Histoire des éditions du recueil
Durant le laps de temps où les Oudot et les Garnier ont été en compétition, les exemplaires de la littérature de colportage ont été sans cesse copiés et réédités par les maisons rivales. Alors que les Oudot se spécialisent dans la Bibliothèque bleue et les almanachs, les Garnier quant à eux se tournent vers le livre religieux, tout en copiant les petits livrets à couverture bleue de leurs adversaires. Malgré la présence des Contes de Perrault dans le catalogue des Oudot, dont le succès est total, les limitations de la littérature de colportage ont raison de cette célèbre famille dont les presses viennent augmenter les capacités de l’entreprise Garnier.
L’éditeur chrétien Wentzel Jean-Frédéric Wentzel naît quant à lui à Wissembourg le 15 octobre 1807. Il appartient à une famille de petits commerçants et artisans de langue allemande. Il quitte le nid familial composé de ses deux parents protestants et de ses six frères et sœurs pour apprendre la reliure à Paris. À son retour dans sa ville natale, la concurrence est rude. Il demande alors des brevets auprès du Conseil de la librairie pour exercer le métier d’imprimeur-libraire, qu’il obtient le 6 mars 1832, soit un an après son mariage avec Marie-Sophie Esser. L’année suivante, sa mère lui lègue sa maison, dans laquelle il installe son commerce. Il se démène par la suite pour acquérir les brevets de lithographe et d’imprimeur de lettres, nécessaires à l’impression d’images légendées. Il les obtient respectivement en Figure 30 : Photographie de 1835 et 1840 malgré les manœuvres de la famille Bock, Jean-Frédéric Wentzel. imprimeurs concurrents. Il devient dès lors un créateur d’images. Cependant, selon l’auteur de L’imagerie Wentzel de Wissembourg au XIXe siècle, « Wentzel n’est à aucun moment « inventeur ». Il entend profiter habilement […] d’une technique nouvelle, la lithographie, qui remplace le bois gravé et permet une production de masse, avec une impression de fini et de finesse supérieure au bois gravé. Sans compter que la solidité de la pierre permet de multiples tirages » 496. Son entreprise devient rapidement importante et emploie près de cinquante employés pour un chiffre d’affaires de soixante mille francs entre 1856 et 1870 (contre deux cent mille francs pour l’imagerie Pellerin d’Epinal). L’imprimerie embauche de nombreux créateurs d’images, reproducteurs et coloristes. Ses artistes attitrés sont Lix, Bitsch et Bartsch. Il fait également appel à Dévéria de façon occasionnelle, qui illustre aussi les Contes des fées 497 de l’éditeur V. Lecou avec Tony Johannot, Célestin Nanteuil, Gigoux et bien d’autres. À l’époque, le copiage entre les imprimeurs est fréquent, ce qui explique que l’on retrouve chez Wentzel des images de Charles Pinot et d’autres éditeurs. Entre 1838 et 1850, il y a en effet plus de cent trente centres de productions lithographiques en France, sans compter Paris. Jusqu’en 1855, la production de l’imagerie de Wentzel est faible : moins de cent images par an. Elle augmente ensuite progressivement 496 LERCH, Dominique, Imagerie et société, L’imagerie Wentzel de Wissembourg au XIX e siècle, Strasbourg, éd. Librairie Istra, coll. Publications de la société savante d’Alsace et des Régions de l’Est, série Grandes publications, tome XXI, 1982, p. 29.
497 PERRAULT, Charles, Les contes des fées / par Charles Perrault, illustrés de 150 gravures par Johannot, Devéria, Thomas, Célestin, Nanteuil, J.C. Demerville, Gigoux, Paris, éd. V. Lecou, ill. T. Johannot, A. Devéria, et alii, in8, 1851, 143 p., cf. annexe 2.
BERCEGEAY Marie-Sophie | Diplôme national de master | Mémoire de M1 | juin 2015 Droits d’auteur réservés.
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