Paperjam Juin 2022

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Enjeux Running

Axe de communication

Ce qui fait courir les marques

Plongée dans le monde du sponsoring qui entoure le running avec Gary Tribou, professeur en marketing du sport à l’Université de Strasbourg, auteur de plu­sieurs ouvrages de référence et consultant pour des marques de sport. Pourquoi sponsoriser le running ? « La question du sponsoring dans le running est vraiment pertinente, dans la mesure où l’on y retrouve peu de sponsorings dit ‘classiques’, c’est-à-dire où l’on mise sur la visibilité liée à l’événement », lance Gary Tribou, professeur en marketing du sport à l’Université de ­Strasbourg. Ce phénomène s’explique par des audiences loin d’être comparables aux grands sports collectifs médiatisés. Et ce même si 300.000 personnes sont parfois massées le long du parcours. De fait, la course à pied est un domaine où l’on voit davantage de sponsorings dits « de spécialistes ». « Lorsqu’un équipementier comme Asics associe son nom au marathon de Paris, il le fait parce qu’il y trouve une rentabilité, illustre celui qui a été consultant pour des marques comme Adidas ou Puma. Sa cible, ce sont les coureurs à pied. Ceux qui participent, évidemment. Mais il prend également le pari que le public sur le bord de la route est ­composé d’autres coureurs, qui sont donc des consommateurs potentiels. » Mais, à côté de ces «spécialistes», des enseignes davantage généralistes se sont tout de même également tournées vers le running. Donnant même, pour certaines, leur nom à des épreuves, à l’image d’ING pour le marathon de Luxembourg, Schneider Electric pour celui de Paris ou encore TCS – une des plus grandes sociétés informatiques au monde – à New York. «En matière de sponsoring, la règle d’or est: on n’in78

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vestit que là où on va retrouver sa cible de consommateurs.» Or, la course à pied draine une population qui s’est t­ ellement élargie ces dernières années – en raison notamment d’une féminisation et d’une démocratisation accrues (en France, on l’évalue à 16 millions de personnes) – que beaucoup font le pari d’y retrouver leur cible. « Tout est une question d’impact : celui que ce sponsoring peut générer pour vous», explique Gary Tribou. Avant d’avancer un exemple : « Tout le monde a en tête cette grande marque de produits de charcuterie présente sur le Tour de France. Elle n’est pas «légitime» dans un monde comme celui du vélo. Mais il se trouve qu’à la sortie de chaque Tour, elle explose son chiffre d’affaires pendant 15 jours ! Pour elle, il s’agit d’un simple calcul afin de voir quel bénéfice financier elle en retire. Et le sponsoring, aujourd’hui, c’est de plus en plus ça : un simple calcul. Et de moins en moins un bénéfice symbolique lié à l’image. Cette dernière étant d’ailleurs souvent trop compliquée à calculer… »

Le plogging, ce croisement entre jogging et écologie Connaissez-vous le plogging, cette acti­vité d’origine suédoise, mixant course à pied et écologie, dont le nom est né de la combinaison du verbe « plocka upp » (« ramasser » en suédois) et du mot « jogging » (« course à pied » en anglais) ? Il s’agit d’une activité combinant donc running et ramassage de déchets, mise sur pied pour la première fois en 2016 par un certain Erik Ahlström, excédé par l’invasion du plastique dans la nature en Suède. Six ans plus tard, cette discipline est pratiquée dans le monde entier mais peine tout de même un peu à véritablement percer auprès du grand public. Comme c’est le cas au Luxembourg. « En janvier, nous avons voulu relancer l’organisation d’un plogging mensuel, mais cela n’a pas vraiment pris », explique Didier Picard, créateur de Pickitup (www. pickitup.lu), une asbl pour la pré­servation de l’environnement qui organise ce type d’événement. « Par contre, en entreprise, cela a l’air de bien fonctionner. Nous orga­nisons des ploggings en guise de team building et les retours sont positifs. »

Quels retours peut-on espérer ? «Si vous êtes une marque dite ‘spécialiste’, à l’image d’un équipementier, par exemple, dont les articles sont consommés par les coureurs, vous faites référence comme Sponsoring sportif ou ce qu’on appelle de la ‘preuve-produit’», précise Les ­Marchés du sport. Néanmoins, selon ce le professeur en marketing du sport. C ­ omprenez ­dernier, une simple règle de trois peut parfois que la présence de la marque en tant que spon- suffire à imaginer l’échelle à laquelle on se trouve. sor suggère que ses produits sont performants, «Vous prenez l’audience globale de la course à un message qui peut être amplifié par la parti- pied qui vous occupe et vous la comparez à celle cipation d’ambassadeurs de celle-ci. «Pour de d’un grand match de sport collectif dont les montelles entreprises, l’indicateur de réussite de votre tants sont, eux, connus. Le rapport des deux vous action est simple : il s’agira de la variation de donnera une idée du ticket d’entrée...» votre chiffre d’affaires futur.» L’audience étant ici calculée en fonction du Pour d’autres marques, les retours seront nombre de participants, de spectateurs et de plutôt liés à l’image que renvoie le partenariat. téléspectateurs. « À côté de ça, il y a aussi «Chez certaines, on sera même dans du ‘­marketing ­désormais la présence sur les réseaux sociaux. ­ eaucoup de mal à l’évaluer, mais elle est de disculpation’», avance celui qui a été consul- On a b tant pour de nombreuses entreprises mais aus- aujourd’hui ­essentielle, vu l’impact qu’elle ­possède si pour la Fédération française de t­ ennis. Il notamment sur les moins de 35 ans.» En moyenne, une entreprise dépense en pointe ici des sociétés n’ayant aucun lien avec le running mais qui s’y attachent afin de nour- sponsoring entre 2 et 10 % de son budget rir leur image avec les valeurs d’un sport consi- commu­nication. « Il existe des exceptions, des déré comme sain, relativement épargné par les entreprises qui montent à 25%, voire bien plus dérives du dopage, du racisme, etc. «Elles s’en encore pour une société comme Red Bull, ­précise servent pour laver leur image! On parle là d’en- Gary Tribou. L’image de l’événement entre treprises pharmaceutiques, agro­alimentaires – celles ­aussi en ligne de compte au moment de déteraccusées de favoriser l’obésité telles que des marques miner son investissement. » Pouvoir associer de fast-food, des limonadiers, etc. – ou même son nom à celui d’un marathon comme celui d’acteurs du secteur financier ayant connu des de New York, par exemple, constitue, en effet, soucis par le passé…» une vraie valeur ajoutée. Quels budgets sont dépensés ? «Les chiffres du sponsoring, c’est secret défense…», déclare, en souriant, l’auteur d’ouvrages de

Auteur JULIEN CARETTE


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