Histoires, ou Contes du temps passé, Charles Perrault - Mémoire de master de Marie-Sophie Bercegeay

Page 34

Le conte

Les fées Bien que les fées ne soient pas toujours présentes dans les contes de fées (exemple du Chat Botté 124), elles n’en restent pas moins, et ce particulièrement pour les premiers conteurs, des éléments de narration incontournables. Pour Georges Sand, la question est bien « de savoir s’il y en a ou s’il n’y en a pas » 125. Elles sont également les témoins privilégiés de l’interaction entre une culture savante et une culture populaire. Le terme “fées” est d’origine populaire. Il en vient à « désigner tous les êtres fantastiques qui échappent au merveilleux chrétien » 126. Il est générique et regroupe tous les êtres invisibles aux hommes et désignés comme “le petit peuple” (comprenant fées, elfes, lutin, changelins, trolls, gnomes, etc.), habitant dans le royaume de Féérie (ou Faërie). Ce dernier est souvent considéré comme un monde parallèle au nôtre, visible par certains mortels choisis, ou lors de fêtes païennes, dans certains lieux de cultes. Avec l’avancée du christianisme, l’adoration des déesses-mères gauloises et des druidesses, associées au peuple celte, ne disparaît pas. Bien que diabolisées par l’Église, les fées ont un rôle prédominant au sein du folklore comme au sein de ces récits. Elles personnifient en effet le merveilleux, de par leur seul qualificatif. Fata, en latin, fait référence au destin, mais désigne également les Parques ou Moires de la mythologie gréco-romaine, divinités infernales. « Semblables à leurs sœurs d’ombre, elles croisent sur les berceaux les fils du malheur et du bonheur, des épreuves et des fortunes, immobilisant l’aventure à sa source » 127. À « ces femmes, le peuple leur donna le nom de magiciennes, de fées, de sorcières ; mais il les désigna spécialement par le nom de fata, sous lequel ses ancêtres avaient honoré les parques identifiées aux déesses-mères, par celui de fata, qui ne refermait rien de plus, au reste, à ses yeux, que l’idée d’enchantement. De fate, on avait fait faé, fée, féérie, […] » 128. Ce culte est associé et confondu avec celui des divinités champêtres locales, tels que les nymphes, sylvains, lutins ou korrigans 129. Ces lutins, ou sotret 130 vivent généralement dans des grottes (dans les Vosges principalement). Ces petits êtres basanés aux cheveux longs réparent des objets contre de la nourriture. Ce sont des divinités du foyer, très espiègles, qui possèdent le pouvoir de métamorphose. En 442, le concile d’Arles interdit d’adorer les arbres, fontaines ou pierres, places des croyances envers ces créatures. Néanmoins, « les dieux du passé n’avaient point été totalement oubliés, mais les hommes, les héros du même temps ne l’avaient pas été davantage. En devenant chrétiens, les Celtes n’avaient point répudié d’un coup toutes leurs traditions 124

Op. cit.

125 PERROT, Jean, Tricentenaire Charles Perrault. Les grands contes du XVII e siècle et leur fortune littéraire, op. cit., p. 273.

126 GALLAIS, Pierre, « Les fées seraient-elles nées au XIIe siècle ? (A propos d’un ouvrage récent) », dans Cahier de civilisation médiévale, 29 e année, n° 116, oct.-déc., p. 358. 127

Idem, p. 241.

129

« En Bretagne, les fées sont appelées korrigans. », idem, p. 37.

128 MAURY, Alfred, Les fées du Moyen-Âge, Recherches sur leur origine, leur histoire et leurs attributs, pour servir à la connaissance de la mythologie gauloise, Paris, éd. Librairie philosophique de Ladrange, 1843, p. 24. 130

Plusieurs orthographes possibles : sottai, sotê, sotré, sotret, souttré, soltrait.

BERCEGEAY Marie-Sophie | Diplôme national de master | Mémoire de M1 | juin 2015 Droits d’auteur réservés.

- 34 -


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook

Articles inside

TABLE DES ANNEXES

1min
pages 180-182

BIBLIOGRAPHIE

7min
pages 174-179

SOURCES

15min
pages 166-173

CONCLUSION

5min
pages 162-165

Un être torturé

4min
pages 159-161

Une vie d’artiste consciencieux, entre succès et échecs

10min
pages 155-158

Les techniques et collaborateurs

5min
pages 149-151

L’ensemble éditorial

2min
page 152

Rôle et importance des illustrations

28min
pages 133-147

L’éditeur chrétien Wentzel

4min
pages 120-121

Les trois grands éditeurs qui ont perduré

13min
pages 126-130

Un éditeur pour les enfants : Pierre-Jules Hetzel

11min
pages 122-125

Un projet pédagogique

8min
pages 112-114

Des éditeurs répandus sur le territoire

2min
pages 115-116

Le renouveau des éditions au XIXe siècle

18min
pages 104-111

Les éditions populaires

11min
pages 100-103

Brève description des contes

27min
pages 86-95

Moralités

2min
page 85

Composition de l’ouvrage et réception

2min
page 82

La Querelle de paternité

5min
pages 80-81

Sources italiennes

2min
page 72

La Bibliothèque bleue et les récits de colportage

11min
pages 73-76

Suites et fin de la Querelle

25min
pages 61-70

La Querelle en France

10min
pages 57-60

Les précurseurs

5min
pages 55-56

La Querelle des Anciens et des Modernes

5min
pages 53-54

Réalisations

10min
pages 49-52

Charles : commis du surintendant

8min
pages 46-48

Les fées

19min
pages 34-41

Études

3min
page 43

Vie privée

2min
page 44

Conteurs et conteuses

18min
pages 23-29

Bref historique du conte

5min
pages 21-22

Une classification conflictuelle

2min
page 19

SIGLES ET ABREVIATIONS

0
pages 12-13

INTRODUCTION

6min
pages 14-16
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.