Paperjam octobre 2021

Page 94

5 Paroles d‘exportateurs

Les Moulins de Kleinbettingen sont une affaire familiale comptant 75 salariĂ©s et rĂ©alisant un chiffre d’affaires annuel de 55 millions d’euros, dont 80 % proviennent d’activitĂ©s d’exportation. Jean Muller, son directeur, Ă©voque la maniĂšre dont son entre­ prise vit ce phĂ©nomĂšne.

« Plus on veut aller loin, plus il faut innover » chĂ©s artisanaux ou industriels, nous avons Ă©galement des produits retail Ă  destination des supermarchĂ©s.

En termes de ressources humaines, quelle est la part de votre personnel directement impliquĂ© dans les activitĂ©s d’exportation ? Pour la vente des produits exportĂ©s, nous avons une Ă©quipe de six personnes, marketing inclus. Pour un effectif global de 75 personnes. On associe souvent exportation et innovation. Ressentez-vous cela ? Absolument. Plus on veut aller loin, plus la concurrence est rude, et plus il faut innover et ĂȘtre crĂ©atif pour ĂȘtre compĂ©titif. Par exemple, les meuniers Ă©trangers de notre taille ont souvent une gamme limitĂ©e de produits qu’ils vendent dans de trĂšs gros volumes Ă  beaucoup de clients. Nous sommes diffĂ©rents. Nous avons quasiment une farine par client car ils ont tous des besoins trĂšs spĂ©cifiques, et nous dĂ©veloppons avec chacun la farine qui lui convient. Peu de meuniers de notre taille font cela. Ce qui nous distingue de la concurrence. Un autre exemple, c’est l’innovation en retail. Il y a de nombreux meuniers dans chaque pays et un acteur local sera beaucoup plus crĂ©dible pour vendre sur son marchĂ© domestique. Mais nous avons une farine innovante qui est trĂšs fluide et trĂšs bonne pour les applications en cuisine, et nous avons combinĂ© ça avec un packaging novateur. Ce qui nous a ouvert de nouveaux marchĂ©s.

Comment en ĂȘtes-vous arrivĂ©s Ă  prendre pied aux États-Unis ? C’est une histoire assez drĂŽle. Un client luxembourgeois voulait lancer un food truck dĂ©diĂ© aux crĂȘpes et Ă©tait intĂ©ressĂ© par notre mix « crĂȘpes ». Il nous a demandĂ© si nous Ă©tions prĂȘts Ă  le sponsoriser en mettant notre logo sur son camion. Comment expliquer que 80 % de votre L’idĂ©e nous a sĂ©duits. Nous nous sommes ensuite production parte Ă  l’exportation ? La raison principale est qu’une grande partie cĂŽtoyĂ©s de nombreux mois. Il nous a toujours des produits que nous produisons sont trĂšs peu dit que son rĂȘve Ă©tait d’aller aux États-Unis. Et consommĂ©s au Luxembourg. Par exemple, plus il Ă©tait sĂ»r que nos produits mix « crĂȘpes », mix de la moitiĂ© de notre activitĂ© concerne la pro- « gaufres » et mix « pancakes » auraient du sucduction de semoule Ă  partir de blĂ© dur, le pro- cĂšs sur ce marchĂ©. Nous avons dit banco, finanduit de base pour faire des pĂątes, des lasagnes cĂ© son voyage et installĂ© une sociĂ©tĂ© lĂ -bas pour et du couscous. Et il y a trĂšs peu, pour ne pas voir ce que cela pouvait donner. C’est comme dire aucun producteur de pĂątes, de lasagnes et cela que ça a commencĂ©. de couscous au Luxembourg. Donc, forcĂ©ment, C’était un peu un effet d’aubaine... nous exportons. C’est la mĂȘme chose pour la farine. Une Tout Ă  fait. Ce n’était pas du tout stratĂ©giquebonne partie de cette production est vendue ment planifiĂ©, c’était juste une opportunitĂ©. Nous aux artisans boulangers luxembourgeois, mais nous sommes dit : « Oui, des produits de bonne Vous avez donc dĂ©veloppĂ© toute une Ă©galement Ă  des producteurs de pizzas, de bis- qualitĂ©, faits maison et rĂ©pondant aux normes gamme de produits pour l’exportation. cuits. Mais cela ne suffit pas Ă  Ă©couler toute europĂ©ennes, c’est-Ă -dire sans OGM et sans addi- Existe-t-il des produits qui ne sont destinĂ©s notre production. Beaucoup d’entreprises tifs, cela peut intĂ©resser le marchĂ© amĂ©ricain. » qu’à l’exportation et rĂ©pondant Ă  des luxembourgeoises, dĂšs qu’elles atteignent une Nous avons fait quelques sondages et nous avons besoins bien prĂ©cis ? certaine taille, n’ont pas d’autre choix que eu des Ă©chos positifs. Nous nous sommes lan- Oui. Étant donnĂ© que, dans l’industrie et dans d’exporter Ă  cause des dimensions du marchĂ© cĂ©s fin 2018 et, aujourd’hui, notre objectif aux l’artisanat, nous faisons beaucoup de produits luxembourgeois. États-Unis est d’atteindre un million de dollars sur mesure, ce sont des produits qui, sans l’exde chiffre d’affaires, ce qui serait dĂ©jĂ  une petite portation, n’existeraient pas. Par exemple, le mix Comment ciblez-vous les marchĂ©s rĂ©ussite. Ce n’est pas encore le grand succĂšs, « crĂȘpes » et le mix « gaufres », vendus en Europe et les produits que vous allez exporter ? mais un million de dollars sur des produits retail, et au Luxembourg, ont Ă©tĂ© adaptĂ©s pour le marLe transport est la donnĂ©e dĂ©terminante. La cela fait beaucoup de produits vendus et consom- chĂ© amĂ©ricain. Ce sont des produits qui n’y semoule de blĂ© dur et la farine restent des pro- mĂ©s rĂ©guliĂšrement par les AmĂ©ricains. existaient pas. C’est cela l’originalitĂ© que l’on duits de base, et donc le coĂ»t du transport compte veut apporter. beaucoup dans le calcul de la marge. C’est pour- Mis Ă  part ce cas particulier, comment quoi nous avons dĂ©fini un rayon d’action. En prospectez-vous vos marchĂ©s cibles ? Que vous a apportĂ© le dĂ©veloppement farine, on peut aller jusqu’à 200-250 kilomĂštres Pour tout ce qui est marchĂ© artisanal et indus- de vos activitĂ©s d’exportation ? autour du moulin. Et en semoule de blĂ© dur, triel, nous pensons en avoir une bonne connais- Cela nous a amenĂ©s Ă  devoir constamment nous notre marchĂ© principal, jusqu’à 400 kilomĂštres. sance. Nous participons Ă  de nombreuses foires, challenger. À l’exportation, on a toujours un On fait Ă©galement un peu d’exportation dans nous faisons des screenings et nous analysons nouveau client avec une nouvelle demande qui les pays scandinaves. Mais les pays limitrophes la concurrence. Et, pour ce qui relĂšve du marchĂ© nous met au dĂ©fi au niveau commercial, sur le reprĂ©sentent 90 % de notre activitĂ©. retail, sauf pour les marchĂ©s limitrophes, nous plan de la production ou encore de la logistique. Il faut ajouter que si le gros de l’activitĂ© est travaillons avec des distributeurs. Nous essayons Et donc, cela nous force Ă  nous rĂ©inventer et rĂ©alisĂ© avec la vente en vrac – ce sont des de trouver, dans les pays europĂ©ens, les princi- Ă  toujours ĂȘtre Ă  l’écoute du marchĂ©. camions de 25 tonnes qui partent d’ici ou des paux distributeurs pour nos gammes de produits sacs de 25 kilos sur des palettes –, pour des mar- et nous les contactons. Auteur MARC FASSONE

94

OCTOBRE 2021


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook

Articles inside

La liste

8min
pages 136-140

MA COLLECTION

3min
pages 128-131

MON STYLE

2min
pages 126-127

MON ARGENT

3min
pages 124-125

MA MAISON

1min
pages 122-123

PAROLES D’EXPORTATEURS

5min
pages 94-95

Portfolio

4min
pages 102-113

TOILE DE FONDS

13min
pages 82-85

PAROLES D’EXPORTATEURS

5min
pages 88-89

SPUERKEESS

4min
pages 78-79

JEAN-LOUIS ZEIEN

2min
pages 76-77

CHRISTOPHE SCHILTZ

14min
pages 70-75

CHRISTIAN MOSAR

14min
pages 54-59

BERYL KOLTZ

14min
pages 64-69

FRÉDÉRIC GILLEN

11min
pages 60-63

PHILIPPE SEYLL

13min
pages 44-49

LAZARD FUND MANAGERS

5min
pages 36-37

FLORIAN CRAEN

16min
pages 50-53

SAM TANSON

24min
pages 26-35

PLACEFINANCIÈRE

1min
pages 18-19

GUY CASTEGNARO

3min
pages 16-17

DEGROOF PETERCAM LUXEMBOURG

3min
pages 22-23

SINOR CHHOR

3min
pages 20-21

NATHALIE OBERWEIS

2min
pages 8-9

ENTREPRISES

2min
pages 14-15

GILLES BAUM

3min
pages 12-13

POLITIQUE

1min
pages 10-11
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.