c D O S S I E R – E X P OS TGV PARIS Jean-Luc Fournier
Städel Museum – ARTOTHEK/BPK, Berlin, Dist. /Centre Pompidou, MNAM-CCI-Bertrand Prévost – RMN-GP
RÉTROSPECTIVE AU CENTRE POMPIDOU
La planète « Baselitz » est un signe qui ne trompe pas, pour nous qui avons la chance d’être à une portée d’arbalète du monde alémanique et qui suivons depuis longtemps les expos régulièrement consacrées à Georg Baselitz en Allemagne, Suisse (la Fondation Beyeler lui avait consacré une somptueuse exposition il y aura bientôt quatre ans) ou Autriche : les fans de ce peintre savent tous qu’il a réalisé lors de cette dernière décennie des toiles gigantesques, quasi titanesques, d’une dimension telle qu’elles ne pourraient être exposées que dans des salles exceptionnellement hautes. Et bien, Baselitz est à l’évidence trop grand, même pour le réputé Centre Pompidou. Ces toiles-là sont inéluctablement absentes, et, au fond, cette absence nous préserve sans doute de la violence de leur tragique puissance…
C’
« Une résistance au monde… »
Oui, la planète Baselitz. Car comment mieux définir la singularité profonde de ce peintre inclassable, aujourd’hui octogénaire, qui poursuit avec une incroyable constance une œuvre dont l’inventivité, la violence et l’audace ne se sont jamais démenties depuis des décennies. Il y a eu, depuis vingt ans, une foule d’expositions en Europe, mais très peu en France. Beaubourg permet à Paris d’offrir enfin une rétrospective magique et magnifique (sans doute la plus vaste jamais organisée dans le monde), à la hauteur de la tempête permanente des toiles de ce dynamiteur né… Die Mädchen von Olmo II
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c D OS SI E R — Expos TGV
Si vous êtes amateur d’une peinture paisible, agréable et décorative, alors fuyez les cimaises de Beaubourg ! Il en va du paisible de vos nuits. Car les œuvres de Baselitz, littéralement, nous agressent, nous prennent à la gorge et ne nous lâchent plus jamais. Elles sont d’une brutalité totale et sauvage, elles sont outrancières, brutes, crues… Hans-Georg Kern (son véritable nom) est né en 1938 en Allemagne, à Deutschbaselitz, un faubourg de la petite ville de Kamenz, en Saxe. Cette simple date fournit à elle seule une indication majeure : l’artiste a vu le jour au cœur de l’Allemagne nazie et de son totalitarisme bestial. Il a ensuite grandi au cœur des ruines du IIIe Reich, parti pour durer mille ans et qu’il aura fallu détruire à l’extrême pour tenter d’exterminer les puissances maléfiques qui l’animaient. Ce même totalitarisme, revisité façon communisme pur et dur, fut encore la toile de fond de l’adolescent puis du jeune adulte habitant de la RDA. №43 — Décembre 2021 — Splendeurs