Histoire des éditions du recueil
Les éditions populaires Les contes sont donc publiés à la toute fin du XVIIe siècle, soit un peu moins d’un siècle après l’apparition de la Bibliothèque bleue, qui arrive, elle, au début de la période. La parution des contes répond à une attente de la part des lecteurs, aussi bien urbains (les salons et la Cour), que dans les zones périphériques et rurales. La littérature de colportage s’étend en effet dans les campagnes. « Cette extension s’accompagne d’une évolution dans le catalogue, qui désormais comprend aussi des abécédaires, des textes éducatifs et techniques, des livres de médecine populaire, ainsi que des textes liés à la culture savante, comme les Contes de Perrault. » 446 La demande de lecture y est très forte, et la Bibliothèque bleue s’y diffuse du XVIIe siècle à la première moitié du XIXe siècle. Pendant deux siècles et demi, les contes seront lus et racontés jusque dans les moindres chaumières. La stratégie éditoriale de ces éditeurs, venant principalement de Troyes, mais aussi de Caen, est de réaliser des livres pour les petits et mauvais lecteurs. Ce sont probablement plusieurs dizaines de millions d’exemplaires, dont on a cependant peu de traces aujourd’hui, du fait de la fragilité de ce papier de mauvaise qualité, qui s’est pourtant déversé chez les petites gens comme dans le monde lettré. Ce dernier n’était pas en reste face à ces livrets dont nous avons parlé précédemment 447. Ce ne sont néanmoins que treize à dix-neuf pour cent de ces parutions qui étaient destinées à la jeunesse. En réalité, comme l’explique si bien Christine Boutevin dans l’article sur la littérature de colportage du Dictionnaire de la littérature de jeunesse, « la plupart des textes considérés aujourd’hui comme des classiques de la littérature de jeunesse ont été largement diffusés par la littérature de colportage, sous une forme tronquée, abrégée, adaptée, résumée. La simplification et la réduction de récits complexes et écrits originellement pour des adultes, comme Les Contes de Perrault, Les Voyages de Gulliver ou Robinson Crusoe, qui figuraient parmi les grands succès de l’époque, ont permis aux enfants de s’approprier les schémas et les types de personnages d’une littérature devenue progressivement la leur » 448. Les contes bleus tirés de Perrault, outre les trois contes de princesses, sont Barbe bleue et Le Chat botté, qui ont marqué les mémoires, et dont on retrouve le plus de traces. Les notices trouvées ne correspondent pour le XVIIe siècle qu’aux contes officiels, parus dans le Mercure Galant, ou chez les imprimeurs-libraires JeanBaptiste Coignard et Claude Barbin. Le premier est l’imprimeur officiel de l’Académie française et du roi. Bien que Jean-Baptiste père décède en 1689, son fonds est réutilisé par son fils et sa veuve, ce qui induit une certaine confusion. C’est bien le fils qui publiera quatre éditions de Griselidis. Nouvelle. Avec le conte de Peau d’asne et celuy des Souhaits ridicules, en in-12 entre 1694 et 1695. Cependant, la première édition de cet ensemble est introuvable. Quant à Claude Barbin (1618-1698), il est l’imprimeur-libraire favori de la cour. Molière, François de la Rochefoucauld, la comtesse de La Fayette ainsi que Jean de la Fontaine font sa grande renommée. Il publie au moins deux éditions des contes en prose, réunis 446 BOUTEVIN, Christine, art. « Colportage (littérature de), Dictionnaire de la littérature de jeunesse, à l’usage des professeurs des écoles, Paris, éd. Vuibert, 2008, p. 67-68. 447 448
Sources italiennes, p. 63. Ibidem.
BERCEGEAY Marie-Sophie | Diplôme national de master | Mémoire de M1 | juin 2015 Droits d’auteur réservés.
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