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OUTRE-MER
grandeur Nature
GUADELOUPE RESTAURATION D’UNE ZONE HUMIDE REMBLAYÉE ILLÉGALEMENT : QUELS ENSEIGNEMENTS EN TIRER ? Dans
la commune des
A bymes,
le
Conservatoire
du littoral a restauré une zone humide,
dont une importante superficie avait été dégradée par des travaux de remblaiements.
Retour
sur cette affaire épineuse et les conclusions à en retenir.
En Guadeloupe, le Conservatoire du littoral protège près de 6 000 hectares de zones humides constituées de mangroves, de forêts marécageuses ou prairies humides, principalement sur les pourtours du Grand Cul-de-Sac marin. Ces zones humides jouent un rôle majeur pour la protection du littoral, la prévention des inondations, l’épuration des eaux en provenance du bassin versant ou encore la conservation de la biodiversité. Cependant, elles font l’objet de pressions multiples : dépôts de déchets, pollutions, modifications du fonctionnement hydraulique, remblaiements… C’est ainsi qu’en novembre 2019, des agents du Parc national de la Guadeloupe constatent que d’importants travaux de remblaiement d’une zone humide à partir d’un mélange de terre, de tuf, de gravats et de déchets sont en cours sur la commune des Abymes. Le remblai s’étend sur environ 10 000 m² à cheval sur une propriété privée et sur la parcelle limitrophe acquise par le Conservatoire du littoral en 1999. En décembre 2019, le Conservatoire met en demeure l’auteur des faits de stopper
les travaux et de supprimer le remblai déjà réalisé. Constatant un mois plus tard que les travaux n’ont pas cessé, le Conservatoire décide de poursuivre le contrevenant devant le Tribunal administratif pour occupation illégale du domaine public. Il met en œuvre pour cela une procédure dite de « référé mesures utiles » permettant d’obtenir une décision rapide du juge en raison de l’urgence à agir. Par ordonnance du 6 avril 2020, le juge condamne l’auteur des faits à libérer les lieux et à supprimer le remblai illégal dans un délai de 30 jours. Faute d’avoir pu obtenir l’exécution du jugement par le contrevenant lui-même, le Conservatoire du littoral procède en janvier 2022 à l’évacuation des remblais installés illégalement sur sa propriété, soit environ 10 000 m3 répartis sur 3 000 m². Le coût, de l’ordre de 200 000 €, sera refacturé au contrevenant. À titre de comparaison, ce coût de la restauration de la zone humide, encore susceptible d’augmenter s’il s’avère nécessaire à l’avenir d’intervenir pour contrôler le développement d’espèces invasives, est déjà plus de 100 fois supérieur à celui de l’acquisition !
© Conservatoire du littoral
À gauche : situation avant le début du remblaiement (2017). En bleu : propriété du Conservatoire du littoral relevant du domaine public. Au centre : situation lors de la saisine du tribunal administratif en janvier 2020. Le remblaiement commence à s’étendre sur le domaine public sur environ 1 000 m². À droite : situation en juin 2020 : le remblaiement s’est poursuivi sur le domaine public malgré la mise en demeure de décembre 2019 et la décision de justice d’avril 2020. Il atteint 3 000 m² sur plus de 3 mètres de hauteur.