Commerce
La chaussure se taille la part du lion
Cela fait bien longtemps que les équipementiers sportifs ont senti que le développement du running était synonyme de filon à haut potentiel commercial. Dans les magasins spécialisés ou généralistes, la gamme des produits ne cesse de prendre de la place. Avec un produit phare : la chaussure de course.
Tous les spécialistes de la course à pied vous le diront: les chaussures de running se font de plus en plus légères. Tous les spécialistes du marketing vous le diront aussi : le business autour de ce sport pèse pour sa part de plus en plus lourd. Plus de 8,2 millions de paires vendues chaque année en France Certains chiffres collectés – peu accessibles pour le seul marché luxembourgeois, trop petit sans doute – sont éloquents. En France, le marché de la course à pied (chaussures, accessoires, textile…) s’élevait à 850 millions d’euros, a calculé en 2021 l’Union Sport & Cycle, qui réunit plus de 1.200 entreprises de la filière du sport, des loisirs, du cycle et de la mobilité active. C’est deux fois plus que le football ! Chaque année, plus de 8,2 millions de paires de chaussures de course à pied sont vendues dans l’Hexagone. Dans son budget annuel moyen (564 euros pour un homme, 388 pour une femme) englobant tous les produits et les inscriptions aux courses, le coureur prévoit 171 euros pour être bien chaussé. Du pain béni pour les firmes commerciales 70
JUIN 2022
puisque, cerise sur le gâteau, les achats de chaussures de running semblent concerner toutes les tranches d’âge – 7 % des produits étant par exemple vendus à des moins de 14 ans – et sont parfaitement équilibrés entre les sexes. De plus, ces chaussures de course ne séduisent pas que les coureurs : une paire sur cinq est utilisée pour le loisir ou pour aller
12,7 MILLIONS
En 2020, la plateforme communautaire Running Heroes et l’Union Sport & Cycle estimaient à 12,7 millions le nombre de pratiquants du running en France ayant entre 18 et 75 ans.
t ravailler. Enfin, le marché est très dynamique. Certes, 2020 a mis en lumière une baisse des ventes à hauteur de 4 %, surtout due à la fermeture des magasins et compensée par un bond des ventes sur internet. Mais la reprise a été immédiate, directement liée à un appétit de grand air après le confinement. La France fait-elle figure d’exception? Pas du tout. L’institut d’études de marché allemand Dietmar Brandl a ainsi calculé que le running représentait désormais 7% du puissant marché du sport allemand. Mais aussi que les chaussures de course devenaient de plus en plus des objets lifestyle: outre-Rhin, en 2019, cinq des dix chaussures de sport les plus vendues étaient des chaussures de course. Peters Sports a pris les devants La chaussure de running a-t-elle aussi le vent en poupe au Luxembourg? Pour le savoir, il faut sortir du centre de Luxembourg-ville et prendre la direction d’Howald, pour arriver à la rue des Joncs. Ce lacet en bordure de l’A1 forme une sorte de mini-zoning dans un plus grand zoning, avec des bâtiments identiques les uns aux autres, fonctionnels à défaut d’être esthétiques. Ce n’est pas vraiment l’endroit où l’on s’attend à trouver un temple. Pourtant, c’est bien là que se situe celui des coureurs à pied: Peters Sports. Créé en 1990, le magasin a d’abord accueilli les clients à Strassen, puis Merl, avant de rejoindre le zoning Ronnebesch en 1997. Le parti pris a été radical dès le départ, avec la volonté de se spécialiser dans les produits destinés aux coureurs à pied et le matériel de natation pour les triathlètes. Nico Peters, ancien kayakiste de niveau international et fondateur du magasin, aime d’ailleurs à rappeler « que nous sommes les seuls à être aussi pointus au Luxembourg». La comparaison avec des magasins multisports qu’il respecte «mais qui ne font pas la même chose que nous » le mettra assez logiquement de méchante humeur. Son pari de l’hyperspécialisation s’est en tout cas avéré payant. L’explication tient en plusieurs points. Tout d’abord, la qualité du conseil. «Tous les vendeurs sont des coureurs à pied ou des sportifs, qui connaissent donc parfaitement les produits», explique Nico Peters. Des sportifs qui ont, pour la plupart, flirté avec le très haut niveau. Ensuite, la qualité du service. Peters Sports a par exemple été le premier à proposer une analyse du pied afin de déterminer le choix de ses chaussures. Enfin, la gamme des produits est très large, permettant un choix quasi sur mesure en fonction du niveau et des besoins du client-coureur. «La gamme s’est en effet élargie généreusement au fil du temps. Mais une chose n’a pas changé: le coureur ‘débutant’ arrive chez nous avec la volonté de mettre du budget dans le textile – short, t-shirt... – avant de se rendre compte que ce sont les chaussures qui sont les plus importantes », explique Arno Kuster, employé chez Peters