Contes de ma mère l’Oye
l’imprimeur libraire contrefacteur intègre le conte dans la première partie du tome cinq de son Recueil 380. La version officielle des Contes de Perrault de 1697 a un tel succès que l’œuvre est réimprimée à de nombreuses reprises. L’éditeur de La Haye reprend les contes en prose et les inclut dans la quatrième partie du tome cinq 381.
La Querelle de paternité Au sujet de la première édition de Claude Barbin, qui ne comporte donc que les contes en prose (les trois contes en vers étant considérés par leur auteur « comme une œuvre distincte et complémentaire des contes en proses » 382), se pose la question de la véritable paternité de l’œuvre. En effet, le recueil est signé Pierre Darmancour, du nom du domaine Armancour acheté par Charles à son troisième fils, ou en référence à un calembour : « des Armes en cour ». Pierre Perrault, naît le 21 mars 1678 et effectue une carrière dans l’armée, en tant que lieutenant dans le régiment du Dauphin. Selon l’hypothèse la plus probable, ce dernier aurait recueilli quelques contes de fées lors de veillées populaires ou auprès de ses nourrices. Le jeune homme est alors âgé de seize ou dix-sept ans lorsque son père apprend l’existence de ces cahiers. Pour Charles Deulin, les choses se sont déroulées de la manière suivante : « Il est aisé de se figurer comment les choses se sont passées. Perrault habitait, nous l’avons dit, sa maison du faubourg Saint-Jacques, à portée des collèges, et s’y occupait fort de l’éducation de ses enfants. Un jour, il donna à l’un deux, comme thème de narration, un des contes que sans doute il avait l’intention de mettre en vers. C’était un petit bonhomme d’une dizaine d’année, doué d’une excellente mémoire et de beaucoup d’esprit naturel. Il tenait de son père l’amour des contes et il se rappelait les tournures naïves que sa nourrice employait en les disant. Il les reproduisit avec un tel bonheur que son père fut frappé de ce style ingénu qui ne devait rien à l’art » 383. Cependant, la critique littéraire actuelle, tout comme les contemporains de Charles s’opposent à la vision d’un enfant comme seul écrivain de ces contes. L’œuvre est en effet fort complexe et difficilement réalisable par un jeune enfant ou un adolescent. Celui-ci a probablement collaboré à l’écriture des contes en prose, en indiquant « le ton et l’allure qui convenaient, le père n’a eu ensuite qu’à arranger les choses et à les mettre, comme on dit, sur leurs pieds » 384. « En ce qui concerne Perrault, comme on sait, s’il n’a pas signé le recueil fameux dont le privilège, pour la publication, a été accordé à Pierre Darmancour, son fils, personne ne semble avoir douté de sa “paternité”, dès les premiers commentaires critiques. Et l’usage a consacré jusqu’à nos jours, l’expression “Contes de Perrault”, sans s’arrêter à la non paternité des sources. » 385
380 [PERRAULT, Charles], « La Belle au bois dormant », dans Recueil de pièces curieuses et nouvelles, tant en prose qu’en vers, t. V, part. 1, La Haye, éd. A. Moetjens, in-12, 1696.
381 [PERRAULT, Charles], Recueil de pièces curieuses et nouvelles, tant en prose qu’en vers, t. V, part. 4, La Haye, éd. A. Moetjens, in-12, 1697. 382
SERMAIN, Jean-Paul, Du Classicisme aux Lumières, op. cit., p. 227.
384
Idem, p. 27.
383
385
DEULIN, Charles, Les contes de ma mère l’Oye, avant Perrault, op. cit., p. 23. PERROT, Jean, Tricentenaire Charles Perrault, op. cit., p. 206.
BERCEGEAY Marie-Sophie | Diplôme national de master | Mémoire de M1 | juin 2015 Droits d’auteur réservés.
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