristretto #Politique

« Rien ne peut remplacer la présence en classe » Gilles Baum, député (DP) et président de la commission parlementaire de l’Éducation nationale, revient sur le protocole sanitaire mis en place dans les écoles depuis la rentrée du 15 septembre.

Une des priorités du gouvernement est, comme l’année passée, que les élèves étudient au maximum en présentiel, et non pas à distance ? Oui, tout à fait. L’enseignement à distance a fait ses preuves, notamment durant la première phase de la pandémie, mais rien ne peut remplacer la présence de l’enseignant en classe, surtout pour des enfants qui ne sont peut-être pas très bien accompagnés à la maison ou qui n’ont pas les moyens techniques et digitaux pour suivre. Au final, les établissements ont été fermés uniquement deux semaines depuis le début de la crise sanitaire. Nous avons toujours fait le maximum pour que les enfants puissent continuer à aller à l’école, et c’est donc dans cette continuité que les élèves sont retournés en classe le 15 septembre. Une des annonces phares a notamment été le retrait du masque en classe… Oui, la population scolaire est aujourd’hui largement vaccinée, puisque 90 % des enseignants et 55 % des élèves de 12 à 18 ans le sont. Nous sommes donc proches de l’immunité de groupe. La situation est donc beaucoup plus favorable qu’en septembre 2020, et c’est pour cela que la décision a été prise de pouvoir ôter le masque lorsque les élèves sont assis. Mais tous doivent le porter lorsqu’ils se déplacent en classe et dans les bâtiments. Vous aviez eu des retours des enseignants et des parents d’élèves pour aller vers cela ? Oui, depuis le mois de mai, les parents ont été très actifs pour demander à ce que les enfants ne portent plus le masque. Mais le taux de vaccination n’était pas encore suffisamment élevé à l’époque. La stratégie d’autotests du gouvernement va se poursuivre dans les écoles et les lycées ? Oui, elle s’est avérée très performante pour éviter des chaînes d’infections, et plus de 90 % des élèves ont participé aux dispositifs d’auto­ testing. Pour les enfants du cycle 1, qui ont de 3 à 5 ans, deux autotests doivent être réalisés par semaine à domicile. À partir du cycle 2 et au-delà, deux autotests seront réalisés par semaine à l’école pour l’enseignement fondamental, et un test à l’école et un test à domicile pour l’enseignement secondaire.

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Que se passe-t-il lorsqu’un cas positif apparaît dans une classe ? Cela dépend des situations et des âges des enfants. En présence d’un ou deux cas positifs, pour les élèves du cycle 1, tous les élèves sont mis à l’écart. Au sein de l’enseignement fondamental (cycles 2 à 4), de l’enseignement secondaire et dans les centres de compétences, le port du masque redevient obligatoire, et les élèves vaccinés ou rétablis ne sont pas mis en quarantaine. Les élèves qui ne sont ni vaccinés ni rétablis seront mis en quarantaine avec une autorisation de sortie pour fréquenter l’école, qui sera soumise à l’obligation de participer à un testing renforcé toutes les 48 heures. La quarantaine sera levée avec un test PCR négatif après le sixième jour, qui sera effectué soit par une équipe mobile du LNS, soit sur ordonnance. Et à partir de trois cas positifs dans une classe ? Au cycle 1, tous les enfants sont placés en quarantaine sans autorisation de sortie. À partir du cycle 2, les élèves vaccinés ou rétablis ne seront toujours pas mis en quarantaine. La quarantaine des élèves ni vaccinés ni rétablis sera levée avec un test PCR réalisé sur ordonnance après le sixième jour. Et il n’y aura pas d’exception ni d’autorisation de sortie. Il n’y a pas de dispositifs spécifiques d’aération ou de purification qui doivent être mis en place dans les écoles ? Non, ce qui est préconisé, c’est une aération régulière des salles de classe. La Direction de la santé considère que les purificateurs d’air ne sont pas appropriés pour les salles de classe, mais qu’ils sont au contraire nécessaires dans des lieux stériles comme les salles d’opération. Qu’en est-il au sein des maisons relais ? Il y a également un assouplissement des règles de port du masque. À l’extérieur, le port du masque et la distanciation physique ne sont pas obligatoires. À l’intérieur, le port du masque et la distanciation physique ne sont pas obligatoires que lorsque le nombre de personnes participant simultanément à la même activité ne dépasse pas 10.

En présence d’un ou deux cas positifs, le masque redevient temporairement obligatoire, précise Gilles Baum.

Interview IOANNA SCHIMIZZI Photo ROMAIN GAMBA



Ristretto #Entreprises Sélectionné par CATHERINE KURZAWA

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INSPIRÉ

« L’entrepreneur doit s’attendre à vivre sur courant alternatif, en particulier au début, où atteindre ses objectifs est pratiquement impossible. Ou rare. » Le multi-entrepreneur et philanthrope Alexandre Mars était de passage au Luxembourg et à Metz le 10 septembre dans le contexte du 9e Grand Est Numérique. L’occasion de distiller à paperjam.lu quelques clés pour devenir entrepreneur.

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MOTIVÉ

« Ce temps est étrange : le marché de l’espace n’a jamais été autant disrupté… ce qui crée autant d’opportunités ! » Ruy Pinto, directeur technique de SES, le 13 septembre. L’opérateur luxembourgeois de satellites lancera, fin octobre, son nouveau satellite, SES-17. Thales Alenia Space finalise les tests sur ce premier des cinq satellites de SES, dont le lancement est prévu cette année.  3

SILENCIEUX

Avec au moins 120 véhicules électriques sur une flotte de 700 appareils, Voyages Emile Weber veut accélérer l’électrification de son parc. Depuis la mi-septembre, l’opérateur déploie ses Nightlifebus en version électrique. « Ils émettent jusqu’à 30 décibels de moins ! », soulignait le 13 septembre Cyrille Horper, en charge du marketing et de la communication des solutions de mobilité du voyagiste basé à Canach.  4

OBSERVATEUR

« Il suffit qu’il y ait un petit choc, parfois un petit choc grave, pour que toute une industrie se mette au garde-à-vous. » Guy-Philippe Goldstein, enseignant à l’École de guerre économique de Paris, conseiller de PwC et d’Expon Capital pour la cybersécurité et auteur de romans de science-fiction, a participé, le 10 septembre dernier, au #GEN2021 à Metz. Devant une salle comble, l’auteur du roman Babel Minute Zéro a livré son analyse des enjeux entourant la cybersécurité.

Eurofins Scientific est entrée au CAC 40 ce 17 septembre, en lieu et place d’Atos. Le siège social de cette entreprise d’analyses et de tests française est basé au Luxembourg, ce qui en fait la deuxième société grand-ducale à figurer dans l’indice vedette de la Bourse de Paris, aux côtés d’ArcelorMittal. « Eurofins Scientific a été l’un des groupes européens ayant connu la plus forte croissance, avec un chiffre d’affaires en hausse de 32 % (en moyenne composée) depuis 1988 grâce à la croissance organique et aux acquisitions, et un cours en bourse en hausse de plus de 30 % chaque année (en moyenne composée) depuis son introduction en octobre 1997 », a mis en avant, le 10 septembre dernier, son fondateur et PDG, Gilles Martin.  6

AMBITIEUX

« SnowWorld va poursuivre le développement du site pour en faire une station de sports d’hiver couverte complète, en commençant par l’ajout de services de restauration et de vente au détail. »

Wim Hubrechtsen, PDG du groupe néerlandais SnowWorld qui a remporté l’appel d’offres européen pour l’exploitation du Snowhall d’Amnéville pour une durée de huit ans. La plus longue piste de ski intérieure d’Europe (620 mètres) va, par conséquent, passer dans le giron du milliardaire belge Marc Coucke.

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Edwin Tse, Matic Zorman et Shutterstock

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Ristretto #Entreprises

« Aucune loi n’impose la vaccination » Guy Castegnaro, avocat spécialisé en droit du travail, revient sur les droits et obligations des entreprises dans un contexte sanitaire toujours placé sous le signe du Covid-19.

L’obligation d’être vacciné imposée par l’entreprise Pimco a beaucoup fait parler d’elle. Pourquoi est-elle illégale ? Parce qu’elle heurte le principe fondamental du droit au respect de la vie privée et de l’intégrité physique. Se posent également des problèmes au regard du règlement général sur la protection des données (RGPD). Plus généralement, les entreprises ontelles le droit de demander le CovidCheck à leurs salariés ? En principe, non, car une telle démarche pourrait être considérée comme une obligation déguisée de se faire vacciner ou de dévoiler un élément concernant leur état de santé. Une entreprise n’a pas le droit, légalement, de demander à ses salariés s’ils sont vaccinés. Et que se passe-t-il si le salarié ne présente pas de CovidCheck, dans le cas où son employeur le lui demande ? Peut-il être sanctionné ? Non. En l’absence d’une loi en ce sens, un licenciement ou toute autre mesure disciplinaire vis-à-vis du salarié en question serait contraire à la loi. Le Centre hospitalier de Luxembourg avait annoncé imposer le vaccin anti-Covid à ses nouveaux embauchés. Était-ce légal ? À mon avis, non. En cas d’embauche, il incombe exclusivement au médecin du travail de décider si un salarié est médicalement apte ou inapte pour le poste envisagé. La vaccination contre le Covid-19 ne figure pas parmi les éléments que le médecin du travail doit analyser dans ce contexte. Reste à savoir si, dans la situation particulière actuelle, le droit à la protection de la vie privée pourrait être temporairement restreint dans un souci de santé publique. À mon avis, seules une loi et, en dernière instance, une juridiction pourront apporter une réponse précise à cette question. Certaines professions peuvent-elles se voir imposer la vaccination, et d’autres non ? Aucune loi au Luxembourg ne permet d’imposer la vaccination dans un secteur plutôt que dans un autre, contrairement à certains pays comme la France, où une loi a été adoptée en urgence cet été. Quelles mesures les entreprises sont-elles autorisées à prendre dans le cadre du retour au bureau de leurs salariés ?

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Comme indiqué, l’employeur ne peut actuellement pas obliger les salariés actuels ou futurs à se faire vacciner. Rien ne lui interdit cependant de le recommander. Les réunions obligatoires sous le régime CovidCheck sont également risquées, et le fait d’autoriser les salariés refusant de participer à ces réunions à y assister par visioconférence me semble également difficile, car cela pourrait être considéré comme une obligation déguisée du salarié d’informer l’employeur de son état de vaccination. Il en va de même pour la séparation physique – étages ou bureaux différents – des salariés vaccinés et non vaccinés, testés négatifs ou rétablis du Covid-19 au sein d’une même entreprise. Qu’en est-il si le travail qui doit être effectué ne peut pas se faire à distance ? Comment concilier cela avec la sécurité de tous les autres employés ? L’employeur reste tenu de fournir du travail. Par conséquent, des aménagements du lieu de travail devraient être mis en place : maintien des gestes barrières et mesures sanitaires, port du masque, mise à disposition de gel désinfectant, distanciation physique, etc. Si une minorité d’employés refuse le vaccin, est-il normal que les autres doivent porter le masque ? En plus du nombre de travailleurs, il faut tenir compte de la nature des activités et de la configuration des espaces. À l’heure actuelle, les recommandations sanitaires restent les mêmes : maintenir le port du masque dans les espaces clos lorsqu’une distance physique d’au moins deux mètres n’est pas possible, que les salariés soient vaccinés ou non. Ainsi, tous les salariés, quel que soit leur état de vaccination, peuvent enlever leur masque si la distance de deux mètres est respectée. Peut-on imaginer un jour des entreprises poursuivies par un salarié tombé malade ? Cela n’est pas impossible. Toutefois, dès lors que l’employeur sera en mesure de démontrer avoir mis en œuvre et veillé au respect des mesures sanitaires préconisées par la Direction de la santé, le risque d’une mise en cause s’en trouve réduit.

Pour Maître Castegnaro, les réunions sous régime CovidCheck obligatoire sont risquées d’un point de vue légal.

Interview IOANNA SCHIMIZZI Photo MIKE ZENARI (ARCHIVES)


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Ristretto #PlaceFinancière Sélectionné par MARC FASSONE

REMONTÉ

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« C’est une étude faite par des gens qui ont décidé depuis longtemps que certains centres financiers sont des paradis fiscaux. »

Nicolas Mackel, CEO de Luxembourg for Finance, a dû puiser dans son expérience de diplomate au moment de commenter, le 7 septembre, l’étude de l’Observatoire européen de la fiscalité (OEF), qui place le Luxembourg sur sa liste des paradis fiscaux. LUCIDES

2

« L’année 2020 a montré que la banque n’est pas à l’abri d’une évolution défavorable affectant rapidement et significativement ses résultats, même avec un bilan a priori très fort. » Emmanuel Baumann, directeur de la Société nationale de crédit et d’investissement (SNCI), et Patrick Nickels, son président, ont présenté au titre de l’exercice 2020, le 23 août, une perte historique de 22,76 millions d’euros. Ils s’attendent à un exercice 2021 difficile. COMPARATIVE

3

Selon l’Autorité bancaire européenne, 22 banquiers de la Place ont touché en 2019 un salaire annuel de plus d’un million d’euros. Soit un de moins qu’en 2018. Dans le détail, 16 ont été rétribués entre 1 et 2 millions d’euros, quatre entre 2 et 3 millions, un entre 3 et 4 millions et un dernier entre 4 et 5 millions, selon une étude publiée le 19 août.Le champion absolu est installé sur le sol anglais : il a perçu, en 2019, entre 64 et 65 millions d’euros.  4

MILITANT

« Nous réaffirmons notre engagement en faveur de la ‘durabilité par défaut’, en cherchant à générer un impact positif dans le monde réel sans sacrifier la performance. » James Purcell, responsable de l’investissement durable chez Quintet, commentant, le 8 septembre, le partenariat signé entre Quintet et Amundi au terme duquel la banque privée va investir 200 millions dans l’Amundi Funds Emerging Markets Green Bond.

« Les produits structurés que les grandes banques proposent en Europe ne sont pas spécialement plus risqués. » Fabrice Todeschini, président de la toute jeune association Luxsipa, qui veut redorer le blason des produits structurés, comme expliqué le 15 août.  6

FERME

« Ce n’est pas un tapering. »

Christine Lagarde, la présidente de la BCE, a insisté, le 9 septembre, lors de la conférence de presse suivant la décision du conseil des gouverneurs, sur le fait que l’annonce du ralentissement du programme d’achats d’urgence face à la pandémie (PEPP) ne constituait pas l’amorce d’un retournement de la politique monétaire accommodante de son institution.

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Quintet, Shutterstock et Nader Ghavami (archives)

PÉDAGOGUE

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Ristretto #PlaceFinancière

« L’investissement responsable est dans notre ADN » Nommée en juillet CEO de Nordea Investment Funds, et première femme à occuper ce poste, Sinor Chhor se présente et détaille ses ambitions.

Quels sont vos objectifs personnels pour Nordea Investment Funds ? Mon objectif est de continuer à soutenir la croissance qu’a connue Nordea Investment Funds depuis son lancement ici il y a une trentaine d’années et de renforcer encore plus sa position au Luxembourg. Quelles sont les origines de l’implantation de Nordea Investment Funds au Luxembourg ? L’idée était de créer un fonds commun de placement utilisant le régime Ucits pour servir les clients de la banque privée du groupe Nordea à partir du Luxembourg. Placer cette société au Luxembourg a permis d’atteindre une distribution globale efficace et de toucher un large éventail de clients. Comment ont évolué vos activités depuis ? Notre croissance a été constante. Nous avons développé nos forces de vente, nous avons élargi notre gamme de produits, et nous sommes aujourd’hui devenus une société à part entière au service d’une clientèle internationale. Nous gérons aujourd’hui une large gamme de classes d’actifs. Nous sommes environ 200 employés au Luxembourg, de 30 nationalités différentes. En quoi vos produits peuvent-ils se différencier de ceux de la concurrence ? Ce sont des produits qui font la part belle au développement durable. L’investissement responsable est ancré dans notre ADN nordique. Qui sont les clients de vos produits ? Nos fonds sont distribués dans de nombreux pays, principalement en Europe, mais aussi dans d’autres juridictions, ainsi que dans les pays nordiques. Quelles sont les spécificités des marchés nordiques pour les fonds d’investissement ? En termes de distribution, ces marchés sont très matures et ils passent principalement, majoritairement, par le canal bancaire. Et c’est purement pour des raisons historiques. C’est aussi un marché important en ce qui concerne les fonds de pension et les assurances. Revenons sur votre parcours. Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ? J’ai commencé ma carrière dans le secteur des services financiers en 2002 ici, au Luxembourg, chez EY, et plus spécialement dans des métiers d’asset servicing en charge de l’audit de grandes institutions financières et de gestionnaires d’actifs mondiaux. J’ai ensuite rejoint Fidelity en 2010 en tant que directeur associé

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responsable de la fonction de conformité et de la gouvernance des filiales et des succursales. J’ai aidé de nombreux fonds internationaux à mettre en œuvre la directive Ucits lorsque la réglementation est entrée en vigueur. Que vous ont apporté ces expériences antérieures lors de votre entrée chez Nordea ? Pendant mon expérience chez Fidelity, j’ai eu l’occasion d’approfondir mes connaissances et mon expérience dans l’aspect international de la gestion d’actifs. J’ai été exposée aux différentes réglementations auxquelles les gestionnaires d’actifs étaient soumis. J’ai ensuite rejoint Nordea ­Luxembourg en 2016 au même poste, et pour les mêmes fonctions. Comment avez-vous vécu votre nomi­ nation au titre de managing partner ? Je suis très fière d’être la toute première directrice générale de Nordea Investment Funds au Luxembourg. C’est un point important que je veux souligner. Je pense que cela témoigne de l’importance que le groupe Nordea accorde à la diversité. Vous avez été nommée en juillet. Comment s’est passée votre prise de fonction ? Ces deux derniers mois, j’ai eu la chance de pouvoir dialoguer avec de nombreux collègues et de rencontrer beaucoup d’équipes différentes. Et j’ai été frappée par leur motivation et leur volonté de toujours placer les intérêts des clients au centre de leurs préoccupations. Quel type de manager êtes-vous ? C’est une question que vous devriez poser aux membres de mon personnel… Je suis quelqu’un qui essaie de sortir de sa zone de confort, et j’incite mes collègues à en faire de même. Je suis aussi quelqu’un qui pousse les membres de son équipe à atteindre leur potentiel maximum. Je les encourage à développer leurs compétences et à en acquérir de nouvelles. Sinor Chhor ambitionne de renforcer la position de Nordea Investment Funds au Luxembourg. Interview MARC FASSONE Photo ROMAIN GAMBA


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Ristretto #Investissement

Quand la succession patrimoniale se fait internationale Contenu sponsorisé par Degroof Petercam Luxembourg

Depuis la création de l’UE, la libre circulation des personnes et la mondialisation notamment, le patrimoine de tout un chacun ne se concentre plus essentiellement dans un seul pays. Qu’en est-il d’un point de vue légal et fiscal au moment de la succession ? Rencontre avec Florence Waûters, Estate Planner chez Degroof Petercam.

Qu’entend-on concrètement par « internationalisation d’un patrimoine » ? De nombreux résidents luxembourgeois ne sont pas nés au Luxembourg ou sont de nationalité étrangère, et disposent souvent de biens dans leur pays d’origine ou dans un pays étranger en plus de leur patrimoine luxembourgeois. Leurs enfants peuvent aussi, à leur tour, avoir quitté le foyer pour aller vivre et travailler dans un autre pays. On aboutit donc à un patrimoine familial disséminé dans différentes juridictions, patrimoine dont les héritiers sont eux-mêmes parfois éloignés. En quoi cela complique-t-il la transmission du patrimoine ? Vous l’aurez sans doute anticipé : dans le cas d’une succession, il faut alors considérer les dispositions juridiques applicables dans les différents pays où des biens se situent ainsi que celles des pays de résidence des héritiers et du défunt. D’un point de vue juridique, le processus de transmission successorale peut être complexe, notamment si l’on ne dispose pas d’une visibilité parfaite sur l’étendue géographique du patrimoine. D’un point de vue fiscal, des cas de double imposition peuvent se présenter. Que faut-il alors considérer ? Dans le cadre d’une succession, il faut considérer deux grands volets : le volet civil d’une part, le volet fiscal d’autre part. Le volet civil permet de répondre aux deux questions suivantes : « qui hérite ? » et « de combien ces personnes héritent ? ». Si chaque pays avait auparavant ses propres critères législatifs, le règlement européen sur les successions de 2015 a permis une harmonisation sur ce point. En principe, la loi applicable est celle du dernier pays de résidence du défunt avec la possibilité d’opter de manière explicite pour la loi applicable de la nationalité du défunt. Et d’un point de vue fiscal donc ? Le volet fiscal permet quant à lui de répondre à la question : « quel va être le montant des droits de succession que je vais devoir payer ? ». Ici, l’harmonisation n’existe pas entre les différents pays et le patrimoine concerné pourrait donc être imposé dans plusieurs pays. Dans le cas d’un résident luxembourgeois, la transmission de l’ensemble des biens du patrimoine, à l’exception des biens immobiliers situés à l’étranger, sera taxée. Pour un non-résident luxembourgeois,

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seuls les biens immobiliers situés au Luxembourg détenus en direct feront l’objet d’une imposition aux droits de mutation par décès luxembourgeois. Et pour les héritiers ? Il faut également comprendre où se trouvent les ­héritiers car ils pourraient aussi être redevables de droits de succession dans leur pays de résidence. Par exemple, en France, la portion du patrimoine qui pourrait être soumise aux droits de succession français va dépendre depuis combien de temps l’héritier est résident en France au moment de la succession. Au-delà de ces dimensions économico-­ juridiques, à quoi faut-il être attentif ? La succession n’est pas un sujet simple à aborder pour les légataires comme pour les héritiers. Je dirais donc que la clé d’une succession patrimoniale internationale réussie tient en deux mots : anticipation et communication, entre les membres de la famille et avec son conseiller patrimonial. C’est ce que vous recommandez à vos clients ? Absolument, je pense notamment à l’une de nos clientes, Inès, dont les enfants sont à l’étranger, et qui souhaitait faire le point sur son patrimoine, le protéger aussi, puis le transmettre. Quels sont les services de la banque à ce sujet ? Certains de nos clients sont présents chez Degroof Petercam depuis très longtemps. Nos équipes dédiées à la planification successorale peuvent ainsi suivre ces patrimoines familiaux génération après génération et par là même s’assurer de leur bonne transmission.

Florence Waûters nous renseigne sur la façon de gérer une succession patrimoniale internationale.

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Photo SIMON VERJUS (MAISON MODERNE)


Florence conseille ses clients dans la transmission de leur patrimoine.

Grâce à elle, Inès a bénéficié d’une planification successorale internationale.

Growing together


Data Dada #Jeunesse

La garde d’enfants, un business évolutif 88.058 enfants avaient entre 0 et 12 ans au Luxembourg en janvier 2021. Pour 59.891 places dans les services d’accueil, où viennent aussi les frontaliers. Résultat : une liste d’attente plus ou moins longue, selon les communes. Comment les services d’accueil se sont-ils organisés au fil des années face à une telle demande ? Réponse en chiffres. Auteur MATHILDE OBERT 60.000 LÉGENDE Évolution des agréments : Assistants parentaux Services d’éducation et d’accueil commerciaux Services d’éducation et d’accueil conventionnés Source

Évolution du nombre de places Évolution du nombre d’enfants qui utilisent le chèque-service accueil

Ministère de l’Éducation nationale, de l’Enfance et de la Jeunesse

50.000 2010 Le 1er mars 2009, le chèque-service accueil est opérationnel. Le but est d’assurer l’accès aux structures d’accueil, peu importe la situation économique des parents. Fin 2010, on compte 7.692 places supplémentaires par rapport à fin 2009.

40.000

689

696

665

620

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30.000 368 346

354

327 278 222 20.000

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10.000

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2010


TOP 5

46

Babilou Family

27

Crèche Barbara

19

La Luciole

15

Rockids

13

Crèche Nascht Butzemillen

LEXIQUE

2020 Au 31 décembre 2020, 1.295 agréments étaient enregistrés pour 59.891 places. Un nombre qui peut paraitre élevé par rapport aux 49.035 béné­ ficiaires du chèque-service accueil. Mais le taux d'occupation des crèches est variable selon que la structure se situe dans une zone plus ou moins peuplée. L’offre a en effet plus de mal à suivre dans la capitale.

Classement des 5 plus grands groupes de gestion­naires de services d’éducation et d’accueil commerciaux au Luxem­bourg selon le nombre d’agréments (sur base des sites internet des groupes au 3 septembre 2021).

Services d’éducation et d’accueil (SEA) Crèches, foyers de jour, maisons relais, foyers scolaires… les SEA regroupent toutes ces struc­tures accueillant les enfants jusqu’à 12 ans. Les SEA conventionnés sont gérés par une commune, un syn­dicat de communes ou une asbl. Les SEA commerciaux (ou structures privées) ont un but lucratif.

59.691 1.800

Assistants parentaux (AP) Les AP exercent sous le statut d’indépendant pour la prise en charge d’enfants de 0 à 12 ans. Ils ne peuvent pas en accueillir plus de cinq simultanément. Mini-crèches Depuis 2019, ce modèle permet ­d’accueillir jusqu’à 11 enfants. Seulement deux deman­des d’agrément ont été introduites et accordées depuis la mise en place de l’agrément.

694

1.500

633 582 49.035

2016 Depuis septembre 2016, les enfants dont au moins un parent est tra­vailleur frontalier peu­vent bénéficier du chèque-service accueil. Ils étaient 45.112 résidents et 709 fron­ taliers bénéficiaires au 31 décembre.

2017 En octobre 2017 est mis en place le programme d’édu­cation plurilingue gratuit pour les enfants de 1 à 4 ans, obligatoire dans les services d’éducation et d’accueil presta­taires du chèqueservice accueil, pour les mettre en contact avec le français et le luxembourgeois.

416

532

1.200

900

441

384

409

455

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486

469

334

Prestataire du chèqueservice accueil AP comme SEA ont besoin d’un agrément pour ouvrir. Ils doivent respecter certains critères de prestation (repos, ali­men­tation équilibrée), d’honora­bilité et d’infras­ tructure. Des règles plus con­trai­ gnantes s’appliquent pour ceux qui acceptent le CSA. Les SEA doivent proposer un concept d’action ­général, tenir un journal de bord. Les AP suivent des heures de for­ mation. Un pro­gramme d’édu­cation plurilingue doit aussi être proposé dans les SEA qui accueillent des enfants de 1 à 4 ans. Les SEA conventionnés sont auto­matique­ ment prestataires du CSA. CHIFFRES

2020 Pour la première fois en 10 ans, le nombre de bénéficiaires du chèque-service accueil chute. Le ministère de l’Enfan­ce et de la Jeunesse l’explique par la crise, les parents en télé­travail ou en congés pour raisons familiales gardant eux-mêmes leurs enfants.

407

Chèque-service accueil (CSA) Versement aux parents pour parti­ ciper aux frais de garde, calculé selon les revenus, le nombre d’enfants et leur âge. Elle est pla­ fon­née à 6 euros par heure dans les SEA et à 3,75 euros chez les AP.

4

SEA sur les 469 à vocation com­mer­ ciale n’étaient pas prestataires du CSA en 2020, soit moins de 1 %. Ils étaient 20 sur les 486 AP, soit moins de 5 %. 600

7 € / heure

C’est le prix moyen d’une place en crèche, selon la Fédération Luxembourgeoise des Services d'Éducation et d'Accueil pour Enfants. 80 % du chiffre d’affaires des services d’accueil est couvert par le CSA.

340 300

4.020

salariés travaillaient dans des SEA non conventionnés en mars 2021.

239 0 2016

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2020

gestionnaires différents exploitaient les 362 SEA à vocation commerciale pour jeunes enfants enregistrés en juillet 2021. Et 57 gestionnaires pour les 120 SEA conventionnés pour jeunes enfants.

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Conversation

Nommée ministre de la Justice en octobre 2019, Sam Tanson (44 ans) mène son action en gardant à l’esprit de préserver la stabilité et la solidité des institutions.

Photo ANDRÉS LEJONA

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Sam Tanson

« La justice n’est qu’un miroir de la société » Entre les réformes au long cours, comme celle de la Constitution, et des réponses à apporter à des phénomènes de société, comme la violence dans le quartier Gare, la ministre de la Justice, Sam Tanson (déi Gréng), continue de pousser son leitmotiv : protéger les plus vulnérables, notamment les jeunes.

Interview PIERRE PAILLER

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Conversation Sam Tanson

BIO EXPRESS

La question de la sécurité, dans les quartiers de la Gare et de Bonnevoie, est revenue sur le devant de la scène, ces dernières semaines. Pourquoi, malgré le petit périmètre concerné – seulement quelques rues –, cette problématique semble-t-elle insoluble ? Elle n’est pas insoluble. Ces quartiers con­ centrent de nombreuses institutions qui atti­ rent une population dépendante. ­L’Abrigado, pour ne nommer que celle-ci, a été conçue à ­partir d’une idée juste : celle de devoir offrir un lieu aux personnes dépendantes aux ­drogues dures pour consommer ou pour passer la nuit. ­L’infrastructure n’a cessé de gagner en envergure, alors que les besoins des utilisateurs ont changé. Une étape importante pour décharger le quartier serait d’ouvrir, en ville, plusieurs petites structures accueillant moins de monde, et plus spécifiques par rapport aux différents besoins, en fonction des stupéfiants consommés et du genre.

Diplômée en droit et sciences politiques Titulaire d’un master en droit de l’environnement, Sam Tanson est aussi diplômée de Sciences Po Paris. Journaliste, avocate… Journaliste entre 2002 et 2004 chez RTL, elle est avocate de 2005 jusqu’à son entrée au gouvernement. … puis ministre Membre du parti déi Gréng depuis 2005, Sam Tanson fait son entrée au gouvernement comme ministre de la Culture et du Logement en 2018. Nommée à la Justice le 11 octobre 2019, elle cède son portefeuille du Logement à Henri Kox.

aussi important pour rassurer les habitants, pour qu’ils voient qu’ils ne sont pas seuls et pour qu’ils puissent s’adresser à quelqu’un en cas de souci. Le renforcement en termes de personnel, qui a déjà été effectué et qui le sera encore, est une nécessité.

L’installation de caméras de surveillance est-elle une solution ? En tant que ministre de la Justice Les caméras qui existent depuis 14 ans n’ont et membre du parti déi Gréng, quelle est votre approche en matière pas freiné la dynamique criminelle. Elles sont, de sécurité publique ? à mon sens, importantes pour empêcher les Il est primordial que la sécurité dans l’espace activités criminelles de se dérouler dans des public et l’usage de la force restent des préro- lieux particulièrement sensibles, tels que devant gatives publiques. Il s’agit de domaines extrê- une école. Mais leur efficacité en termes de mement sensibles que nous ne pouvons pas prévention est limitée. La réalité le démontre. sous-traiter ou privatiser. D’autant plus que l’activité policière est strictement encadrée, Une réforme de la loi sur les sociétés par la loi sur la police, par le Code de procé- de gardiennage est en cours d’élaboration dure pénale, que les agents de police suivent au sein du ministère de la Justice. une formation spécifique et qu’ils sont sou- Quel est l’objectif de cette réforme ? mis au contrôle de l’Inspection générale de L’objectif de la réforme est de préciser le cadre la ­police. Concernant les solutions, elles sont légal qui, actuellement, ne mentionne pas les multiples. La première est de tenter de réduire activités de gardiennage dans l’espace public. au maximum l’usage illicite de drogue, ceci par Or, nous devons réglementer le recours à des une politique de prévention efficace, par une sociétés privées dans le cadre de grandes réglementation adaptée et par un suivi sani- mani­festations publiques (telles qu’une foire taire et social. Car si nous arrivons à endiguer ou un événement sportif) et clairement déla demande, l’offre sera également réduite. limiter ces activités de surveillance générale L’urbanisme du quartier a également son rôle de l’espace public qui, pour moi, ne peuvent à jouer, les activités illicites se déroulant moins être effectuées que par des forces publiques. souvent dans un cadre bien soigné et accueil- Je souhaite également prévoir une gradation lant. Ensuite, il y a évidemment un volet sécu- des sanctions. À l’heure actuelle, je peux uniritaire. La police a un rôle primordial à jouer, quement retirer un agrément à une société, et sa présence sur le terrain sous différentes avec toutes les conséquences que cela peut formes est indispensable. C’est effectivement avoir pour ses salariés. Il est important de

«  Il est primordial que la sécurité dans l’espace public et l’usage de la force restent des prérogatives publiques. » 28

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prévoir des sanctions en amont et de ne prévoir le retrait qu’en dernier recours. L’usage des chiens devra également être réglementé dans le cadre de cette loi. Je souhaite déposer le texte encore cette année. Les travaux concernant la formation des agents et d’autres aspects relatifs à d’autres ministères se poursuivront et seront finalisés ultérieurement. En tant qu’habitante de Bonnevoie, ressentez-vous de l’insécurité ? Je souhaite que nous menions la discussion poli­tique de manière rationnelle, même si, pour les habitants, elle peut être très émotionnelle. Pour cette raison, j’estime que mon sentiment d’insécurité inexistant n’est pas pertinent dans cette discussion. Mais une chose me tient à cœur : c’est l’image projetée de mon quartier, Bonnevoie. J’y ai grandi, je m’y suis installée de manière plus que volontaire avec ma ­famille. C’est un endroit formidable, multiple, vivant, avec des petits commerces, un lieu culturel, des cafés et des restaurants sympa, un grand parc, et la forêt à deux pas. Dans un autre registre, la réforme de la Constitution, notamment dans son volet justice, est un des grands dossiers de la rentrée. Quel impact aura-t-elle sur le fonctionnement de la justice ? Pour l’organisation judiciaire, c’est quelque chose de fondamental. L’indépendance de la magistrature sera inscrite dans la Constitution. Celle-ci introduira aussi le Conseil n ­ ational de la justice, qui garantira cette indé­pendance. Il aura un rôle très important à jouer, en tant qu’organe disciplinaire et de désignation des magistrats. Quelle est la conséquence de l’inscription de l’indépendance de la magistrature dans la Constitution ? L’indépendance fonctionnelle du Parquet sera reconnue, ce qui m’importait beaucoup. Concrètement, cela officialise le fait que le ministre de la Justice ne doit pas s’immiscer dans les affaires courantes de la justice : il ne dit pas au Parquet de poursuivre ou de ne pas poursuivre telle ou telle affaire. Et, en général, il ne commente pas celles en cours afin de ne pas exercer d’influence. Ces pratiques sont d’ailleurs de rigueur depuis des décennies. Si ces pratiques étaient déjà de rigueur, en quoi était-il si important d’inscrire l’indépendance de la magistrature dans la Constitution ? Quand on voit les tendances de certains pays – des pays qui nous sont proches géogra­phi­ quement –, j’estime qu’il faut toujours que les lois, d’autant plus la Constitution, soient élaborées dans l’hypothèse où des partis pour lesquels la démocratie importe moins accéderaient au pouvoir. Les institutions doivent


L’AFFAIRE LUTGEN, RÉVÉLATRICE DES TENSIONS ENTRE AVOCATS ET MAGISTRATS être fermes et pouvoir résister à de telles tendances. Raison pour laquelle je veux que le Parquet puisse agir en toute indépendance au niveau de sa politique de poursuites. Avec la seule réserve que des instructions d’ordre général pourront être données par le gouvernement, qui communiquera ses priorités politiques au Parquet – par exemple, mettre un accent parti­culier sur le volet de la violence faite aux enfants ou en matière d’exécution des peines. Mais cela n’empêchera pas le Parquet de réa­liser son travail, car toute affaire individu­el­le sera évaluée indépendamment par celui-ci : il pourra décider dans chaque cas si des poursuites sont opportunes ou pas. Ainsi, le ministre de la Justice et le gouvernement n’auront pas la possibilité d’intervenir dans des affaires en particulier. Ce qui est primordial. Car s’il n’y a que l’impression qu’une telle immixtion existe, cela est préjudiciable pour tous : pour la justice en tant que telle – quelle est la valeur d’une justice qui agit en fonction d’intérêts éventuellement politiques ou personnels ? – et aussi pour la politique, car, dès lors qu’on imagine que la politique peut décider des affaires de justice, cela devient extrêmement délicat.

Photo

Romain Gamba (archives)

Au-delà de son indépendance fonctionnelle, comment la désignation des magistrats du Parquet est-elle prévue ? Cette étape est essentielle pour garantir leur indépendance. Actuellement, c’est le ministère de la Justice qui désigne le procureur général d’État. Concernant le Parquet, toutes les nominations passent par mon bureau – même si je ne fais que signer les propositions que je reçois. Avec la réforme, la procédure de désignation sera transférée au Conseil national de la justice, afin de garantir cette indépendance. Justement, des discussions ont eu lieu quant à la future composition du Conseil national de la justice qui, selon le Groupement des magistrats luxembourgeois, n’offrait pas toutes les garanties pour permettre une dési­ gnation indépendante des magistrats… Nous sommes encore dans des arbitrages par rapport à ce texte. Une proposition était sur la table : dans celle-ci, les trois chefs de corps, à savoir le président de la Cour supérieure de justice, le président de la Cour administrative et le procureur général d’État, étaient nommés d’office membres du Conseil national de la justice. À cela s’ajoutaient trois magistrats élus par leurs pairs, ainsi que trois représentants de la société civile, dont un avocat. Or, la Commission européenne, dans son évaluation de l’État de droit, a estimé que cette procédure de nomination était problématique, car le nombre de magistrats désignés d’office était trop élevé.

Tout part du décès d’un ouvrier par électrocution, le 27 mai 2019, dans l’usine d’ArcelorMittal de Differdange. Le disjoncteur principal du site est alors placé sous scellés par le juge d’instruction en charge du dossier dans l’attente d’une expertise, comme le veut la procédure. Sans disjoncteur principal, l’usine est dans un premier temps mise au ralenti, puis risque d’être mise l’arrêt dès le jeudi 30 mai. Conséquences potentielles : 20 millions d’euros de préjudice économique par semaine et des centaines d’ouvriers au chômage. L’avocat d’ArcelorMittal, André Lutgen, réclame dès le 28 mai au juge d’instruction la mainlevée des scellés. Ce à quoi le juge répond le lendemain que l’expertise doit d’abord être réalisée – expertise qui aura lieu durant la matinée du 29 mai et qui conclura à la possibilité de lever les scellés. Mais seul le juge d’instruction peut décider de leur mainlevée effective. L’avocat tente de joindre le ma­gis­ trat pour réclamer la mainlevée. Mais celui-ci, s’il lève les scellés vers 18 h 30, ne répond pas. Entre-temps, André Lutgen a écrit au procureur général d’État, Martine Solovieff, ajoutant également en copie le ministre de la Justice de l’époque, Felix Braz (déi Gréng), et le ministre de l’Économie de l’époque, Étienne Schneider (LSAP), pour leur faire part de ses échecs à contacter le juge. Le 31 mai, Martine Solovieff écrit à son tour à André Lutgen pour lui signifier qu’il est « inadmissible » de s’adresser aux membres du pouvoir exécutif, qui « n’ont pas à s’immiscer dans des affaires judiciaires ». Elle assimile cela à une « pression sur le magistrat instructeur ». Le juge d’instruction dépose quant à lui une plainte le 5 juin

contre André Lutgen pour intimi­ dation et outrage à magistrat. Une procédure disciplinaire ouverte de manière automatique au Barreau est classée sans suite en novembre 2020 par la bâtonnière Valérie Dupong, aucune faute déontologique n’ayant été retenue. La Chambre du Conseil de la Cour d’appel décide néanmoins de renvoyer l’avocat devant le tribunal. « Poursuivre, au nom de l’indépendance de la justice et du principe de la séparation des pouvoirs, un avocat pour ‘intimidation d’un magistrat’ parce qu’il a pris l’initiative de s’adresser à un membre du gouvernement est une attaque frontale à l’indépen­ dance de l’avocat et au libre choix de ses moyens d’action », selon l’avocat d’André Lutgen, François Prum. La séparation des pouvoirs n’est en effet « pas du ressort de l’avocat », estime-t-il. La création du Conseil national de la justice, chargé des mesures disciplinaires envers les magistrats, pourrait, en recevant les éventuelles plaintes d’avocats, clarifier la situation. Même si « aucun avocat n’osera jamais saisir le Conseil contre un magistrat, puisque c’est ce même Conseil qui décide des suites des carrières, des affectations, s’inquiète François Prum. Ce serait vu comme de l’intimidation et il risquerait alors de se voir poursuivi. » Le procès, qui devait avoir lieu du 29 juin au 1er juillet 2020, a finale­ ment été suspendu sine die lors du dernier jour d’audience, après le dépôt par la partie civile d’une requête en récusation à l’égard du président de la chambre correction­ nelle. Ce dernier ayant décidé de « s’abstenir de l’affaire », le procès aura lieu devant une autre Chambre et sera repris ab initio.

« Aucun avocat n’osera jamais saisir le Conseil contre un magistrat, puisque c’est ce même Conseil qui décide des suites des ­carrières, des affectations. » Me François Prum Avocat de Me André Lutgen


Conversation Sam Tanson

Donc la future composition doit être entièrement revue… Différentes possibilités s’offrent à nous : soit ne pas avoir de magistrats désignés d’office dans le Conseil national de la justice, soit augmenter le nombre de magistrats qui y sont représentés – ce qui alourdirait le fonctionnement, puisque plus le nombre de gens qui doivent discuter est important, plus cela devient compliqué, sachant qu’il y a en outre des suppléants pour chaque membre. De plus, la Commission, tout en réclamant une majorité de magistrats, veut en parallèle une représentation suffisante de personnes externes à la magistrature. Il faut donc arriver à maintenir l’équilibre entre société civile et magistrats. Nous allons voir quel chemin nous allons emprunter. Mais nous avons une certaine pression, parce que le volet justice de la Constitution sera a priori voté dans le courant du mois ­d’octobre, avec une entrée en vigueur neuf mois plus tard, après le deuxième vote, soit avant l’été prochain. Et nous voulons bien sûr que le Conseil national de la justice puisse commencer ses travaux avec l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions de la Constitution. Dans l’état actuel des choses, cette réforme dans son ensemble vous satisfait-elle ? Je pense que tout le monde peut vivre avec le compromis tel qu’il est sur la table – ce qui est l’essence d’un compromis : personne n’est à 100 % d’accord avec les résultats, mais tout le monde peut s’en accommoder. L’affaire André Lutgen a mis en exergue les tensions qu’il peut y avoir entre les différents acteurs de la justice. Êtes-vous sensible à l’irritation ressentie par les avocats ? Bien sûr que je suis sensible à toutes les ­discussions qu’il y a autour de cette affaire, et surtout au potentiel de conflits qu’il y a entre les avocats et la magistrature, qui t­ ravaillent

Cour supérieure de justice Parquet général Tribunaux d’arrondissement Parquets d’arrondissement Justices de paix Cour administrative Tribunal administratif

30

OCTOBRE 2021

Mais un juge ne pourra-t-il pas, comme dans l’affaire Lutgen, estimer que saisir le Conseil national de la justice est aussi une tentative d’intimidation et s’en plaindre ? Puisque c’est une des missions du Conseil ­national, a priori, non. Maintenant, tout ­dépend des cas d’espèce et de ce qui se trouverait p ­ o­tentiellement dans un courrier… Mais le but est d’avoir des procédures claires pour que tout un chacun puisse s’adresser au Conseil pour les cas définis dans le texte de loi. L’augmentation du nombre de procé­dures devant les tribunaux ne risque-t-elle pas de créer un arriéré judiciaire de plus en plus conséquent ? La commission sur l’efficacité de la justice du Conseil de l’Europe a récemment publié les chiffres à ce propos. Un premier constat : le ­Parquet traite énormément d’affaires par rapport à la population – ce qui s’explique par le fait que la population du Luxembourg est beaucoup plus importante en journée que le soir. Mais, en général, le rapport est satisfaisant : le Luxembourg se situe dans la moyenne en ce qui concerne le délai d’évacuation des affaires. Avec un bémol concernant les juridictions administratives… C’est un problème que

nous connaissons et sur lequel nous travaillons avec elles. Nous savons qu’un potentiel de retard existe dû à l’élargissement constant des c ­ ompétences du tribunal administratif ces dernières années et au nombre très important d’affaires qui, par conséquent, s’ajoutent. Ces affaires deviennent en outre de plus en plus spécifiques et techniques, notamment dans des domaines comme l’urbanisme ou la fiscalité. Cela crée d’ailleurs un besoin en p ­ ersonnes très spécialisées. Estimez-vous que la justice s’adapte suffisamment vite aux évolutions rapides de notre société ? La justice n’est qu’un miroir de la société. ­Aujourd’hui, le monde tourne peut-être plus vite qu’il y a 20 ou 30 ans. Mais avec les bons outils juridiques, on peut toujours s’en sortir. Même si cela reste important de comprendre tous les détails d’une affaire pour ne pas avoir l’impression de passer à côté de quelque chose, d’où le besoin de mettre à disposition des ­spécialistes en la matière. Ces recrutements très spécialisés sont-ils un enjeu primordial pour la magistrature ? Il est important de disposer au sein de la magi­ strature, mais aussi du ministère, de gens qui sont vraiment à la pointe de ces matières qui gagnent en importance. Cela permet de ne pas avoir trop de déséquilibres de know-how entre l’avocat qui plaide une affaire et le juge qui doit statuer dessus. Le tribunal adminis­tratif essaie toujours de recruter des spécialistes.

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Ministère de la Justice

« Entre 2000 et 2020, on compte en moyenne +75 % d’effectifs dans la magistra­ture. Le Parquet du Tribunal du Luxembourg a même doublé ses effectifs durant cette période » a expliqué la ministre.

ensemble au quotidien. En dehors des détails de l’affaire, que je ne commente pas, cela montre que nous devons absolument avoir un Conseil national de la justice, afin de disposer d’un organe identifié en charge de ce genre de conflit.

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NOMBRE DE MAGISTRATS DANS LES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES ET JUDICIAIRES

« Le ministre de la Justice ne doit pas s’immiscer dans les affaires courantes de la justice. »


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Conversation Sam Tanson

En quoi mettre l’accent sur le droit luxembourgeois à l’Université est-il essentiel ? Ce n’est pas par patriotisme, mais parce qu’il est, à mon sens, très important de disposer d’une vraie doctrine luxembourgeoise. Et comment va-t-elle naître, si ce n’est pas par la recherche universitaire ? Il est donc très important que l’Université n’oublie pas – car elle est beaucoup axée sur le droit transnational – que nous avons besoin d’elle pour ce volet purement national. Les assises du Code civil sont une des colla­borations que nous avons actuellement avec l’Université afin d’opérer une refonte du droit civil au Luxembourg. Il s’agit d’un travail pluri­disciplinaire : les praticiens et les juristes du ministère travaillent étroitement avec les chercheurs et les professeurs. Au-delà du recrutement, comment fluidifier le traitement des affaires ?

32

OCTOBRE 2021

UN BUDGET EN CONSTANTE HAUSSE Budget total des juridictions judiciaires

Budget total des juridictions administratives

120 millions d’euros

112,29 mios €

100

80

67,69 mios € 57,03 mios €

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Ministère de la Justice

Le recrutement ne peut-il pas être facilité avec l’Université ou la création, par exemple, d’une école de la magistrature ? Le problème ne vient pas de là. Nous avons énormément de candidats aux cours complémentaires en droit luxembourgeois (CCDL). Et quand on regarde en général l’évolution des recrutements entre 2000 et 2020, on compte en moyenne +75 % d’effectifs dans la magistrature, ce qui est énorme – la population n’a pas évolué à un tel rythme. Le Parquet du Tribunal du Luxembourg a même doublé ses effectifs durant cette période. Mais, pour devenir magistrat, il faut être Luxembourgeois. Donc, parmi les candidats aux CCDL, seule une partie est susceptible – du moins tant que la nationalité luxembourgeoise n’est pas acquise – de poser sa candidature pour la magistrature. En outre, concernant les juristes, ceux-ci sont de plus en plus nécessaires au sein des ministères ou d’entreprises privées avec des formations en droit luxembourgeois. Donc une très grande concurrence existe sur le m ­ arché des juristes luxembourgeois. Nous travaillons d’ailleurs avec l’Université du Luxembourg pour augmenter l’offre de droit luxembourgeois au sein de ses formations.

Le projet de loi sur l’efficacité de la justice aura, trichienne qui travaille avec les Nations unies, je l’espère, un effet de désengorgement. D’une madame Renate Winter, de nous guider dans part, à partir de la rentrée judiciaire, nous allons l’élaboration d’un nouveau texte. Et comme augmenter le taux de compétence de la justice nous avons décidé de séparer le texte en deux, de paix, qui va passer de 10.000 à 15.000 euros. avec un volet concernant le droit pénal des miOr, dans ce cadre, vous n’avez pas besoin de neurs et un autre la protection de la jeunesse, vous faire représenter par un avocat – même si nous travaillons également étroitement avec vous le pouvez. Et, s­ urtout, ce sont des procé- le ministère de l’Éducation nationale, qui se dures orales : ­l’affaire est fixée pour plaidoirie, charge du second volet évoqué. elle est plaidée et le juge prend sa décision, sans échange d’un nombre indéterminé de conclu- Pourquoi distinguer ces deux volets ? sions. Ce qui a un effet de désengorgement sur le Actuellement, nous avons un seul texte pour les tribunal d’arrondissement. Bien entendu, nous deux volets, alors même que ce sont des prodevons surveiller de près l’impact de cette loi blématiques très différentes. D’un côté, vous sur les justices de paix. Puis, d’autre part – et avez un mineur qui a commis un acte qualifié c’est peut-être la plus importante réforme de de délit ou de crime, par exemple un vol ou ce texte –, pour les affaires de 100.000 euros des violences. D’un autre côté, vous avez un ou moins avec seulement deux parties, des mineur qui est dans une situation de détresse délais fixes et un nombre fixe de conclusions familiale – l’enfant est délaissé ou il subit des à échanger seront instaurés – après quoi, sauf violences physiques ou sexuelles. Or, cet enfant exception, ­l’affaire sera clôturée. Nous nous est pris en charge, mais avec la même procédure. sommes inspirés du système existant auprès L’argument de la magistrature est de dire : les des tribunaux adminis­tratifs. enfants délinquants que nous rencontrons, nous les connaissons souvent du volet protection. Je Quelles sont vos priorités pour la suite le crois volontiers, mais il est tout de même imde votre mandat ? portant de différencier ces cas de figure. Pour La liste est longue. Mais mon leitmotiv est la Mme Winter, il s’agit d’un aspect fondamental protection des personnes vulnérables. Car si dont il faut tenir compte. j’estime que la justice est là pour tout un chacun, nous avons un rôle fondamental à jouer Concernant le volet droit pénal des dans la protection des plus faibles. Et si les mineurs, quel est l’enjeu de la réforme ? textes de loi peuvent le faire, alors nous devons Il est important que le mineur en situation de le faire – ce qui n’est pas toujours possible… délinquance sache exactement ce qui lui est reproché, quels sont ses droits, ses devoirs, ses Dans ce domaine, la protection de la jeugaranties procédurales. Et nous mettons un acnesse vous tient particulièrement à cœur… cent très fort sur les mesures de diversion : les Très clairement. Le texte actuel date de 1992. travaux d’intérêt général primeront sur l’enDes tentatives pour le réformer ont eu lieu, fermement – la prison sera toujours le dernier mais, à chaque fois, cela s’est révélé une im- ressort. Il sera en outre interdit d’enfermer passe.Au début de ma prise de fonction, j’ai un mineur dans un centre pénitentiaire pour décidé de charger une juge pour enfants au- adultes. Et nous fixerons un âge minimum en

32,79 mios €

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Source

Comment se déroule ce travail de recrutement ? Tout d’abord, des spécialistes peuvent se ­manifester de leur propre initiative parce qu’ils veulent changer de carrière, par exemple des avocats spécialisés dans une matière qui passent de l’autre côté de la barre. Puis le volet des référendaires de justice (ils ont pour mission d’assister les magistrats dans leurs travaux, ndlr) offre la possibilité de recruter des spécialistes dans une matière spécifique. Le dépôt du texte sur les référendaires a ­d’ailleurs eu lieu au mois de juillet, avec la proposition de créer 46 nouveaux postes.


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Conversation Sam Tanson

En tant que ministre de la Justice, vous avez moins de moyens d’action sur les questions environnementales et ­climatiques que certains de vos col­lègues déi Gréng qui, au sein du gouver­nement, occupent les ministères de l’Environ­ nement, de l’Énergie ou encore des Transports. Cela vous frustre-t-il en tant qu’écologiste ? C’est réducteur par rapport au parti écologiste. Je me suis engagée chez déi Gréng ­notamment pour la cause écologiste, mais pas seulement. Le parti des Verts est issu de mouvements citoyens, non seulement écologistes, mais également pour les droits des hommes et des femmes. Je me suis aussi retrouvée dans ce parti pour ses positions sur les questions de société, sur les discriminations, ce qui a trait aux dispositions protectrices des minorités, des gens vulnérables ou exposés qui sont attaqués à cause de leur nationalité, de leur origine, de leur religion, de leur genre. La ­politique ­écologique ne concerne pas que la nature et le climat, cela va beaucoup plus loin : nous voulons une politique durable dans tous les domaines. C’est ce que j’essaie de faire.

dessous duquel le mineur ne sera pas traité selon le droit pénal. Un autre volet sur lequel nous travaillons est de pouvoir traiter le cas de jeunes adultes jusqu’à 21 ans, s’ils n’ont pas la maturité nécessaire pour être considérés comme majeurs, selon la procédure pénale pour mineurs. Quelles modifications sont prévues concernant les violences sexuelles sur les mineurs ? D’une part, il est important d’introduire une infraction autonome de l’inceste. Pour l’instant, cela ne constitue pas une infraction à part. Il est aussi nécessaire de travailler sur le délai de prescription, afin de permettre aux concernés de prendre le temps nécessaire pour réaliser ce qui s’est passé et pour porter plainte. Nous allons également affiner la ­définition du viol par rapport à la jurisprudence. Et, concernant le droit de la famille, le Conseil d’État nous a enfin donné son avis sur la réforme du droit de la filiation. Ce projet était prévu de longue date… C’est un texte qui a été déposé en 2017, alors que j’étais encore membre du Conseil d’État… Nous sommes en train d’évaluer l’avis, qui est très complet. Il y aura des ajustements importants à faire. Ce texte permet de ne plus faire de différence entre les enfants légitimes et les enfants naturels. Et il prend en compte les nouvelles situations qui peuvent se poser par rapport à la filiation : il y aura une discussion autour de la gestation pour autrui, qui est interdite dans le texte, au sujet de laquelle le Conseil d’État a fait un long développement. Dans le domaine commercial, la loi sur les faillites est attendue depuis des années. Qu’est-ce qui bloque ? Rien ne bloque, mais ce texte est complexe : il a une grande envergure matérielle, avec de nombreux acteurs. En outre, une directive euro­péenne au sujet des procédures de faillite a été adoptée entre-temps et doit d ­ ésormais être intégrée dans le texte existant… Je me suis demandé, peu de temps après mon arrivée, si nous devions repartir de zéro. Mais tant de travail a été effectué, notamment avec la Chambre des députés et la sous-­commission des faillites… Le constat est de toute façon là : il faut agir sur la prévention, faire en sorte d’avoir tous les instruments nécessaires afin qu’une société ne tombe pas en faillite. Tout en sachant que certaines ­faillites étant inévitables, il est nécessaire de disposer d’une procédure compréhensible et claire pour tout le monde. Voit-on le bout du tunnel ? Désormais, oui. La sous-commission a beaucoup travaillé avec les fonctionnaires du ministère et ajuste maintenant ce qui a trait à la directive. Les amendements seront finalisés dès la rentrée afin d’être renvoyés au Conseil d’État. 34

OCTOBRE 2021

FAST & CURIOUS Prévention ou répression ? Prévention. C’est le plus important, justement pour éviter la répression. Légalisation ou dépénalisation du cannabis? Réglementation du cannabis. Vélo ou tram ? Vélo. Diplomate ou franc-parler ? J’ai un franc-parler de nature. Donc je me suis entraînée, depuis mon entrée en politique, à devenir de plus en plus diplomate. Kirchberg ou Gasperich ? Bonnevoie ! Bistrot ou gastro ? Je suis végétarienne depuis très longtemps. Donc la cuisine gastro, ça a été longtemps compliqué. Cela va mieux maintenant, mais bistrot quand même. Retrouvez l’interview vidéo Fast & Curious de Sam Tanson sur paperjam.lu.

États et entreprises sont davantage poursuivis en justice pour leur inaction face à la crise climatique ou les dommages qu’ils causent à l’environnement. Que pensez-vous d’un tel recours au pouvoir judiciaire ? Je préférerais ne pas avoir à en venir là… Les actions politiques devraient être assez fortes pour que les citoyens n’aient pas à agir en justice pour garantir l’avenir de leurs enfants. Mais rien ne s’oppose à ce que tout citoyen entame les démarches qu’il souhaite auprès des juridictions compétentes. De fait, nous avons une responsabilité énorme face aux générations futures, et cela se joue maintenant. Nous devons prendre, ces prochaines années, une direction nouvelle afin d’éviter que nos enfants aient des problèmes inimaginables – peut-être d’ailleurs un peu plus imaginables après l’été que nous venons de passer… Votre métier d’avocat, que vous avez dû quitter en entrant au gouvernement, vous manque-t-il ? Actuellement, la question ne se pose pas : j’ai ce mandat, et le but est de le mener à son terme. Mais c’est une belle perspective de savoir que je pourrai retourner sous ma robe d’avocate à un moment donné. C’est une très belle profession. Elle est multiple, vous pouvez aider les gens et vous êtes indépendant, dans vos réflexions, dans vos actions, dans vos choix. Bien entendu, vous avez des clients, mais personne ne vous oblige à défendre quelqu’un que vous ne voulez pas défendre. Et l’avocat n’a jamais terminé d’apprendre, donc c’est aussi un challenge intellectuel quotidien.


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Pour performer, les gestionnaires d’actifs de la Place ont des approches qui diffèrent. Selon Bram op de Beeck, Head of Belgium & Luxembourg chez Lazard Fund Managers, et Matthieu Grouès, Responsable des gestions institutionnelles chez Lazard Frères Gestion, le recours à une analyse fine des fondamentaux des entreprises ainsi que la prise en compte des critères ESG sont indispensables pour performer sur le long terme. Quelles sont actuellement les grandes tendances à l’œuvre dans le secteur de la gestion d’actifs ? BRAM OP DE BEECK   De nos jours, les sociétés de gestion font face à un défi majeur, celui de la durabilité de leurs investis­ sements. Chez Lazard Asset Management, nous avons commencé à tenir compte des critères ESG il y a 20 ans et le travail en ce sens n’a jamais cessé, avec notamment

la signature en 2014 des Principes pour l’Investissement Responsable des Nations Unies (UN PRI) et l’obtention récente de la plus haute note associée à leur évaluation annuelle. Cette année, Lazard AM est également devenue signataire de la « Net Zero Asset Managers Initiative » visant à atteindre zéro impact CO2 d’ici 2050 pour l’ensemble de sa gestion. L’exigence croissante des investisseurs vis-à-vis de la prise en

UNE HISTOIRE LONGUE DE PLUS DE 170 ANS

1848

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OCTOBRE 2021

Les trois frères d’origine alsacienne Alexandre, Elie et Simon Lazard fondent Lazard Frères à la Nouvelle-Orléans.

1854

Comment les critères ESG sont-ils intégrés à votre approche ? B.ODB.   La prise en compte de l’ESG est intégrée au cœur de notre processus de gestion, dans une approche dynamique. C’est un cheminement, et non un objectif figé. Nous cherchons également à dialoguer avec les entreprises pour les inciter à accélérer dans les domaines environnementaux et sociaux, car nous prenons en compte ces critères dans notre processus d’analyse fondamentale. En effet, en plus des données microéconomiques (bilans, comptes de résultat des entreprises) et macroéconomiques (indicateurs conjoncturels, décisions politiques), nous disposons d’un outil spécifique, développé par nos soins, pour identifier et évaluer de manière très concrète la prise en compte des enjeux ESG au sein de chaque société. Ces données sont traduites dans une « table de matérialité ». MATTHIEU GROUÈS  Chez Lazard Frères Gestion, cette méthode, qui prend aussi en compte des données ESG fournies par des prestataires externes, nous permet d’attribuer à chaque entreprise une note située entre 0 et 5. En gestion actions, cette note est intégrée au « bêta » des entreprises, c’est-à-dire au niveau de risque qu’elles présentent. De façon schématique, on peut dire que moins les critères ESG sont pris en compte par une société, plus la valeur de cette dernière sera dégradée dans notre analyse.

Création d’une succursale à Paris.

1870

Création d’une succursale à Londres.

Bram op de Beeck, Head of Belgium & Luxembourg chez Lazard Fund Managers, et Matthieu Grouès, Responsable des gestions institutionnelles chez Lazard Frères Gestion.

Pour les obligations, le fonction­ nement repose sur l’élimination des titres les moins bien notés. Ainsi, nous veillons toujours à ce que l’intégration des critères ESG ait un effet très concret sur nos choix d’investissement. Vous avez beaucoup collecté sur vos fonds diversifiés au cours des dernières années. Quel est l’intérêt, pour l’investisseur, de ces fonds « multi-assets » ? M.G.   En général, lorsque l’on confie son argent à une société de gestion, c’est dans l’idée de lui déléguer le stock picking ou le bond picking, autrement dit le choix des titres. Dans le cas d’un fonds ­diversifié, l’investisseur

1880

Création d’une succursale à New York.

Frédérique Veysset

L’analyse fondamentale, socle de la performance

compte des principes durables constitue un environnement idéal pour les gérants actifs que nous sommes.

Photo

Marchés financiers


« Nous veillons toujours à ce que l’intégration des critères ESG ait un effet très concret. »

Matthieu Grouès Responsable des gestions institutionnelles chez Lazard Frères Gestion

délègue non seulement le choix des titres, mais aussi l’allocation globale entre les différentes classes d’actifs (actions, obligations), qui évolue selon la conjoncture. C’est ici que réside tout l’intérêt de la gestion diversifiée, car le pilotage de cette allocation s’avère déterminant pour la performance globale. B.ODB.   En outre, les fonds « multi-assets » permettent d’accéder à des sous-segments de marché auxquels les investisseurs sont généralement peu exposés, comme le High Yield ou les obligations subordonnées financières, dont les rendements restent attractifs malgré la période actuelle de taux bas.

1970

Développement de la gestion d’actifs au sein de la succursale de New York.

1995

Vous proposez à vos clients une « gestion active des risques ». En quoi cela consiste-t-il ? M.G.   Le niveau de risque acceptable varie toujours selon le client. Pour permettre à chacun d’obtenir le produit le plus adapté, nous proposons deux fonds : Lazard Patrimoine SRI et Lazard Patrimoine Opportunities SRI. Le premier est qualifié de « défensif », avec une proportion d’actions centrée à 20 %, tandis que le second est plus agressif, avec une part d’actions centrée à 50 %. Par ailleurs, le premier dispose d’un mécanisme de protection qui se déclenche automatiquement en cas de

Création de Lazard Frères Gestion à Paris.

2005

Lazard est cotée à la Bourse de New York. Lazard Asset Management et Lazard Frères Gestion deviennent des filiales de Lazard Ltd.

panique, de manière à limiter sa volatilité. Quatre signaux d’alarme ont été définis : à chaque fois que l’un d’eux se déclenche, nous « coupons » un quart de notre allocation. Cela peut limiter la capacité du fonds à profiter pleinement d’un éventuel rebond, mais l’intérêt est ici de limiter les à-coups des marchés en évitant aux investisseurs d’être trop exposés en cas de forte baisse des cours. Comment voyez-vous l’avenir proche des marchés financiers ? M.G.   Il est toujours difficile de formuler une opinion définitive, mais nous avons une conviction : sauf catastrophe

2021

Lazard Asset Management et Lazard Frères Gestion gèrent 277 milliards de dollars dans le monde au 30 juin.

sur le front sanitaire, l’argent injecté par les gouvernements et les banques centrales est d’ores et déjà suffisant pour assurer une forte croissance lors des prochains trimestres. La question est ensuite de savoir si l’économie est déjà « tendue », auquel cas cette croissance pourrait générer un surplus d’inflation et précipiter l’arrêt des politiques monétaires accommodantes, ou si l’éco­nomie va simplement intégrer cette croissance sans excès d’inflation. Le second scénario serait préférable au premier. Une chose est sûre : la réponse à cette question viendra des États-Unis. Il faudra donc suivre l’évolution de la conjoncture américaine cet automne dans un contexte « normalisé » (retrait des indemnités chômage transitoires, réouverture des écoles facilitant la reprise du travail). Selon le scénario qui se dégagera, les investisseurs devront ajuster rapidement leurs choix d’allocation d’actifs. C’est dans ce type de situation que la gestion diversifiée peut démontrer toute sa pertinence.

lus avoir p sés d’en s o ie p v o r n E es p servic Managers ? s le r u s und zard F ous sur : par La -v z e d n Re nd

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Attentive à l’esthétique de ses produits, Lola Valerius n’en oublie pas l’élément déterminant : le goût.


Conversation Lola Valerius

« Il y a un vrai marché à conquérir dans le chocolat » Diplômée en architecture, Lola Valerius s’est pourtant découvert un goût prononcé pour le chocolat, au point d’en faire son métier et d’ouvrir sa propre maison dans sa ville, Esch-sur-Alzette. La trentenaire entend bien imposer sa griffe dans un créneau dominé par les marques étrangères et les produits standards grâce à des bonbons originaux conçus comme des bijoux. Interview JULIEN CARETTE

Votre première boutique a vu le jour à Esch-sur-Alzette, en mars dernier. Une ouverture qui a été fort suivie et commentée. Comment expliquez-vous un tel engouement pour une « novice » ? Tout simplement parce que nous créons un produit qui, je pense, est nouveau au Luxembourg. Avec des chocolats très esthétiques. J’ai aussi eu la chance de m’être constitué un vrai réseau sur les médias sociaux. Et ce, bien avant l’ouverture de cette boutique. Notamment via Instagram. Un public qui m’a suivie et a donné de l’ampleur à l’annonce de l’ouverture du magasin. Et puis, nous avons ouvert nos portes au moment des fêtes de Pâques. Et nos œufs colorés ont fait parler d’eux. Tout le monde voulait les voir et les goûter. Votre nom a peut-être aussi aidé un peu, non ? Votre papa, Gérard, est une figure bien connue au Luxembourg… Peut-être un peu… Mais je n’y crois pas trop. Avant, on me demandait si j’étais sa fille. Aujourd’hui, il y a des gens qui lui demandent s’il est mon père [rires]. Notre clientèle à la boutique est plutôt jeune. Et ma génération n’a plus vraiment les mêmes références. S ­ urtout que mon père ne possède plus les bars et ­discothèques qui ont fait sa renommée. Il a suivi sa passion pour l’art et dispose désormais de sa propre galerie. Votre parcours est un peu singulier. Vous avez un diplôme d’architecture et vous ne vous destiniez pas vraiment à une carrière de chocolatière… C’est vrai. Et je crois que ça, c’est au moins en partie dû à l’éducation luxembourgeoise. La voie est souvent déjà toute tracée pour vous, avec le lycée qui vous pousse ensuite vers l’uni-

Photo ANDRÉS LEJONA

versité. Il n’y a pas vraiment d’autres choix. Je me suis donc procuré des bouquins, j’ai regardé C’est une autoroute sans sortie… des tutos, je me suis renseignée… Et tout est Dans mon cas, lorsque je me suis interro- devenu très addictif. Alors, au bout d’un moment, gée sur la suite que je voulais donner à mes je me suis dit : « Pourquoi ne pas se lancer sur études, il est assez vite ressorti que je désirais cette voie-là ?! » Mais comme je voulais être sûre, me tourner vers quelque chose de créatif. Et afin de me tester et de voir si j’avais un avenir, j’ai opté pour des études d’architecture. J’ai à la fin de mes études, j’ai pris l’option de faire terminé mon bachelor parce que j’aime aller un stage. En tant qu’Eschoise, je me suis alors au bout des choses, mais je savais déjà, durant tournée vers Gérard Cayotte, notre meilleur ce cursus, que je ne poursuivrais pas sur ce pâtissier, à mon sens. On se connaît bien, mes chemin-là. Je ne suis pas faite pour être assise grands-parents ayant tenu une boutique à côté devant un ordinateur toute la journée. Je me de la sienne. Malheureusement, il n’avait pas suis donc remise en question, me demandant de place. Mais il m’a mise en relation avec le ce que je voulais vraiment faire. J’ai pensé au chef pâtissier du traiteur Steffen… graphisme ou au product design. Mais je suis Et l’expérience vous a beaucoup plu ? tombée dans la pâtisserie… Oui. Sauf le fait de devoir se lever très tôt. Ou Par hasard ? plutôt de devoir se coucher très tôt [sourire]. Oui ! À l’université, à Vienne, j’ai commencé à Un des avantages de tenir aujourd’hui une faire des gâteaux pour mes camarades. Or, boutique de chocolats est d’ailleurs que perje suis quelqu’un qui aime bien faire les choses. sonne ne vous demande d’être ouvert à 7 heures [rires]. J’ai ensuite travaillé quelques mois pour le groupe de pâtisserie Schumacher (devenue aujourd’hui Hoffmann, après la fusion avec le BIO EXPRESS groupe du même nom, ndlr). Eschoise pur jus Née le 11 février 1991, Lola Valerius est une Eschoise pur jus. De fait, lorsqu’elle a songé à ouvrir sa boutique, elle n’a guère hésité sur son emplacement. « Beaucoup de jeunes y ouvrent leur boutique. L’ambiance est vraiment excellente », dit-elle en souriant. Si vous la cherchez, vous la trouverez rue de la Gare, au numéro 37. Son premier entremets à… 24 ans Lola Valerius n’a réalisé son premier vrai gâteau, à savoir un entremets, qu’en 2015. Elle avait alors 24 ans et suivait des études d’architecture du côté de Vienne (Autriche), où elle a passé trois ans.

Sans diplôme ? Juste avec le background que vous aviez acquis dans les livres et sur internet ? Oui. Quand je me suis présentée, on s’est dit qu’on allait essayer ainsi. Et que, s’ils n’étaient pas contents de moi, je partirais. Mais ils ont été très satisfaits. Au point qu’ils ne voulaient pas me laisser partir. J’avais donc apparemment des bases suffisantes… Mais je tenais absolument à obtenir un diplôme. Il me fallait ce bout de papier qui disait que j’étais apte à pâtisser. C’est ainsi que je suis partie à Paris pour passer mon CAP. En fait, c’était une version un peu accélérée. Il n’a OCTOBRE 2021

39


Conversation Lola Valerius

duré que six mois, mais l’examen était le même que celui de la filière classique. Une fois votre diplôme en poche, vous avez alors songé à ouvrir votre pâtisserie ? Non, c’était encore trop tôt. Je voulais acquérir da­vantage d’expérience. J’ai envoyé des demandes un peu partout à travers le monde : Afrique du Sud, Australie… pour finalement me rendre à Taïwan afin de travailler quatre mois pour un chef français. Et, en rentrant, je n’avais qu’une idée en tête : dégoter une place chez un Meilleur ouvrier de France. C’est ainsi que j’ai été engagée à Paris chez Patrick Roger, l’un des plus grands chocolatiers au monde. Mais l’expérience n’a pas duré longtemps… Pourquoi ? Parce que c’était loin d’être ce que je m’imaginais. J’avais en tête un travail « artisanal », et je me suis retrouvée devant ce qui ressemblait, à mes yeux, à une usine. Je n’ai rien à redire sur la qualité du chocolat produit, il est vraiment excellent ! Mais quand vous bossez là-bas, votre travail consiste à charger et décharger des machines, pas à travailler vous-même le chocolat. Or, c’est ce qui m’intéressait. Bref, ce n’était pas le métier de chocolatier dont je rêvais. Je ne sais pas si vous vous imaginez, mais on produisait entre quatre et cinq tonnes de c ­ hocolat en quatre jours, avec une brigade de 16 ­personnes… En plus, c’était mal payé. Ce qui ne me posait aucun souci à partir du moment où j’avais le sentiment d’apprendre quelque chose. Mais là, ce n’était pas le cas…

LE BAMKUCH, LE BESTSELLER En ce qui concerne ses influences culinaires, Lola Valerius a gardé des traces de son passage par Taïwan : thé matcha, thé noir, yuzu… Et, pour un bonbon, elle se sert même de miel produit sur les toits d’Esch. Mais celui qui marche le mieux, c’est celui baptisé « Bamkuch ». Du nom de ce célèbre gâteau, fort en rhum, typique du Luxembourg et très populaire lors des mariages ou des baptêmes. « On cuit le Bamkuch évidemment nous-mêmes, puis on le coupe en petits cubes. Et on les enferme individuellement dans la coque en chocolat du bonbon, avec une ganache chocolat au lait », explique la chocolatière eschoise. Et cela fait un tabac. « Il arrive fréquemment qu’un client nous prenne une boîte complète, c’est-à-dire 25 bonbons, avec seu­lement des Bamkuch », dit-elle, avec le sourire.

sanitaire, c’est que les plus grands pâtissiers-­ chocolatiers à travers le monde ont commencé à donner des master classes en ligne. Au lieu de les faire en présentiel chez eux, ils se sont ouverts via internet. Cela a été assez génial pour moi.

À quel moment vous êtes-vous dit que vous vouliez vous spécialiser dans le chocolat ? En pâtisserie, j’ai peu travaillé le chocolat. Cette fois, l’heure était venue d’ouvrir Je n’ai d’ailleurs pas de diplôme spécifique de votre propre établissement… chocolatier. Du coup, c’est vraiment une p ­ assion Oui. Je me suis mise à chercher un local et… qui s’est développée à côté, lorsque j’étais chez la crise du Covid-19 est apparue ! Du coup, j’ai moi. Et qui m’a gagnée petit à petit, jusqu’à ce plutôt aménagé un petit labo dans la cuisine que je me dise : c’est ça que je veux faire ! Et de mes grands-parents. Et j’ai fait du chocolat. non ouvrir une pâtisserie. Le chocolat est vraiBeaucoup de chocolat ! Pratiquement jour et ment une matière très intéressante à travailler. nuit. Histoire de ne pas penser à la pandémie Et puis, j’avais pu constater qu’il y avait un qui nous touchait. Cela m’a permis de me déve- manque dans notre pays dans ce secteur-là. lopper, de découvrir certaines techniques. Et Chez nous, généralement, les professionnels s’il y a eu, pour moi, un bon côté à cette crise font de tout : pain, viennoiseries, gâteaux, voire un côté traiteur… Cependant, il y a peu de boutiques vraiment spécialisées dans un domaine. À mes yeux, il y a donc un marché à conquérir au niveau des bonbons au chocolat.

« Je ne veux pas devenir un Patrick Roger ou un Pierre Marcolini... » 40

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Vous parliez du manque de chocolatiers au Luxembourg, d’un marché encore à conquérir. Comment expliquez-vous cela, alors que les voisins belges et français sont reconnus pour leurs « pralines » ou « bonbons » ? Tout simplement parce qu’il n’y a pas de ­formation de chocolatier au Luxembourg. On peut préparer un DAP (diplôme d’aptitude professionnelle, ndlr) en boulangerie et pâtisserie. Cela dure trois ans, et vous avez quelques cours traitant des bases du chocolat disséminés par-ci

par-là. Mais rien de très spécialisé. Il est donc logique que les boutiques de c ­ hocolats soient rares chez nous… Si vous voulez vous perfectionner, il faut tout apprendre par vous-même, comme je l’ai fait, ou alors opter pour des études à l’étranger. Et vous sentez un marché important ? Oui ! La population luxembourgeoise adore le chocolat. Elle en achète le plus souvent de moindre qualité, faute de mieux. Il n’est pas étonnant de voir des chocolatiers étrangers débarquer pour ouvrir des boutiques ou des stands chez nous, comme le Belge Pierre ­Marcolini à la Cloche d’Or ou chez Smets, à Strassen, par exemple. Le potentiel est assez énorme, à mon sens. Dans notre boutique, on constate ainsi que les gens viennent parfois de loin. Ils le disent d’ailleurs pratiquement à chaque fois en ­passant la porte. Il y a également cette volonté de vouloir se fournir autant que possible localement. D’acheter luxembourgeois, si c’est possible. Vous avez le sentiment d’être sur un marché sans véritables concurrents ? Oui. Comme je le disais, on ne fabrique pas vraiment le même produit que les autres. Et puis, les grands noms de la pâtisserie m’ont plus proposé leur aide qu’autre chose. C’est le cas des frères Oberweis, par exemple, mais aussi de Gérard Cayotte, que je croise tous les jours. Et chez qui je peux aller chercher un conseil sans souci. Il m’a dit qu’il était heureux de me voir ouvrir ma boutique, malgré la concurrence que cela pouvait lui causer. Cela m’a rendue fière. Et cette passion du chocolat, elle vous vient d’où ? Je ne sais pas… On n’en mangeait pas beaucoup à la maison quand j’étais petite. Et je pense même que la première fois qu’on m’en a mis en bouche, à quatre ans, j’ai dit que je n’aimais pas ça [rires]. Je vous avoue que je n’en mange toujours pas énormément. Ce que j’adore surtout, c’est la « matière chocolat ». Tout ce qu’elle permet de réaliser. Une matière qui vous permet aussi d’assouvir une autre de vos passions, celle qui touche au domaine graphique… C’est vrai. Mais il n’y a pas que l’esthétique qui compte à mes yeux. Je voulais aussi innover en termes de goûts et de textures. Alors, forcé­ ment, on retrouve dans mes bonbons du caramel au beurre salé, de la praline… parce que je ne veux pas tout bouleverser non plus. Mais j’ai développé bien d’autres associations qui me sont passées par la tête. J’ai même tout un tableur Excel qui reprend celles-ci. Parfois, tout est simplement parti d’un fruit vu au ­marché, me demandant ensuite avec quoi je pouvais le marier. Puis s’il fallait le travailler en ganache,


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Conversation Lola Valerius

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en gelée… En faisant attention à respecter un côté régional mais aussi la chronologie des saisons. Tous nos fruits proviennent ainsi de chez Am Gaertchen, une association basée près de Diekirch qui cultive de manière biolo­ gique. Et nous créons en fonction de ce qu’ils ont récolté. Pas question donc de proposer de la fraise en plein mois de décembre. Et avec l’automne qui se profile, on va changer notre collection. Nos « classiques », c’est-à-dire les bonbons qui fonctionnent le mieux, resteront à la carte, mais le reste va évoluer.

Pour le moment, les produits de Lola Valerius ne sont disponibles que dans sa boutique à Esch et à la Luxembourg House, à Luxembourg-ville. Mais la jeune chef d’entreprise a évidemment en tête de diversifier tout cela et de toucher un public bien plus large grâce à la vente en ligne. « Nous travaillons sur la mise en place d’un compte sur le site luxembourgeois de vente en ligne Letzshop », explique l’Eschoise de 30 ans. Celui-ci devrait voir le jour fin septembre ou début octobre. « Avant, ce n’était pas possible. À cause de la chaleur, même si l’été n’a pas été bon. Dans quel état arriveraient les chocolats, en cas de gros coup de chaud ? » Dans un premier temps, la vente

en ligne devrait se limiter au territoire Visuellement, vos bonbons sont national. Mais, si cela fonctionne, assez spectaculaires, avec des mélanges Lola Valerius envisage de prendre l’option permettant de vendre en de couleurs vives comme on en voit Allemagne, en Belgique et en France. rarement en matière de chocolat. Comment est né ce concept ? J’ai découvert ce type de bonbons sur Instagram. Cela m’a un peu intriguée et poussée à faire des recherches. C’est un concept encore rare dans des univers qui leur étaient inconnus. Et ça, en Europe, mais plus développé sur les conti- c’est vraiment une belle récompense. nents américain ou australien. Ce n’est pas si facile que ça à réussir… La couleur, c’est impor- Vous produisez votre chocolat vous-même ? tant pour les yeux. Le packaging aussi. Je ne Je me fournis chez le Français Valrhona. comprends pas pourquoi certains s’évertuent Le ­rapport qualité/prix est vraiment excellent. à créer de jolies choses pour ensuite les entas- Fabriquer son propre chocolat, c’est un métier ser les unes sur les autres dans un ballotin. Cela différent de celui de chocolatier. D’ailleurs, me dépasse un peu… C’est pour ça que j’ai opté dans cette profession, on ne parle pas de « chopour une boîte où chaque bonbon peut être colatier » mais de « couverturier ». Ce dernier regardé, en étant bien rangé, sans toucher les produit le chocolat de couverture, qui est utiautres. Il faut que cela soit comme un bijou lisé par les chocolatiers pour leurs créations. dans son écrin. Et que la dégustation soit res- Certains font les deux. C’est le cas, par exemple, sentie comme un moment d’exception. Cela au Luxembourg, de la maison Oberweis. Mais doit être une explosion en bouche. produire son chocolat coûte extrêmement cher, qu’il s’agisse des fèves qu’il faut importer ou Il faut donc que chacun de vos bonbons du ­matériel indispensable à la production. Sans soit une surprise pour les yeux comme parler de la place nécessaire pour entreposer pour le palais… tout ça. C’est un investissement vraiment énorme. C’est exactement ça ! D’ailleurs, à l’ouverture Tout cela pour, au final, une différence que peu de notre boutique, nous ne vendions que des de personnes parviennent réellement à noter. boîtes précomposées. Histoire de faire goûter toute notre production. Sinon, les gens ne Quelles ambitions avez-vous ? prennent que ce qu’ils connaissent et aiment. D’abord, de finir notre petit salon de dégusOr, je voulais qu’ils me donnent une chance de tation qui doit prendre place dans notre bouleur faire découvrir de nouvelles saveurs. ­Certains tique. Histoire que les gens puissent venir sont d’ailleurs revenus afin de nous remercier. s’asseoir chez nous, boire un chocolat chaud Ils avaient apprécié que nous les emmenions et manger quelques bonbons.

« La population luxembour­ geoise adore le chocolat. Elle en achète le plus souvent de moindre qualité, faute de mieux. » 42

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Après, je veux continuer à développer notre gamme. J’ai encore des milliers d’idées qui fourmillent dans ma tête mais, à deux dans le labo que tout le monde peut voir à l’arrière de la boutique, nous n’avons pas assez de mains pour les produire… Mais cela marche suffisamment pour que vous puissiez penser à évoluer ? Oui. D’ailleurs, à la rentrée, je vais engager une personne supplémentaire. Nos produits sont vendus à la Luxembourg House, près du palais, mais j’ai également en tête l’idée d’installer une seconde boutique, cette fois à L ­ uxem­bourg ville. Pas un point de vente aussi grand qu’à Esch. Un 30 m2 me suffirait. On regarde, mais c’est très cher. On est sur du 20.000 euros de loyer par mois dans la Grand-Rue… Mais avant ça, il va falloir que je développe un peu plus mon réseau. Travailler avec des restaurants, des hôtels… Et, si je me projette très loin, j’avoue que j’aimerais bien un jour m’exporter. J’ai toujours tellement aimé voyager. Vous avez un exemple en tête de grand chocolatier s’étant exporté que vous aimeriez bien suivre ? Non. Certains sont parfois devenus trop grands et la qualité de leurs produits peut en souffrir. Dernièrement, par exemple, j’ai été déçue par ce que j’ai mangé venant de chez Pierre M ­ arcolini. Je ne veux pas devenir un Patrick Roger ou un Pierre Marcolini. Comme je le disais, leur pro­ duc­tion est trop importante. Le côté artisanal, le travail avec les mains ont disparu. Et moi, cela me manquerait. Je ne veux pas que tout devienne automatisé, avec des machines p ­ artout. Même si ce que fait Patrick Roger reste la meilleure qualité qu’il m’ait été donné de ­goûter. Le but de ma carrière, ce n’est pas de devenir la plus grande. Pas en termes de production ou de volume, en tout cas. On sait que la pâtisserie et la chocolaterie sont des domaines où les concours internationaux sont nombreux et de plus en plus médiatisés. Cela vous tenterait de vous tester ? Pour l’instant, je n’y pense pas vraiment. Je n’en ai pas le temps. Je me dois de travailler en production, vu qu’on fonctionne en petite équipe. Mais, dans le futur, cela me tenterait, oui. Si on se développe suffisamment bien, pourquoi ne pas, à l’avenir, me dégager du temps pour ­tenter certains concours... On vient de me demander de rejoindre les Sucrés du Lux, un groupe réunissant les pâtissiers-chocolatiers luxembourgeois et de la région limitrophe. Ils se réunissent quelques fois par an, et chacun propose un buffet sur un thème donné. J’ai hâte. C’est le genre de chose qui m’excite assez. C’est la première fois que je vais pouvoir me jauger concrètement par rapport à d’autres…


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C’est dans le domaine de l’exploitation des données que Clearstream brasse en grand volume, son CEO Philippe Seyll se veut volon­ tariste, mais avec une approche « terre-à-terre».


Conversation Philippe Seyll

« Nous ne voulons pas accompagner le changement technologique, mais l’initier » Discrète ces dernières années, Clearstream Banking Luxembourg continue pourtant de caresser de grandes ambitions depuis le Luxembourg. Son CEO, Philippe Seyll, partage sa vision pragmatique de l’innovation dans l’industrie des fonds, dont Clearstream veut être un des moteurs. Interview MARC FASSONE

Clearstream est une entreprise emblé­ matique de la Place, mais paradoxalement très discrète ces dernières années. Quelle est son actualité ? Nous avons effectivement un fort ancrage luxembourgeois, mais, pour des raisons variées, nous nous sommes faits discrets ces dernières années. Nous sommes quand même 1.200 personnes sur la Place – et 3.000 de par le monde – et nous réalisons un chiffre d’affaires de 827,2 millions d’euros. Être discret n’est pas une fin en soi, mais c’est vrai qu’expliquer ce que nous faisons de manière claire est un exercice compliqué. Une personne privée comprend ce que fait une banque, car elle y est confrontée dans sa vie quotidienne. Nous, nous sommes dans le B2B, et, qui plus est, un B2B ni très classique, ni très sexy. Mais notre importance dans le monde de la finance est réelle : si nous devions tomber, une grosse partie de la finance européenne s’arrêterait. Ce que je souhaite, c’est montrer que rien de ce que l’on fait n’est secret. Je veux que les candidats qui postulent chez nous sachent ce qui nous différencie des autres institutions financières de la Place. Clearstream est plus réputée sur la Place pour la succession des plans sociaux de ces dernières années que pour être une entreprise qui recrute énormément. Cette image serait-elle fausse ? Clearstream est une société en plein développement. Elle l’a toujours été. Et si nous avons eu, comme toutes les institutions financières, des plans de restructuration, ils visaient deux objectifs : le contrôle des coûts et le renouvellement des cadres. L’idée n’était pas de recruter hors du Luxembourg, même si nous l’avons fait pour des raisons systémiques

Photo MATIC ZORMAN

afin de ne pas avoir tous nos effectifs sur un seul emplacement ; c’était surtout de pouvoir disposer de centres opérationnels ailleurs pouvant prendre le relais si nécessaire. Le but était plus de rééquilibrer notre workforce. Nous avons toujours eu une politique d’aménagement de fin de carrière très ambitieuse et avantageuse pour nos salariés. Notre objectif a toujours été de conserver ce que nous avions sur la Place, voire de l’accroître en termes de présence. Nous pourrions très bien faire ce que nous faisons depuis la lune, mais nous nous sentons très bien ici, au Grand-Duché de Luxembourg, pour plusieurs raisons, comme le multi­

BIO Un Belge à la carrière internationale Philippe Seyll est né le 10 juin 1963 à Bastogne. De nationalité belge, il parle couramment le français, l’anglais et le néerlandais. Ingénieur de formation Il est titulaire d’un master en ingénierie industrielle mécanique obtenu en 1987 auprès de l’Institut supérieur industriel de Bruxelles et d’un autre master en science de l’informatique obtenu en 1989 auprès de l’Université libre de Bruxelles. En 1991, il obtient un master en management délivré par HEC Bruxelles. Une carrière internationale Avant de rejoindre Clearstream Banking en 2005, il a fait un crochet par Londres, auprès de la Bank of New York, Hong Kong et Bruxelles.

linguisme, la qualité des infrastructures, de la relation avec le régulateur et le gouverne­ment, ainsi que la stabilité du pays, qui est pour nous un critère d’une énorme importance. Quelles sont, justement, vos activités, votre actualité et vos pistes de croissance aujourd’hui au Luxembourg ? Nous avons trois métiers sur la Place. Le premier est simple et classique, historique : c’est celui du service aux émetteurs. Lorsque des sociétés et des États veulent faire appel au marché en émettant de la dette, cela s’organise. Nous sommes – via Clearstream Issuer ­Services – un de ces orchestrateurs qui permettent à des emprunteurs de se retrouver sur le marché des capitaux. Ce n’est pas un métier que tout le monde connaît, mais que tout le monde peut plus ou moins comprendre. Une fois ces valeurs émises, elles ont une vie sur ce que l’on appelle les marchés secondaires. Mettons que vous avez acheté un bon du Trésor français ou un bon du Trésor allemand sur le marché primaire avec une maturité, disons, de 30 ans. Si, au bout de 10 ans, vous décidez de vous en défaire, vous le revendez sur un marché secondaire. Nous intervenons une fois que la décision d’échange de la valeur mobilière est prise. C’est la ligne de métier que nous appelons « investor services », notre deuxième métier. Nous nous occupons de la livraison effective du titre – le settlement. Nous facilitons techniquement l’échange de titres contre du cash, ou des titres, le cas échéant, mais nous ne sommes pas une contrepartie centrale. Il y a enfin un troisième métier, un peu à la marge des deux autres, que l’on appelle « investment fund services », et qui a pour objectif de faciliter la souscription et le rachat dans des parts de fonds. C’est un métier qui est fondaOCTOBRE 2021

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Conversation Philippe Seyll

mental au Luxembourg. J’ai été engagé il y a 17 ans pour le développer. Il représente aujourd’hui à peu près un tiers des revenus de Clearstream, et il connaît une croissance fulgurante. C’est d’ailleurs le métier de croissance de Clearstream. Et c’est un métier qui est beaucoup plus proche des métiers classiques de la place financière luxembourgeoise. C’est sur lui que se concentre l’actualité de la société. Que recouvre concrètement cette activité ? Nous sommes devenus aujourd’hui la plus grosse plateforme au monde d’exécution et de conservation de parts de fonds. Nous avons développé à partir de rien une offre de services que l’on appelle Vestima, qui a pour objectif de faciliter l’accès aux distributeurs – des banques qui signent des accords de distribution avec les managers pour mettre à disposition de leurs clients les produits de ces derniers – à toutes les gammes de fonds existant dans le monde. Il suffit aux distributeurs de créer un seul compte chez nous pour accéder à 200.000 fonds d’investissement dans le monde, à l’exception des fonds américains, pour des raisons réglementaires. Nous offrons à plus d’un millier de clients l’accès à des fonds provenant de 43 juridictions internationales et gérant pour 3,3 milliards d’euros d’avoirs. Nous acheminons les ordres des distributeurs et conservons leurs parts de fonds. Nous intervenons également entre les gestionnaires d’actifs et les distributeurs. Avec Clearstream Fund Centre (CFC), nous avons développé une activité de centrale d’achat. Nous achetons en gros volumes des fonds auprès des gestionnaires d’actifs, que nous proposons aux distributeurs à des conditions meilleures que celles qu’ils pourraient obtenir s’ils négociaient en face à face avec les gestionnaires. Si Vestima est une activité « technique », CFC est une activité plus commerciale. Nous nous sommes vraiment développés dans le métier de la distribution, par croissance interne ou externe. Citons l’acquisition, en 2015, de Citco G ­ lobal Securities Services, une société basée à Cork qui offrait des services d’exécution de parts

UN PILIER HISTORIQUE DE LA PLACE Clearstream a été fondée en 1970 sous le nom de Cedel par un consortium de banques locales en réaction à la création d’Euroclear par la banque américaine J.P. Morgan. C’était à l’origine un dépositaire central international (ICSD, pour international central securities depository) dont le métier était le règlement-livraison sur le marché des euro-obligations, en plein essor à l’époque au Luxembourg. À ce métier originel se sont ajoutés, au fil du temps, le règlement-livraison des titres et parts de fonds d’investissement et le service à l’industrie des fonds, activités menées par Clearstream Banking, dirigée par Philippe Seyll. Les clients de Clearstream sont des banques ou des institutions financières. Cedel est devenue Clearstream (« courant limpide ») en 2002 suite à la fusion de Cedel International et Deutsche Börse Clearing, une filiale de Deutsche Börse Group. Deutsche Börse Group l’acquiert en totalité en 2004.

de fonds dans les hedge funds pour « mettre plus de produits sur l’étagère ». Ou encore notre politique d’expansion en Australie, avec l’acquisition d’une société spécialiste de l’exécution et de la conservation de parts de fonds. L’Australie est un marché colossal dominé par d’énormes fonds de pension qui ont désormais la possibilité d’investir dans des fonds Ucits. L’idée est pour nous d’attirer les flux venant de ce marché. Avez-vous d’autres projets de croissance externe ? Il faut savoir que, pour Clearstream, la transformation digitale est quelque chose d’extrêmement important. C’est quelque chose que l’on a toujours connu et pratiqué. Si vous visitez nos sous-sols, là où nous avions des coffres que nous louions à nos sociétés clientes, vous verrez que ces coffres sont quasiment vides. Il y a de moins en moins de papier. Les valeurs mobilières sont dématérialisées. C’était notre

« On s’achemine vers des fonds d’investissement totalement dématérialisés. » 46

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première transformation digitale, que nous avons terminée il y a quelques années. La deuxième transformation digitale réside pour nous dans l’utilisation des technologies blockchain. Technologie qu’il ne faut pas con­ fondre avec le bitcoin. La technologie DLT (pour distributed ledger technology, ou registres distribués) est un système numérique qui enregistre des transactions d’actifs et leurs détails dans plusieurs emplacements à la fois. Contrairement aux bases de données traditionnelles, la DLT ne dispose pas d’un dépôt de données de référence ni de fonction d’administration centralisée. Dans un registre distribué, chacun des nœuds traite et vérifie chaque élément des transactions. Un consensus sur la véracité de ces éléments est ensuite trouvé entre les différents nœuds. Cette technologie peut servir à enregistrer des données statiques, par exemple un cadastre, ou des données dynamiques, telles que des transactions. Une architecture informatique de ce type révolutionne la tenue des registres, en changeant radicalement le mode de collecte et de communication des informations. Cette technologie, nous allons l’utiliser pour construire la banque du futur. Comment comptez-vous procéder ? Nous ne voulons pas accompagner le changement technologique, mais l’initier. Nous avons en projet un service qui a pour objectif de changer la manière dont les valeurs mobilières sont émises et opérées sur le marché secondaire. La digitalisation va prendre de l’ampleur dans l’industrie des fonds, et on s’achemine vers des fonds d’investissement totalement dématérialisés. Aujourd’hui, les registres classiques sont dématérialisés. Et cela ne va pas s’arrêter là. Il nous a semblé important de nous prémunir contre un changement inéluctable en devenant l’un des acteurs. Comment ? En devenant partenaires de la société FundsDLT, une société spécialisée dans la digitalisation de la distribution des fonds lancée en 2016 par la Bourse de Luxembourg et Fundsquare. Société qui regroupe désormais, outre la Bourse, Credit Suisse Asset Management, Natixis Investment Partners et nous. Ce qui est intéressant dans FundsDLT, c’est que l’on a dépassé le cadre du proof of concept. Nous nous plaçons ici de nouveau entre les gestionnaires et les distributeurs. Le Graal pour les gestionnaires, et c’est un thème récurrent dans les salons professionnels, c’est d’avoir le réseau de distribution le plus léger possible et le chemin le plus court vers l’investisseur. Un réseau le plus léger et le plus court possible, c’est aussi ce que veulent les distributeurs, qui cherchent également à obtenir des conditions plus favorables pour la création, la structuration et la gestion des fonds qu’ils distribuent à leurs clients. Nous nous posi-


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Conversation Philippe Seyll

LA TECHNOLOGIE DLT

tionnons entre ces deux acteurs en leur offrant des possibilités techniques d’amélioration et d’élimination progressive de certains maillons de la chaîne de valeur. Nous avons déjà des clients intéressés : Zürcher Kantonalbank (ZKB) et Raiffeisen, en Autriche, ont créé des fonds entièrement digitalisés via DLT, avec comme objectif d’avoir le contrôle de l’entièreté de la chaîne de valeur, sauf peut-être la gestion pure. Prenons aussi l’exemple de la société d’asset managers italienne Azimut. Elle a créé des fonds qui éliminent toute la traditionnelle chaîne de distribution en offrant à ses clients l’accès à ses produits par de simples apps disponibles sur smartphone ou tablette. On dit souvent dans nos métiers que les fonds sont vendus et non achetés. Cela est en train de changer… La digitalisation dans vos métiers peut-elle encore aller au-delà ? Nous avons parlé d’exécution, de distribution et d’innovation. Il reste un quatrième domaine : celui des données. Data, c’est le buzzword qui excite tout le monde. Loin de cette excitation, je resterai plus « terre-à-terre ». Nous avons comme clients un millier de distributeurs et plus ou moins 700 gestionnaires d’actifs pour qui nous traitons 60 millions de transactions par an. Des transactions groupées, c’est-à-dire que, derrière une transaction, peuvent se cacher des dizaines, voire des centaines d’opérations d’achat. Nous sommes la plus grosse plateforme du monde, la seconde faisant un tiers de notre taille. Pour les distributeurs et les gestionnaires, aller chercher la bonne donnée qui va leur permettre de faire leur métier ou de répondre aux obligations réglementaires devient un cauchemar. Comme nous sommes à la convergence de toutes les données, pourquoi ne pas nous positionner sur ce métier ? Nous avons étudié le marché. Il est scindé en deux types de données de base. Il y a ce que l’on appelle les données des fonds et ce que l’on appelle les analytiques.

La technologie DLT, pour distributed ledger technology, que l’on peut traduire par « registre distribué » ou « registre partagé », est une base de données décentralisée simultanément enregistrée et synchronisée qui évolue par l’addition de nouvelles informations préalablement validées par l’entièreté du réseau et destinées à ne jamais être modifiées ou supprimées. Elle est basée sur la technologie peer-to-peer et nécessite un algorithme de consensus pour fonctionner. Son application la plus médiatique est la blockchain. Outre les controversées cryptomonnaies, cette technologie facilite les paiements instantanés, permet le développement de contrats intelligents, ainsi que le stockage de fichiers.

La donnée des fonds est la donnée qui n’est – presque – pas touchée, la donnée pure qui comprend le numéro ISIN (international securities identification number, ndlr) du fonds, son nom et sa politique d’investissement, élément primordial pour s’assurer que votre client est bien un client qui peut avoir accès à ce fonds spécifique par ce genre de choses. Sur ce créneau de l’exploitation des fonds, il y a à peu près une cinquantaine d’acteurs en Europe qui se partagent 300 millions d’euros de revenus. Les analytiques, ce sont toutes les données qui peuvent être combinées pour obtenir des tendances, et donc faire de la prospective. Un marché qui pèse entre 500 et 600 millions d’euros de revenus répartis ici aussi entre une cinquantaine d’acteurs. Un milliard à se rapatrier entre une centaine d’acteurs, cela peut sembler marginal. Mais comme nous sommes à la convergence des données, pourquoi ne pas nous positionner dans ce métier ? Une question quelque peu rhétorique, car nous sommes en train de développer une offre de services. Nous avons acquis des équipes qui viennent de BNP Paribas, et nous avons, au sein du groupe Deutsche Börse, investi dans ISS (­Institutional Shareholder Services), une société qui manipule énormément de données dans

« Notre objectif a toujours été de conserver ce que nous avions sur la Place, voire de l’accroître en termes de présence. » 48

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le secteur des fonds. Le groupe, voyant la croissance du métier des fonds chez Clearstream, est très intéressé par la perspective de nous permettre de nous développer, y compris par la voie de la croissance externe. L’industrie des fonds est donc devant une révolution copernicienne équivalente à celle qui a touché les banques sur le segment de valeur du paiement. Quels seront les premiers perdants, selon vous ? On va vers encore plus de digitalisation. Mais la digitalisation dans l’industrie des fonds, ce n’est pas juste mettre sur des ordinateurs ce qui était avant consigné sur du papier, c’est changer la manière dont les parts de fonds seront émises et distribuées. L’utilité d’un registre dans une configuration DLT disparaît. Certes, nous aurons encore dans 10 ans des registres d’actionnaires. Mais de moins en moins. Les fonds qui seront créés à l’avenir seront digital native, tandis que les anciens devront évoluer. Tous ceux qui vont s’accrocher au registre papier, comme les teneurs de registres ou les agents de transfert, vont devoir se réinventer. Si on va jusqu’au bout de la logique de la digitalisation, l’échange de titres contre du cash va disparaître. Les grands asset managers qui sont également fournisseurs de technologies vont probablement transformer leurs technologies de manière à supporter la vague de « DLTisation » du marché. Ce ne sera pas brutal. On sera plutôt dans une évolution naturelle inéluctable. Je m’attends également à ce que la crypto­ monnaie fasse son entrée dans le métier. Je ne parle pas du bitcoin ou de cryptomonnaies comme actifs – c’est un autre débat –, mais des cryptomonnaies comme outil. Aujourd’hui, les procédures d’achat et de vente prennent entre un et trois jours parce que l’émetteur de la part ou celui qui traite le cash a besoin d’un à trois jours pour confirmer l’existence des parts de fonds et du cash impliqués. On peut concevoir que, lorsqu’une monnaie scripturale a été convertie en monnaie électronique et que la part de fonds est émise en temps réel par une inscription non plus en compte, mais dans un écosystème DLT, on est dans l’instantané au moment de l’échange.


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« La clientèle luxembourgeoise est une très belle clientèle »

Florian Craen voit, dans les 18 derniers mois, une succession de trans­ formations vertigineuses.

À l’occasion de la réouverture du magasin Hermès dans la capitale, Paperjam a pu rencontrer Florian Craen, directeur général commercial d’Hermès International et membre du comité exécutif. Interview CÉLINE COUBRAY

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Photo HERVÉ THOUROUDE


Florian Craen

BIO EXPRESS

Au premier trimestre 2021, Hermès ­enregistre une progression de ses ventes de +44 % par rapport à la même période en 2020, et dépassant de 33 % les résultats du premier trimestre 2019, soit avant la pandémie. Ce sont des chiffres qui feraient rêver plus d’une entreprise. Comment expliquez-vous ce succès commercial malgré cette période difficile ? Pour être franc, je ne sais pas si nous sommes en mesure de tout expliquer. Ce qui est surtout plus notable, c’est la croissance par rapport à 2019, car 2020 est une année atypique, avec un bon début de premier trimestre, suivi par une baisse conséquente de l’activité. C’est d’abord une leçon d’humilité, une illustration du fait qu’au-delà de ce que l’on anticipe et prévoit, il faut savoir réagir à un monde qui change. Nous n’avions évidemment pas prévu la situation dans laquelle nous nous sommes retrouvés il y a un an, et encore moins celle dans laquelle nous nous retrouvons aujourd’hui. Il y a un an, nous connaissions une situation de contraction forte et de grandes incertitudes. Aujourd’hui, nous sommes dans une phase d’expansion forte, mais avec toujours de grandes incertitudes. Les points d’explication à cela ne sont pas inédits : il y a un report de consommation dans certaines catégories de produits. C’est très lisible par ex­emple pour les collections maison, qui sont un métier chez nous. Il y a aussi peut-être un report de consommation sur notre industrie en général parce que les gens ne voyagent pas, organi­sent moins de réceptions. Il y a donc un pouvoir d’achat qui se reporte, sans doute. À cela il faut ajouter la force d’une signature et de notre mar­que vers laquelle se tournent manifestement nos clients. Il y a aussi le choix fait stra­tégique­ ment d’investir partout dans le monde, d’être présents localement. Nous avons toujours eu cette intention. Elle est récompensée aujourd’hui. Le magasin de Luxembourg, que nous sommes en train de rénover, en témoigne. Pour autant, nous ne sommes pas partout, mais nous sommes là où il y a une clientèle locale, et nous en sommes récompensés. Hermès dispose en effet de 306 magasins exclusifs à travers le monde en 2020. Quels sont vos plus gros marchés ? Nos quatre grands marchés sont la France, les États-Unis, la Chine et le Japon. La France est notre marché historique. Le Japon est le premier marché majeur d’importance depuis les années 1980. Les États-Unis et la Chine sont venus, ces dernières décennies, compléter cette présence. Mais nous sommes aussi beaucoup implantés, et de longue date, dans des pays comme la Corée du Sud, l’Allemagne, la Suisse, l’Italie et l’Angleterre. Les magasins Hermès comptent 221 ­succursales et 85 concessionnaires en 2020. Quelles sont les différences ?

Des études internationales Né en 1970, Florian Craen est diplômé d’un accelerated management program de l’Harvard Business School (2013), ainsi que de l’École supérieure du commerce extérieur (1992). Chez Hermès depuis 25 ans Il entre chez Hermès en 1997 comme chef de zone. Puis, il passe directeur international du travel retail à partir de 2001. En 2006, il devient directeur général de la filiale anglaise et, à partir de 2009, de la zone Asie du Nord. En 2013, il devient directeur général commercial d’Hermès International et membre du comité exécutif, postes qu’il occupe toujours actuellement.

On imagine aisément que la crise sanitaire accélère aussi cette croissance. Bien sûr. On a pu constater une forte augmentation du trafic sur nos sites dès mi-mars 2020 et de l’activité de vente en mai 2020, partout dans le monde. Depuis, nous sommes restés sur un niveau d’activité considérable et sans commune mesure avec ce que l’on con­ ­naissait avant.

Avez-vous dû faire preuve d’agilité, peut-être même d’inventivité, sur le plan commercial, depuis la pandémie, pour ne pas perdre en progression de vente ? L’enjeu n’était pas tant de ne pas perdre en progression que de garder le contact avec nos Ce qui est important, avant tout, c’est que clients. Depuis plus de 180 ans, la relation l’ex­périence client soit la même dans chacun client se fait classiquement et traditionnellede nos magasins, que ce soit dans nos maga- ment dans nos magasins. Occasionnellement sins historiques ou ceux de nos partenaires, par téléphone ou par e-mail, quasiment plus comme c’est le cas avec la famille Graas au du tout par courrier. Mais, avec la fermeture Luxembourg, qui est un partenaire de longue des boutiques, la relation client a été bouscudate. Aujourd’hui, nous avons plutôt tendance lée. Le magasin, point de contact principal et à intégrer les magasins dans notre réseau, sauf quasi exclusif, n’était plus accessible. Et tout quelques cas particuliers comme le réseau a changé : la façon dont on communique, dont des aéroports qui est essentiellement concédé on anime les équipes, dont on forme, dont on et quelques magasins en ville, comme celui vend. Ces 18 derniers mois sont une succesde Luxembourg. C’est une distinction évi- sion de transformations assez vertigineuses demment juridique et économique. et qui, en même temps, doivent nous donner confiance dans notre capacité à nous adapter, Hermès possède aussi une plateforme à réagir. Nous avons donc développé des outils d’e-commerce. Quel succès la vente rapidement pour faciliter les échanges entre en ligne rencontre-t-elle ? un vendeur et sa clientèle. Nous avons mis Là aussi, c’est une leçon d’humilité. Nous en œuvre des outils de paiement à distance, avions été l’une des premières maisons à déve- une communication qui s’appuie sur toutes lopper l’e-commerce en 2001, en ouvrant le les solutions qui sont aujourd’hui à notre porsite aux États-Unis, ce qui était précurseur. tée, comme WhatsApp ou WeChat pour notre Puis, nous avons eu un développement régu- clientèle en Chine. Nous avons même créé, lier dans le temps, mais assez lent. Depuis dans certains magasins, de véritables studios quatre ans, on note une forte accélération de vidéo pour réaliser des présentations de nos l’activité de l’e-commerce, qui s’est encore produits, avec des prises de rendez-vous. Par renforcée depuis deux ans. Celle-ci se déve- ce biais, à défaut de pouvoir venir dans le ma­ loppe sur tous les marchés et dans tous nos gasin, certains clients pouvaient avoir des métiers. Le moteur premier est le trafic sur présentations des collections de prêt-à-porter nos sites www.hermes.com dans le monde, qui par exemple. C’est une ap­proche qui aurait été ont vu une forte augmentation de leur fréquen­ inenvisageable il y a quelque temps. D’abord, tation depuis plusieurs années, avec une accé- parce que nous nous le se­rions peut-être interlération depuis deux ans. dit nous-mêmes. Mais ces solutions se sont imposées, car elles étaient le seul moyen de Que représente l’e-commerce au niveau garder le contact avec nos clients, et certaines de vos ventes ? d’entre elles sont sans doute a ­ menées à cohaC’est une croissance significative. Ces ventes biter avec une relation plus classique en magaévoluent beaucoup plus vite que la croissance sin. Personnellement, ce qui a été le plus du groupe, que nous évoquions en début d’en- gratifiant pour moi a été de voir ces clients qui tretien. La réalité est aussi différente en fonc- ne pouvaient plus frapper à notre porte t­ rouver tion des produits. Le prêt-à-porter, par exemple, d’autres portes pour solliciter un contact avec n’a pas le même poids que les accessoires la maison. Cela nous a portés. comme les carrés, les cravates, les ceintures ou encore les chaussures, qui fonctionnent Comment évolue votre clientèle ? très bien en vente en ligne. Ce que je peux Je suis dans la maison depuis 25 ans et sur cette vous dire, c’est que notre e-commerce est le courte période à l’échelle de la maison, mais premier magasin du groupe et il conserve quand même significative, la clientèle a toucette place dans quasiment toutes les catégo- jours bougé. Nous sommes une maison qui a grandi, qui accueille de nouveaux clients par ries de produits. OCTOBRE 2021

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Conversation Florian Craen

Jean Bechameil

les pays et par les âges. Nos catégories de produits bougent aussi. On porte aujourd’hui beaucoup moins la cravate que dans les années 1980-1990, alors les clients se tournent vers d’autres offres de la collection comme la bijouterie, la maison ou les chaussures, pour citer trois métiers très actifs en ce moment. En plus de ces dynamiques de produits, il y a des dynamiques de marché. On a vu arriver la clientèle japonaise dans les années 1980, la russe au milieu des années 1990, la chinoise dans les années 2010, avec une clientèle forte aujourd’hui dans le sud-est asiatique. Récemment, nous avons ouvert le marché en Pologne. De nouveaux horizons et de nouvelles clientèles ­émergent régulièrement. C’est une évolution pro­­gressive et constante qui fait que le panorama général de nos clients est différent de ce qu’il était il y a trente ans. Est-ce vrai que chaque magasin Hermès, quelle que soit sa taille, doit présenter les 16 familles de produits de la maison ? Oui, c’est juste. C’est une particularité un peu contraignante, je l’assume, y compris dans nos magasins d’aéroport qui sont contraints, à bien des égards, en surface de vente et en stock. L’idée est qu’Hermès, ce n’est pas qu’un objet, mais un ensemble de propositions d’offres. C’est une signature qui se construit, pas seulement avec un sac ou un carré, mais aussi avec des objets de la maison, du prêt-à-porter, des bijoux… Toutefois, chaque magasin a la possibilité de présenter la sélection de son choix à sa clientèle. Nous avons une offre très large, d’environ 50.000 références par collection. Aucun magasin ne peut présenter l’ensemble, pas même le magasin du Faubourg Saint-Honoré à Paris. Aussi, pour choisir ces gammes, chaque magasin vient à Paris deux fois par an pour choisir ce qu’il veut pour sa clientèle. Le parti pris est de dire que les offres doivent être différentes dans tous les magasins. Et elles le sont nécessairement puisque ce sont des acheteurs différents, avec des clientèles différentes. Pour le magasin, c’est la possibilité de s’ajuster à sa clientèle et d’organiser sa différence. Pour les clients, c’est aussi la garantie de trouver dans chaque magasin Hermès une proposition ­singulière, d’être surpris. De nouveaux métiers sont aussi apparus récemment dans la maison Hermès. C’est le cas du maquillage, avec les rouges à lèvres. Est-ce que ce produit a pu rencontrer sa clientèle ? Nous sommes au tout début de cette aventure, d’autant plus que le lancement s’est fait le 4 mars 2020, une semaine avant le confinement à peu près mondial, et un port du masque généralisé et obligatoire. On conviendra que, pour lancer un rouge à lèvres, ce n’est pas le moment le plus opportun. Nous venons de lancer l’offre Beauté en Chine. La clé du 52

OCTOBRE 2021

Martine Feipel

UNE VITRINE SIGNÉE FEIPEL & BECHAMEIL À l’occasion de la réouverture du magasin Hermès à Luxembourg, les artistes Martine Feipel et Jean Bechameil ont été invités à concevoir une vitrine spécialement conçue pour la boutique de la rue Philippe II. Cette démarche fait partie de l’ADN d’Hermès, qui soutient les talents artistiques et créatifs partout dans le monde et à travers son réseau de boutiques pour la création de vitrines. La réouverture au public est prévue le 12 novembre.

s­ uccès va être notre capacité à faire revenir les clients qui sont venus par curiosité et à conquérir de nouveaux clients grâce à d’autres canaux de distribution. C’est un des rares métiers qui n’est pas vendu exclusivement en magasins Hermès, mais aussi dans des comptoirs beauté de grands magasins par exemple. Il y a donc un modèle d’expansion qui est plus large que le strict périmètre de nos magasins.

politiques et géopolitiques, au c ­ arrefour de l’Europe. La clientèle luxembourgeoise est une très belle clientèle, qui continue de grandir et nous accompagne depuis longtemps. Nous allons pouvoir lui proposer un environnement différent. L’expérience a montré que, lorsque l’on a un environnement plus propice, plus confortable, on répond en général encore mieux aux attentes de nos clients. Notre distri­ bution mondiale est stable depuis une dizaine d’années, mais elle s’est contractée en Europe. Il peut arriver que l’on ferme des points de vente, mais c’est en général pour nous recentrer sur quelques centres urbains où nous avons une belle clientèle. C’est clairement le cas de Luxembourg.

L’acte créatif est important dans l’esprit Hermès. Comment cela se manifeste-t-il dans les magasins ? Avant toute chose, l’acte créatif se manifeste par l’objet, sa singularité, son renouvellement. Dans un magasin, cela s’exprime aussi par la diversité de la sélection et le fait que les aména­ gements de tous nos magasins sont différents. Une photographie d’intérieur me suffit généralement à reconnaître un magasin dans le Quelles autres nouveautés vont arriver monde, car ils sont tous particuliers. Les vitrines prochainement ? sont aussi l’occasion d’exprimer cet acte créatif. Nous allons présenter un bagage à roulettes. Nous n’avons pas de concept de vitrine mondia­ Par ailleurs, le mobilier continue de se dévelop- lisé et préférons plutôt nous appuyer sur un per. L’écriture de la maison a été relancée il y a réseau de créatifs locaux qui font des propo­ cinq ans, avec là aussi de nouveaux produits. sitions spécifiques pour chaque magasin. Pour C’est une création foisonnante, sans cesse renou- Hermès, qui est une marque française et qui velée, nourrie par une attention et une sensi­ fabrique majoritairement en France, c’est une bilité constantes aux évolutions de la société et manière de célébrer localement la création dans de ses besoins. toutes ses formes, ses origines et ses talents. Les magasins sont finalement le dernier maillon de Quels métiers fonctionnent bien toute cette chaîne. sur le marché luxembourgeois ? Luxembourg est un marché où nous sommes Quelle part de liberté ont les directeurs implantés de longue date. Notre métier phare de chaque magasin ? Au contraire, qu’est la maroquinerie, qui est le premier métier que leur est-il imposé ? du groupe, est aussi le premier du magasin au Un directeur de magasin est un ambassadeur Luxembourg. Vient ensuite la soie, féminine de la maison. C’est lui qui insuffle l’esprit de et masculine, certainement portée par l’envi- son magasin, assume le recrutement de ses ronnement économique. Mais on a aussi une équipes, personnalise l’accueil de ses clients. forte dynamique dans la bijouterie. Le nou- Au-delà de la dimension culturelle qui est propre veau magasin a pour ambition de permettre à chaque pays, il y a une dimension personnelle plus de confort, de générosité, de capacité de dans l’accueil qui est propre à chaque store présentation, avec des places assises, un envi- manager. Évidemment, on lui demande de faire ronnement plus propice à la vente concernant bien et beau, mais nous n’avons pas de protocole précis. Nous proposons à nos directeurs la mode et la maison par exemple. de donner une identité propre à leur magasin La boutique Hermès à Luxembourg et que les clients viennent chez eux parce qu’ils renouvelle entièrement son espace s’y sentent bien. La liberté réside aussi dans le de vente, ce que l’on peut interpréter choix des produits que nous avons déjà évoqué. comme une preuve de confiance en Cette capacité qu’a chaque directeur de magal’avenir. Quelle place occupe ce marché sin à s’ajuster à la clientèle permet de créer des dans la stratégie de vente d’Hermès ? univers propres à chaque boutique. Au-delà des Sans hésitation, ce marché est très dynamique. variations classiques, comme le choix des tailles C’est un petit marché en matière de d ­ émographie, ou des couleurs, certains opèrent des partis pris, mais c’est un marché qui s’apprécie par sa avec par exemple une sélection plutôt classique, dimension particulière en termes é ­ conomiques, ou au contraire très contemporaine.


PUBLIREPORTAGE

NOTZ STUCKI DEVIENT NS PARTNERS Genève, le 14 septembre 2021 – Le groupe de gestion d’actifs genevois NOTZ STUCKI devient NS PARTNERS. Cette évolution s’accompagne d’une refonte de l’identité visuelle, avec un logo remanié et une nouvelle signature de marque. Ce changement répond à l’évolution qu’a connu l’entreprise depuis quelques années. En effet, le Groupe est entré depuis deux ans dans une nouvelle étape de son développement qui s’est traduit par un renouvellement de son organisation. Par ailleurs, alors qu’il était concentré à l’origine sur la gestion privée et les fonds alternatifs, NS PARTNERS s’est largement diversifié depuis quelques années, comme le démontrent le succès de ses fonds de placement traditionnels et la forte croissance des activités de services et d’ingénierie de fonds menées par sa ManCo luxembourgeoise. « Déjà utilisées pour désigner nos fonds et certains de nos projets, les deux lettres NS représentent les initiales de nos deux fondateurs, Beat Notz et Christian Stucki. Elles rappellent ainsi notre histoire de façon concrète et témoignent de notre volonté de maintenir la continuité. Pour sa part, le mot PARTNERS exprime l’inclusion de nouveaux actionnaires et les relations de partenariat que nous entendons créer avec nos collaborateurs, nos partenaires professionnels et nos clients. » a déclaré Frédéric de Poix, Membre du Comité Exécutif.

UNE NOUVELLE SIGNATURE Ce changement de nom s’accompagne d’une nouvelle signature, « Invest with talent », qui traduit la conviction de NS PARTNERS qu’il existe des personnalités véritablement talentueuses, qui génèrent une réelle valeur ajoutée en matière d’investissement. « Dès les années 60, le groupe a été pionnier dans la sélection des meilleurs gestionnaires du monde et a commencé à travailler en architecture ouverte. Ce concept novateur a rencontré un grand succès et a permis à NS PARTNERS de devenir aujourd’hui l’un des principaux gestionnaires de fortune indépendants en Suisse. Grâce aux synergies

avec nos équipes de gestion internes, nous avons développé en parallèle une expertise forte sur plusieurs thématiques porteuses. » a ajouté Cédric Dingens, Membre du Comité Exécutif. Les raisons sociales des différentes entités du Groupe ont été modifiées en conséquence, de même que l’adresse du site internet, qui est désormais nspgroup.com.

A PROPOS DE NS PARTNERS Fondé en 1964, NS PARTNERS est aujourd’hui l’un des plus grands groupes de gestion indépendants en Suisse et en Europe. En 57 ans d’existence, NS PARTNERS a développé une expertise unique dans la sélection des meilleurs gestionnaires de fonds du monde entier et leur combinaison afin de construire des portefeuilles robustes et performants. En parallèle, NS PARTNERS a construit une gamme diversifiée de stratégies traditionnelles au track-record convaincant. Internationale et sophistiquée, la clientèle du Groupe se compose de particuliers fortunés, de family offices, de fonds de pension, de sociétés de gestion et d’entreprises qui partagent une même exigence pour une performance absolue supérieure et un service très personnalisé. Détenu par ses dirigeants, NS PARTNERS est

farouchement indépendant et libre de toute pression externe qui mettrait en danger son impartialité. Ses dirigeants investissent aux côtés des clients, assurant ainsi un parfait alignement des intérêts. Le groupe NS PARTNERS gère ou administre quelque CHF 11 milliards d’actifs à travers trois activités fortement complémentaires : Le groupe NS PARTNERS gère ou administre quelque CHF 11 milliards d’actifs à travers trois activités fortement complémentaires : • Gestion privée : gestion discrétionnaire et conseillée • Gestion d’actifs : fonds NS Funds et solutions d’investissement • ManCo : ingénierie de fonds et services dédiés aux fonds NS PARTNERS compte plus de 110 collaborateurs à travers 7 bureaux dans le monde entier (Genève, Zurich, Londres, Luxembourg, Madrid, Milan, Bermudes). NS PARTNERS est autorisée et réglementée par la FINMA, en tant que gestionnaire de placements collectifs.

Pour toute information supplémentaire, prière de contacter : Ana-Maria Fojo Rey NS Partners SA T +41 (0)22 906 52 95 ana.maria.fojorey@nspgroup.com nspgroup.com

Ricardo Payro Payro Communication Sàrl T +41 (0)22 322 13 17 rp@payro.ch payro.ch


La Konschthal, avec Christian Mosar à sa tête, va donner un nouveau souffle à la culture dans le Sud.


Conversation Christian Mosar

« Critiquer la culture pendant 15 ans c’est bien, mais à un moment il faut la faire ! » À quelques mois du grand début d’Esch-sur-Alzette comme Capitale européenne de la culture, Christian Mosar, le nouveau monsieur Culture du sud du pays, se lance avec conviction dans l’inauguration de la Konschthal et du Bridderhaus, dont il s’est vu confier la direction. Interview FABIEN RODRIGUES

En préambule de l’ouverture de la Konschthal, vous avez organisé la manifestation Schaufenster. Quel bilan tirez-vous de celle-ci ? Il faut tout d’abord dire que le projet de la Konschthal, de l’achat du bâtiment par la Ville d’Esch-sur-Alzette à son ouverture imminente le 2 octobre, a été un processus très rapide. D’habitude, on pense qu’il faut d’abord s’occuper du chantier avant de mettre en place l’action culturelle, comme cela avait été le cas avec le Mudam par exemple, pour lequel les gens se sont longtemps demandé ce qui allait y être exposé. Ici, c’est l’inverse : on a voulu d’abord montrer à la population ce qu’elle allait pouvoir trouver à la Konschthal avant d’ouvrir le bâtiment. La pandémie n’est pas spécialement à l’origine du projet, mais elle a permis aux artistes d’être directement impliqués et de montrer leur travail aux passants, dans la grande vitrine du bâtiment en travaux qui a donné son nom à cette exposition. Schaufenster a aussi permis de mettre en lumière le futur fil rouge artistique, notre mission étant à la fois de montrer des artistes internationaux, mais aussi de les faire dialoguer avec des artistes locaux. Et le fait d’avoir pignon sur rue, le réseau de notre partenaire eschois noc.turn ainsi que la curiosité des visiteurs, pendant une période de fermeture des lieux publics, ont grandement concouru à son succès. Un succès dont je suis évidemment ravi. La transition est toute faite avec la Konschthal, nouveau grand lieu de culture au Luxembourg, qui s’apprête à ouvrir ses portes. Qu’est-ce que le public va découvrir lors de cet événement très attendu ?

Photo ANDRÉS LEJONA

Le grand thème de la Konschthal, au moins bâtiment, mais aussi sur le boulevard Kennedy, jusqu’en 2023 et tout le long de l’année cultu- juste devant, qui sera fermé pour l’occasion. relle Esch2022, sera la transformation. Pour La Project Room accueillera quant à elle les l’ouverture justement, cette notion de trans- artistes Niels Ackermann, Martine Feipel et formation sera on ne peut plus présente grâce Jean Bechameil. à l’exposition ambitieuse de Gregor Schneider, un artiste autrichien qui recrée des inté- Le fil rouge de la transformation rieurs au sein même des espaces muséaux et se prolongera donc sur les expositions des salles d’exposition. La visite devient indi- qui suivront ? viduelle et complètement immersive... Seront Tout à fait. La deuxième exposition sera ensuite également présents pour cette ouverture les mise en place pour l’inauguration de l’Année artistes de Lët’z Arles 2021 Lisa Kohl et Daniel de la culture le 27 février prochain avec un Reuter, qui symboliseront la présence des artiste luxembourgeois d’envergure internaartistes locaux dans les grandes manifesta- tionale, Filip Markiewicz, qui va pour l’occations étrangères. Des concerts et des perfor- sion exposer de manière beaucoup plus mances seront également organisés dans le « classique » que ce que l’on peut attendre de lui. Il faut dire que la Konschthal va continuer d’être en travaux durant les prochains mois, probablement jusqu’à la mi-juin 2022. Filip va ainsi beaucoup travailler avec de la peinBIO EXPRESS ture dans ce lieu d’accueil en pleine transforNaissance mation... Viendra ensuite une exposition avec Christian Mosar est né en 1968 une approche plus ‘installation’, avec l’artiste à Esch-sur-Alzette. danois Jeppe Hein, qui va créer ici une œuvre 30 ans d’indépendance unique, multigénérationnelle et fédératrice Journaliste, critique d’art, organisateur d’expositions, qui occupera toute la Konschthal et qui aura médiateur culturel… pour caractéristique un sentiment d’identiChristian Mosar a participé fication très fort quant au thème du jeu... à la vie culturelle luxembourgeoise, à sa promotion et à sa critique Enfin, en septembre 2022, la quatrième en tant qu’indépendant pendant exposition autour de la transformation metune trentaine d’années. tra en avant l’artiste lituanien Deimantas Il a notamment participé aux deux Années de la culture Narkevičius, qui est très connu pour avoir de 1995 et 2007. travaillé sur l’époque post-soviétique en LituaÀ la radio nie et en Europe, notamment par le biais du Si une œuvre radiophonique cinéma. Il s’agira donc d’immersion dans les prendra place au Bridderhaus salles obscures grâce à une rétrospective de dans le cadre d’Esch2022, c’est peut-être parce que son dix de ses films et la présentation de deux directeur est lui-même familier nouveaux. J’ai pensé à lui pour ce volet car je et friand du média, ayant me souviens encore avec amusement d’un présenté un temps une émission culturelle sur la radio 100,7. film qu’il avait montré à Luxembourg en 1998 OCTOBRE 2021

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Conversation Christian Mosar

« EGO-TUNNEL » La première exposition des œuvres de Gregor Schneider au Luxembourg pour l’inauguration de la Konschthal est baptisée « Ego-Tunnel ».

pour Manifesta II et dans lequel il décidait, au lendemain de l’indépendance de la Lituanie, de se rendre au centre de l’Europe géogra­ phique grâce à une certaine liberté retrouvée. Sauf que le centre géographique de l’Europe – peu le savent, et lui ne le savait pas non plus à l’époque – se trouve à 30 km de son lieu de résidence à Vilnius. L’escapade fut donc de courte durée ! La question des publics est primordiale pour tout espace culturel. Quels sont les publics que vous visez à la Konschthal ? Un premier élément à garder en tête quant à la question des publics est le fait que l’entrée à la Konschthal est gratuite. Tout le monde vient quand il veut. Ensuite, nous sommes dans un quartier très particulier qui est le Brill et qui a déjà donné lieu à quelques études sociologiques. On y trouve plus d’une centaine de nationalités et c’est un quartier qui a toujours rassemblé les différentes vagues d’immigration avec des communautés italienne, portugaise, capverdienne, balkanique et autres très présentes dans un lieu chargé d’histoire industrielle. La France est à quelques centaines de mètres également, ce qui entre évidemment en compte dans l’identification de nos publics avec qui nous souhaitons sincèrement interagir de manière vertueuse, par la communication mais aussi par l’identité même des artistes avec qui nous allons travailler. Il est facile de dire qu’il faut être inclusif et participatif, mais il faut aussi trouver les moyens pour le faire ! C’est à mon avis un travail sur le long terme et progressif. Les jeunes auront-ils aussi leur place à la Konschthal ? Absolument ! D’autant plus que c’est un public qui a un atout de taille : les jeunes viennent souvent avec leur famille ! Nous avons en tout cas des ambitions pour le public jeune, notamment grâce à des synergies avec le ciné Ariston, qui est en pleine réfection, et l’écovillage Benu, tous deux très proches. Pour les scolaires, il est parfois difficile de faire venir une classe de loin pour un seul événement, mais dans ce contexte collaboratif, j’imagine tout à fait la possibilité de proposer aux écoles du pays des journées culturelles bien faites avec, par exemple, une pièce, un atelier et une

L’artiste allemand propose une sélection de sa collection personnelle des Räume permettant aux visiteurs d’explorer différentes œuvres-clés de son parcours artistique. Avec aussi des films, des photographies et des sculptures, l’exposition rassemble en tout 150 œuvres et pose des questions fondamentales sur la construction et la perte d’identité.

exposition combinée, ce qui leur permettrait de visiter les trois lieux... En parlant de collaboration, qu’est-il prévu en la matière avec le centre culturel emblématique de la ville qu’est la Kulturfabrik ? Il est évident que des synergies vont se mettre en place avec la Kulturfabrik, mais ce sera probablement plutôt du côté du Bridderhaus, qui se trouve tout près de là. Nous allons certainement faire fonctionner les résidences d’artistes du Bridderhaus avec le programme Squatfabrik de la Kufa. Ce n’est qu’un exemple parmi d’autres futurs projets possibles. Et, pour le week-end d’ouverture, la Kulturfabrik coorganise avec nous la série de concerts qui sera proposée à la Konschthal. Comptez-vous également sur la trans­ formation du quartier Rout Lëns non loin d’ici pour stimuler la fréquentation de la Konschthal ? Il est indéniable que l’on observe ce développement urbanistique de très près et nous avons d’ailleurs déjà conclu un partenariat en exposant des photos du chantier en preview dans le cadre de Schaufenster. De nouveaux chemins d’accès vont voir le jour vers les nombreuses habitations de ce quartier qui sera sans voiture, et il sera très intéressant d’observer comment ce nouveau flux et cette culture piétonne vont passer vers le centre-ville, et notamment – j’en ai le grand espoir – par ici. Vous dirigez aussi ce nouveau ­Bridderhaus, ancien hôpital qui devient à présent une résidence d’artistes. Y a-t-il des con­traintes particulières au sein de ce bâtiment en raison de son statut patrimonial ? Les contraintes sont plutôt apparues lors de la restauration du bâtiment, qui a de toute

« La Konschthal a une vocation de conservation, mais moins muséale. » 56

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façon été effectuée en lien étroit avec le Service des sites et monuments nationaux. Par contre, le nouveau bâtiment est très flexible, avec huit grandes résidences, des appartements doubles ou simples, et un petit atelier pour chaque logement. Il y a également, et je tiens à le mentionner, un appartement conçu entièrement pour les personnes à mobilité réduite, ce qui est aussi intéressant concernant le rôle patrimonial. Nous allons également mettre en place le projet Le Salon de Helen Buchholtz, qui émane de l’appel à projets d’Esch2022 et dans lequel figure entre autres une artiste non voyante, et nous essaierons de faire découvrir aux voyants de manière artistique le monde de cette artiste aux autres sens plus développés du fait de sa cécité... Quels sont les autres projets culturels qui y sont envisagés ? Nous avons eu la chance de pouvoir restaurer et transformer une dépendance en atelier de création qui accueillera l’œuvre sonore immersive de Sam Reinard, qui reprendra les bruits nocturnes des industries passées et actuelles d’Esch-sur-Alzette. Un autre projet étonnant, venant lui aussi de l’appel Esch2022, sera en fait une station de radio qui va s’installer pendant 100 jours au Bridderhaus et diffuser chaque jour des projets purement artistiques de 22 heures créés par un ou plusieurs artistes ainsi que deux heures de live... Et qui aura très probablement des connexions avec la Documenta 15 qui aura lieu à la même époque à Kassel, en Allemagne. Qu’en est-il de la collection d’art de la Ville d’Esch ? La collection va être entreposée et sauvegardée ici dans nos archives. Le programme d’acquisition va être renouvelé et redirigé vers plus de variété et de contemporain grâce un nouveau jury composé de directrices et directeurs de centres d’art des pays voisins. Mais cela n’est pas le but principal des institutions eschoises. La Konschthal a une vocation de conservation, mais moins muséale. Comment sont financées ces deux nouvelles structures que sont la Konschthaus et le Bridderhaus ? Allez-vous chercher à développer le mécénat privé ? Les deux structures sont intégralement financées de manière publique par la ville d’Eschsur-Alzette, ce qui n’exclut pas une possibilité de mécénat privé dans le futur. Mais, pour l’instant, la priorité est de répondre aux missions publiques qui ont été données. Le recours au mécénat, s’il se fait, se construira en même temps que l’identité de la Konschthal dans les années à venir. Petite précision cependant quant aux projets du Bridderhaus : ceux qui sont issus de l’appel à projets d’Esch2022 sont financés à 50 % par Esch2022.



Conversation Christian Mosar

La performance live de Georges Maikel Pires Monteiro, le danseur-interprète de la vidéo Liquid Earth, véritable lien allégorique entre la Konschthal et son futur public. Tulipe, collaboration entre le musicien Samuel Reinard, le vidéaste Ted Kayumba et la chorégraphe Jill Crovisier, filmée sur place dans les anciens ateliers Lavandier. Un monde parfait, de Martine Feipel & Jean Bechameil, réflexion sur les rapports entre architecture et société qui tisse un lien avec le futur quartier d’habitation Roüt Lens.

au soutien logistique de la Ville et à Schaufenster qui a permis d’identifier les premiers défis du bâtiment.

OCTOBRE 2021

Quelles structures d’accueil et de restauration avez-vous prévues pendant et après Esch2022 ? Nous aurons ici un espace d’accueil qui servira aussi de bar lors des vernissages, mais pas de bar ni de restaurant permanent. Nous allons plutôt nous associer avec l’Ariston, qui aura un vrai bar où nous pourrons inviter le public à se joindre à nous après les événements. Le Bridderhaus aura, quant à lui, son propre petit bar-restaurant qui sera dédié dans un premier temps à des événements ponctuels – vernissages, concerts, ateliers, conférences… – et qui sera mis à la disposition de professionnels externes.

Votre départ d’Esch2022 a fait couler pas mal d’encre. S’agissait-il d’un problème de mission, de gestion ou un mélange des deux ? Il faut déjà savoir une chose : participer à l’organisation d’une capitale culturelle, ça chamboule les membres de l’équipe de manière Avez-vous l’intention de devenir permanente, même après la fin de cette année un véritable contrepoids dans le sud culturelle. Il y a beaucoup de pression, on est du pays par rapport à un établissement très seul au début. Croiser un directeur artis- de la capitale comme le Casino tique qui est le septième en poste et qui com- Luxembourg ? mence à travailler six mois avant le lancement Je parlerais plus volontiers d’alternative que de l’année culturelle est assez significatif de de contrepoids. Ici, l’architecture et le fil rouge cette situation… Pour en revenir à mon expé- de la transformation vont déterminer une rience, je voyais ce que je voulais faire, je première partie de la création de son identité. compilais ce programme et je me suis rendu Le Casino a été modelé avec la première Capicompte de la difficulté d’arriver au bout de la tale de la culture en 1998 et le travail de piontâche. Cela a été personnellement frustrant, niers d’Enrico Lunghi et Jo Kox à une époque et lorsque j’ai fait ressentir ce malaise, cette où rien n’était là et tout était possible. La proautre porte s’est ouverte pour moi. Le timing grammation de la Konschthal va être fondamentalement différente de celle du Casino. a été plutôt bon sur ce coup-là ! Elle sera plus physique, plus directe, et il ne serait pas pertinent de vouloir comparer les deux. Ni dans leur création ni dans leur programmation. Avec ces quatre phases de programmation ambitieuses, nous allons avoir des expositions qui auraient tout à fait leur place au Mudam par exemple, à l’instar de celle de Gregor ­Schneider. Notre avantage cependant est la flexibilité du lieu : on peut tout faire ici ! Enfin, le soutien de la communauté locale va également donner une dimension unique et très identitaire à cette nouvelle institution.

« La programmation de la Konschthal va être fondamentalement différente de celle du Casino. Elle sera plus physique, plus directe. » 58

Cela ne vous empêchera donc pas de collaborer étroitement pendant l’année culturelle... Évidemment ! Il y a déjà les trois projets au Bridderhaus. À la Konschthal, l’exposition de Deimantas Narkevičius sera également cofinancée par Esch2022, ainsi qu’une autre probablement, et nous serons, je le pense, un lieu de rencontre très important lors de cette année culturelle, même si nous n’y sommes affiliés qu’indirectement. Le quartier du Brill est un pôle culturel important et très proche de Belval aussi, au final.

Mike Zenari

Le terrain fertile était donc déjà là ? Oui, non seulement chez moi mais aussi, je me permets de le rappeler, au sein de la Ville d’Esch-sur-Alzette. L’achat de la Konschthal s’est fait il y a à peine un an ! Et la commune a également décidé de racheter le ciné Ariston dans la même dynamique, alors que ce n’était pas prévu à la base... Que tout cela arrive d’un coup, de cette manière, il faut quand même avoir un certain courage derrière. Le courage de me donner une carte blanche absolue du point de vue artistique éga­lement. On a établi les budgets ensemble. J’ai alors eu la conviction personnelle que cela allait marcher et j’étais très enthousiaste à l’idée de partir ainsi de zéro, tout seul, sans filet. Le filet est à présent construit, notamment grâce

SCHAUFESTER, 3 ŒUVRES FORTES

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Après avoir fait beaucoup pour la culture en tant qu’indépendant, ce poste plus institutionnel est-il une étape-clé, voire une consécration pour vous ? C’est vrai que lorsqu’on est indépendant pendant aussi longtemps – une trentaine d’années en l’occurrence –, les partenaires des institutions vous considèrent facilement comme un éternel électron libre et cela peut devenir difficile de faire comprendre que l’on cherche peut-être une autre manière de faire de la culture, une autre façon de travailler. Cela impose une certaine distance. Mais il faut dire que la succession des événements qui m’ont amené à ce poste aujourd’hui a été très rapide, et je n’avais pas du tout prévu cela. L’Espace Lavandier était cependant un lieu que j’avais déjà repéré et pour lequel je m’étais dit qu’il ferait un superbe lieu d’exposition. J’ai donc eu de la chance de me voir proposer un projet et des lieux qui correspondent autant aux envies que j’ai pu avoir à ce moment-là, après m’être confronté à beaucoup d’aspects de la culture. Et puis c’est bien beau de critiquer la culture pendant des années, mais il faut savoir se mettre à la place de ceux qui la font à un moment !



Conversation

« Je crois au futur de l’imprimerie  »

Frédéric Gillen a repris la gestion de Reka en 2018, dans la foulée de la cession réalisée par son précé­dent gérant, Jean-Marc Bintner.

En moins d’un an, Reka Print a racheté deux entreprises, revendiquant le statut de plus importante imprimerie du pays. Rencontre avec son gérant, Frédéric Gillen, pour évoquer des ambitions en plusieurs formats et supports. Interview CATHERINE KURZAWA

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Photo ANDRÉS LEJONA


Frédéric Gillen

BIO EXPRESS Au commencement Né le 12 juin 1985 à Luxembourg, Frédéric Gillen étudie à l’Athénée de Luxembourg, d’où il sort en 2005.

L’imprimerie Reka Print montre un bel appétit ces derniers mois avec la reprise, fin 2020, d’Italux, une société spécialisée dans les emballages et cadeaux personnalisés, puis, au printemps dernier, de WePrint, un autre con­current spécialisé dans les impressions grand tirage. Frédéric Gillen, le gérant de la PME basée à Ehlerange, qui a grandi de 50 à 84 salariés, ne cache pas son ambition : faire de celle qui est devenue la plus grande imprimerie du pays un one-stop shop pour tous les travaux d’impression. Quand on regarde l’historique de l’en­treprise, Reka a toujours connu une croissance organique. Puis il y a eu deux rachats successifs, Italux et WePrint. Quel est leur but et d’autres rachats sont-ils prévus ? En fait, nous n’avions rien planifié, c’était un peu opportuniste. Pour Italux, nous sommes tombés dessus ; idem pour WePrint. Nous ne voulions pas laisser passer ces opportunités, car on ne pouvait exclure qu’un investisseur ou une imprimerie étrangère tente de les racheter. Ici, nous contrôlons la concurrence. Après, sans rien dévoiler, il n’est pas à exclure qu’il y ait des développements, si l’occasion se présente. Mais je ne peux pas vous en dire plus…

Les études De 2005 à 2007, il étudie l’économie à l’université d’Innsbruck. Il y poursuit son parcours jusqu’en 2010 en étudiant le management. La vie de banquier Après quelques jobs étudiants dans le secteur, il intègre en 2011 CBP Quilvest en tant que banquier privé. En parallèle, il entreprend un master en gestion de fortune à la Luxembourg School of Finance, complété par une formation à la Singapore Management University. Place à l’impression En janvier 2018, Frédéric Gillen devient CEO de l’imprimerie Reka.

c’est un métier différent. Nous avons engagé Thierry Bidinger, qui avait auparavant sa propre activité spécialisée dans le large printing. Reka a repris ses machines et son know-how pour développer le grand format. Pouvez-vous préciser votre plan d’investissement ? Un peu plus d’un million d’euros sont prévus au cours des prochaines années, mais une partie se fera déjà cette année.

Effectivement, mais elle a été suspendue avec le Covid. C’était du one shot à nouveau. Mais, en général, bien sûr qu’il y a une tendance vers l’écologique. Une loi précise que, pour l’alimentaire, il faut préconiser une solution plus durable. Et nous pouvons fournir les produits adaptés à ces besoins et en accord avec les lois qui vont être en application dans les années à venir. Mais au moment du Covid, c’était le plastique. Reka Print met en avant la dimension RSE. Est-ce une manière de se distinguer de la concurrence ? C’est un atout, mais on n’est pas les seuls. Nous étions la première imprimerie à avoir l’impression climatiquement neutre ; d’autres imprimeries l’offrent, mais sur demande seulement. Nous compensons toutes les émissions, nous avons le label FSC aussi. C’est quelque chose d’important. Nous voulons investir dans des panneaux solaires pour continuer de développer ce côté durable qui nous tient à cœur. Comment peut-on être un imprimeur durable lorsque l’on produit des choses qui sont souvent jetées à la poubelle ? Souvent, on imprime sur du papier recyclé. Et puis, le papier, c’est du papier recyclable. Émettre un e-mail, cela produit aussi du CO2. Si l’on compare un e-mail et un flyer imprimé, l’empreinte carbone n’est pas si grande que cela. Au final, les volumes d’impression ont tendance à diminuer… Cela reste du papier, ce n’est pas du plastique, c’est un produit issu d’une source naturelle. Produire des voitures, c’est aussi quelque chose dont tout le monde a besoin, comme pour les produits imprimés.

Mais à quoi ce montant sera-t-il dédié Comment s’est déroulé le rachat d’Italux concrètement ? en particulier ? Italux était – tout comme Reka Print en 2017 – À actualiser le parc de machines existant, à confrontée à une problématique de succession : faire plus d’in-housing et à développer l’imles deux enfants du patron étaient en âge de pression grand format (LFP) : tout ce qui est reprendre la société, mais nullement intéressés. grandes affiches, pages, stands, lettrages. Il Ils ont rencontré mes associés, des négociations s’agit donc majoritairement d’achat de machines, se sont ouvertes et un accord a été conclu pour mais aussi des logiciels qui y sont liés. la reprise. La société est aujourd’hui en passe Donc les actionnaires de Reka sont prêts d’être totalement intégrée dans Reka Print. Qu’est-ce que WePrint vous apporte, à mettre les liquidités nécessaires pour sa part, dans votre activité ? pour soutenir la croissance de l’entreprise, WePrint, c’est déjà une presse huit couleurs qui Vous êtes devenu gérant de Reka Print qui passerait par d’autres rachats… en 2018 suite à sa vente l’année précéproduit le double par rapport à la nôtre. Par Oui. dente par son propriétaire, Jean-Marc contre, elle ne va pas doubler notre chiffre d’afBintner. Aujourd’hui, à qui appartient faires, ce n’est pas aussi simple. Maintenant, il Le rachat d’Italux a apporté une nouvelle Reka Print ? faut préciser que c’est une machine conçue Gauthier Gosselin et Georges Zahlen sont business line : les objets personnalisés… pour l’impression de grands volumes. Chez mes associés. En tant que general partners, ils Les objets personnalisés représentent un petit WePrint, ils sont relativement automatisés et gèrent un fonds destiné à reprendre des socié- domaine. Italux est aussi spécialisée dans les possèdent une importante expertise au niveau tés qui ont des problèmes de succession emballages, les sachets – les sachets écono- du workflow IT. Nous voulons nous dévelop(­Axiomatic, ndlr). Derrière ce fonds, on trouve miques mais aussi de luxe –, les boîtes de luxe, per davantage sur le segment des gros volumes. des entrepreneurs luxembourgeois. Je suis les emballages alimentaires. Il y a les goodies moi-même actionnaire de Reka Print avec aussi. Mais c’est une minorité par rapport au Reka a connu plusieurs déménagements. Axiomatic. reste. La valeur ajoutée d’Italux, c’est vrai- Comptez-vous garder les implantations ment le conseil dans le développement d’em- de WePrint et Italux ? Quelle est la stratégie que vous ballages, et l’emballage de luxe. Nous avons La majorité sera rapatriée à Ehlerange, à l’exavez définie pour Reka ? pas mal de clients de renommée au Luxem- ception de la grande presse, qui va rester à Notre stratégie, c’est le one-stop shop. En impri- bourg et à l’étranger, mais pour des raisons Hamm. Nous envisageons de développer le merie, il y a tant de secteurs différents, de pro- de discrétion nous ne pouvons pas dévoiler large printing – le LFP – à Hamm. duits, de métiers… Avec le rachat d’Italux, nous leur identité. Vous avez suffisamment d’espace ici ? couvrons désormais l’emballage. Avec l’acqui[Rires] Cela devient très étroit pour tout le sition de WePrint, nous pouvons produire tous Le marché de l’emballage en papier les volumes en grand format. Le grand format est-il porteur ? On assiste à une chasse monde. On va probablement devoir agrandir, est aujourd’hui quelque chose de très demandé, au plastique en ce moment… mais ça n’est pas pour tout de suite. Mais on OCTOBRE 2021

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Conversation Frédéric Gillen

a des solutions temporaires pour ne pas avoir de problème pour l’instant. En quoi le Covid a-t-il affecté l’activité de votre entreprise ? Les commandes ont chuté fortement au début du confinement. Aujourd’hui, nous sommes considérés comme un secteur vulnérable et nous pouvons encore bénéficier à 100 % du chômage partiel. La fin de l’année 2020 a été marquée, pour nous, par une reprise, comme s’il n’y avait pas eu le Covid. Puis, au premier trimestre 2021, il ne s’est plus rien passé, c’était catastrophique. J’estime qu’avec la crise du Covid, toutes les imprimeries ont perdu de 20 à 30  % de leur chiffre d’affaires en 2020. Pour 2021, l’année n’est pas encore terminée, mais on voit la lumière au bout du tunnel. Combien de personnes de votre entreprise sont-elles au chômage partiel ? Cela varie au fil des jours, le planning est mis à jour constamment. En moyenne, cela touche de 10 à 20 % de la masse salariale environ. Quelle est la composition de votre clientèle ? À 99 %, c’est du business to business (B2B). Dans le top 20, il y a, je crois, une quinzaine d’agences de communication. En relation, les privés ne représentent donc qu’une part minime, mais j’ai l’ambition de la développer bientôt. Je ne veux pas trop parler pour le moment. Nous sommes en train de développer un ­pa­ckage one-stop shop pour tout le monde. L’Amil (Association des maîtres imprimeurs du Grand-Duché de Luxembourg) compte une trentaine de membres. Le pays a-t-il autant d’imprimeurs ? Non, des vrais imprimeurs qui impriment, je pense qu’il y en a une douzaine. L’Amil compte aussi des relieurs, d’autres professions connexes et, au final, beaucoup de petites structures. Avec l’acquisition de WePrint, nous avons évidemment un peu consolidé notre position. Aujourd’hui, qui est votre plus grand concurrent ? Maintenant, c’est l’Imprimerie Centrale. Mais nous avons d’autres concurrents, comme Ossa, Schlimé et d’autres. Comment se passent vos relations avec ceux-ci ? J’ai une bonne relation avec le président de l’Amil, Jean-Paul Schmitz (par ailleurs administrateur d’Ossa, ndlr), que j’apprécie fortement. On échange sur les problèmes du marché, notamment le dumping des prix que pratiquent certaines imprimeries. Pour le reste, nous sommes des concurrents qui travaillent de manière correcte. Parfois on pique un client, mais c’est le jeu. 62

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85 ANS D’HISTOIRE 1936 René Kauffmann fonde l’imprimerie Reka. 1972 Fernand Bintner reprend l’imprimerie et ses 10 salariés. 1999 Jean-Marc et Doris Bintner, les enfants de Fernand Bintner, reprennent l’entreprise familiale qui, à l’époque, emploie 16 salariés. 2001 Reka Print déménage du quartier de la gare à Leudelange, dans un bâtiment de 1.300 m2. L’entreprise compte 20 salariés. 2010 Reka Print déménage à Ehlerange, sur 3.600 m2. 2017 Jean-Marc Bintner décide de revendre l’entreprise, qui emploie alors 50 salariés, car ses enfants ne souhaitent pas la reprendre. 2018 Axiomatic entre dans le capital de Reka Print et Frédéric Gillen en devient le gérant. 2020 Reka Print rachète Italux, spécialisée dans l’emballage et les cadeaux personnalisés. 2021 Rachat de l’imprimerie WePrint.

Vous laissez entendre qu’il y aurait un dumping sur les prix : c’est un phénomène que vous constatez entre imprimeurs au Luxembourg ou par rapport à des concurrents établis à l’étranger ? Même au Luxembourg, il arrive que quelqu’un brade. Mais je ne vais pas donner de noms. J’en connais quelques-uns qui le font, mais ce n’est pas dans l’intérêt de la profession de faire cela. Les prix qu’on facture sont aussi liés aux charges élevées en comparaison avec l’étranger : nous avons d’autres salaires, d’autres loyers qu’à l’étranger, tout cela est normal. Vous évoquez la présence d’imprimeurs étrangers sur le marché luxembourgeois. Quelle est leur part de marché ? Je sais qu’il y a des imprimeurs qui se situent près de la frontière et qui sont des concurrents, mais la part qu’ils représentent, je l’ignore. Vous avez une idée de la part de marché que détient Reka au Luxembourg ? [Sourire] Non. Il y a les services d’impression en ligne. Vous les considérez aussi comme des concurrents ? Oui et non. Pour des produits très simples, il est difficile de s’aligner, mais notre valeur ajoutée, c’est le conseil et le parc de machines diversifié. Nous avons beaucoup de salariés, nous avons le service et le conseil à la clientèle, et nous proposons un accompagnement personnalisé à nos clients. Si le client souhaite

des cartons d’invitation avec une finition particulière, un autre imprimeur ne saura pas répondre à cette demande. Il faut se différencier, et c’est pour cela que nous voulons devenir un one-stop shop pour tout offrir in-house. Nous avons eu des clients qui, plusieurs fois, ont commandé en ligne, mais c’est une loterie : on ne reçoit pas forcément ce que l’on a commandé, on doit repasser commande et, au final, ce n’est peut-être pas aussi avantageux qu’il y paraît. Quels sont les principaux défis face à vous ? L’intégration de nouvelles acquisitions, gérer les projets d’investissement qui sont en cours et analyser d’autres opportunités. C’est un travail à temps plein. Vous avez travaillé dans le secteur bancaire avant de rejoindre celui de l’imprimerie. Comment cette transition s’est-elle effectuée ? Je connais l’un de mes associés, Georges Zahlen, depuis l’école. Nous nous sommes revus durant l’été 2018 et il m’a demandé si je voulais reprendre une entreprise. Cela me semblait intéressant, mais je voulais savoir de quoi il s’agissait. L’imprimerie en direct, quelqu’un qui n’est pas du métier ne peut pas se représenter clairement de quoi il s’agit. Au premier abord, entrer dans une imprimerie en plein cœur d’une période résolument digitale semble un pari risqué. Mais, après avoir découvert le business plan, les clients, le fonctionnement, le positionnement sur le marché, je me suis dit que cela pouvait être un challenge très intéressant. Je m’y suis engagé et je peux vous le confirmer : travailler dans un secteur où l’on voit directement ce que l’on produit est gratifiant. Venant d’un métier non lié à l’imprimerie, je vois les choses d’un autre point de vue et c’est pourquoi je peux me permettre de me concentrer sur le développement stratégique. Mon équipe est parfaitement opérationnelle et elle fonctionne de manière tout à fait indépendante. Est-ce que, parfois, le milieu bancaire ne vous manque pas ? Du tout. Qu’est-ce que vous aimez dans ce métier de l’imprimerie ? C’est tangible : on a un résultat, quelque chose que l’on peut toucher. C’est pour cela que je crois au futur de l’imprimerie. Je peux recevoir des centaines d’e-mails par jour, mais si c’est plutôt une belle invitation en papier, avec une belle finition, je me sens plus valorisé. Je peux aussi tout de suite développer mes idées, réaliser mes projets. Je décide où on va puis, avec mon équipe, on fonce.



Beryl Koltz veut utiliser son bagage de réalisatrice pour susciter de l’émotion et porter les messages de promotion du Grand-Duché.


Conversation Beryl Koltz

« Notre mission est de placer le pays sur la carte » Un an après son entrée en fonction, Beryl Koltz, responsable stratégique de la promotion de l’image de marque du pays, partage ses ambitions d’ici 2025 pour faire connaître le Luxembourg en profondeur à l’international. Un objectif qui passe par le triptyque créativité, diversité et durabilité. Interview IOANNA SCHIMIZZI

Faut-il encore parler de nation branding pour évoquer la stratégie de promotion du pays ? On essaie plutôt de parler d’image de marque, qui équivaut au nation brand. Le mot « branding » suggère, quelque part, que l’on peut créer de toutes pièces des outils de marketing, que l’on pourrait créer une image comme on crée l’univers d’une marque commerciale. Je ne pense pas que cela fonctionne pour un pays, qui est un sujet éminemment plus complexe qu’une marque. L’inventeur du terme « nation brand », Simon Anholt, s’est lui-même un peu détaché de l’expression « nation branding » parce qu’il ne s’agit pas de positionner le pays de manière artificielle, mais plutôt de s’appuyer sur les atouts et aspirations qui existent. Quelle est la vision qui prévaut aujourd’hui pour mettre en place la promotion du pays ? Avec les parties prenantes impliquées (voir encadré), nous avons défini la vision suivante, entérinée par le conseil de gouvernement début juin : celle d’asseoir le positionnement du Luxembourg comme un acteur engagé sur la scène internationale, un allié fort dans le cadre d’une croissance durable et un facilitateur d’idées innovantes pouvant contribuer à un monde meilleur. Dans la continuité de ce feu vert gouvernemental, vous avez présenté un plan d’action 2021-2025 le 30 juin dernier. Quels en sont les objectifs ? Notre objectif est de « faire connaître et apprécier les valeurs et visages du Luxembourg ». En découlent quatre sous-objectifs : développer un positionnement authentique, cohérent et durable du Luxembourg ; coordonner les dif-

Photo ANTHONY DEHEZ

férentes parties prenantes actives dans la promotion du pays ; viser l’international à travers des actions de promotion ciblées, et développer une expertise en matière de perception du Luxembourg et d’évaluation de nos actions. Les priorités définies dans notre plan d’action s’inscrivent dans le programme gouvernemental. Il est vrai que, parfois, la frontière peut être fine entre promotion, communication et sensibilisation, mais notre travail, c’est avant tout la promotion. Le but principal est

BIO EXPRESS Naissance Beryl Koltz, 46 ans, possède la double nationalité francoluxembourgeoise. Du côté paternel, elle est la petite-fille de la poétesse luxembourgeoise Anise Koltz et, du côté maternel, la petite-fille de la poétesse et écrivaine française d’origine syro-libanaise Andrée Chedid. Réalisatrice récompensée Après avoir effectué sa scolarité au Luxembourg, elle étudie à l’université de la Sorbonne et devient réalisatrice de films, puis réalisatrice multimédia et consultante en communication. Son parcours a été récompensé d’une quinzaine de prix internationaux et d’une program­ mation au MoMA de New York. Elle devient responsable de la communication de l’Œuvre en 2018 et est nommée en septembre 2020 responsable stratégique de la promotion de l’image de marque au sein du ministère des Affaires étrangères et européennes.

de mettre en avant ce qui incarne aujourd’hui les valeurs du Luxembourg en termes de projets, d’initiatives, d’idées. Comment y parvenir ? Nous allons continuer à organiser nos workshops de développement du plan d’action d’ici la fin de l’année, sur la base des grandes lignes de la nouvelle stratégie. Ce plan d’action s’articule autour de quatre grands axes stratégiques. Le premier est de développer un positionnement cohérent et authentique du Luxembourg, tant au niveau du message qu’au niveau visuel. Concernant le message, nous allons davantage développer le storytelling. Nous développons actuellement un axe narratif qui sera modulable, afin de pouvoir être intégré par les différentes parties prenantes dans leur travail de promotion. Le deuxième axe correspond au verbe « coordonner » : l’un des facteurs-clés de la réussite de l’initiative. Coordonner au mieux les différentes parties prenantes dans le but d’harmoniser les messages qui sont véhiculés vers le monde. Cet axe met en avant notre rôle de facilitateur, et c’est dans ce contexte que nous allons aussi mettre en ligne un nouveau site internet d’ici la fin de l’année, pour regrouper les différents services que notre équipe met à la disposition des acteurs. Notre but ultime de coordination est de développer une vraie communauté de personnes actives dans la promotion du Luxembourg. Le troisième axe est de promouvoir : ici, l’idée est vraiment de viser l’international pour augmenter la notoriété et renforcer l’image du pays. Pour le quatrième axe, il s’agit d’évaluer : mesurer la perception externe – en effectuant un monitoring – et évaluer l’impact des actions de coordination et de promotion. L’idée est OCTOBRE 2021

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Conversation Beryl Koltz

d’avoir une expertise sur la perception du Luxembourg: où est-il connu ? Dans quels pays l’est-il moins ? Quels sont, justement, les atouts du Luxembourg pour se « vendre » à l’international ? À travers la consultation publique réalisée en 2015, trois grandes valeurs de référence ont été identifiées pour qualifier le ­Luxembourg : dynamique, ouvert et fiable. Que représentent ces trois valeurs ? La première signifie que, par sa taille et son agilité, le Grand-Duché a toujours su se réinventer à travers les âges et dans tous les secteurs – agricole, industriel, puis dans celui des services et aujourd’hui dans le secteur de la recherche ou du spatial. Et ce dynamisme se manifeste aussi dans le secteur culturel avec les industries créatives, et aussi les initiatives sociales, l’économie solidaire et circulaire. Le terme « ouvert » est utilisé dans le sens où le pays est ouvert vers l’extérieur. C’est vraiment l’élément-clé de l’identité luxembourgeoise. Et, bien entendu, le Luxembourg est un carrefour cosmopolite, un melting-pot de personnalités et de nationalités. La troisième valeur est la fiabilité, car c’est un pays économiquement et politiquement stable. Comment transformer cette prise de connaissance en action ? Cette initiative de promotion de l’image de marque est encore très jeune : elle s’est construite en 2013 sur l’idée que, pour pouvoir parler de nous, il faut déjà savoir qui nous sommes et ce que nous pouvons apporter. C’est pour cela que ces trois valeurs ont été dégagées. L’étape suivante a été, par le biais de la nouvelle stratégie qui vient de paraître, de définir les thèmes prioritaires. Après le « qui sommes-nous ? », il a fallu formuler le « que voulons-nous ? ». Ces trois priorités sont la créativité, la diversité et la durabilité. Elles s’appuient sur les trois valeurs de référence, et je dirais qu’elles les spécifient encore un peu plus dans l’idée de leur apporter une dimension plus éthique. Depuis 2013, le monde a continué d’évoluer. La crise climatique gronde de plus en plus fortement, la pandémie de Covid-19 a éclaté, #MeToo est

SAVOIR-FAIRE ET FAIRE SAVOIR Une vision « L’objectif de la promotion de l’image de marque est de ‘faire connaître et apprécier les visages et les valeurs du Luxembourg’, c’est-à-dire de faire connaître le pays plus en profondeur », explique Beryl Koltz.

arrivé. Le monde a changé. Nous avons senti le besoin d’intégrer cela dans notre démarche. Quelles sont les parties prenantes actives dans la promotion du Luxembourg ? Il arrive souvent que l’on confonde parties prenantes et groupes cibles. De manière générale, les parties prenantes sont les groupes de personnes ou d’organisations impliqués d’une façon ou d’une autre dans une initiative donnée ou qui ont un intérêt relatif à cette question. Elles sont reliées par le but de l’initiative. Pour la promotion de l’image de marque du Luxembourg, les parties prenantes jouent un rôle crucial dans le déploiement des messages. Chaque partie prenante contribue, à sa façon, à la mission de promotion du Luxembourg à l’international. Les parties prenantes se distinguent en une cellule de promotion de l’image de marque et cinq réseaux majeurs. Il y a le comité, qui représente une vingtaine de personnes, et qui est le noyau dur de la promotion de l’image de marque. Il définit aussi les grandes orientations stratégiques. Il est composé de représentants des ministères et administrations, des agences de promotion sectorielles, des chambres professionnelles et de divers autres partenaires. Nous avons également un réseau de membres consultatifs. Pour donner un exemple, on peut citer le ministère de la Mobilité et des Travaux publics qui, sans être directement impliqué dans la promotion du Luxembourg à l’international, a notamment fait le buzz à l’étranger avec la gratuité des transports publics, et a contribué à véhiculer une image positive du Luxembourg. Les autres réseaux sont celui des représentants officiels, constitué de nos

« La promotion de l’image de marque est un exercice qui s’inscrit dans la durée. » 66

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missions diplomatiques et consulaires, ainsi que les réseaux commerciaux et économiques dans le monde, le réseau des membres du comité et le grand public national. Considérez-vous que le Luxembourg est un pays à part ? Oui, le Luxembourg a des atouts remarquables, des capacités d’adaptation au contexte, à l’environnement, qui sont liés également à la taille du pays. Nous avons toujours dû et su trouver des alliances solides avec l’extérieur pour survivre en quelque sorte. L’image du pays reste-t-elle pourtant négative à l’international ? C’est plutôt une question de vision partielle, voire partiale du Luxembourg. Pourtant, lorsque l’on regarde de manière objective le pays, que l’on voit tout ce que le Luxembourg initie et réalise en termes de projets, d’initiatives et de synergies, ses aspirations, ses efforts et ses atouts sont évidents, d’un point de vue moral également. Et je dirais que les trois priorités que nous avons identifiées visent à mettre en lumière cet aspect-là. Il y a le savoir-faire et le « faire savoir », et notre mission est de faire savoir et donc de placer le pays sur la carte. L’idée est aussi d’avoir des images en tête quand on pense au Luxembourg ? Oui, et qu’il y ait une narration cohérente qui relie le tout, que l’on n’ait pas qu’une seule image en tête, qu’il y en ait plusieurs, mais que tout le monde n’en cite pas dix différentes. Il faut que l’on sache quelle est la vision pour le Luxembourg. Il est donc très important que l’image soit authentique, parce que les gens doivent s’y reconnaître, sinon les messages ne vont pas fédérer et ne seront donc pas diffusés. Il faut un discours qui soit en équilibre entre passé, présent et avenir. Ce serait dommage d’occulter le passé du pays, car le Luxembourg est riche à la fois de son patrimoine historique, mais aussi de son dynamisme, et il est tourné vers l’avenir. Vous avez des exemples de « visages » qui représentent le Luxembourg ? Il y en a une multitude. Par rapport à l’actualité des derniers mois, on peut, par exemple, citer l’actrice Vicky Krieps ou l’athlète Charles Grethen, comme on peut penser à des personnes engagées qui gagnent à être connues par-delà nos frontières car elles incarnent justement des valeurs bien présentes au Luxembourg. Nous entrons maintenant dans le vif du sujet avec le plan d’action qui va être de mettre en avant ces trajectoires, notamment à travers les réseaux sociaux ou des petits formats vidéo ou photo, pour les faire connaître. Quels sont les meilleurs vecteurs pour promouvoir le pays aujourd’hui ?



Conversation Beryl Koltz

UNE ÉQUIPE DÉDIÉE

Il y a les réseaux sociaux, les événements, le travail avec la presse, et le fait que chaque personne est, en elle-même, un vecteur potentiel d’une image positive du Luxembourg.

Coordonner Service intégré au sein du secrétariat général du ministère des Affaires étrangères et européennes, la cellule de promotion de l’image de marque est composée de six personnes. Elle a pour mission « d’inspirer, de coor­donner les parties prenantes et de promouvoir l’image de marque du Luxembourg à l’étranger ». Beryl Koltz en est notamment la responsable stratégique, et Jeff Raach est responsable du marketing et du développement de la cellule depuis 2016.

même logique, la coordination des différents partenaires est aussi une condition à assurer pour un déploiement optimal et durable. La ­p romotion de l’image de marque est ­également un exercice qui s’inscrit dans la durée : il n’y a pas de résultats du jour au lendemain. C’est donc un exercice de persévérance et d’humilité.

Certains pays ou villes vous inspirent-ils dans leur démarche de promotion ? Au niveau du message et au niveau visuel, la Comment décririez-vous le passé, Suisse a une image qui est très forte et qui le présent et le futur du pays ? renvoie à une nature préservée, des monNous avons justement cherché à dégager un tagnes, des spécialités culinaires, mais aussi fil rouge, aux niveaux social, culturel et écodes nouvelles technologies et la finance, comme nomique, en partant de l’histoire des gens au Luxembourg. pour raconter le Luxembourg. C’était une Les travailleurs frontaliers y jouent un rôle important, tout comme chez nous. La Suisse sonnage principal, c’est le Luxembourg. Je me demande des parties prenantes, qu’il y ait un a adopté une approche systématique pour sa sers donc de mon métier initial pour mener à axe narratif pour présenter de manière cohécommunication internationale, qui donne bien ma mission d’aujourd’hui. rente le pays, et qui représenterait aussi bien des messages cohérents et qui repose aussi l’histoire des gens que leurs aspirations actuelles, sur des analyses d’images concrètes. Des pays Vous sentez-vous en phase avec la métholes valeurs et les priorités. Cet axe narratif est scandinaves comme la Suède ou la Finlande dologie appliquée depuis plusieurs années celui du « Luxembourg, terre de culture et des cultures ». En effet, le pays est à la base une nous inspirent aussi en tant que pays qui s’en- pour la promotion et avec les figures qui terre agricole qui a su se renouveler, se réingagent fortement en matière de développe- l’ont portée ? ment durable. Depuis le départ, la méthodologie appliquée venter, mais qui demeure une terre fertile au a été une approche participative, et cela va sens figuré, une terre où les meilleures condiAu vu de votre parcours et après rester ainsi parce que plus le projet est parti- tions sont réunies pour que chaque projet, une première année de recul, cipatif, plus il a des chances de fédérer. Cette chaque idée, puisse s’y développer durablequel regard portez-vous sur votre initiative a été implantée et déployée dès 2014 ment. Il y a aussi l’idée d’une terre d’accueil fonction ? par un trio de femmes qui sont, pour moi, une des cultures. Il nous reste à présent à incarner Cette fonction est avant tout celle d’une facili- source d’inspiration : Francine Closener, qui cet axe narratif avec des images, des mots, tatrice d’échanges, de réseaux, de partenariats, était secrétaire d’État à l’Économie, Sasha des visages. Notre approche est centrée sur de concepts et d’outils pour la promotion du Baillie, aujourd’hui CEO de Luxinnovation l’humain : les émotions humaines sont ce qu’il pays. L’intérêt de ce poste est de pouvoir culti- et qui présidait à l’époque le comité Nation y a de plus fort pour partager des idées. ver le regard que j’ai sur notre pays, à la fois de Branding, et Tania Berchem, qui était la coorl’intérieur et de l’extérieur, de par mes origines dinatrice générale pour la promotion de l’image Il y a un parallèle avec votre expérience (voir biographie) et grâce à mon parcours, avec de marque au ministère des Affaires étran- de réalisatrice ? pour question centrale « comment exprimer une gères et européennes. J’espère réussir à m’ins- Totalement. Je suis dans la continuité de ce idée, communiquer un concept, transformer ce crire dans la continuité de cet esprit que que je faisais auparavant. Faire un film, c’est concept en une émotion qui, au final, va toucher j’admire beaucoup. Elles ont réussi en très aussi de la communication, c’est véhiculer un son destinataire ? ». En tant que réalisatrice de peu de temps à mettre en place une équipe ou des messages. Si, au bout de la chaîne, il films de fiction et documentaires, mes objec- et à déployer une initiative qui s’est très vite n’y a pas une émotion, le message ne va pas arriver à toucher les gens, comme pour un tifs ont toujours été de « raconter » une personne, développée dans le pays. de valoriser une ville, de transmettre un mesfilm de fiction ou un documentaire. Mais dans sage, donc cela se rejoint. Sauf qu’ici, le per- Les choses sont-elles en train ce travail, je me mets au service d’une idée de s’accélérer ? qui me dépasse, d’une stratégie qui s’appuie Oui, il y a de plus en plus d’acteurs qui com- sur une multitude de témoignages que nous prennent l’intérêt de notre démarche et de avons récoltés, et que nous nous employons l’initiative, qui nous contactent car ils se recon- à déployer au quotidien, après, avec mon naissent dans les priorités de la stratégie de équipe qui est très engagée et qui s’investit promotion de l’image de marque du pays, ces sans compter. J’ai beaucoup de chance de dénominateurs communs que nous nous pouvoir exercer cette activité qui est vraiment efforçons de déployer. C’est un effort de longue passionnante. haleine, mais qui portera ses fruits.

« De plus en plus d’acteurs comprennent l’intérêt de notre démarche. » 68

OCTOBRE 2021

Qu’est-ce qui peut empêcher le bon déploiement d’une stratégie de promotion de marque ? L’exercice de promotion de l’image de marque est surtout un effort collectif, l’effort ne peut être efficace que si les partenaires actifs portent tous les mêmes messages à l’extérieur du pays. C’est pour cette raison que l’adhésion des différents partenaires est une condition sine qua non de la réussite du déploiement. Dans cette


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Après la crise du Covid-19, le président du Conseil d’État espère un retour à un rythme moins soutenu dans le traitement des dossiers.


Conversation Christophe Schiltz

« Souvent, les gens connaissent le nom du Conseil d’État, mais… » Mettre davantage en lumière le Conseil d’État. Voilà la mission que s’est fixée son nouveau (et jeune) président, Christophe Schiltz (LSAP, 42 ans). Plongée avec lui dans les coulisses d’une institution trop méconnue du grand public, dont le rôle est pourtant essentiel. Interview JULIEN CARETTE

Après votre nomination en avril dernier, vous avez expliqué vouloir mieux faire connaître le travail du Conseil d’État… Souvent, les gens connaissent le nom du Conseil d’État, ayant entendu parler des avis que nous rendons, mais sans savoir exactement ce que nous réalisons, ni la manière dont nous fonctionnons. Or, je trouve important, dans un pays comme le nôtre, que la population connaisse les institutions qui l’entourent et puisse avoir une idée de la manière dont elles agissent dans la société. Cela me pousse donc à donner des interviews, à l’image de celle-ci, afin d’informer… Justement, comment définiriez-vous le Conseil d’État ? Nous sommes là pour analyser les projets de loi, les propositions de loi et les projets de règlement grand-ducal. Afin de donner notre avis sur ceux-ci. De les examiner d’un point de vue juridique. De voir si ces textes fonctionnent, s’ils sont clairs, et surtout s’ils sont compatibles avec les principes généraux de droit, la Constitution luxembourgeoise et les normes de droit supérieur (à savoir le droit de l’Union européenne et celui valable à l’international). Et si nous considérons que ce n’est pas le cas, nous pouvons alors émettre une opposition formelle. Ce qui signifie, concrètement, que, si le texte en question reste en l’état, nous n’accorderons pas la dispense qui permet d’éviter le second vote constitutionnel… À ce stade, il est sans doute bon de rappeler que le Luxembourg possède un système unicaméral, et non bicaméral comme ses voisins. Le Parlement ne compte donc qu’une seule Chambre. Dès lors, pour qu’une loi entre en vigueur chez nous, elle doit passer deux fois par le vote de la Chambre des députés. Mais une dispense pour

Photo ANTHONY DEHEZ

ce second vote peut donc être demandée au Conseil d’État. Et nous l’accordons (ou non), selon notre analyse. Mais vous ne pouvez pas complètement bloquer la machine législative ? Non. Nous ne prenons pas de décision, mais donnons des avis. Nous possédons ce que l’on peut appeler un « droit de veto suspensif ». Sans notre dispense, le Parlement doit alors attendre trois mois de plus, soit le temps légal entre les deux votes, pour voir s’il souhaite vraiment avaliser ce texte.

BIO EXPRESS Strasbourg, Cambridge et Bruges Né le 12 décembre 1978 à Luxembourg, il est titulaire d’une maîtrise en droit privé de l’Université Robert Schuman de Strasbourg, d’un master en droit européen de l’Université de Cambridge, et d’un autre en études politiques et administratives européennes du Collège d’Europe de Bruges. Juriste et diplomate Il débute 2004 en tant que chargé de mission à la Représentation permanente du pays auprès de l’UE. En 2006, il commence une carrière diplomatique au ministère des Affaires étrangères, puis devient, en 2009, chef de cabinet au ministère du Travail. Après un second passage à la Représentation du pays auprès de l’UE et aux Affaires étrangères, il est nommé en novembre 2013 au Conseil d’État pour un mandat de 15 ans. En avril dernier, il en devient président.

L’absence de dispense signifie que le Conseil d’État met en garde vis-à-vis d’un souci au niveau de la compatibilité entre le texte en question et certains principes et normes. Ce qui sous-­entend que, dans le futur, le risque de sanction, notamment par la Cour constitutionnelle, existerait, en cas de recours devant cette dernière… Une Cour constitutionnelle dont nous analysons toujours les arrêts, la jurisprudence, afin de voir comment elle a interprété certains principes. Car c’est elle qui, en définitive, détermine la bonne interprétation de notre Constitution. Or, cette dernière aura souvent une influence sur nos propres avis… Peut-on considérer le Conseil d’État comme une sorte de deuxième Chambre, à côté de celle des députés , tel le Sénat dans les systèmes bicaméraux ? Selon moi, non. En tout cas, pas de la manière dont on conçoit ces deuxièmes Chambres à l’étranger. À l’image du Sénat français ou de la House of Lords au Royaume-Uni, par exemple. Pourquoi ? Parce que leur travail est très politique. Là où le nôtre est celui de l’examen juridique des textes de loi. Et puis, nous ne votons pas sur ces textes comme cela peut se faire ailleurs. Nous parlions de mieux faire connaître le Conseil d’État. Quelles pistes avez-vous en tête pour y parvenir ? Nous avons été invités au Parlement de la jeunesse, afin d’expliquer aux jeunes qui nous sommes et notre rôle. C’est une voie intéressante de s’adresser directement à eux. La connaissance des institutions est importante au niveau de l’éducation civique, selon moi. OCTOBRE 2021

71


Conversation Christophe Schiltz

Georges Wivenes

Pour réussir à intéresser le public, il y a un vrai travail de vulgarisation à réussir. Ce qui n’est pas toujours simple lorsqu’il s’agit de droit… Oui. D’un côté, il y a notre rôle, notre travail d’analyse, qui, lui, ne changera pas. Mais de l’autre, il faut effectivement pouvoir expliquer ce travail et l’importance de celui-ci. Parvenir à faire comprendre quelle est notre valeur ajoutée. Et ça, sans se montrer trop théoriques et en faisant passer un message clair sur l’influence que nous pouvons avoir sur la vie de tous les jours. Comme cela a été le cas, par exemple, ces derniers mois, avec la crise liée au Covid-19. Souvent, les textes de loi ont été ajustés suivant nos avis. Comment le Covid-19 et les différentes lois qu’il a imposées ont-ils influencé le travail du Conseil d’État ? Cela a eu une grande influence sur notre manière de travailler, comme dans beaucoup d’autres secteurs. Les réunions que nous avions en présentiel sont devenues virtuelles. Lors de nos séances plénières, les votes concernant les projets d’avis ont été réalisés par e-mail. Par contre, en ce qui concerne nos séances publiques, c’est-à-dire celles où nous attribuons (ou non) la dispense d’un deuxième vote à la Chambre à un projet de loi, nous n’avons pas changé : nous avons continué à nous réunir. Mais en limitant le nombre de personnes présentes afin de simplement assurer le quorum nécessaire, en le faisant dans un endroit où nous pouvions conserver une certaine distanciation sociale et pendant un laps de temps très limité. Ce processus législatif est inscrit dans la Constitution, et nous ne souhaitions pas le changer. La pandémie ne vous a-t-elle pas aussi obligés à réagir plus rapidement qu’avant la crise sanitaire ? Oui. Surtout en ce qui concerne les projets d’avis liés au Covid-19. Moins pour le reste. Pour ce qu’on appelle, par exemple, la « loi Covid », tout doit se boucler généralement en une semaine. Entre la réception du texte de loi, dans la foulée d’un conseil de gouvernement, et le vote de celui-ci à la Chambre. Si on reçoit le texte un vendredi, comme c’est arrivé souvent, cela signifie qu’un rapporteur est chargé de rédiger un projet d’avis sur ce projet de loi

UNE NOMINATION PAR ROTATION Nommé président du Conseil d’État le 21 avril dernier, Christophe Schiltz l’a été en vertu d’un principe de rotation entre différents partis politiques qui s’est établi de manière informelle au fur et à mesure de l’histoire de cette institution qui compte 21 conseillers. Estampillé LSAP, il a ainsi succédé à la DP Agnès Durdu, qui, elle-même avait pris la suite du CSV Georges Wivenes. « Si la rotation continue comme elle est agréée aujourd’hui, c’est un membre du CSV qui devrait me suivre… », explique celui dont le mandat de président est établi pour trois ans. À noter que cette fonction de président revient généralement au représentant le plus ancien du parti concerné. Ce qui était le cas de Marc Schaefer pour le LSAP. Cependant, une règle additionnelle énonce que, pour accéder à ce poste, il faut faire valoir un mandat d’encore au moins un an au sein de l’institution. Or, celui de Marc Schaefer prend fin en décembre…

durant le week-end. Avant que le projet ne soit examiné en commission le lundi. Le lendemain, nous rendons notre avis, et le jeudi ou vendredi, c’est voté. Sans oublier notre séance publique en vue de l’obtention de la dispense de second vote… Il a donc fallu accélérer considérablement notre mode de fonctionnement. Ce rythme très soutenu qui s’est établi, vous n’avez pas peur qu’on s’y habitue un peu et qu’on vous demande d’y faire face plus souvent à l’avenir pour d’autres dossiers ? Ce ne serait pas possible de travailler de cette manière-là sur tous les dossiers. Et pas que pour nous. Il en irait de même pour le gouvernement et la Chambre des députés. On sait que nous nous trouvons aujourd’hui dans une situation exceptionnelle. Pour les textes dont nous parlons ici, l’urgence est réelle. Parce qu’il faut pouvoir réagir très rapidement sur les nouveaux développements liés à la crise sanitaire. Mais, si j’ai le choix, je préfère prendre

« Il faut parvenir à faire comprendre quelle est notre valeur ajoutée. » 72

OCTOBRE 2021

Agnès Durdu

plus de temps pour les analyses des textes. Et je pense qu’il en va de même pour l’écriture de ceux-ci au niveau du gouvernement ou pour les débats qu’ils peuvent susciter au Parlement. Donc, je ne pense pas qu’il y ait un grand risque que cela se propage à d’autres domaines que la crise sanitaire. Il est arrivé que le Conseil d’État regrette une analyse peut-être rédigée trop rapidement ou un avis qui s’est avéré par la suite perfectible ? L’État n’est pas infaillible. Je suis certain qu’il existe des avis qui auraient pu être mieux rédigés, plus clairs ou plus précis. Ce qui est important, c’est que nous ayons une interaction avec les autres institutions, un dialogue avec les auteurs des projets, à savoir le ministre compétent ou la commission parlementaire en charge du dossier, afin de trouver la solution idoine. Et en termes de volume de projets de loi à traiter, la crise sanitaire n’a rien changé ? On constate une augmentation du nombre d’avis rendus ces trois dernières années (voir les chiffres par ailleurs, ndlr). Et le chiffre pour l’année académique 2020-2021 (460 projets de loi, ndlr) est bien supérieur à la moyenne de ces 15 dernières années. Mais cela n’est pas dû seulement à la crise sanitaire que nous traversons. Même si nous en sommes désormais à la 15e ou 16e modification de cette « loi Covid ». Soit un rythme d’une par mois en moyenne… Un autre de vos très gros dossiers, c’est la réforme de la Constitution… C’est un dossier qui date d’avant mon arrivée au Conseil d’État, en 2013. Cela fait plus de 10 ans désormais qu’il est en route. On ne compte plus les avis, les débats, les discussions… Aujourd’hui, on se trouve dans la dernière ligne droite. Il reste quelques petits ajustements, mais le plus gros du travail a déjà été réalisé. Désormais, il est important que cette réforme entre en vigueur. Comment se déroulent l’examen d’un texte de loi et la procédure pour adopter un avis au Conseil d’État ? Concrètement, on reçoit, par exemple, un projet de loi déposé par le gouvernement. Celui-ci est alors attribué à l’une de nos commissions, en fonction du sujet qu’il véhicule. Il faut savoir que nous avons six commissions permanentes : la CERM (commission culture, enseignement, recherche et médias), la DDI (commission développement durable et infrastructures), l’ECOFIN (commission économie et finances), l’IAP (commission institutions et administrations publiques), la JUR (commission juridique) et la SOC (commission affaires sociales). Auxquelles s’ajoutent, assez rarement, d’autres commissions dites



Conversation Christophe Schiltz

« spéciales ». Il y en a eu une, par exemple, sur la protection des données privées, une autre sur la révision de la Constitution… Chacune des commissions permanentes compte sept membres, dont un président qui attribue, en concertation avec les autres conseillers, le projet de loi à un membre de cette commission. Ce rapporteur analyse alors le dossier en question, sur la base d’un premier examen effectué par notre secrétariat. Un secrétariat qui travaille également sur la légistique du texte, afin de vérifier la forme de ce qui a été rédigé, tout en étant présent pour effectuer des recherches complémentaires. Le rapporteur écrit ensuite lui-même un premier projet d’avis, qui est mis à l’ordre du jour de sa commission. Celui-ci est lu à haute voix de la première à la dernière ligne, de manière à ce que tout le contenu puisse être discuté en détail. Et lorsque la commission s’est mise d’accord sur l’avis, ce qui peut aller très vite ou prendre jusqu’à huit ou dix réunions, suivant l’ampleur du projet, alors, cet avis est mis à l’ordre du jour de l’une des séances plénières du Conseil d’État.

460 Sur l’année académique 2020-2021 (de septembre 2020 à juillet 2021), le Conseil d’État a émis un total de 460 avis en matière législative réglementaire. Un bilan supérieur aux deux exercices précédents, puisque 2019-2020 avait vu 427 avis être prononcés, pour 335 en 20182019. Mais c’est moins que lors de l’année académique 2017-2018, avec ses 605 avis. « Les années d’élections, l’activité législative est souvent plus intense », explique Christophe Schiltz.

Vous avez déjà dit que vous n’étiez pas pour l’accès au public lors de ces séances plénières. Afin de garantir l’indépendance de vos membres… Pour s’assurer qu’il y ait une vraie analyse juridique indépendante et non politisée, en effet. Parce que je suis convaincu que l’une des forces du Conseil d’État, ce sont ses avis, dont on sait qu’ils ne sont pas influencés par des considérations politiques.

Des séances plénières qui sont comparables à celles que l’on voit à la Chambre des députés et qui sont parfois très animées ? Non, pas vraiment. Chez nous, une séance plénière est généralement beaucoup plus courte, durant aux alentours de 15 à 30 minutes. Pourtant, vos membres ont un lien étroit Les conseillers d’État en charge du dossier avec le monde politique ou celui des entreénumèrent les oppositions formelles qui ont prises. On peut vraiment laisser tout ça au été soulignées vis-à-vis du projet de loi, et le placard quand on entre dans les bâtiments président demande s’il y a d’autres observa- du Conseil d’État ? tions à faire. Tout le monde a un certain background. Et, en Ce qui reste habituellement sans suite. L’avis matière de droit, il n’y a pas qu’une seule voie est alors adopté, le plus souvent à l’unanimité possible. Certains ont une approche plus libéet sans qu’il y ait besoin de voter. C’est aussi rale. D’autres ont une sensibilité plus sociale. une différence par rapport à la Chambre des Notre conception du droit, les valeurs qui nous députés : ici, on ne vote pas selon les affilia- influencent, ont un effet sur les positions expritions politiques. D’ailleurs, on ne fonctionne mées au sein du Conseil d’État. Et c’est quelque pas, au sein du Conseil d’État, en tant que chose de très positif ! Parce que cela permet groupes appartenant à un parti… d’enrichir nos échanges, d’étoffer nos avis, avant d’arriver à un consensus. D’où le fait qu’il reste crucial, à mes yeux, qu’on puisse avoir ce dialogue en toute sérénité, en toute confiance. Sans ressentir de pression politique. Et, à ce niveau-là, je trouve appréciable aussi qu’on ne puisse briguer qu’un seul mandat au sein du Conseil d’État. Parce que, si celui-ci était renouvelable, le risque d’influence extérieure serait bien plus fort, afin de tenter de continuer cette mission.

« Ici, on ne vote pas selon les affiliations politiques. » 74

OCTOBRE 2021

Quels sont les moyens mis à la disposition du Conseil d’État ? Notre budget annuel s’élève à 4,5 millions d’euros, et, à l’instar de la Chambre des députés, il s’agit d’une dotation globale. Quant à notre personnel, il est en constante augmentation ces dernières années. Un ren-

forcement qui était nécessaire au niveau de notre secrétariat, mais aussi du back-office. Et qui va se prolonger dans le futur. Tout comme une amélioration de l’outil informatique. Tout cela afin de nous permettre d’être encore plus efficaces sur tout ce qui touche aux recherches, ces dernières, effectuées chez nous ou au niveau de normes étrangères, étant toujours plus nombreuses. À mes yeux, il est important que les conseillers continuent à rédiger eux-mêmes les avis. Mais pour ça, ils ont besoin d’être bien secondés, avec un secrétariat effectuant un gros travail de préparation. Aujourd’hui, on peut évaluer notre personnel aux alentours de 20 à 25 personnes. Et ce, alors que 21 conseillers siègent chez nous, sans oublier S.A.R. le Prince Guillaume. Quels autres challenges vous êtes-vous fixés pour votre mandat de trois ans ? Je n’ai pas d’autre défi que celui de faire fonctionner au mieux cette institution. Comme vous avez pu le comprendre, nous avons une tâche très précise à accomplir. Ce n’est pas comme un gouvernement qui arrive au pouvoir avec un programme qu’il souhaite mettre en œuvre. Je veux juste faire en sorte que le Conseil d’État soit doté des meilleurs outils pour parvenir à conseiller juridiquement au mieux le gouvernement et le Parlement dans la rédaction de leurs textes. On suppose que l’une des missions de votre mandat sera d’obtenir une meilleure mixité, puisque, actuellement, il n’y a que sept conseillers féminins au sein du Conseil d’État… Pour 13 hommes, c’est exact. Une place étant effectivement vacante aujourd’hui. La loi fixe un minimum de sept membres pour le sexe sous-représenté, tout en ajoutant qu’il faut tendre vers un équilibre dans la parité hommes-femmes. C’est évidemment ce que je souhaite aussi. Mais cela ne dépend pas que de nous, puisque les nominations au Conseil d’État sont cycliques, le gouvernement, la Chambre et le Conseil d’État lui-même proposant un nouveau membre à tour de rôle. Le prochain sera nommé par la Chambre, et il devrait être du parti déi Gréng. J’encourage évidemment pour que le choix se porte sur une nouvelle représentante féminine. Une mixité plus grande signifie une « inclusivité » plus importante.


Jeffrey Dentzer, Chief of Luxembourg Market & CIB

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Digitalisation et accompagnement des clients Durant la crise sanitaire et en plein confinement, la BIL s’est donnée pour mission de rester au plus près de sa clientèle. Outre des mesures de soutien, la banque a mis en place de nouveaux outils digitaux et accompagné leur adoption par les particuliers et entreprises. Des fonctionnalités aujourd’hui largement utilisées.

À la BIL, le confinement a permis d’accélérer l’adoption des services digitaux par les clients. Rendre la banque accessible à domicile via internet ou l’application BILnet a permis à la clientèle de rester active. Pour que le plus grand nombre profite de l’ensemble de ses services en ligne, la BIL a développé une véritable stratégie d’accompagnement. Rester à proximité des clients Pour rester proche de sa clientèle et l’accompagner de manière proactive malgré la distance, la BIL a développé de nouvelles fonctionnalités comme les entretiens avec un conseiller en visioconférence. Elle a aussi organisé des webinaires pour partager ses analyses financières avec ses clients

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investisseurs et impactés par la crise sanitaire. La banque a également accompagné les clients et secteurs les plus touchés ou les plus à risque grâce aux moratoires et prêts garantis par l’Etat. La complémentarité du digital et de l’humain Depuis plusieurs années, la BIL propose des services à haute valeur ajoutée avec ses conseillers et services digitaux pour aider les clients à gagner en autonomie et indépendance. « Le client a adopté le canal digital mais la banque est restée

88 % Taux de clients actifs de la banque équipés et utilisant un accès banque à distance

humaine. Il est en mesure de prendre des initiatives sur certains produits et services. Lorsqu’il atteint des points bloquants ou nécessitant une expertise, le contact humain reste une nécessité » explique Jeffrey Dentzer, Chief of Luxembourg Market & CIB. Le digital permet aux employés de la banque de libérer du temps, en automatisant certaines tâches, pour jouer pleinement leur rôle de conseiller lors de moments-clés de la vie des clients, particuliers et entreprises (projets immobiliers ou d’investissements ou création/ transmission d’une entreprise). « Nous souhaitons plus que jamais continuer à accompagner notre clientèle en ligne, via notre plateforme BILnet, mais aussi en face à face au sein de nos agences ou chez nos clients grâce à la proximité et l’expertise de nos conseillers ». Pour répondre à ses ambitions et le rendre le digital accessible, la BIL a mis en place des outils pédagogiques, coaching digital, ainsi qu’un répertoire de liens utiles et un microsite de tutoriels.

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Octobre 2021


Débat public Plus une économie est globalisée, plus elle est soumise au risque que certains secteurs économiques soient impliqués au niveau de viola­ tions de droits humains dans leur chaîne de valeur. Face à ce constat, peut-on se permettre, au Luxembourg, de continuer à fermer les yeux et de plaider pour un simple engagement volontaire des entreprises ? Certaines associations patronales ont milité, en février 2021, lors de la consultation publique par la Commission européenne, pour contrecar­rer toute législation en affirmant que des mesures volontaires sont tout à fait suffisantes. Donc pas de législation, ni européenne ni nationale. Comment peuvent-elles oser revendiquer cela, alors que l’Organi­­sa­tion internationale du travail et l’Unicef ont averti en 2021 que le nombre d’enfants victimes du travail des enfants s’élève à 160 millions dans le monde, soit près d’un enfant sur dix ? Un exemple révélateur : en 2000, l’industrie du chocolat avait pris l’engagement d’éradiquer le travail des enfants avec des initiatives volontaires jusqu’en 2005 ! Après deux décennies de promesses non tenues et de projets pilotes, c’est évident : le volontaire a échoué. Des rapports récents montrent que plus de 1,5 million d’enfants travaillent dans des conditions dangereuses dans les cacaoyères au Ghana et en Côte d’Ivoire. Aussi longtemps qu’un morceau de chocolat que nous mangeons aura le goût amer de l’exploitation d’enfants ou même de leur esclavage sur des plantations de cacao, nous aurons un problème sur le plan du respect des droits humains.

Jean-Louis Zeien

Co-coordinateur de l’Initiative pour un devoir de vigilance L’exemple actuel du dossier NSO avec l’espionnage de journa­listes par le logiciel Pegasus, dans lequel sont citées des entreprises de ce groupe ayant leur siège au Luxembourg, démontre également les limites actuelles de la politique en cas d’activités économiques qui risquent d’entrer en violation avec les droits humains. Il est donc grand temps d’agir. Introduire une législation d’un devoir de diligence au Luxembourg, c’est précisément mettre le respect des droits humains au centre des activités économiques. Ainsi, le respect des droits humains fera partie de l’ADN des entreprises. Le secteur de la finance connaît, par exemple, le principe de l’obligation d’une diligence raisonnable quant au blanchiment d’argent et au financement du terrorisme. Alors, pourquoi le respect des droits humains devrait-il être moins important que ces deux activités illégales ? Le mois prochain, il y aura des élections. Le Luxembourg se présente pour avoir un siège au Conseil des droits de l’Homme des Nations unies. Ne faudrait-il pas être parmi les premiers à garantir une protection des hommes, des femmes et des enfants contre les atteintes aux droits humains dans le cadre d’activités économiques ? Retrouvez sa contribution dans son intégralité sur paperjam.lu Ce débat public, en principe mensuel, est un rendez-vous qui donne la parole aux représentants de la société civile. Si vous voulez témoigner, contactez la rédaction à l’adresse : temoignage@paperjam.lu. Photo ANDRÉS LEJONA

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OCTOBRE 2021


NOVEMBRE MARS 2020 2021

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Banques

Du Grand-Duché à la Grande Région et vice versa Contenu sponsorisé par SPUERKEESS

Pourquoi se tourner à présent également vers la Grande Région ? N.B.  Comme vient de le dire Guy, un établissement bancaire étatique comme Spuerkeess a pour vocation de soutenir les acteurs économiques locaux. 78

OCTOBRE 2021

Cette mission est inscrite dans l’article 5 de la loi du 24 mars 1989. Mais que veut dire local dans le cas très particulier du Luxembourg ? En réalité, il est difficile de s’en tenir à sa stricte frontière géographique car le développement économique du pays s’opère aussi au-delà, au sein même de ce que l’on nomme la Grande Région. Cette zone correspond aux régions limitrophes du Grand-Duché, c’est-à-dire la Lorraine en France, la Sarre et la Rhénanie-Palatinat en Allemagne, et la province du Luxembourg en Belgique. G.K.  Nombreux sont nos clients qui, chaque jour, affichent leur volonté de se développer dans cette Grande Région, et nous voulons les accompagner dans cette voie. L’interna­tionali­sa­tion des affaires va aujourd’hui en grandissant, c’est à nous d’agir différemment si nous voulons continuer à soutenir les entre-prises luxembourgeoises. Cette prolongation est donc finalement un mouvement assez naturel. Guy Koster, Deputy Head of Business Unit Corporate Banking.

N.B.  Il ne faut pas croire que Spuerkeess ne le faisait pas auparavant. Mais jusqu’à présent, c’était toujours une initiative du client qui demandait à être accompagné pour la reprise ou le développement de telle ou telle activité en Grande Région. Aujourd’hui, la nouveauté, c’est que nous proposons officiellement ce service, de façon proactive, pour tous nos clients du Corporate Banking.

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Définissons les termes du sujet : qu’est-ce que le Corporate Banking ? NORBERT BRAUSCH  Le Corporate Banking, c’est l’ensemble des services bancaires dédiés aux professionnels, aux entreprises. Il se différencie du Retail Banking qui s’adresse, lui, aux particuliers. Que l’on parle d’une PME ou d’une société de 1.500 salariés, toutes ont des besoins particuliers auxquels le département Corporate Banking s’efforce de répondre. GUY KOSTER  Certains Chargés de Relations effectuent également cette mission, au sein du réseau d’agences dont nous disposons à travers le pays. On peut donc dire que cette branche de la banque est en lien direct avec les entre­­ preneurs luxembourgeois, soutient le tissu économique local du Grand-Duché.

Quelle forme va prendre cette ouverture ? Qui est concerné ? G.K.  L’ouverture se fera dans les deux sens. Autrement dit, elle concerne toutes les entreprises luxembourgeoises qui souhaitent se développer en Grande Région, celles qui sont donc déjà nos clientes ou pas d’ailleurs, mais également des sociétés étrangères qui souhaiteraient s’établir au Luxembourg en tant que filiale ou succursale.

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Pour les entreprises du Luxembourg comme pour celles de France, de Belgique et d’Allemagne, traverser la frontière est synonyme d’opportunités. À condition de disposer d’un service bancaire à la hauteur. Rencontre avec Norbert Brausch et Guy Koster du département Corporate Banking à Spuerkeess.


SPUERKEESS EN PRIMES ET EN RÉCOMPENSES

Classée parmi les banques les plus sûres au monde en 2019, selon le Global Finance Magazine.

Primée Best Bank 2020 du Luxembourg pour l’excellence du service offert.

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Spuerkeess − Flavie Hengen

Norbert Brausch, Senior Vice President & Head of Department Corporate Banking & Public Sector.

Concrètement, ce mouvement modifie-t-il vos services pour les entreprises concernées ? N.B.  Il n’y a pas de changements spécifiques dans notre offre, c’est plutôt une extension du scope géographique de notre activité, de nos services tradi­tionnels. Nous pouvons par exemple conseiller les entreprises qui souhaitent s’externaliser sur la structu­ration des financements. Les solutions et produits de paiement ou de financement, quant à eux, ne changent pas non plus. G.K.  Précisons également que le Conseil Fiscal sera toujours l’affaire des fiduciaires et non la nôtre. Enfin, Spuerkeess ne va pas s’implanter physiquement en Grande Région, nous n’ouvrirons pas de bureaux de représentation dans les pays limitrophes. Quels sont les intérêts pour les entreprises de chaque côté de la frontière ? N.B.  Pour la société résidente à Luxembourg, c’est très pratique puisque c’est la même banque qui s’occupera des affaires situées sur le

SPUERKEESS EN QUELQUES CHIFFRES

1856

Création de Spuerkeess en 1856.

60

Plus de 60 employés spécialisés en conseil aux entreprises.

1

1 unique actionnaire : l’État luxembourgeois.

1.800

1.800 employés travaillent à Spuerkeess.

territoire, ou bien des affaires en Grande Région. Il y a une dimension « One-Stop Shop » pour la société en question. G.K.  Pour la société française, belge ou allemande, qui souhaite s’implanter au Grand-Duché, elle souscrira d’une banque qui dispose d’un ancrage local fort, qui connaît parfaitement le marché et pourra mieux la conseiller, lui proposer des outils d’implantation efficaces et pertinents. Si elle a des garanties à émettre dans le cadre d’un

marché obtenu au Luxembourg, ou si elle a des créances à préfinancer sur un chantier luxembourgeois par exemple, nous pouvons l’accompagner. Cet accompagnement des entreprises participe-t-il également à une volonté de relance de l’économie, locale mais aussi internationale ? N.B.  Oui, c’est vrai, cette extension profite aux entreprises de chaque côté de la frontière. Vous vous en doutez, la pandémie que nous avons traversée ne connaît pas de frontière, elle a fragilisé le tissu économique de la planète entière. Spuerkeess remplit donc sa mission en aidant les entreprises présentes sur le sol du Grand-Duché à se relancer, tout en faisant bénéficier celles de la Grande-Région également. Comme je vous le disais plus tôt, marquer la frontière géographique de façon nette n’a pas de sens d’un point de vue du développement économique.

Banque n°1 pour les entreprises au Luxembourg, selon l’étude de marché TNS Ilres de 2020.

Les agences internationales de rating Standard & Poor’s (AA+) et Moody’s (Aa2) ont décerné à Spuerkeess des notations parmi les meilleures au monde.

’inforplus d z s e v u erkees Retro ur Spu es : s s n io ris mat entrep et les

r/ ss.lu/f erkee u p s . els/ www sionn profes rises/ entrep

OCTOBRE 2021

79


Enjeux En millions d’euros

Exporter : une question d’identité

14.000

12.000

10.000

8.000

6.000 1 L’économie face

au défi de l’exportation

État des lieux du paysage des exportations luxembourgeoises et de la façon dont le pays cherche à conquérir le marché européen. p. 82

4.000

2 « Notre présence

Le Luxembourg participe aux expositions universelles depuis leur début, en 1851, la Chambre de commerce ayant su con­ vaincre les autorités politiques d’un tout jeune pays que son développement passait par le fait que ses entreprises puissent se faire connaître à l’étranger. Dès l’origine, exporter est dans l’ADN luxembourgeois.

2.000

à Dubaï apparaissait comme une évidence »

Le directeur général de la Chambre de commerce, Carlo Thelen, aborde les enjeux actuels, passés et futurs des expositions universelles. p. 86

3 Jouer la carte

des partenariats

Pour se développer à l’international, l’horloger-bijoutier Schroeder privilégie un réseau d’amoureux du métier. p. 88

0 1995 80

2000 OCTOBRE 2021

2005


COMMERCE EXTÉRIEUR PAR PAYS PARTENAIRES (en millions d’euros) ENTRE 1995 ET 2020 Même si, au fil du temps, quelques crises ont pu peser sur le volume des exportations – et notamment celle du Covid-19 –, la croissance est bien réelle : 11.945 milliards de biens et services exportés en 2021, c’est un peu plus du quart du PIB du pays. Si l’Europe, et plus particulièrement la zone euro, reste le marché de prédilection des entr­e­prises luxembourgeoises, les produits made in Luxembourg sont présents sur toute la planète. Source

Hors Europe

HORS EUROPE

utres pays d’Europe A (Angleterre, Suisse…)

1.386 mios €

ays de l’Union P européenne, dont: Belgique France Allemagne

+ 124 % entre 1995 et 2020

AUTRES PAYS D’EUROPE

Statec (mars 2021)

1.074 mios €

+ 104 % entre 1995 et 2020

PAYS DE L’UNION EUROPÉENNE

9.485 mios €

+ 107 % entre 1995 et 2020 BELGIQUE

1.477 mios € FRANCE

1.944 mios € ALLEMAGNE

3.213 mios €

4 Les défis des marchés

de proximité

Selon la Brasserie Nationale, le principal frein à l’exportation reste le manque d’harmonisation fiscale et les complications administratives qui en découlent. p. 90

5 « Plus on veut aller loin,

plus il faut innover »

Afin de conserver voire d'augmenter sa place sur un marché à la fois très concurrentiel et ancré dans le local, les Moulins de Kleinbettingen misent sur l’innovation. p. 94

6 L’exportation, un cœur de métier

Avec 99 % de son chiffre d’affaires réalisé à l’export, la jeune société SolarCleano opte pour une approche multiculturelle. p. 96

2010

2015

2020 OCTOBRE 2021

81


1 Toile de fonds

Regarder les évolutions des exportations luxembourgeoises pourrait presque tracer en creux l’évolution de l’histoire économique du pays, vers une internationalisation de plus en plus grande et une mutation vers une économie de services. À l’instar des pays « industrialisés », les biens – surtout métallurgiques – ont longtemps représenté la partie la plus dynamique des exportations. Mais contrairement aux autres pays, cette perspective s’est totalement inversée à l’aube des années 90 au Luxembourg. Depuis cette date, l’exportation de services est devenue le moteur du commerce extérieur national. Un renversement e ­ xtrêmement rapide. Ainsi, en 1974 – juste au moment où le premier choc pétrolier commence à faire sentir ses effets sur les économies développées –, les exportations de biens représentaient 84 % des exportations. En 1980, cette part était tombée à 75 %, puis à 44 % en 1995. Et en 2010, elles ne représentaient plus que 20 %. La crise de la sidé­ rurgie, d’une part, et l’essor du secteur financier, de l’autre, expliquent bien évidemment ce changement structurel. Si les services dominent à présent dans les exportations, ils ne sont pas que financiers. La catégorie « services autres que financiers » – 82

OCTOBRE 2021

CARLO THELEN Directeur général Chambre de commerce

« On voit au quotidien que le marché unique n’est pas si unique que cela, qu’il n’est pas achevé. »

Gamme évolutive Et surtout, la palette des produits exportés a évolué. Ainsi, les produits plastiques et pneumatiques, ainsi que le groupe très large de biens d’équipement que sont les machines et appareils, ont détrôné les produits sidérurgiques. Viennent ensuite les produits agroalimentaires, le matériel de transport, les matières textiles et les produits chimiques. Une mutation logique que l’on peut mettre à l’actif de la politique de diversification économique menée à partir des années 50 par les gouvernements successifs. Des gouvernements qui ont su attirer des opérateurs étrangers, notamment américains, comme Guardian ou DuPont de Nemours, pour en nommer deux historiques. Pour y parvenir, le Luxembourg est promu comme hub à partir duquel on peut conquérir le marché européen. Ces opérateurs importent des matières premières ou des produits semi-finis, y injectent de la valeur ajoutée, puis les réexportent. C’est à partir de là que se sont développés des domaines d’activité comme l’aéronautique ou encore le secteur des équipements automobiles, bien servis par le fait que, dans un rayon de 3 heures autour du Luxembourg, on compte une dizaine de fabricants du secteur. Si loin, si proche Pour ce qui est des pays, les exportations luxem­ bourgeoises sont d’abord des exportations de proximité. Tant en 2019 qu’en 2020, l’Allemagne, la ­Belgique, la France et les Pays-Bas concentraient près des deux tiers du total de nos échanges de biens. En termes de flux, ils compta­bilisent 80 % du total des importations et 65 % des exportations. En 2020, l’Allemagne restait la première destination, devant la France et la Belgique. La France, elle, a doublé la Belgique en 1989. De manière plus globale, le continent européen absorbe 88 % des exportations du pays, et l’Union européenne, 79,5 %. On peut noter que la part de marché des pays francophones décroît. Si cette région représentait 61 % du total des exportations en 1993, elle ne pèse « plus » que pour 55 % désormais. La part des pays hors Europe, après avoir décollé dans les années 90, stagne quelque

Andrés Lejona

Pour se développer, il faut passer la frontière : Grande Région, Europe ou grandes exportations. Ce message, la Chambre de commerce le diffuse en continu, sinon depuis ses origines, au moins depuis les années 60, une décennie qui a vu l’essor des exportations grâce à l’implantation de grandes entreprises américaines venues ici pour conquérir le marché européen.

principalement ceux liés aux secteurs du trans­port aérien de biens et de marchandises, des technologies de l’information et de la communication, de l’assurance ou des services aux entreprises – fait en effet au moins jeu égal avec les exportations de biens. Et même si la part relative des exportations de biens diminue, leur valeur absolue progresse. Moins vite que pour les services, mais elle progresse. 3,5 % en moyenne annuelle et à prix constants entre 1970 et 2010, contre 8,4 % pour les ­services.

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L’économie face au défi de l’exportation


peu désormais, voire s’essouffle. Parti d’un montant de 594,3 millions d’euros, le volume des exportations a atteint 1,385 milliard en 2020, après un record de 1,847 milliard en 2015. Depuis ce pic, la place des pays hors Europe se réduit. Tout comme la part relative du marché nord-américain décroît en faveur de l’Asie. Dans les années 60, selon le Statec, 9 % des exportations étaient destinées au continent nord-américain, contre 2,4 % à l’Asie. Depuis, cette dynamique s’est inversée. En 1993, les marchés nord-américains et asiatiques représentaient respectivement 5,61 % et 4,73 % des exportations luxembourgeoises. En 2020, la part de l’Amérique du Nord s’est réduite à 4,11 %, tandis que celle de l’Asie est passée à 5,93 %. Ce recul relatif du continent américain correspond ainsi l’expansion relative du continent asiatique. Au cours des dernières années, les ventes en Asie ont ainsi dépassé les exportations sur le continent américain. Et même si les ÉtatsUnis demeurent le principal partenaire commercial du Luxembourg en dehors du marché européen, l’écart se réduit cependant avec la Chine. Si on regarde les chiffres de 2019, prépandémie donc, le volume des exportations avec les États-Unis s’élevait à 405,4 millions d’euros, contre 199,1 millions avec l’empire du Milieu. Il est cependant remarquable de constater qu’en 2020, les exportations avec les États-Unis reculaient à 275,7 millions, tandis que celles vers la Chine étaient stables, à 200,2 millions. Au niveau européen, la Chine a doublé les États-Unis et est devenue en 2020 le premier partenaire économique de l’UE, selon Eurostat. Répartition des tâches La montée en puissance de la Chine en matière d’exportations est une conséquence directe de

l’Exposition universelle de Shanghai. Si on compare les chiffres des exportations en 2010 et 2020, on constate une forte progression, ceuxci étant passés de 135,8 millions à 200,2 ­millions en 2020. Une success-story que Carlo Thelen espère bien voir se répéter lors de l’Exposition universelle de Dubaï 2020, qui débute ce 1er octobre. L’occasion de viser une clientèle internationale. Le directeur général de la Chambre de commerce espère « un saut quantique et qualitatif pour le secteur des exportations ». En attendant – et le patron de la Chambre de commerce y voit un bon présage –, le pavillon luxembourgeois connaît déjà un beau succès d’estime. « Il a été désigné lors de plusieurs votes comme le plus beau pavillon du site. » Un événement comme une exposition internationale se prépare et demande la coordination de plusieurs acteurs. Au premier rang desquels on retrouve la Chambre de c­ ommerce et le gouvernement. Qui, lorsqu’il s’agit de promouvoir l’économie du pays, se partagent subtilement les tâches. Le gouvernement et les différents ministères concernés se préoccupent d’attirer au Luxembourg de nouveaux investisseurs et de nouvelles activités par nature exportatrices, tandis que la Chambre de commerce se charge d’emmener les entreprises du pays vers de nouveaux marchés. Une stratégie inboundoutbound aux frontières perméables. « ­Souvent, lorsque l’on mène des missions économiques, on vise ces deux objectifs, confie Carlo Thelen. Quand un ministre vante à l’étranger les attraits du Luxembourg, moi, je passe après pour attirer l’attention des entreprises du pays visité afin qu’elles puissent se connecter aux entreprises luxembourgeoises. Nous travaillons main dans la main. » Dépendante du ministère de l’Économie, l’initiative Luxembourg Trade & Invest se

LES PRODUITS PHARES À L’EXPORT Exportations des entreprises luxembourgeoises par produit, par rang, en 2020 Machines et équipements 25 %

20 %

Articles manufacturés en métaux communs

Produits chimiques et produits connexes Autres articles manufacturés classés d’après la matière première

Matériel de transport

15 % Articles manu­facturés divers

Source

Statec

10 %

5 %

0

Produits alimentaires et animaux vivants

Matières brutes non cosmétiques, huiles et graisses Boissons et tabacs

Combustibles minéraux et lubrifiants

consacre au développement de l’économie luxembourgeoise en aidant les entreprises locales à se développer ou à exporter à l’inter­ national, ainsi qu’à attirer les investissements directs étrangers. Elle fournit également des informations sur les possibilités de financement et d’innovation dans le pays, les initiatives et programmes utiles aux entreprises, avec des liens vers des organisateurs de rencontres, des informations sur les marchés et des agences qui peuvent aider à l’internationalisation. Le Trade & Investment Steering Committee en assure le leadership. Le ­comité est devenu le lieu central, la tour de contrôle de la promotion économique du pays, le lieu où converge cette stratégie inbound-outbound. Créé en 2016, il s’agit d’un comité de pilotage du commerce et des investissements étrangers composé de représentants du ministère de l’Économie, du ministère des Affaires étrangères et européennes, du ministère d’État, de la Chambre de commerce et de Luxinnovation. C’est le lieu où se discutent les plans de promotion et de prospection, où se montent les programmes des visites officielles, et où l’on discute également de problématiques spécifiques pouvant atteindre les entreprises. « Avec la création du Trade & Investment Steering Committee, les procédures ont été clari­fiées, et chacun sait ce qu’il doit faire. ­L’écosystème est devenu plus clair et transparent pour tout le monde », se réjouit Carlo Thelen, pour qui, « lorsqu’on est un petit pays, il faut bien utiliser les forces et les structures existantes. Il faut travailler ensemble ». Un réseau efficace Dans leur odyssée exportatrice, les entreprises luxembourgeoises peuvent donc compter sur l’appui des autorités et de différentes institutions. Et avant tout sur le réseau de diplomatie économique du pays, qui regroupe plus de 40 ambassades, consulats généraux et représentations permanentes, 160 consuls honoraires et 14 conseillers en commerce extérieur présents dans 70 pays. Les entreprises luxembourgeoises peuvent également compter sur le réseau des ambassades belges dans le pays, où le Grand-Duché n’est pas représenté. De quoi ouvrir quelques portes. L’entreprise ­SolarCleano a notamment pu profiter de l’appui de l’ambassadeur luxembourgeois en Inde pour mettre un premier pied sur un marché d’avenir pour son activité (voir par ailleurs en page 96). Parmi les acteurs incontournables, citons également l’Office du Ducroire luxembourgeois (ODL), spécialisé dans l’assurance-­crédit à l’exportation. En tant qu’assureur-crédit, l’ODL assure les entreprises contre les risques de non-paiement de leurs clients, que ces risques soient d’origine politique ou liés à l’insolvabilité, ou encore à la carence des OCTOBRE 2021

83


Enjeux Export

Selon les biens 26,9 %

Allemagne

16,28 %

France Belgique

12,37 %

Pays-Bas

5,37 %

Royaume-Uni

0 %

5 %

4,14 %

10 %

15 %

20 %

25 %

30 %

25 %

30 %

Biens et services confondus 18,6 %

Allemagne

13,2 %

Royaume-Uni France

10,6 %

États-Unis Belgique

0 %

84

5 %

8,7 % 8,4 %

10 %

15 %

20 %

OCTOBRE 2021

Une route semée d’embûches Si les autorités politiques se mettent en quatre pour faciliter la vie des entreprises exportatrices, c’est bien à elles de monter au créneau en proposant des biens et services compétitifs séduisants et répondant aux attentes des clients au niveau international. Les clés du succès ? Bien cibler ses marchés-clés et innover en permanence. C’est une constante qui remonte du terrain. Être opiniâtre aide aussi (voir, en pages 88 à 96, des témoignages d ­ ’entreprises face à leur quotidien d’exportateurs). Car le jeu en vaut la chandelle : l’exportation, ce sont, dans certains cas, des revenus supplémentaires, et, dans d’autres, une part non négligeable du chiffre d’affaires. Jusqu’à 99 % même, dans certains cas. Pour des entreprises dont le marché domestique révèle vite ses limites, c’est incontournable. En tant que petite économie qui a besoin des marchés extérieurs pour se développer, les exportations sont un enjeu majeur pour le pays. Le coût de la non-Europe Mais la route vers l’exportation est semée d’embûches. « On voit au quotidien que le ­marché unique n’est pas si unique que cela, qu’il n’est pas achevé », insiste Carlo Thelen, qui pointe l’absence de simplification administrative entre les pays membres, ou même des processus administratifs encore trop lourds. C’est d’ailleurs pour aider ses ouailles que la Chambre de commerce a déployé des attachés économiques et commerciaux dans les pays voisins. Des conseillers qui sont là pour aider les exportateurs face aux procédures et aux formulaires administratifs. Les changements de procédures constituent également un obstacle fréquent pour les entreprises. Obstacles à ne pas sous-estimer. Le Brexit est un exemple extrême, avec les importants changements au niveau des procédures douanières, qui ont causé d’énormes soucis aux entreprises exportatrices. « Certes, ce phénomène se retrouve à des échelles moins importantes dans beaucoup de pays. » C’est le thème de la non-Europe, comprendre le non-achèvement du marché intérieur européen. Si des études récentes ont montré que les principes de libre circulation des biens et des services et la législation dans ce domaine engendrent des bénéfices évalués à 985 milliards d’euros par an, une étude de 2020 commanditée par la commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs du Parlement européen, Legal Obstacles in Member States to Single Market Rules, estime que des gains substantiels restent ­possibles : 389 milliards d’euros si on enlevait les actuelles barrières à la libre prestation de services ; 386 milliards d’euros si on s­ upprimait

Covid et exportations L’économie luxembourgeoise s’est sortie de la pandémie avec les hon­­­neurs. Après un recul du PIB de 1,3 % en 2020 – contre 6,6 % dans l’UE –, ce dernier devrait croître de 6 % en 2021, puis de 3,5 % en 2022, soit un niveau supé­rieur à celui observé avant la crise. S’il est un secteur où le Luxembourg s’est distingué et qui illustre la rési­lience de son économie, c’est celui des exportations. En 2020, le Statec a enregistré une croissance de +2,5 % en volumes, contre une baisse de presque 10 % en zone euro. « Cette performance relève exclusive­ ment de la hausse des exportations de services non financiers, soutenues notamment par les services de banque de données et traitement de données, de transport aérien de marchandises et d’études de marché», selon l’Institut national de la statistique. Les exportations de biens se sont repliées de 10 % en 2020, tandis que les exportations de services financiers ont stagné par rapport à l’année pré­cé­dente. 50 % de la baisse géné­ralisée des exportations s’explique par la régression des articles de fer et acier et celle des machines et appareils industriels, due au ralentis­sement de l’activité industrielle causé par la pandémie. Une croissance des expor­tations est à noter pour les savons, produits d’entretien et détersifs (+17 %).

les barrières non tarifaires pour les biens, et 176 milliards de mieux en cas de réalisation complète du marché unique numérique. La fiscalité est également un obstacle, notamment pour le commerce des biens soumis à accises. Mais le problème principal reste le risque de double imposition. Et c’est pour éviter qu’une entreprise soit doublement imposée lorsqu’elle exporte vers un pays tiers que la Chambre de commerce demande ­souvent au gouvernement d’engager des discussions sur le sujet. Le dernier exemple en date est celui de la Russie, où le système fiscal a c­ hangé et/ou la Chambre de commerce essaie de convaincre les autorités russes et luxembourgeoises d’engager des négociations pour mettre à jour les conventions. « Plus globalement, au niveau international, le Luxembourg doit faire entendre sa voix pour contribuer à la simplification administrative afin de faciliter la vie des entreprises s’attaquant au marché intérieur. La libre circulation des biens et des services sont deux des quatre libertés fondamentales au sein de l’UE, et pourtant, on a l’impression que l’on trouve chaque année des nouvelles complications dans leur exercice », résume Carlo Thelen. Statec

TOP 5 DES PAYS VERS LESQUELS LES ENTREPRISES LUXEMBOURGEOISES EXPORTENT LE PLUS

l’économie reste innovante, condition indispensable pour partir à la conquête de nouveaux marchés.

Auteur MARC FASSONE

Source

clients. L’ODL offre également un soutien financier aux exportateurs luxembourgeois et leur propose des conseils sur les perspectives internationales d’une entreprise. L’Enterprise Europe Network est un réseau créé à l’initiative de la Commission européenne, dont la vocation est d’aider les PME à innover et à développer leurs activités commerciales en Europe. Ce réseau aide les entreprises à trouver des partenaires internationaux avec lesquels fabriquer ou distribuer des produits, accéder à de nouveaux marchés, trouver la bonne technologie ou réaliser des projets de recherche. Ses services de conseil couvrent des sujets tels que l’exportation de produits ou de services, l’obtention de fonds européens, le financement de plans de croissance, la protec­tion de la propriété intellectuelle et des actifs à l’étranger. Il organise également des missions commerciales, des conférences et des ateliers dans toute l’Europe. L’action de l’Enterprise Europe Network est coordonnée au Luxembourg par la Chambre de commerce, qui est également derrière la House of Entrepreneurship, dédiée à l’accompagnement des créateurs d’entreprises et ­proposant des services de conseil personnalisés, des ateliers, des financements et des aides. Citons enfin Luxinnovation, qui s’efforce d’attirer des fonds, des entreprises et des ­travailleurs qualifiés au Luxembourg afin que


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2 Expo 2020

« Notre pré­sence à Dubaï apparaissait comme une évidence » Après un report d’un an, l’exposition universelle de Dubaï ouvre ce 1er octobre pour six mois. L’occasion idéale pour oublier la pandémie et renouer le contact physique. Carlo Thelen, directeur général de la Chambre de commerce, revient sur l’organisation de la présence luxembourgeoise à cet événement économique majeur et détaille ses attentes. Pourquoi était-il important, pour le Luxembourg, de participer à Expo 2020 Dubai avec un pavillon comme à celle de Shanghai ? Notre participation à Shanghai a été une véritable success-story. 2010 était non seulement un cru exceptionnel pour nos vignerons mosellans, mais également pour la promotion du commerce extérieur luxembourgeois. En effet, lors de l’exposition universelle à Shanghai, le Grand-Duché a pu briller avec un magnifique pavillon et la présence de son monument national, la Gëlle Fra. Le pavillon a attiré près de 10 % des 73 millions de visiteurs endéans les six mois d’ouverture de l’exposition, et ce succès fut couronné par l’acceptation de la donation au peuple chinois du pavillon luxem­bour­geois, qui est encore aujourd’hui installé sur le site de l’exposition. Shanghai a donné un véritable coup de boost aux relations commerciales avec la Chine. Citons l’entrée de HNCA au capital de Cargolux et l’essor de la connexion aérienne Zhengzhou-Findel qui en a découlé, le train entre le terminal intermodal Bettem­ bourg-Dudelange et le Chengdu Qingbaijiang International Railway Port, la signature d’ac86

OCTOBRE 2021

2,7 C’est, en millions d’euros, ce que coûtera à la Chambre de commerce l’Exposition universelle Dubaï 2020. La participation au coût du pavillon en lui-même pèse pour 2 millions d’euros, auxquels il convient d’ajouter 500.000 euros d’apport en industrie (à savoir des biens et des services. En l’espèce, le directeur du pavillon à Dubaï est un salarié de la Chambre de commerce). Le budget des six missions sectorielles prévues durant l’événement est estimé à 150.000 euros, et le coût de la semaine « Made in Luxembourg » à 60.000 euros.

cords sur la collaboration dans l’initiative Belt and Road (nouvelle route de la soie). Dans le secteur de la finance, citons l’arrivée de six nouvelles banques au Luxembourg, le fait que le Grand-Duché soit devenu une des plaques tournantes les plus importantes pour les affaires transfrontalières en ­renminbi en Europe et un centre important pour les investissements transfrontaliers entre la Chine et l’Europe, que 79,8 % des fonds européens investissant en Chine continentale sont des fonds luxembourgeois, ou encore que le Luxembourg fut le premier membre fondateur européen de la Banque asiatique d’investissement pour les infrastructures (BAII). Shanghai 2010 a renforcé les bonnes relations et la solidarité entre les deux pays. On en a eu l’exemple au moment de la première vague de la pandémie, lorsque Cargolux a pu ramener de Chine des masques et des appareils médicaux. En faisant ce bilan, notre présence à Dubaï apparaissait comme une évidence. C’est pourquoi, dès décembre 2016, la Chambre de commerce a pris la décision de se joindre à une aventure lancée en mai en devenant partenaire du groupement d’intérêt économique créé à cette occasion et en charge de la conception, de la construction et de l’exploitation de la présence luxembourgeoise. Comment vous êtes-vous préparé pour ce nouveau rendez-vous ? À Shanghai, ce sont 105 entreprises qui avaient fait le déplacement pour entrer en contact avec plus de 1.000 entreprises chinoises. Après l’événement, nous sommes allés voir les entreprises pour faire le bilan et tirer des leçons. Pour ce qui est du bilan, les entreprises étaient très satisfaites. Et leur retour d’expérience nous a permis de mettre au point notre programme pour l’exposition et d’améliorer notre outil de matchmaking B2Fair. À la différence de Shanghai où, pour des raisons logistiques, nous avons organisé une grande semaine commerciale qui comprenait cinq journées thématiques présentant cinq ­secteurs-clés de l’économie luxembourgeoise (ICT, automobile, écotechnologies, logistique et maritime, agroalimentaire), nous avons opté, cette fois-ci, pour six missions sectorielles réparties durant toute la durée de l’événement. À savoir une mission ICT dès la mi-octobre, une mission space, la semaine « Made in Luxembourg », une mission sustainability, une mission healthtech, une mission food and beverage et une mission matchmaking B2B. Les détails pratiques de ces missions et les modalités d’inscription sont détaillés sur le site www.cc2020.lu. Les trois premières missions sont déjà programmées et ont attiré l’attention des entreprises luxembourgeoises. Une centaine d’entre elles se sont déjà inscrites. 45 feront le voyage pour la mission ICT, 35 pour la mission dédiée


CARLO THELEN Directeur général de la Chambre de commerce

«  Pourquoi ne pas avoir l’ambition de faire une prochaine exposition universelle à Luxembourg ? »

à l’espace – c’est quasiment toutes les entreprises actives dans ce secteur au Grand-Duché qui se sont manifestées, à notre plus grande surprise –, et 12 seront présentes pour la semaine « Made in Luxembourg ». C’est le nombre maximum que permettait l’agencement intérieur du pavillon.

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Andrés Lejona

Quel sera le quotidien des entreprises participantes ? Les entreprises qui participeront à ces missions sectorielles auront accès à des foires spécialisées – les UAE Anchor Events – organisées dans la région de Dubaï durant l’exposition universelle. Cette formule permettra aux entreprises de rencontrer des partenaires potentiels et d’exploiter le pavillon national pour nouer des contacts locaux, mais aussi de puiser dans les réseaux des foires internationales, qui ac­ cueillent normalement entre 50.000 et 100.000 visiteurs, pour faciliter le networking sectoriel. Pour le reste, le programme est dense : invitation d’officiels luxembourgeois ; placement d’orateurs aux foires spécialisées ; un pavillon national dans le cadre des foires dédiées à la santé et à l’alimentation ; rencontres B2B avec des prospects internationaux via les plateformes des foires spécialisées ; organisation de séminaires / workshops / ateliers ; visite du pavillon luxembourgeois sur le site de l’exposition universelle ; visite d’une sélection de pavillons se rapportant au secteur mis à l’honneur ; participation à des réceptions de networking et, le cas échéant, une visite d’entreprise ou d’un projet phare relatif au secteur mis à l’honneur. Les invitations pour les missions sustainability, healthtech, food and beverage et le matchmaking B2B, qui auront respectivement lieu en janvier et février 2022, suivront sous peu. Comment avez-vous choisi les secteurs économiques que vous allez mettre en avant ces six prochains mois ? À Shanghai, les pays participants allaient se présenter à la Chine. À Dubaï, nous allons nous présenter à un environnement plus i­ nternational

qui dépassera le Moyen-Orient. Cela n’a pas Une longue histoire de sens d’y aller pour faire des événements mulLe Grand-Duché et les expositions tisectoriels généralistes. Je crois que les entreuniverselles, c’est une longue histoire. Dans un petit pays qui vit de l’exportaprises internationales qui veulent faire du business tion de ses biens et de ses services, en Europe se sont renseignées et connaissent il faut absolument s’y montrer régulièle Luxembourg. Donc, il faut y aller avec un rement, insiste Carlo Thelen. « Ce sont des vitrines pour les entre­prises, les message plus ciblé en fonction des besoins de biens et les services luxem­bourgeois, notre économie. Nous nous sommes concertés et aussi pour tout le pays. » En réaf­fir­ avec toutes les parties prenantes, principalemant cet engagement, l’actuel direc­teur général de la Chambre de commerce ment les ministères de l’Économie, des Finances, s’inscrit dans le droit fil de l’action et des Infrastructures et du Développement de ses devanciers. En 1851, la Chambre de commerce durable. avait en effet conseillé le Premier Si notre rôle est de promouvoir les biens ministre de l’époque, Jean-Jacques luxembourgeois et les entreprises du pays pour Willmar, de participer à l’exposition universelle de Londres – la toute qu’elles trouvent de nouveaux partenaires et de première d’une longue série – en lui nouveaux débouchés, les ministères essaient expliquant que s’il voulait que ce pays plutôt d’attirer des investisseurs. Au moment très jeune (l’indépendance avait été proclamée en 1839) soit mis sur où nous cherchions quels étaient les secteurs la carte et que ses entreprises puissent s’inscrivant dans la thématique de l’exposition se présenter, c’était l’occasion rêvée. « Connecting minds, creating the future », où Le pays s’était, pour l’occasion, fendu d’un petit pavillon du côté de Crystal nous avions quelque chose à montrer et où le Palace. Et depuis, le pays a toujours potentiel de développement est important, le été présent, que ce soit avec un pavillon gouvernement réfléchissait à ce qu’il manquait ou via des visites et des délégations. Ce qui fut le cas pour Milan 2015, la der­encore à notre économie pour la diversifier nière exposition universelle en date, davantage et la renforcer en attirant de noudont le thème, l’agroalimentaire, n’avait pas été jugé suffisamment porteur pour veaux acteurs. mobiliser des moyens équivalents à ceux Nous avons mis nos réflexions en commun rassemblés pour Shanghai ou Dubaï. pour aboutir au programme définitif de nos missions. J’ajouterais qu’à Dubaï, tout le monde sera content de se retrouver et de renouer avec le réseautage physique. Il était important de mettre en avant les secteurs où nous pouvions nous présenter de manière moderne, inno- Luxembourg, évidemment ! Pourquoi ne pas vante et agile. avoir l’ambition de faire une prochaine exposition universelle chez nous ? Le moment me Qu’attendez-vous comme retours de votre semble très propice pour y réfléchir, au moment participation à Expo Dubai 2020 ? où l’on conçoit la nouvelle Luxexpo qui sera Les attentes des entreprises, qui sortent d’une basée sur un concept inédit combinant prépandémie dont certaines ont encore du mal à sentiel et digital. Ce qui confère la flexibilité se remettre, sont hautes. Je suis confiant dans nécessaire à l’organisation d’une telle manile fait que notre programmation économique festation. D’autant plus que Luxembourg ne dispose pas d’une surface équivalente à ce sera à la hauteur de leurs espérances. Plus globalement, je pense que le pays a une que peut offrir Dubaï. belle carte à jouer en se montrant comme l’un Il faudrait donc organiser un tel événement des promoteurs de l’économie circulaire et du sur plusieurs sites. Nous avons de magnifiques développement durable. L’architecture du pavil- endroits que l’on pourrait privatiser et où l’on lon renvoie cette image. Tout comme des pourrait raconter de belles histoires et inviter initiatives telles que Fit 4 Circularity de Luxin- le monde entier à venir raconter les leurs : le novation et les efforts entrepris en matière de sud du pays – que l’on pourrait relier à la capidigitalisation – une digitalisation qui, en con­ tale avec un tram rapide –, théâtre de l’histoire tribuant à une meilleure efficience et à une sidérurgique du pays ; Schengen, qui est un productivité plus importante, profite à l’envi- petit peu le lien historique du pays avec l’inronnement. Je pense qu’avec les entreprises qui ternationalisation ; ou encore Betzdorf, où est installée SES, afin de montrer les différentes vont se montrer là-bas, cela va nous réussir. facettes et étapes du développement du pays. Je ne pense pas que ce projet soit irréaliste Après une exposition spécialisée dédiée et dénué de sens, mais il nécessiterait un vériaux industries créatives dans la convergence numérique à Buenos Aires, en 2023, table effort collectif. Et de l’ambition. la prochaine exposition universelle se tiendra à Osaka, au Japon, du 3 mai au 3 novembre 2025. Pour le Luxembourg, quelle serait la meilleure localisation possible d’une prochaine édition ? Auteur MARC FASSONE

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3 Paroles d’exportateurs

Bien cibler les marchés « À partir du moment où vous créez votre propre marque, le marché local et de la Grande Région révèle ses limites. Lorsque vous fabriquez vos propres bijoux et vos propres montres, il faut pouvoir en vendre une certaine quantité pour être rentable. » Toute la difficulté est de bien cibler les marchés que l’on veut – et que l’on peut – conquérir. 88

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Schroeder

C’est en 1979 que Pierre Rossy, petit-neveu du fondateur de l’entreprise Lambert Schroeder et actuel dirigeant, entre dans l’entreprise familiale. Et c’est sous son impulsion que ­Schroeder Joailliers va se développer à l’international, avec le déploiement d’agents et la participation à diverses expositions sur les cinq continents. Travailler à l’international, pour Pierre Rossy, c’est aller au-delà du Luxembourg et de la Grande Région pour vendre sa propre production. Et s’il a sauté le pas quelques années plus tard, c’est que la manière « traditionnelle » de travailler ne lui convenait pas. « Quand on est bijoutier-horloger local – ce qui était le cas à cette époque et l’est toujours aujourd’hui –, on attend que le représentant passe, qu’il ouvre ses valises ; on choisit ce que les fabricants nous proposent et on le vend. Très honnêtement, déjà il y a 30 ans, cette façon de travailler ne m’intéressait pas beaucoup. Je voulais que notre maison puisse créer ses propres bijoux, ses propres montres, et c’est ce que nous avons fait. » En choisissant de développer sa propre production, le besoin d’exporter s’est fait sentir. D’autant qu’outre des bijoux et des montres, Schroeder Joailliers produit également désormais ses propres foulards, ses propres stylos et des articles de maroquinerie.

rain inconnu, le joaillier y ayant déjà fait des expositions et s’y étant constitué une clientèle fidèle. Suite à sa décision de participer à l’Exposition universelle de Dubaï en tant que co-sponsor du pavillon luxembourgeois, la société est passée à la vitesse supérieure en signant un accord de distribution de ses produits dans les pays du Golfe « Il faut garder en tête que, dans notre métier, avec la compagnie Istana, également une sociénous sommes tout petits. Nos concurrents sont té familiale. Ce nouveau partenaire va d’aildes grands groupes internationaux comme leurs, en marge de l’Exposition, organiser une ­Richemont ou LVMH. Ce sont des acteurs qui exposition privée pour ses clients. La collecont une puissance phénoménale par rapport à tion emblématique « Rose de Luxembourg » nous, petite société familiale. Donc nous devons sera présentée dans le lounge VIP du pavillon parfaitement bien cibler le marché dans lequel luxembourgeois, « mais ce n’est pas là que les nous entrons. » Et si, « jusqu’à présent », cela fonc- affaires se font ». tionne bien, c’est que Pierre Rossy est extrêmement rigoureux au moment de sélectionner les L’ouverture sur le monde en prime agents qui commercialiseront ses produits. « Le Se lancer sur le marché de l’exportation force partenaire est primordial pour moi. » Ses critères les entreprises à évoluer, à innover. « Le métier au moment du choix ? « Des amoureux du métier, de bijoutier exportateur est très différent de celui comme nous, qui sont heureux de collaborer avec exercé localement, dans votre magasin, où vous une société familiale flexible et rapide dans ses attendez que le client vienne jusqu’à vous. À décisions et qui acceptent que l’on travaille comme l’international, il faut se faire connaître. Les une société de niche. » réseaux sociaux sont incontournables pour cela. Le premier marché ouvert à l’exportation le Il faut y être extrêmement dynamique. II ne se fut lors du lancement de la collection « Pas de passe pas un jour où S ­ chroeder ne publie pas un Deux », en 1989. Et c’est le Japon qui fut ciblé nouveau post sur Instagram. Il faut aussi fourpar Pierre Rossy. Pourquoi ? « Parce que le mar- nir du soutien à nos agents dans les différents ché japonais est connu pour son sérieux. Lorsque pays, qui doivent avoir une personne de contact l’on travaille avec des Japonais, on est sûr que vers laquelle se tourner lorsqu’il y a des demandes tout ce qui aura été négocié sera bien exécuté et spécifiques ou des renseignements à fournir. » que les paiements seront faits à temps. » Sur ce Tout cela mis l’un dans l’autre, ce sont entre marché, Schroeder Joailliers travaille avec trois et quatre emplois à temps plein qui ont ­Uchihara Group, « un groupe d’une certaine été créés et qui ne l’auraient pas été si Schroeimportance qui a aimé travailler avec une mai- der Joailliers était resté dans son pré carré. son familiale comme la nôtre ». Ces efforts produisent des résultats : l’entreprise réalise désormais « un bon tiers » de son Émotion et histoire chiffre d’affaires à l’exportation. « Une proporSi la qualité de la production est un élément tion qui a tendance à augmenter régulièrement. » déterminant pour les partenaires de la maison Au-delà des aspects purement économiques, luxembourgeoise, il en est un autre qui tient Pierre Rossy voit un autre aspect positif de l’exune grande place : l’histoire de la maison. portation : « L’exportation a rendu mon métier « ­Schroeder a plus de 140 années d’existence. Durant beaucoup, beaucoup plus intéressant – je dirais cette période, nous avons développé des liens avec même fascinant – et m’a ouvert au monde. J’ai la famille grand-ducale. Nous sommes fournis- fait la connaissance, dans notre métier, de perseurs de la Cour depuis plus de 100 ans et nous sonnalités tout à fait exceptionnelles que je n’autravaillons avec des maisons royales dans d’autres rais pas rencontrées si je n’avais pas fait de voyages. pays. Toute cette histoire est un vrai plus pour L’exportation conduit à une plus grande ouvernous. Beaucoup de groupes étrangers recherchent ture d’esprit, à une plus grande ouverture sur le cela. Une montre ou un bijou, c’est aussi une his- monde. C’est antisclérosant. Nous sommes en toire que l’on achète. S’ils sont anonymes, une concurrence permanente très forte, et donc nous montre ou un bijou restent aujourd’hui très dif- développons et améliorons constamment nos ficiles à vendre. Notre métier est fait d’émotion collections, ce qui est évidemment bénéfique pour et d’histoire. » nos ventes locales. » En plus du Japon, Schroeder Joailliers est particulièrement actif en Chine et aux É ­ mirats arabes unis, à Dubaï. Dubaï n’était pas un ter- Auteur MARC FASSONE

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Schroeder Joailliers s’est tournée vers l’exportation il y a près de 30 ans. Pierre Rossy, actuel dirigeant de l’entre­ prise, revient sur cette expérience qui, selon ses termes, l’a « ouvert au monde » et a rendu son métier « beaucoup plus intéressant ».

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Dans un marché, celui de la bière, qui a tendance à stagner voire à décroître et où la superficie et le nombre d’habitants sont relativement limités, la seule façon de faire augmenter ses volumes, et donc de continuer à se développer, est d’envisager l’exportation. Ce constat, la Brasserie Nationale l’a fait il y a une quin­zaine d’années. Et Frédéric de Radiguès, fraîchement arrivé à l'époque d’AB InBev, a été chargé de l’implémenter.

S’adapter est indispensable, et surtout sur le marché de la bière. Cette dernière étant un bien soumis à accises, les facilités qui devraient découler de la libre circulation des biens au sein de l’Union européenne ne sont donc pas de mise. De plus, à un jet de pierre du Grand-Duché, les goûts des consommateurs ne sont pas forcément les mêmes. L’exportation n’a donc pas été une partie de plaisir  pour le directeur général  de la Brasserie Nationale, Frédéric de Radiguès. L’histoire fait sourire : il y a quelques années, Bofferding s’attaquait au marché chinois. Au moment de l’Exposition universelle de Shanghai, l’anecdote résonnait dans les salons. Mais cette aventure chinoise n’était en rien le fruit d’une stratégie conquérante. Plutôt d’une relation amicale. La famille Lau, des Chinois ayant la nationalité luxembourgeoise, avait ouvert un restaurant à Bascharage, à proximité de la brasserie où est brassée la Bofferding. Des liens « de bon voisinage » se tissent entre la famille Lau et Georges Lentz, alors administrateur délégué. 90

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FRÉDÉRIC DE RADIGUÈS Directeur général, Brasserie Nationale

« Si nous voulons gagner notre vie, il faut faire du volume. »

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Les défis des marchés de proximité

Puis les frères Lau repartent en Chine pour ouvrir une chaîne de restaurants haut de gamme, les Jade Garden. C’est donc tout naturellement que Billy Lau appelle Georges Lentz pour servir de la Bofferding dans ses restaurants. Ainsi commence l’aventure chinoise de la Brasserie Nationale. Les volumes n’étaient pas énormes, quelques milliers d’hectolitres par an. Mais le marché chinois a plus été pour Bofferding un relais de croissance, un contrat de prestige. Même si la Bofferding sera également proposée en grande surface après la signature d’un partenariat avec le groupe de distribution BHG en 2012. Le marché chinois est rude et la concurrence y est féroce face aux deux marques dominantes – Tsingtao, qui appartient à AB InBev et Snow, copropriété de SAB Miller (groupe racheté en 2016 par AB InBev), et China Resources Enterprise – et à une multitude de bières locales. S’y maintenir aurait demandé des moyens importants. Comme le fait remarquer Frédéric de Radiguès : « L’exportation n’est rentable qu’à partir du moment où vous avez un circuit logistique qui est court – plus il est court, plus c’est rentable –, ou si les volumes sont extrêmement importants. L’aventure chinoise était du pur opportunisme. En tant que brasserie de taille très moyenne par rapport aux géants brassicoles, nous n’avons pas les moyens de pénétrer ces marchés lointains. » De fait, après la disparition d’un des frères Lau, Bofferding est discrètement sortie du marché chinois. Et si l’entreprise n’a pas de stratégie d’exportation vers les pays très lointains, elle ne fait pas pour autant la sourde oreille à des propositions opportunistes de ce style. D’ailleurs, la brasserie exporte désormais au Cameroun, qui est devenu de facto le plus grand marché à l’exportation de la société après la France et la Belgique, avec une quantité toute relative, « un container par mois, soit 30.000 bouteilles. Ce n’est pas si mal, mais ce n’est pas stratégique. » Un contrat dont l’initiative revient à un importateur qui a démarché la brasserie après avoir découvert le produit et estimé qu’il y avait une opportunité. Le marché « naturel » de l’exportation pour Bofferding est un marché de proximité. « Lorsque l’on regarde autour du Luxembourg, la Grande Région – c’est-à-dire tout le nord-est de Paris et le sud de la Belgique –, on a, dans un périmètre de 200 kilomètres autour du lieu de production, un vivier dont la consommation de bière équivaut à dix fois celle du Luxembourg, soit environ 4 millions d’hectolitres, alors que le marché luxembourgeois représente environ 400.000 hectolitres, tous produits confondus », explique Frédéric de Radiguès, pour qui il est clair que ce sont ces régions qu’il faut prospecter en priorité. « Nous y étions déjà présents de manière dispersée à droite et à gauche avant

Romain Gamba (archives)

Paroles d'exportateurs


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Enjeux Export

d’accélérer avec un certain succès depuis une nos propres camions et lorsque l’on est dans un quinzaine d’années. » périmètre de plus de 50 à 100 kilomètres de chez Un marché pour lequel la Brasserie ­Nationale nous, nous passons par des négociants de boispeut répondre à la demande et qui lui suffit sons qui sont notre relais vers le marché. » actuellement pour assurer sa croissance. « Un Bofferding emploie cinq personnes à temps marché pour lequel les frais de déplacement et plein en France et quatre en Belgique pour de suivi ne vont pas manger la moitié de la marge. ses activités d’exportation. « Si l’on y ajoute Nous ne vendons pas des sacs Hermès. Si nous les activités de suivi commercial, de logistique voulons gagner notre vie, il faut faire du volume. et de production depuis le Luxembourg, ce sont C’est le grand défi. » entre 12 et 14 équivalents temps plein qui sont Aujourd’hui, la Brasserie Nationale réalise directement occupés par les activités d’expor« un petit 30 % de son chiffre d’affaires » à l’ex- tation. » Pour mémoire, la Brasserie Nationale portation. Une proportion appelée à augmen- emploie environ 280 personnes. ter, les volumes en Belgique et en France se Le nord-est de la France et le sud de la Beldéveloppant selon une hausse proche de 10 % gique sont donc le « marché naturel » de la l’an. Un vrai relais de croissance. Brasserie. Un marché proche, mais pas pour « Dans notre industrie, ce sont les hecto- autant facile. litres marginaux qui rapportent. Le dernier Pour deux raisons majeures. La première hectolitre ne coûte pas très cher parce que c’est tient à la demande des consommateurs. « Je avec les premiers que vous avez payé votre outil pense que les caractéristiques des marchés, même de production. Ce sont des hectolitres assez s’ils sont assez proches de nous géographiqueprofitables et qui, marginalement, contribuent ment, sont assez différentes en termes de demandes bien à la profitabilité de la société. » L’expor- de la part du consommateur. Et donc, si l’on veut tation est donc une activité indispensable saisir toutes les opportunités, il faut se montrer pour la Brasserie Nationale. « Si nous voulons innovant. Il y a des produits que l’on vend en continuer à croître et à nous développer, c’est France et que l’on ne vend pas ici, au Luxemincontournable. On ne peut pas rêver de faire bourg, tout comme il y a des produits que l’on mieux lorsque, aujourd’hui, on occupe à peu vend en Belgique et que l’on ne vend pas au Luxemprès 55 % du marché des bières luxembour- bourg. Et pour s’adapter à la demande du consomgeoises. Ce serait illusoire de penser que l’on mateur, il faut être tout à la fois flexible et pourrait détenir 100 % du marché. Et donc le innovant. » Par exemple, le marché français est complément de volume, il faut aller le chercher friand de bières de printemps et de bières d’été. à l’exportation. » La Brasserie Nationale essaie de répondre à Pour servir ce marché stratégique, la Bras- ces habitudes de consommation avec des recettes serie Nationale a déployé des équipes de com- spécifiques réservées à ce marché. merciaux – « le secret, c’est d’avoir des équipes L’autre grand problème que souligne Frédéen place. S’il n’y a pas d’équipes en place, il n’y ric de Radiguès est lié à la nature même du proa pas de développement possible » – et sous-traite duit exporté : la bière. Un produit sensible de les services techniques. « Nous livrons les points par sa nature alcoolique et, surtout, un produit de vente en direct à partir du Luxembourg avec soumis à accises.

ÉVOLUTION DES EXPORTATIONS DE BIÈRE De 2010 à 2019 Quantité de bière exportée Belgique France Pays-Bas

Allemagne

Autres

250 en milliers d'hectolitres 207.973

172.529 150.656

156.870

150

100

95.228

50

0

92

2010

2015

OCTOBRE 2021

2016

2017

2018

2019

Sources Statec / Confédération des brasseries et des brasseurs du Luxembourg

193.410

200

Marché de proximité ou marché d’exportation ? C’est une grande question : comment considérer la Grande Région ? Est-ce un marché domestique ou un marché d’exportation ? « Les entreprises luxembourgeoises considèrent la Grande Région comme un marché de proximité qu’elles peu­vent atteindre facilement », observe Carlo Thelen, le directeur général de la Chambre de commerce, pour qui, malgré la proximité, ce marché reste un véritable marché d’exportation. Avec tout ce que cela implique. « Malgré sa proximité, il faut traver­­ser une frontière. On ne peut pas considérer ce marché comme normal, comme acquis. Et c’est pour cela que, là aussi, il faut régulièrement se pré­senter et discuter avec nos voisins. » La Chambre de commerce organise des réunions régulières avec les direc­teurs de ses homologues et plus largement toutes les instances compé­tentes en matière de commerce extérieur de la Grande Région. Des missions baptisées « GET2Know Your Neighbours » sont régulièrement menées, la dernière dans la région du Bade-Wurtemberg pour présenter l’actualité du pays, ses opportunités et mettre en contact les entreprises locales avec les entreprises luxembourgeoises. Pour Carlo Thelen, la Grande Région constitue un très bon marche-­ pied pour amener surtout les petites et moyennes entreprises (PME) sur les marchés d’exportation.

Le droit d’accises est un impôt indirect perçu sur le commerce et / ou sur la consommation de certains produits, en particulier le tabac, l’alcool et les produits énergétiques. Le souci, c’est que ces accises ne sont pas harmonisées au niveau européen, mais relèvent de la compétence des pays membres. Ainsi, « la libre circulation des biens et des services est en fait un leurre, affirme, très remonté, Frédéric de Radiguès. On pourrait croire que la grande Europe est quelque chose de facile avec la libre circulation des biens et des services, mais en fait il n’en est absolument rien parce que nous vendons des produits soumis à accises et que les accises sont différentes d’un pays à un autre. Même si l’on exporte vers des pays limitrophes, il faut produire beaucoup de documents. Exporter un fût de bière, même en France, à trois kilomètres d’ici, génère un volume extrêmement important de paperasse. Et si par malheur je me trompe dans les livraisons et que je dois rapatrier un fût, cela génère une paperasserie tout aussi importante. Dans ces cas-là, en général, je perds les accises et je n’arrive jamais à les récupérer. »

Auteur MARC FASSONE


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5 Paroles d‘exportateurs

Les Moulins de Kleinbettingen sont une affaire familiale comptant 75 salariés et réalisant un chiffre d’affaires annuel de 55 millions d’euros, dont 80 % proviennent d’activités d’exportation. Jean Muller, son directeur, évoque la manière dont son entre­ prise vit ce phénomène.

« Plus on veut aller loin, plus il faut innover » chés artisanaux ou industriels, nous avons également des produits retail à destination des supermarchés.

En termes de ressources humaines, quelle est la part de votre personnel directement impliqué dans les activités d’exportation ? Pour la vente des produits exportés, nous avons une équipe de six personnes, marketing inclus. Pour un effectif global de 75 personnes. On associe souvent exportation et innovation. Ressentez-vous cela ? Absolument. Plus on veut aller loin, plus la concurrence est rude, et plus il faut innover et être créatif pour être compétitif. Par exemple, les meuniers étrangers de notre taille ont souvent une gamme limitée de produits qu’ils vendent dans de très gros volumes à beaucoup de clients. Nous sommes différents. Nous avons quasiment une farine par client car ils ont tous des besoins très spécifiques, et nous développons avec chacun la farine qui lui convient. Peu de meuniers de notre taille font cela. Ce qui nous distingue de la concurrence. Un autre exemple, c’est l’innovation en retail. Il y a de nombreux meuniers dans chaque pays et un acteur local sera beaucoup plus crédible pour vendre sur son marché domestique. Mais nous avons une farine innovante qui est très fluide et très bonne pour les applications en cuisine, et nous avons combiné ça avec un packaging novateur. Ce qui nous a ouvert de nouveaux marchés.

Comment en êtes-vous arrivés à prendre pied aux États-Unis ? C’est une histoire assez drôle. Un client luxembourgeois voulait lancer un food truck dédié aux crêpes et était intéressé par notre mix « crêpes ». Il nous a demandé si nous étions prêts à le sponsoriser en mettant notre logo sur son camion. Comment expliquer que 80 % de votre L’idée nous a séduits. Nous nous sommes ensuite production parte à l’exportation ? La raison principale est qu’une grande partie côtoyés de nombreux mois. Il nous a toujours des produits que nous produisons sont très peu dit que son rêve était d’aller aux États-Unis. Et consommés au Luxembourg. Par exemple, plus il était sûr que nos produits mix « crêpes », mix de la moitié de notre activité concerne la pro- « gaufres » et mix « pancakes » auraient du sucduction de semoule à partir de blé dur, le pro- cès sur ce marché. Nous avons dit banco, finanduit de base pour faire des pâtes, des lasagnes cé son voyage et installé une société là-bas pour et du couscous. Et il y a très peu, pour ne pas voir ce que cela pouvait donner. C’est comme dire aucun producteur de pâtes, de lasagnes et cela que ça a commencé. de couscous au Luxembourg. Donc, forcément, C’était un peu un effet d’aubaine... nous exportons. C’est la même chose pour la farine. Une Tout à fait. Ce n’était pas du tout stratégiquebonne partie de cette production est vendue ment planifié, c’était juste une opportunité. Nous aux artisans boulangers luxembourgeois, mais nous sommes dit : « Oui, des produits de bonne Vous avez donc développé toute une également à des producteurs de pizzas, de bis- qualité, faits maison et répondant aux normes gamme de produits pour l’exportation. cuits. Mais cela ne suffit pas à écouler toute européennes, c’est-à-dire sans OGM et sans addi- Existe-t-il des produits qui ne sont destinés notre production. Beaucoup d’entreprises tifs, cela peut intéresser le marché américain. » qu’à l’exportation et répondant à des luxembourgeoises, dès qu’elles atteignent une Nous avons fait quelques sondages et nous avons besoins bien précis ? certaine taille, n’ont pas d’autre choix que eu des échos positifs. Nous nous sommes lan- Oui. Étant donné que, dans l’industrie et dans d’exporter à cause des dimensions du marché cés fin 2018 et, aujourd’hui, notre objectif aux l’artisanat, nous faisons beaucoup de produits luxembourgeois. États-Unis est d’atteindre un million de dollars sur mesure, ce sont des produits qui, sans l’exde chiffre d’affaires, ce qui serait déjà une petite portation, n’existeraient pas. Par exemple, le mix Comment ciblez-vous les marchés réussite. Ce n’est pas encore le grand succès, « crêpes » et le mix « gaufres », vendus en Europe et les produits que vous allez exporter ? mais un million de dollars sur des produits retail, et au Luxembourg, ont été adaptés pour le marLe transport est la donnée déterminante. La cela fait beaucoup de produits vendus et consom- ché américain. Ce sont des produits qui n’y semoule de blé dur et la farine restent des pro- més régulièrement par les Américains. existaient pas. C’est cela l’originalité que l’on duits de base, et donc le coût du transport compte veut apporter. beaucoup dans le calcul de la marge. C’est pour- Mis à part ce cas particulier, comment quoi nous avons défini un rayon d’action. En prospectez-vous vos marchés cibles ? Que vous a apporté le développement farine, on peut aller jusqu’à 200-250 kilomètres Pour tout ce qui est marché artisanal et indus- de vos activités d’exportation ? autour du moulin. Et en semoule de blé dur, triel, nous pensons en avoir une bonne connais- Cela nous a amenés à devoir constamment nous notre marché principal, jusqu’à 400 kilomètres. sance. Nous participons à de nombreuses foires, challenger. À l’exportation, on a toujours un On fait également un peu d’exportation dans nous faisons des screenings et nous analysons nouveau client avec une nouvelle demande qui les pays scandinaves. Mais les pays limitrophes la concurrence. Et, pour ce qui relève du marché nous met au défi au niveau commercial, sur le représentent 90 % de notre activité. retail, sauf pour les marchés limitrophes, nous plan de la production ou encore de la logistique. Il faut ajouter que si le gros de l’activité est travaillons avec des distributeurs. Nous essayons Et donc, cela nous force à nous réinventer et réalisé avec la vente en vrac – ce sont des de trouver, dans les pays européens, les princi- à toujours être à l’écoute du marché. camions de 25 tonnes qui partent d’ici ou des paux distributeurs pour nos gammes de produits sacs de 25 kilos sur des palettes –, pour des mar- et nous les contactons. Auteur MARC FASSONE

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6 Paroles d‘exportateurs

C’est Pol Duthoit qui est venu à la rencontre de Christophe Timmermans et de ses équipes d’ingénieurs avec une demande précise : qu’on lui crée une solution robotique lui permettant de gagner en efficacité et en temps. C’est de cette demande que naît S ­ olarCleano. Dès la première année d’existence, un robot voit le jour : le ­SolarCleano F1. Le business est lancé. Et si la société s’installe au Luxembourg – là où existe déjà Fallprotec – pour son activité de production, « dès le début le produit était destiné à l’exportation », explique Romain Gourmet, head of global sales de la société. De fait, 99 % du chiffre d’affaires est réalisé hors du Grand-­Duché. Au début, SolarCleano vise l’Europe, et plus particulièrement les grands marchés de proximité comme la France et l’Allemagne – qui reste actuellement le plus gros marché avec 70 robots sur les plus de 300 qu’a à ce jour commercialisé la société. Un marché de proximité qui a permis à la société d’apprendre le métier d’exportateur et de roder ses méthodes. D’ailleurs, le tout dernier robot en développement est en cours 96

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ROMAIN GOURMET Head of global sales SolarCleano

« Il est important, quand on fait de l’export, de connaître parfaitement le pays dans lequel on travaille. »

Le défi du support Le deuxième challenge est celui du support, challenge d’autant plus crucial que beaucoup de clients de la société sont installés hors d’Europe. « Promouvoir une solution de qualité faite au Luxembourg, pays qui n’est pas toujours bien connu, est déjà difficile. Il faut convaincre les clients que l’on peut assurer les relations commerciales et le soutien technique à des milliers de kilomètres », explique Romain Gourmet. Pour ce faire, SolarCleano a développé une

Matic Zorman

SolarCleano, société créée en 2017, résulte d’un parte­­nariat entre Christophe Timmermans, directeur de la société Fallprotect, spécialisée dans les lignes de vie en toitures, et Pol Duthoit, un des plus gros nettoyeurs de panneaux solaires d’Europe. Ensemble, ils développent une solution robotique dédiée au nettoyage de panneaux solaires et visent le marché mondial.

Le défi de la prospection Le premier est celui de la prospection. « Notre robot est un peu comme une voiture. À un moment, le client doit pouvoir le voir, le toucher. Nous avons dû développer une stratégie qui permette cela et trouver les bons arguments. » Lorsque SolarCleano veut développer un nouveau marché à l’étranger, le service commercial démarche en amont des clients po­ tentiels et essaie de remplir son carnet de rendez-­vous. Une fois cette étape franchie, une équipe commerciale se rend sur place avec un robot et assure le rendez-vous et la démonstration. Ce qui peut prendre plusieurs semaines. L’objectif est de mettre un premier robot sur le marché et de faire de ces premiers clients des ambassadeurs de la marque, à partir desquels la société va développer ce marché. Et il n’est pas rare que le robot reste sur place, ayant trouvé un acquéreur. À côté de ces roadshows, les foires constituent un autre moyen d’entrer en contact avec des clients potentiels. Un moyen actuellement quelque peu en sommeil pour cause de Covid. Mais sur le terrain, les choses reprennent. SolarCleano va participer, début octobre, à une grande foire au Mexique, un nouveau point de chute à développer. Si la crise du Covid a eu un impact sur les activités de prospection, ses principaux effets se sont fait sentir sur le secteur de la logistique et les prix. « Les prix d’expédition ont très fortement augmenté, a constaté Romain Gourmet. Vers l’Australie, par exemple, les tarifs du fret ont triplé. Des hausses que nous avons dû répercuter sur nos clients, ce qui n’est pas toujours facile. Et surtout, les délais de livraison se sont considérablement allongés. » SolarCleano a même été victime du blocage du canal de Suez en mars dernier. « Un colis qui était attendu à Singapour a été bloqué pendant deux mois, cela a eu des conséquences pour notre client qui avait besoin du robot pour un projet, qu’il a fini par perdre. Du coup, il a des difficultés pour régler sa facture. »

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L’exportation, un cœur de métier

de test au Luxembourg et en Belgique. Mais, au-delà de la Grande Région, ­SolarCleano ambitionne également d’être présente aux quatre coins du globe. Ce qui implique différents challenges.


Art Day Nous avons le plaisir de vous inviter au Degroof Petercam Art Day by Paperjam + Delano Club. Participez à un workshop suivi d’une visite privée d’une exposition et d’un cocktail au sein des locaux de Degroof Petercam. Cet événement réunira tant les collectionneurs éclairés que les amateurs souhaitant débuter une collection d’art. Sujets des workshops

Ateliers pour Collectionneurs aspirants 17:00-18:15 Comment débuter une collection... tout un art ! Ateliers pour Collectionneurs avertis 17:00-18:15 Comment gérer et exposer sa collection

MARDI

12 O CTO B R E AGENDA 16:30 Accueil 17:00 Workshops 18:15 Visite de l’exposition : Close up on Belgian contemporary art* 19:00 Cocktail

LIEU Degroof Petercam Luxembourg 12 Rue Eugène Rupper L-2453 Luxembourg

SPONSOR

INSCRIPTION OBLIGATOIRE SUR CLUB.PAPERJAM.LU * En collaboration avec le Musée d’Ixelles, Bruxelles


Enjeux Export

Zoom sur la semaine « Made in Luxembourg » Ce sera l’un des temps forts de l’Expo­ sition de Dubaï 2020 dans le pavillon luxembourgeois : la semaine « Made in Luxembourg » se tiendra du 31 octobre au 6 novembre. 12 entreprises ont été invitées à présenter leurs produits et services aux visiteurs. Des entreprises qui ont obtenu le label et qui se voient ainsi récompensées des efforts fournis. Et si elles ne sont que 12 à avoir été sélectionnées, c’est parce que le pavillon ne pouvait en accueillir plus. Le label « Made in Luxembourg » est une initiative conjointe du ministère des Affaires étrangères et européennes, de la Chambre de commerce et de la Chambre des métiers qui vise à iden­tifier d’un coup d’œil l’origine luxembourgeoise des produits et services. Pour l’obtenir, les entreprises implantées au Grand-Duché doivent en faire la demande soit à la Chambre des métiers, soit à la Chambre de commerce, et seront auditées pour s’assurer que leurs produits et services sont conçus, développés ou produits au pays. Pas question d’importer un produit et de le réexporter sans le transformer et lui apporter de la valeur ajoutée. « Made in Luxembourg » est un label d’origine du bien ou service et non de qualité, destiné à promouvoir le savoir-faire luxembourgeois et à se démarquer à l’étranger dans le cadre d’une stratégie d’expor­ tation. Et c’est un plus, car les clients aiment bien les belles histoires et connaître l’origine des produits. Depuis sa création en 1984, il a été octroyé à plus de 1.300 entreprises. Un octroi toujours temporaire puisque, tous les 5 ans, il faut renouveler la démarche de demande.

Aéro-Design, entreprise de design de décoration d’intérieur à partir de pièces d’avion originales ; ArtichocWorldwide, spécialisée dans les installations artistiques ; A. Berl & Cie, fabrique des éléments métalliques sur mesure ; Fabienne Belnou Joaillerie, une marque de bijoux ; Gold & Wood, fabricant de lunettes haut de gamme faites à la main ; Green Innovation, spécialiste de la production de produits durables et écologiques dans les secteurs du bio, des technologies et du médical ; Hanin Glass Center, spécialiste de la vitrerie et de la miroiterie pour l’aménagement des espaces privés et professionnels ; Luxlait, la laiterie coopérative lux­embourgeoise ; MaWi Bears and friends, spécialisée dans la conception et la réalisation d’animaux en peluche à la main ; Romantico Romantico Studios, spécialiste de la décoration d’intérieur ; SolarCleano, spécialiste des robots de nettoyage pour panneaux solaires (voir ci-contre) ; Tsume Art, spécialiste des figurines mangas de collection.

Matic Zorman

LES 12 ENTREPRISES CHOISIES POUR L’ÉVÉNEMENT SONT :

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solution d’aide en ligne avec des tutoriels vidéo plus importante que le prix et le client final et propose des formations sur place chez le prend sa décision en quelques secondes. » L’exportation est également un aiguillon à client. « C’est ainsi que l’on a réussi à prouver à nos clients que notre machine était de quali- l’innovation selon Romain Gourmet. « Notre té et qu’ils pouvaient nous faire confiance pour produit est adapté à l’Europe. Mais pour d’autres le support. » pays, les besoins sont différents. Pour les pays où L’aide des autorités luxembourgeoises a été l’eau est rare et précieuse, nous avons développé précieuse, reconnaît Romain Gourmet. « Nous une solution qui fonctionne à sec. Autre exemple, sommes très proches de la Chambre de commerce le Chili. Là-bas, les installations font des milet du gouvernement pour beaucoup de projets. lions de kilomètres carrés. Nous avons donc déveLes ambassades apportent beaucoup d’aide aux loppé une solution d’automatisation pour ce sociétés innovantes comme la nôtre. Notre implan- marché. C’est pour cela que nous disons souvent tation sur le marché indien n’aurait pas été pos- que l’innovation est notre ADN. » sible sans le soutien de l’ambassadeur de l’époque, Plus largement, SolarCleano est en train de qui nous a accueillis, pris sous son aile et ouvert concevoir des robots qui ne sont plus seulement de nombreuses portes. » limités au nettoyage, mais qui pourront aussi SolarCleano a d’ailleurs été sélectionnée inspecter les panneaux grâce à des caméras pour être présentée dans le pavillon luxem- thermiques. « Nous voulons proposer une solubourgeois lors de l’Exposition universelle de tion globale à nos clients dans le monde entier. » Dubaï. « C’est pour nous une reconnaissance et La croissance aidant, SolarCleano va quitl’occasion de nous développer au Moyen-Orient, ter, courant octobre, les – petits – locaux qui est un marché au potentiel énorme. Nous qu’elle occupe à Bascharage, dans la zone avons déjà à notre agenda un grand nombre de industrielle d’Op Zaemer, pour la nouvelle rendez-vous. » zone industrielle de Grass. Mais la question d’une délocalisation de la production comDe l’importance d’un réseau mence à se poser. La société pourrait bien À ce jour, la société s’est tissé un réseau de être amenée à produire sur place dans diffépartenaires dans 45 pays. « Il est important, rents pays où les formalités d’importation quand on fait de l’export, de connaître parfai- sont lourdes et les taxes élevées, comme au tement le pays dans lequel on travaille. Avoir Brésil ou en Inde. « La question se posera lorsque quelqu’un sur place est indispensable. Par exemple, nous ferons de la production à grande échelle. en France, les gens ont encore du mal à tra- Actuellement, nous livrons entre 5 à 10 robots vailler avec une société luxembourgeoise en par semaine. Une quantité insuffisante par direct. Aux États-Unis et en Italie, il faut avoir rapport à notre taux de croissance. » quelqu’un sur place qui va faire l’intermédiaire. En Corée du Sud, il faut un agent coréen, qui Auteur MARC FASSONE parle coréen et qui va prendre en compte le risque de la société. » Depuis 2018, ­SolarCleano a renforcé ses équipes dans le sens de la multi­ culturalité. L’équipe commerciale pratique 11 langues et les ingénieurs viennent de partout dans le monde. Quand on vise la planète entière, la multi­ culturalité est un atout indispensable. « Ce que nous avons appris, c’est que la culture de chaque Afin de mieux viser pays a un impact énorme au niveau du business. les marchés à l'international, SolarCleano adapte le robot Au Moyen-Orient, il faut beaucoup négocier en fonction des pays. sur le prix et avoir conscience qu’il faudra des mois pour qu’une décision soit prise. À l’inverse, en France ou en Belgique, la qualité est

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RECOVERY AWA RDS

Résilience

Business Model Innovation

Digitalisation

Solidarité

Partagez votre expérience en participant au concours Paperjam Recovery Awards et donnez de la visibilité à votre société. Share your experience by submitting your application to the Paperjam Recovery Awards competition and give your company the visibility it deserves.

JEUDI

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D ÉC E M B R E

18H30 G O L D S P O N SO RS

O RGA N I SAT E U RS

PLUS D’INFORMATIONS SUR RECOVERYAWARDS.PAPERJAM.LU


Table ronde Crise du logement : qui freine ? Antoine Paccoud (LISER)

Max Leners (Avocat et activiste)

Jacques Brauch (Soludec)


En 2017, avec 30 % du revenu dédiés au loyer, le Luxembourg arrive en 4e position des plus fortes parts au sein de la zone euro. Stocks de logements sociaux, budget ministériel en berne, manque de foncier constructible disponible dans les zones en tension, difficulté à obtenir des permis de construire, quels facteurs entraînent cette pénurie et cette hausse des prix ? Paperjam + Delano Club réunit les promoteurs immobiliers qui façonnent le Luxembourg pour répondre à ces questions. Table ronde animée par les journalistes Céline Coubray et Thierry Raizer.

INSCRIPTION OBLIGATOIRE SUR CLUB.PAPERJAM.LU

Sara Noel Costa de Araujo (Studio SNCDA)

Marc Giorgetti (Félix Giorgetti)

Olivier Bastin (Immobel Luxembourg)

M E RC R E D I

13 18H30

GOLD SPONSOR


Io sto bene Photos ANDRÉS LEJONA

21.962 Italiens vivent au Luxembourg. « Il y a 40 ans, on ne leur laissait pas la possi­ bilité de louer une chambre. Aujourd’hui, ils donnent du travail à des dizaines de milliers de personnes », résume Donato ­Rotunno. Le réalisateur a voulu mettre à l’honneur ces hommes et ces femmes arrivés sans rien dans son long métrage Io sto bene (je vais bien), à découvrir dans les salles le 13 octobre 2021. À cette occasion, Paperjam con­sacre des portraits d’entrepreneurs issus de l’immigration italienne et bien implantés au Grand-­Duché. Ils nous ouvrent les portes de leurs bureaux respectifs. Auteur MATHILDE OBERT 102

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PAUL ET MARC GIORGETTI Félix Giorgetti Difficile de se promener dans le pays sans croiser, affiché sur l’un ou l’autre chantier, le grand G jaune entouré de bleu qui fait le logo de l’entreprise Félix Giorgetti. Les ancêtres des deux frères et dirigeants actuels Paul (63 ans) et Marc (60 ans) avaient simplement quitté l’Italie pour trouver du travail. Aujourd’hui, l’entreprise en donne à plus de 1.500 personnes, du Luxembourg à Dubaï, et réalise 450 millions d’euros de chiffre d’affaires par an. Marc Giorgetti (en photo) a été élu décideur économique le plus influent au Paperjam Top 100 en 2016.


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THIERRY FRANCESCHETTI Industeam Ce n’est pas au Luxembourg, mais en Moselle que les grands-parents de Thierry Franceschetti (51 ans) ont migré. L’un depuis l’Italie, l’autre de Pologne. C’est avec une vision naturellement internationale que leur descendant a choisi de fonder l’ensemblier industriel Industeam à Bettembourg. Avec, au départ, son père René comme associé (en arrière-­plan). Déménager une usine, la construire… Avec des sites de Calais à Mulhouse jusqu’en Roumanie, il emploie 750 personnes et s’approche des 100 millions d’euros de chiffre d’affaires.

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MAURIZIO RENNA Caffè Valentino « Valentino, c’est ma grand-mère », raconte Maurizio Renna (57 ans). Elle a donné son nom à l’atelier de torréfaction familial niché à Lecce. Son petit-fils choisit le Luxembourg, où il rencontre sa femme, pour créer une filiale dédiée à la distribu­tion de leur café en grains pour l’horeca dans le centre de l’Europe, Caffè Valentino Luxembourg. Responsable de 2,5 millions d ­ ’euros de chiffre d’affaires par an, surtout dans la Grande Région.

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GIANNI PIETRANGELO Travel Pro American Express GBT Gianni Pietrangelo (58 ans) n’a pas fondé Travel Pro, mais la société BCD Travel Luxembourg, pour la vendre à un groupe hollandais et rejoindre la marque spéci­ alisée en tourisme d’affaires du ­co­n­cu­­­­r­­­rent Sales-Lentz en 2014. CEO de 31 salariés, il est le premier Luxembourgeois de sa famille. « L’Italie, pour moi, c’était deux mois tous les ans. » Comme pour beaucoup de ses camarades avec qui il a grandi en section italienne à l’École européenne.

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MARIO DI STEFANO DSM Avocats à la Cour 17 ans, 35 salariés. Le célèbre cabinet DSM Avocats à la Cour n’existerait pas si le père de Mario Di Stefano n’avait pas quitté l’Italie pour le Grand-Duché. L’homme de loi a d’ailleurs souhaité prendre la nationalité du pays, où vit encore toute une partie de sa famille.

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ILARIO ET SIMONETTA MOSCONI Restaurant Mosconi Le couple apporte un peu d’Italie avec sa cuisine, étoilée. Le restaurant du Grund est leur deuxième bébé, après le Domus, à Esch-sur-Alzette. Avec un changement majeur dans le nouvel établissement né en 2000 : Ilario M ­ osconi (64 ans) prend possession de la cuisine. « La restauration n’était pas mon monde. Je m’y suis mise, et c’est devenu ma passion », admet sa femme, Simonetta (62 ans). Lui vient de Lombardie ; elle, des Marches. Le retour aux sources, c’est « au moins une fois par mois » pour rencontrer aussi bien la famille que les fournisseurs.

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ROSARIO GRASSO Kleyr Grasso Le neuvième plus gros cabinet d’avocats luxembourgeois (80 employés) puise ses origines au Bel Paese… L’Italien Rosario Grasso (60 ans) en est le cofondateur. « Ma tante était l’une des premières femmes avocates en Sicile. Petit, elle m’emmenait avec elle au tribunal. Cela m’a toujours passionné. » Même s’il est né au Grand-Duché, il rejoint les terres de son père pour étudier le droit. « On attribue aux Italiens une certaine nonchalance. Je ne crois pas que ce soit vrai. »

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NATHALIE MATIZ ET NICHOLAS BERAGHI Quattro Creative Deux associés, deux liens avec l’Italie. Nicholas Beraghi (38 ans) y est né et suit sa femme au Grand-Duché. Alors que les origines italiennes de Nathalie Matiz (43 ans) remontent à ses parents : sa mère vivait dans le sud du pays ; son père, au nord. Milan paraît donc un choix logique pour ses études graphiques. Elle travaille même trois ans et demi près de Venise avant de rentrer. La rencontre de ces deux créatifs mène à Quattro Creative, leur studio, qui se veut durable et emploie sept personnes.

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DONATO ROTUNNO Tarantula Une « immigration économique forcée » amène ses parents au Grand-Duché en 1961. Donato Rotunno (55 ans) y cofondera Tarantula Luxembourg en 1995. Producteur, réalisateur… c’est un habitué des grands festivals internationaux, membre de jurys et de commissions. On se souvient de son long métrage Baby(a)lone et de ses deux premiers films sur la recherche d’identité d’immigrants italiens, Terra Mia, puis Terra Mia Terra Nostra. Tarantula a produit une quarantaine de longs métrages. « On a commencé par la grande porte, à Cannes. Le chal­lenge a été de garder cette place. »

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Bienvenue au Club ! 114

Business Club

Chers membres, Après un premier semestre 2021 en demi-teinte, la rentrée s’annonçait riche. C’est aussi le cas chez Paperjam + Delano Club avec un large choix d’événements à la fois formateurs et informateurs. Le dernier round des Start-up Stories aura lieu ce 28 septembre. Si vous ne pouvez pas y assister, ne ratez surtout pas la finale du 15 décembre. À ne pas manquer, la table ronde du 13 octobre autour de la crise du logement réunissant Sara Noel Costa de Araujo, Marc Giorgetti, Olivier Bastin, Antoine Paccoud, Jacques Brauch et Max Leners. Ce débat proposera des solutions concrètes et établira un livre blanc qui sera remis aux partis politiques pour faire bouger les choses. Le 21 octobre, nous retrouverons un 10�6, préparé en collaboration avec l’INDR, autour des enjeux de la responsabilité sociale des entreprises à Luxembourg. Nos orateurs s’attelleront à dresser un bilan et à expliquer comment identifier la durabilité des actions mises en place au sein d’une entreprise. Enfin, la remise de candidatures au Paperjam Recovery Awards est maintenant clôturée et notre jury se réunira en octobre pour élire les lauréats dans les cinq catégories. Rejoignez-nous le 2 décembre lors d’un dîner de gala convivial pour connaître les gagnants. Les places étant limitées, à vos agendas et inscrivez-vous dès maintenant ! Stay safe. ANA WISCOUR-CONTER Deputy director Paperjam + Delano Club

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Inspire Venez écouter des experts, décideurs et influenceurs locaux ou internationaux s’exprimer sur des sujets d’actualité variés. Qu’il s’agisse de 10×6, tables rondes, débats, ou encore de keynotes, ces rendez-vous vous proposeront une dose d’inspiration pour penser à votre business de demain. Des rendez-vous suivis d’un cocktail dînatoire propice aux échanges et au networking.

Learn Offrez à vos colla­borateurs un pro­gram­me de formation annuel. La Paperjam Academy est un centre de formation continue agréé par l’État, offrant un portfolio ambitieux. Un large choix qui se décline par secteur, métier ou de manière transversale, proposé dans des domaines-clés, avec notamment 500 heures de formation dispen­sées sur neuf journées par les experts membres du Club.


Le Club en chiffres

Engage Encouragez l’intégration de vos collaborateurs expatriés au Luxembourg en les faisant participer à nos événements Live et dédiés : Delano lives et Let’s Let’s Taste. taste. Le meilleur moyen de rencontrer la communauté des résidents étrangers au Luxembourg ! Créez de la valeur pour vos employés grâce aux événements événements du du Club. Club

1.300 SOCIÉTÉS

C’est le nombre de sociétés qui composent le club d’affaires le plus important du Luxembourg.

18.000 PERSONNES

Jan Hanrion

C’est le nombre de personnes qui font partie de la communauté active du Paperjam + Delano Club et avec lesquelles vous aurez le potentiel d’interagir.

Photos

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ÉVÉNEMENTS Événements physiques et digitaux. Entre conférences, formations, networkings et workshops, ce sont presque 400 événements par an auxquels vous pouvez participer.

500 HEURES

Heures de formation par an qui couvriront hard et soft skills, et qui créeront une valeur sup­ plémentaire pour vos employés.

Network Rejoignez les 1.300 sociétés membres du Paperjam + Delano Club et développez votre réseau. Générez de nouvelles opportunités d’affaires dans un cadre convivial et informel avec nos formats Networking Circles, Déjeuners Carrousel, CEO Cocktails, ou encore les visites Dans les coulisses… Pour joindre l’utile à l’agréable !

COMMENT PARTICIPER AUX ÉVÉNEMENTS DU PAPERJAM + DELANO CLUB ? Vous êtes déjà membre Il vous suffit de vous rendre sur notre site web paperjam.lu, dans la section Club, afin de trouver l’événement auquel vous souhaitez participer. Remplissez le formulaire d’inscription en bas de page pour vous inscrire à nos événements physiques ou digitaux.

1  Anne Hoffmann (Les 2 Musées de la Ville de Luxembourg)  2  Julie Treff (Les 2 Musées de la Ville de Luxembourg)

Vous n’êtes pas encore membre

3  Jessica Koeune (Les 2 Musées de la Ville de Luxembourg) 4

Il vous suffit de contacter l’équipe du Paperjam + Delano Club par e-mail via club@paperjam.lu, qui vous mettra en relation avec l’un de nos chargés de compte pour vous faire entrer dans le plus grand business club du Luxembourg. 4

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Zoé Braun (Innov’iction)  Leila Abahous (Wavestone)

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Jordan Lyk (Maltem)

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Madeline Rauzier (Maltem)  Anouk Ruiz (Maltem)

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Ne manquez pas

Business Club Octobre 2021

Mardi 28 septembre

Mercredi 13 octobre

Start-up Stories Round 4

La série Start-up Stories aborde son 4e et dernier round avant les awards. 10 start-up locales s’affronteront dans un concours de pitchs percutants et passionnés pour ce round, en partenariat avec l’Université du Luxembourg. Ils seront challengés en live par notre jury d’experts composé de Diane Tea (LBAN), Lily Wang (Expon Capital), José Soares (SnT), Bastien Berg (LCI), ainsi que des vainqueurs des Start-up Stories 2020 : Aurélien Dobbels et Nicolas Legay (Cocoonut). PROGRAMME 18:30 – 20:00

Inscrivez-vous

LIEU The Cube – Maison des arts et des étudiants SPONSORS CLUB TALK

Crise du logement : qui freine ? En 2017, avec 30 % du revenu dédié au loyer, le Luxembourg arrive en 4e position des plus fortes parts au sein de la zone euro. Stocks de logements sociaux, budget ministériel en berne, manque de foncier constructible disponible dans les zones en tension, difficulté à obtenir des permis de construire, quels facteurs entraînent cette pénurie et cette hausse des prix ? PROGRAMME 18:00 – 21:30 LIEU The Box – Luxexpo SPONSOR

Jeudi 21 octobre 10×6

Entrepreneurship: 10 CSR Strategies

Si, jusqu’à il y a quelques années, ceux qui s’intéressaient au sujet de la RSE étaient des pionniers, ils ont réussi à montrer que prendre en compte ces critères avait du sens pour la performance de l’entreprise et la création d’une valeur partagée – plus seulement par les actionnaires, mais aussi par la société et les parties prenantes. PROGRAMME 18:30 – 22:30 LIEU Athénée de Luxembourg

Inscrivez-vous

SPONSORS

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OCTOBRE 2021

Pour vous inscrire, rendez-vous sur le site du Paperjam + Delano Club : club.paperjam.lu

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Votre business club à portée de main ! En quelques clics seulement, vous pouvez vous inscrire aux événements du Club et planifier votre agenda grâce à des wish lists. Vous serez informés des événements enregistrés et des messages reçus via des notifications.

Après chaque événement, continuez le networking entre membres via des conversations one-to-one et des groupes de discussion. Votre suivi postévénement sera facilité et 100% sécurisé.

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Le programme

Business Club Octobre 2021

Mardi 28 septembre

Mardi 5 octobre

Start-up Stories Round 4

Mercredi 13 octobre WEBINAR

HORAIRE 18:30 – 20:00

Assertive communication

LIEU The Cube – Maison des arts et des étudiants

HORAIRE 13:30 – 14:30, Livestream

SPONSORS Office Freylinger, Startup Luxembourg

Crise du logement : qui freine ?

Mercredi 29 septembre

HORAIRE 18:00 – 21:30

Back to Live

LIEU Luxexpo The Box SPONSOR ING

HORAIRE 18:30 – 19:30 LIEU Knokke Out

Mercredi 6 octobre

Networking Circle HORAIRE 18:30 – 20:30 SPONSOR Car Avenue

WEBINAR

Delano Breakfast Talk: Shareholders' rights in light of corporate interests HORAIRE 08:15 – 09:30

Empowering finance transformation through FP&A

Mardi 19 octobre

HORAIRE 11:00 – 12:00, Livestream

Delano Breakfast Talk

SPONSOR Board

HORAIRE 08:15 – 09:30 LIEU Sofitel Le Grand Ducal

LIEU Sofitel Le Grand Ducal

SPONSOR ABBL

SPONSOR BSP

CLUB TALK WEBINAR

Jeudi 30 septembre CONFÉRENCE

Nouveau contexte : comment s’adapter grâce à la digitalisation HORAIRE 09:00 – 11:00 LIEU Abbaye de Neumünster SPONSORS Fast, Empirys

U

T

In conversation with Christos Christou LIEU Degroof Petercam

L’e-événement, une nouvelle opportunité

PARTENAIRES MSF, Degroof Petercam

HORAIRE 13:30 – 14:30, Livestream

Mardi 12 octobre

Jeudi 21 octobre

SO

LD

O

HORAIRE 18:30 – 21:30

Entrepreneurship: 10 CSR strategies Paperjam Real Estate Seated Dinner

HORAIRE 18:30 – 22:30 LIEU Athénée de Luxembourg SPONSORS PwC, INDR

HORAIRE 18:30 – 22:30

LIEU Athénée de Luxembourg SPONSORS Inowai, ING

Mercredi 27 octobre

Mardi 5 octobre

Journée de workshops

Degroof Petercam Art Day HORAIRE 16:30 – 21:00

HORAIRE 09:30 – 17:15

LIEU Degroof Petercam

LIEU Abbaye de Neumünster

SPONSOR Degroof Petercam

Nathalie Reuter en conversation avec Luc Frieden HORAIRE 18:30 – 21:30

Retrouvez le programme complet

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Pour vous inscrire, rendez-vous sur le site du Paperjam + Delano Club : club.paperjam.lu


Entrepreneurship : 10 CSR Strategies JEUDI

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18H30 Winston Churchill disait : « Mieux vaut prendre le changement par la main avant qu’il ne nous prenne par la gorge ».

GOLD SPONSORS

Si, jusqu’à récemment, ceux qui s’intéressent au sujet de la RSE étaient des pionniers, ils ont réussi à montrer que prendre en compte ces critères avait du sens pour la performance de l’entreprise et la création d’une valeur partagée – non plus seulement par les actionnaires, mais aussi par la société et les parties prenantes. Aujourd’hui, ne pas avoir de politique RSE est même devenu un risque pour les entreprises. Lors de ce 10�6, 10 entrepreneurs, chefs d’entreprise et spécialistes du sujet partageront leur vision de la RSE et montreront comment elle favorise une situation de « win-win-win » pour les entreprises et leurs performances, la société et l’environnement.

INSCRIPTION INSCRIPTION OBLIGATOIRE OBLIGATOIRE SUR SUR CLUB.PAPERJAM.LU PAPERJAM.CLUB

SILVER SPONSOR


Flashback

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“Travelling, connecting and meeting the world again.” Cindy Tereba Luxembourg Chamber of Commerce

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Vos événements Malgré les restrictions dues au Covid-19, le Paperjam + Delano Club a continué de proposer à ses membres, lors de cette saison estivale, des conférences et des networkings de qualité, tout en respectant les normes sanitaires en place. Dans la continuité de l’événement Paperjam Top 100 2020, 1  François Génaux (PwC) a interviewé 2  Sasha Baillie (Luxinnovation) sur la façon dont le Luxembourg évolue afin de devenir un véritable écosystème de développement pour les start-up, ainsi que sur l’aide que le pays fournit aux entreprises locales qui exportent. Le CEO Cocktail, notre incontournable rendez-vous networking, s'est tenu cette fois-ci dans les jardins de la magnifique résidence de S. E. l’ambassadeur du Japon 3  Jiro Okuyama. Un événement qui a combiné sushis, saké et technologie ainsi que de nombreux décideurs du Grand-Duché. En juillet, le Club est revenu avec son 2e tournoi de golf convivial dans le cadre idyllique du Golf de Luxembourg à Junglinster. Joueurs confirmés comme débutants ont pu se retrouver pour un événement aussi ludique que compétitif, suivi d’un moment créateur d’opportunités lors d’un barbecue convivial. Enfin, les équipes de Delano ont fêté, avec une belle brochette d’invités, les 10 ans du magazine anglophone emblématique du Grand-Duché. En septembre, ils ont repris les éditions habituelles de Delano Live, dont les derniers invités furent 4   Cindy Tereba, directrice des affaires internationales à la Chambre de commerce du Luxembourg, et 5   Nicolas Mackel, CEO de Luxembourg for Finance. Ils ont abordé l’attractivité du Luxembourg et la manière dont ils en font la promotion auprès des principales institutions économiques pour attirer les talents au sein du pays. Plus de photos sur

paperjam.lu

“That’s the future.” (when asked about ESG)

Crédits

Simon Verjus

Nicolas Mackel Luxembourg for Finance

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Ma maison

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Un appartement neuf, mais avec le charme de l’ancien. C’est le choix qu’a fait Françoise Kuth.

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Pendant plusieurs années, Françoise Kuth a habité une vieille maison de ville au Limpertsberg. Considérant que celle-ci ne correspondait plus à ses besoins, elle a choisi de s’installer dans un appartement neuf à Hollerich, tout en sou­ haitant conserver un peu du cachet de l’ancien. Situé au dernier étage d’un immeuble

construit par M3 Architectes dans l’ensemble Soho, l’appartement de Françoise Kuth profite d’une double exposition. « J’ai modifié les plans initiaux pour que la distribution et les pièces correspondent mieux à mes habitudes », explique Françoise Kuth, qui s’est fait aider par le bureau Beiler François Fritsch (dont elle est associée). « Aussi, je tenais à ajouter quelques éléments qui rappellent les maisons an­ ciennes, même s’il s’agit d’un appartement contemporain. » C’est ainsi que l’on trouve un carrelage en damier noir et blanc, des radiateurs en fonte, des cloisons-verrières, des poignées de porte en porcelaine et plusieurs meubles de famille. Le fil conducteur de l’aménagement intérieur est le jeu graphique du noir et blanc, et une présence continue du bois. Auteur CÉLINE COUBRAY Photos MATIC ZORMAN

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MODERNE AVEC 122

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5 1 Pour la cuisine, qu’elle utilise beaucoup, Françoise Kuth a deman­dé à l’équipe de Norbert Brakonier de l’aider à réaliser un aménagement pratique et qui ne soit pas fragile. 2 Dans la pièce principale, on trouve de nombreuses œuvres d’artistes luxembourgeois qui sont aussi des amis. 3 Françoise Kuth aime profiter de son salon, seule ou avec des amis, pour discuter, lire, écouter de la musique ou regarder une série. 4 Dans le salon, mobiliers ancien et contemporain dialoguent chaleureusement. 5 La salle de bains reprend les codes du noir et blanc, avec notamment l’utilisation de zelliges.

DU CACHET OCTOBRE 2021

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Mon argent

Angélique Sabron, managing director de JLL Luxembourg, investit dans la pierre et veille à l’éducation financière de ses trois filles.

Angélique Sabron a rapporté d’Italie ce lustre en verre de Murano.

Une devise par rapport à l’argent ? On n’a rien sans rien. Tout ce qu’on a construit avec mon mari, ce sont des choses que l’on a faites entièrement par nousmêmes, par notre travail, par notre épargne, par nos choix. Un exemple du fruit de votre travail ? Nous avons une brique dans le ventre et nous nous sommes constitué un petit patrimoine, que nous rénovons beaucoup nous-mêmes. Le week-end, au lieu de nous amuser, nous allons faire les travaux parce qu’on aime bien cela et parce qu’on sait ce qu’on y met. Le patrimoine que nous nous sommes constitué est vraiment sorti de nos tripes. Et je trouve que cela donne une valeur supplémentaire, qui est autre qu’une valeur financière. Êtes-vous plutôt cigale ou fourmi ? Je suis mi-fourmi mi-cigale, avec un petit bémol : j’ai toujours l’arrière-pensée que ce que je dépense doit rester une forme d’investissement, quel qu’il soit. J’ai été élevée dans une famille où l’argent était un vrai sujet toutes les fins de mois, cela laisse des traces. Je n’entre pas dans un magasin pour tout acheter : il faut qu’il y ait un besoin derrière et cela doit souvent rester une bonne affaire. Avez-vous des passions coûteuses ? Pas du tout. J’adore bricoler et jardiner. Je ne collectionne rien, j’ai ma voiture de fonction et mon mari m’a offert, pour mes 40 ans, une Fiat 500

­ ’origine. Je n’ai pas le temps d et c’est simplement lié au fait que, pour moi, tout doit être rentable dans la vie. Y a-t-il des achats que vous regrettez ? Oui. Il y a quatre ans, lors d’un voyage à Venise, nous avons visité la fabrique de verre de Murano. À la fin, nous sommes arrivés à la boutique d’où nous sommes repartis avec un lustre dont je n’avais absolument pas besoin et qui était, à mes yeux, d’un prix tout à fait indécent. Mais le gentil guide, qui nous avait bien cernés, nous a dit que cela prendrait de la valeur et que c’était un héritage pour nos filles. À chaque fois que je le nettoie ou que je lève la tête chez moi, j’ai un pincement au cœur car je me dis que ce lustre va devoir tenir 100 ans pour qu’à mes yeux, je puisse considérer que ce n’était pas une mauvaise affaire [rires].

Pour quel type d’achat dépen­ seriez-vous sans compter ? Un achat qui me rapporterait quelque chose. La seule chose que je pense maîtriser, c’est l’immobilier. C’est la seule chose dans laquelle je me sens prête à mettre de l’argent, pour que ça prenne de la valeur et que ce soit transmissible à mes enfants. Un rêve qui pourrait se concré­ tiser si vous gagniez à la loterie ? Une belle résidence secondaire, les pieds dans l’eau, idéalement avec du soleil. Essayez-vous d’inculquer certains principes en matière d’argent à vos trois filles ? Oui ! C’est à la méritocratie, elles ont un rapport sain vis-à-vis de l’argent. Leur job est d’avoir un bon diplôme et d’apprendre à être débrouillardes dans la vie, et nous les remercions quand elles font quelque chose de bien

avec un cadeau, c’est aussi se faire plaisir. Elles ne manquent de rien. Je pense que cela leur permet de devenir des adultes responsables, bien dans leurs baskets. Certaines causes vous tiennent-elles à cœur ? Oui, je soutiens tous les mois cinq fondations différentes : les Paralysés de France, Action contre la Faim, Toutes à l’école, les Petits Frères des Pauvres et 30 Millions d’Amis. Pour moi, il n’y a pas une souffrance qui a plus de valeur qu’une autre. J’apprends aussi à mes filles à partager l’argent, j’ai déjà aidé certains de leurs amis, comme ce gamin qui ne pouvait pas aller travailler sans voiture. Je lui en ai acheté une petite. En général, je donne volontiers à quelqu’un qui en a vraiment besoin. Interview CATHERINE KURZAWA Photo ROMAIN GAMBA

La pierre et ses valeurs 124

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Inês Alves Chargée de production, Kulturfabrik Comment définiriez-vous votre rapport à la mode, en quelques mots ? Je me moque des tendances. La mode est soit liée à mon état d’esprit, soit une autre dimension de ma créativité. J’aime beaucoup l’idée de pouvoir être ­­plusieurs personnes à travers mes vêtements… Quelle est la pièce la plus dingue de votre garde-robe ? Une veste de Jean-Charles de Castelbajac, avec des nounours. C’est comme si j’entrais dans une planète enchantée, prête pour l’aventure ! Quelle est la tenue idéale pour un festival, selon vous ? Les festivals représentent souvent un espace où l’on peut être complètement affranchi des normes et devenir ainsi le person­nage d’une histoire… Je me vois bien entrer dans un délire à la croisée de Mad Max et Moebius, avec une tenue et plein de gadgets surréalistes pour jouer avec les gens. Meow ! À quel point est-ce important de ­choisir sa tenue dans votre métier ? Le plus important, c’est d’être prêt à bouger. Quelle pièce aimeriez-vous transmettre, et à qui ? Le kimono que je porte ! À une personne avec qui je pourrais partager un silence doux et confortable en écoutant Takashi Kokubo… Une adresse shopping coup de cœur au Luxembourg ? Pas d’adresse en particulier, mais je me rends volontiers dans les petits marchés second hand. La récup’, c’est le bonheur !

08_legende de cette photo où l’on apprend qu’Anna porte un manteau en fausse fourrure de chez Zara, des escarpins Versace, un jean Reiko et un sac à main Gucci.

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Inês Alves a été photographiée à la Kulturfabrik, et David Pascoal au Gudde Wëllen.

Un festival pour la rentrée 126

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Mon style

David Pascoal Event manager, Gotham Club et Peacock Comment définiriez-vous votre rapport à la mode, en quelques mots ? Très important. C’est le premier contact qu’ont les gens avec moi, avant la parole. Quelles sont les pièces les plus dingues de votre garde-robe ? J’ai des salopettes noires, un pantalon en cuir qui me va bien mieux qu’à Ross dans Friends, et j’ai un kilt que j’ai pas mal porté il y quelques années, quand l’oversize a commencé à être hype. Quelle est la tenue idéale pour un festival, selon vous ? Tout d’abord, il faut être confort : une petite paire de sneakers ou des bottes, ça dépend des festivals et de la météo. Un pantalon léger, un T-shirt avec un message positif et un K-way – on ne sait jamais ! À quel point est-ce important de choisir sa tenue dans votre métier ? Dans le secteur du clubbing, la façon de s’habiller est im­portante. On cherche à projeter l’image de la clientèle que l’on vise. Votre no-go absolu ? Chez les hommes, l’abus ­d’imprimés de la tête aux pieds ; chez les femmes, les escarpins ouverts trop petits, où les orteils veulent partir en balade chacun de leur côté ! Quelle pièce aimeriez-vous transmettre, et à qui ? Sans aucun doute mon perfecto, à mon fils que je n’ai pas encore !

130 - 160 signes 08_legende de cette photo où l’on apprend qu’Anna porte un manteau en fausse fourrure de chez Zara, des escarpins Versace, un jean Reiko et un sac à main Gucci.

Interview FABIEN RODRIGUES Photos ROMAIN GAMBA

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Ma collection

Pour Pascale Kauffman, le style se doit d’être business, mais toujours avec une touche de couleur. Pascale Kauffman est fondatrice et directrice de l’agence de stratégie en communication Apollo Strategists. Pour com­poser ses tenues, elle n’hésite pas à prendre le temps de choisir avec attention les vêtements qui les composent. « J’ai en fait un style très réfléchi, explique Pascale Kauffman. J’aime porter de la couleur, mais toujours une seule à la fois, et sur une base bien équilibrée et neutre, qu’elle soit blan­ che, beige ou noire. » Pour elle, la couleur vient relever une tenue. Elle s’en sert comme d’un point d’orgue qui vient égayer le tout. « Je prolonge aussi souvent cette touche de couleur avec un acces­ soire, comme une paire de bou­ cles d’oreilles, ou encore une paire de chaussures », préciset-elle. Parmi ses matières préférées, Pascale Kauffman avoue avoir un faible pour le vinyle, « une ma­tière hyper brillante, qui est aussi très douce à porter », ainsi que pour les matières soyeu­ ses pour les hauts. Du côté des couleurs, elle craque sans hésiter pour le rouge vif, le corail et le bleu pétrole clair. Ce goût de bien s’habiller, elle le tient certainement de ses parents qui, encore aujourd’hui, à plus de 80 ans, continuent à s’apprêter. Pour Pascale Kauffman, bien s’habiller est aussi une question de respect, « pour soi avant tout, mais aussi envers les autres. Choisir ses vêtements et ses tenues est aussi une manière d’exprimer sa personnalité, tout en s’adaptant toujours aux personnes ou aux lieux que l’on doit fréquenter dans la journée. » Pascale Kauffman est également membre du conseil d’administration de Maison Moderne. Auteur CÉLINE COUBRAY Photo ANDRÉS LEJONA

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Avec une touche de couleur OCTOBRE 2021

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Ma recette

Emily Cooper exprime sa créa­tivité autant dans son métier de marketing manager que dans ses recet­tes gourmandes véganes. La preuve avec cette rencontre Corée-Mexique savoureuse…

our réaliser la marinade, P mettez tous les ingrédients dans un bol, mélangez bien, ajoutez les champignons tran­­chés et remuez pour enrober.

Pour 4 personnes Préparation : 30 minutes Cuisson : 20 minutes

réchauffez le four à 180 P degrés. À l’aide d’une passoire, égouttez le jackfruit et réservez le liquide de marinade dans un bocal pour plus tard. Placez le jackfruit dans un plat et laissez cuire au four pendant environ 20 minutes. C’est prêt quand le liquide est bien réduit et caramélisé et que la mixture est dorée…

POUR LA MARINADE BULGOGI 4 càs d’eau 1 càs de sucre de coco Jus de 1/2 citron vert et de 1/2 orange 2 càs de vin de riz ou de mirin 2 gousses d’ail émincées 1 càs d’huile de sésame 1 càs de gingembre râpé 1 tige d’oignon jeune tranchée 3 càs de sauce soja POUR LES TACOS 1 boîte de jackfruit (jacquier) 4 champignons tranchés Tortillas de tacos au maïs Quelques quartiers de citron vert Coriandre fraîche POUR LA GARNITURE 1 petit chou-rave vert 200 g de chou rouge 1 carotte 2 càs de yaourt végan Jus de 1/2 citron vert 1 càc de gingembre 1 petite poignée de coriandre 2 càc de vinaigre de cidre de pomme 1 càc de sirop d’érable

gouttez le jackfruit, rincez É à l’eau et utilisez vos doigts ou deux fourchettes pour le déchiqueter. Ne jetez pas les graines, chaque partie est comestible ! Une fois effiloché, ajoutez-le à la marinade avec les champignons, remuez pour enrober et laissez mariner pendant au moins 20 minutes.

endant ce temps, râpez P ou tranchez finement le chou-rave, le chou rouge et la carotte. Ajoutez les ingrédients de la garniture, mélangez pour bien enrober et réservez dans un bol. J uste avant de servir, réchauf­ fez des tortillas de maïs moelleuses et enveloppez-les dans un torchon pour emprisonner l’humidité. Pour servir, ajoutez la mixture de jackfruit à la tortilla et la salade de chou en garniture par-dessus. Ajoutez un filet de citron vert et garnissez de coriandre fraîche hachée. stuce zero waste : A ne jetez pas le liquide de marinade, celui-ci vous servira pour une super sauce lors de votre prochain wok ou pour des ramens maison !

Tacos fusion jackfruit / Bulgogi 130

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Auteur FABIEN RODRIGUES Photos ROMAIN GAMBA


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Mon mental

Depuis qu’il est jeune adulte, Paul Thillmann est victime d’attaques de panique. Une situation qu’il a appris à maîtriser. « La première crise est arrivée à l’âge de 23 ans, se souvient Paul Thillmann, aujourd’hui âgé de 63 ans. Cela s’est manifesté par une douleur intense dans la poitrine, comme si on ­m’en­fon­çait une pique. J’ai cru que je faisais un infarctus ! » Très effrayé, il appelle immédiatement le médecin… qui déclare qu’il n’a rien, que tout est normal. Pourtant, Paul Thillmann a bien des palpitations, des tremblements, un manque de salive. « Je sentais bien que quelque chose n’allait pas, mais clini­quement, tout était normal. » Le médecin lui conseille de prendre quelques jours de congé, de se reposer.

Après être sorti d'affaires, Paul Thillmann a décidé de venir en aide aux autres.

Mais après trois jours, rebelote, les douleurs reviennent. Nouvelle visite chez le médecin, avec vita­mines à la sortie. « Cette situation s’est répétée de nombreuses fois, sans qu’aucun médecin ne par­ vienne à comprendre ce qui se passait, explique Paul Thillmann. Nous cherchions un dia­ gnostic, mais sans succès. Et les crises continuaient, à intervalles irréguliers. J’avais très peur d’avoir un problème sérieux et de ne pas recevoir les secours à temps. Cette situation m’angoissait vraiment. » Malgré la dizaine de médecins ou spécialistes consultés, la situation reste ainsi pendant environ deux ans.

Apprivoiser la situation Avec le temps, Paul Thillmann se familiarise avec les douleurs et apprend à les reconnaître. « Ça part du ventre, comme une chaleur intense, qui monte pro­ gressivement. Puis cela se dirige dans la poitrine et implique le reste du corps. » Un jour, il décide d’aller consulter un psychologue, et là, enfin, celui-ci lui explique qu’il est victime d’attaques de panique et lui conseille de suivre une psychothérapie. « J’étais sou­ lagé, d’une certaine manière, car le problème était identifié. » Il décide alors d’aller se renseigner dans une bibliothèque et

trouve deux livres sur ce sujet. Grâce à ces lectures, il prend conscience qu’il peut apprendre à gérer ses angoisses et que se confronter à sa peur est une première étape à franchir. « Je me suis rendu compte qu’en fait, je n’étais jamais vraiment tranquille, et que dès qu’une situation de contrariété ou de stress se présentait, ce niveau de stress, déjà haut, augmentait encore plus, jusqu’à ce que je ne parvienne plus à le gérer. » Sur le plan professionnel, Paul Thillmann, qui était alors chef d’équipe, arrive à cacher ses attaques d’angoisse, et cela ne le pénalise pas. « Quand mon

Maîtriser la panique 132

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esprit est occupé, les attaques ne survien­nent pas », précise-t-il.

« J’ai cru que je faisais un infarctus ! »

Chercher des tactiques Pour essayer de se calmer, il commence à courir. Accompagné dans un premier temps, car l’angoisse de la crise cardiaque n’est pas complètement évacuée, puis seul, quand il s’est rendu compte qu’il ne risquait rien. En parallèlement à cela, il con­ sulte la littérature spécialisée sur le sujet, continue à apprivoiser la maladie. « J’évitais aussi au maxi­ mum les situations qui pouvaient potentiellement me mettre dans une position inconfortable, comme des magasins bondés, des lieux trop chauds… » Une fois, tout de même, il fait une attaque de panique dans un magasin, mais décide d’affronter ce moment. « Je suis resté sur place. Je voulais que cette peur sorte de moi, que ma tête comprenne qu’il ne s’agit que d’émotions, et que ma vie n’est pas menacée. » En procédant ainsi, il prend plus conscience que son corps n’est pas en danger et que ce qu’il ressent, ce ne sont que des signaux de la peur, qui peuvent être maîtrisés. « Je comprenais mieux ce qui m’arrivait et je

pouvais par conséquent structu­ rer cette attaque, en décortiquer les étapes. » Une fois cette analyse faite, il a également appris à contrôler ses pensées automatiques, à les neutraliser. « J’avais pris l’habitude de parler à ma peur, de m’adresser direc­tement à elle. Je lui disais que je ne la craignais plus, que je comprenais son développement, ses tactiques pour me déstabiliser et qu’elle ne prendrait plus le dessus. » Trouver des solutions En parallèle, il apprend aussi à dire non et fait un tri dans son entourage. « Cela a été difficile, car je n’ai jamais dit ouvertement aux autres que j’étais victime d’attaques de panique. C’est un problème que je voulais résoudre par moi-même, sans que mes proches le sachent. » Ce chemi­ nement lui a pris sept ans, mais il est parvenu à des résultats. « J’ai aussi mis en pratique de nou­velles choses, comme la respira­ tion ventrale, le développement des pensées positives ou encore le travail de visualisation. J’ai éga­ lement passé beaucoup de temps en contact avec la nature, j’ai fait des promenades et enlacé les arbres. » Il trouve aussi d’autres

astuces pour calmer son corps, comme boire de l’eau très froide et s’asperger les mains, les avantbras et le visage au moment d’une attaque. Plutôt que de rester passif et de laisser l’attaque arriver, il se met au contraire en mouvement, commence à monter et descendre les escaliers. « Puisque j’avais compris que je ne risquais pas de faire une crise cardiaque, je n’avais plus peur de bouger. » Au bout de quatre ans, la fréquence des attaques a ­fortement diminué. « En fait, j’avais peur de la mort. Une fois, alors que j’ai eu une attaque très forte, je me suis dit : ‘Si c’est aujourd’hui que je dois mourir, alors je l’accepte.’ Je n’ai pas appelé le docteur et j’ai affronté cette attaque jusqu’au bout. Depuis lors, j’ai franchi une étape décisive, et j’ai pu mener à n ­ ou­veau une vie plus ‘normale’. » Aujourd’hui, il est sorti d’affaire, et a choisi d’aider les autres. Il a monté un groupe d’entraide, Panik.lu, qui accompagne les personnes victimes d’attaques de panique.

Auteur CÉLINE COUBRAY Photos ROMAIN GAMBA

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FO N

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ÉDITION OCTOBRE 2021

DIRECTEUR DE LA PUBLICATION

Mike Koedinger

Rédaction

DIRECTRICE DES DÉVELOPPEMENTS ÉDITORIAUX

Téléphone 20 70 70 E-mail press@paperjam.lu

RÉDACTEUR EN CHEF PRINT

SECRÉTAIRE DE RÉDACTION

Jennifer Graglia (-108)

POLITIQUE ET INSTITUTIONS

Julien Carette (-116) Nicolas Léonard (-102) Pierre Pailler (-109) Nathalie Reuter (-104) Ioanna Schimizzi (-120)

ENTREPRISES ET STRATÉGIES

Lisa Cacciatore (-176) Catherine Kurzawa (-115) Thierry Labro (-105) Manon Méral (-173) Mathilde Obert (-114) Thierry Raizer Jérémy Zabatta (-106) PLACE FINANCIÈRE ET MARCHÉS

Marc Fassone (-157) Aurélie Boob

LIFESTYLE ET VIE PRATIQUE

Céline Coubray (-162) Sarah Lambolez (-174) Fabien Rodrigues (-161) Elena Sebastiani (-175) RÉSEAUX SOCIAUX

Christophe Lemaire (-118) PAPERJAM GUIDE BIOGRAPHIES ET DATA

Sarah Macri (-181) Jezabel Scolastici (-183)

RELECTURE ET FACT-CHECKING

Nathalie Rachline, M ­ arie-Annick Saumon WEBPUBLISHING

Megane Kambala PHOTOGRAPHES

Andrés Lejona (Maison Moderne) Romain Gamba (Maison Moderne) Matic Zorman (Maison Moderne) Anthony Dehez, Hervé Thouroude

Nathalie Reuter

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La liste

dirigeants qui feront Esch2022 Alors que le compte à rebours a débuté avant le coup d’envoi d’Esch2022, voici une liste non exhaustive de six dirigeants de lieux et d’établissements du Sud qui marqueront cette Année européenne de la culture organisée en mode transfrontalier. Auteur IOANNA SCHIMIZZI

Julien Floria

Paul Lesch

DIRECTEUR DE L’ARCHE (VILLERUPT)

Marc Treinen

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Marc Treinen

DIRECTEUR DU CONSERVATOIRE DE MUSIQUE (ESCH-SUR-ALZETTE)

À 51 ans, Marc Treinen est né à Esch-surAlzette. Après avoir commencé des études musicales à 7 ans au Conservatoire de la Ville, il réalisera des études de clarinette au Conservatoire royal de Bruxelles. Il revient dans sa ville d’origine dans les années 90 en tant que professeur de clarinette, puis prend la direction du Conservatoire en 2011. Dans le cadre d’Esch2022, le Conservatoire de musique mobilisera son vivier artistique pour créer Sl’Esch, une comédie musicale retraçant l’histoire de la ville. Le projet fera intervenir toutes les disciplines de l’établissement, dont Jean-Claude Braun est le directeur artistique. Les représentations devraient avoir lieu en novembre 2022 à la Maison des arts et des étudiants de Belval.

Natif de Metz et d’une famille issue du Pays Haut, Julien Floria (40 ans) est passionné par les arts depuis plus de 20 ans. Ancien musicien, fondateur et acteur de multiples projets culturels et associatifs sur le territoire lorrain, il a pris la direction, en mars 2021, de l’Arche, Pôle culturel de Micheville, sur le territoire de Villerupt, qui ouvrira ses portes le 7 janvier 2022. Avec ce nouveau pôle culturel, la Communauté de communes Pays Haut Val d’Alzette – dont fait partie Villerupt – se dote d’un équipement culturel adapté à son territoire et qui arrivera à point nommé pour Esch2022. L’Arche accueillera notam­ment la représentation du projet Troupe Avenir Transfrontalière, qui propose à 20 jeunes âgés de 16 à 25 ans, et n’ayant aucune pratique théâtrale, de participer à la création d’un spectacle. Pendant quatre mois, les jeunes seront accompagnés par deux artistes pour des répétitions communes, se déroulant dans plusieurs lieux du territoire.

Paul Lesch

DIRECTEUR DU CENTRE NATIONAL DE L’AUDIOVISUEL (DUDELANGE)

Docteur en sciences de la communication, Paul Lesch (58 ans) était assistant professeur associé à l’Université du Luxembourg et chargé de cours au Miami University John E. Dolibois European Center, où il enseignait l’Histoire et le cinéma, avant de devenir, en 2016, directeur du Centre national de l’audiovisuel (CNA). Il est également membre du conseil de gouvernance de l’Université du Luxembourg et du conseil d’administration du Luxembourg City Film Festival. Dans le cadre d’Esch2022, le CNA participe au projet « Our archive. Your story », du 26 mars 2022 au 1er janvier 2023, qui vise à rendre hom­mage au sud du Luxembourg et à ses lieux emblématiques. Le but est de sensibiliser le public à la valorisation du patrimoine audiovisuel en allant à la rencontre des gens là où ils vivent, dans leurs villes et villages. Les gens pourront ainsi participer à la collecte de nouveaux fonds pour les archives du CNA et contribuer à l’enrichissement de ses collections.

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Julien Floria

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Romain Girtgen - CNA, Gaël Lesure, Escher Theater, DR, Conservatoire de musique, Kulturfabrik

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René Penning

DIRECTEUR DE LA KULTURFABRIK (ESCH-SUR-ALZETTE)

Autodidacte, René Penning (49 ans), né à Langnau im Emmental, en Suisse, est de nationalité luxembourgeoise. Il a commencé à fréquenter la Kulturfabrik (Kufa) au début des années 90. L’ancien abattoir était alors encore un squat artistique. Intéressé par son fonctionnement, il intègre très vite son conseil d’administration. À la réouverture de la Kufa en 1998, il est engagé comme programmateur musical, poste qu’il occupera jusqu’en 2006. Après avoir été successivement responsable administratif et directeur administratif, il en devient directeur le 1er mai 2020, prenant la succession de Serge Basso de March. René Penning voit dans la Kufa un « lieu différent, indépendant et rebelle » porté par une gestion collégiale. Dans le cadre d’Esch2022, le centre culturel organisera le premier festival de musique indoor sur tout le territoire, « Où est le cool », et pré­sentera en avant-première une expo­sition consacrée à l’IBA (Internationale Bauausstellung), un projet de développement urbain régional transfrontalier porté par l’Université du Luxembourg, qui débutera en 2023, et se poursuivra pendant 10 ans.

René Penning

Stéphane Pallage

RECTEUR DE L’UNIVERSITÉ DU LUXEMBOURG

Carole Lorang

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Carole Lorang

DIRECTRICE DU THÉÂTRE (ESCH-SUR-ALZETTE)

Diplômée de l’Institut national supérieur des arts du spectacle et techniques de diffusion (INSAS), section Mise en scène, à Bruxelles, Carole Lorang (47 ans) a, depuis 2003, monté une trentaine de spectacles et cofondé, en 2007, la Com­ pagnie du Grand Boube. Les spectacles de sa compagnie sont partis en tournées internationales, notamment au Théâtre des Bouffes du Nord (Paris), au Théâtre de Suresnes Jean Vilar, au Théâtre national de Bordeaux en Aquitaine, à la Manufacture de Nancy, au Théâtre de la Place (Liège), à la Brotfabrik de Berlin, ou encore au Staatstheater Mainz. Depuis mars 2018, elle est directrice du Théâtre municipal d’Esch-sur-Alzette. La participation de l’Escher Theater à la programmation d’Esch2022 se décline en trois volets : une programmation jeune public présentée principalement à l’ancien Ciné Ariston lors de la saison 2022/23, mais aussi D’Autres Histoires , un festival de théâtre programmé en mai 2022, en partenariat avec Passages Transfestival (Metz) et L’Arche de Micheville. Le troisième volet, intitulé « Panorama », réunira à la fois des productions de l’Escher Theater et des productions issues de l’appel à projets d’Esch2022.

Après avoir entamé son parcours académique à l’Université de Liège, Stéphane Pallage (53 ans) a obtenu un master of science en administration industrielle (finance), ainsi qu’un doctorat en sciences économiques à l’Université Carnegie Mellon aux États-Unis. De 2013 à 2017, il a été le doyen de l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec, à Montréal. Stéphane Pallage est le recteur de l’Université du Luxembourg depuis janvier 2018 ; il a été élu, fin 2019, vice-­président de l’Université de la Grande Région. L’Uni présentera plusieurs de ses projets durant Esch2022, dont A Colônia Luxemburguesa, documentaire interactif déve­loppé par Samsa et le C2DH, « Petite maison », un projet de construction d’une maison éphémère, et l’AI&ART Ecosystem – AI&ART Pavilion on the Future of Art and Intelligence, un environnement multi­ disciplinaire et interactif dans lequel les scientifiques, les artistes et le public peuvent se rencontrer et interagir. L’Uni présentera également de nombreux projets collaboratifs, dont Remix Science : The Sounds of Data, développé et mis en œuvre par le FNR, l’Uni, le Rocklab de la Rockhal et l’Institut luxem­bourgeois des sciences et de la technologie, qui explore de nouvelles façons de créer, d’interpréter et de vivre la musique en utilisant les données comme éléments constitutifs du processus de création.

Stéphane Pallage

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Son engagement ne se limite pas à l’écologie et s’étend à d’autres combats, comme la défense des plus fragiles, souligne Sam Tanson (déi Gréng), en page 26. Des réformes au long cours à l’adaptation de l’appareil judiciaire, la ministre de la Justice garde aussi un œil sur l’évolution politique européenne, qui montre que l’État de droit ou les institutions sont parfois remis en question Des institutions qui fonctionnent et qu’il faut faire connaître pour mieux en apprécier l’importance, estime le nouveau président du Conseil d’État, Christophe Schiltz, en page 70 Un Luxembourg dont les institutions tournent, un Luxembourg qui doit aussi se vendre à l’international. Mettre le Luxembourg sur la carte, c’est justement la mission endossée depuis un an par Beryl Koltz. La responsable stratégique de la promotion de l’image de marque du pays dévoile ses objectifs en page 64 Terre de réussite économique, le pays l’est assurément dans le secteur financier. Le CEO de Clearstream Banking, Philippe Seyll, rompt le silence de la discrète institution en page 44 pour en révéler les (importantes) ambitions, notamment technologiques Florian Craen, directeur En page 50, général commercial de Hermès International, nous fait pénétrer dans les coulisses de la prestigieuse maison à l’occasion de la réouverture du magasin dans la capitale Le Luxembourg doit beaucoup à ses communautés étrangères. Avec son film Io sto bene annoncé pour le 13 octobre, Donato Rotunno rend hommage à son pays d’origine. L’occasion de pousser, en page 102, la porte du bureau de plusieurs entrepreneurs italiens ou d’origine italienne À quelques mois de l’ouverture d’Esch2022, Christian Mosar, le monsieur Culture du sud du pays, partage ses ambitions en page 54 Six figures d’institutions associées à l’Année européenne de la culture sont également présentées en page 136 Ne manquez pas la rubrique Data Dada, en page 24, consacrée au secteur des crèches en plein essor. En cette rentrée, zoom sur les « Enjeux » de l’exportation en page 80. Si la prospection sur des marchés étrangers représente un gain commercial supplémentaire pour certaines entreprises, d’autres en tirent la plupart de leurs revenus. Petite économie ouverte sur la Grande Région, l’Europe et le monde, le Luxembourg a l’exportation dans la peau. Si vous souhaitez terminer cette lecture par une note salée, rendez-vous en page 130 avec les tacos végans d’Emily Cooper. Ou en page 38 si vous êtes plutôt sucré pour découvrir l’aventure chocolatée de Lola Valérius.

Andrés Lejona, Anthony Dehez, Hervé Thouroude et Romain Gamba

Clin d’œil



Maître d’ouvrage CMIL S.A.R.L Architecte M3 Architectes SA

OBH KIRCHBERG www.soludec.lu

Réalisation Soludec en Entreprise Générale OFFFICE BOUTIQUE HOTEL (MAMA SHELTER)


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