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OUTRE-MER
grandeur Nature
MARTINIQUE AUX AVANT-POSTES DE LA LUTTE CONTRE LES INVASIONS BIOLOGIQUES Dès le début de notre entretien, Jeanne de Reviers, chargée de mission « plantes exotiques envahissantes » au Conservatoire botanique national de Martinique, annonce clairement : « Les espèces exotiques envahissantes sont une des premières causes documentées de disparition d’espèces dans le monde
».
Selon l’IUCN, il s’agit en effet de l’une des principales causes d’érosion de la biodiversité. Jeanne de Reviers nous explique comment le Conservatoire botanique national de Martinique (CBNMq) lutte contre les espèces végétales exotiques envahissantes présentes sur l’île et se mobilise en faveur du développement des plantes indigènes. On parle de plantes exotiques envahissantes pour décrire des espèces étrangères à un territoire qui, en préemptant le milieu, nuisent à la biodiversité locale. « Lorsqu’elles sont importées au-delà de leur aire de répartition naturelle, ces espèces développent un avantage compétitif, menaçant alors la biodiversité indigène », résume Jeanne de Reviers. En Martinique, diverses plantes menacent en effet actuellement les espaces naturels. En tant que couvresol, la sonde ( Tradescantia spathacea ) notamment, particulièrement utilisée dans les aménagements paysagers, empêche la régénération de la forêt en impactant Acacia muricata et Cynophalla hastata, en danger d’extinction. Le tulipier du Gabon (Spathodea campanulata), très visible en milieu urbain ; le bien nommé cancer vert (Miconia calvescens) qui pousse sur les berges de certaines rivières et représente l’espèce la plus dangereuse pour les écosystèmes insulaires comme la Martinique ; et la langue de bellemère (Sansevieria trifasciata et Sansevieria hyacinthoides) font également partie des espèces végétales invasives les plus préoccupantes pour le territoire.
La chargée de mission Jeanne de Reviers. © Axelle Dorville
Ces plantes sont non seulement responsables de l’érosion de la biodiversité mais aussi du sol, précise Jeanne de Reviers, prenant l’exemple du bambou qui, en s’accumulant dans les cours d’eau, crée des embâcles à l’origine de retenues d’eau, qui vont alors grignoter les berges. Endiguer la prolifération de ces espèces, « en déconstruisant l’a priori selon lequel l’introduction de nouvelles espèces sur un territoire serait nécessairement bénéfique pour la biodiversité » est donc un enjeu majeur. Pour ce faire, Jeanne de Reviers, animatrice du groupe de travail « plantes exotiques envahissantes » en Martinique, s’attelle à fournir du conseil scientifique et technique aux acteurs impliqués dans la gestion de la flore : gestionnaires d’espaces naturels, collectivités et services de l’État, pépiniéristes, fleuristes, paysagistes. Améliorer les pratiques de gestion, optimiser la détection et l’intervention précoce pour lutter contre les espèces exotiques émergentes, mettre en place des actions de régulation et de destruction des espèces problématiques, et encourager l’émergence d’une filière locale de plantes indigènes sont autant d’actions mises en œuvre par le CBNMq pour préserver la flore autochtone et assurer la biodiversité nécessaire à la survie des écosystèmes. « Tout gestionnaire peut être amené à travailler dans la lutte contre les invasions biologiques », ajoute Jeanne de Reviers. « Nous voulons encourager tous les acteurs de la nature et des loisirs à s’impliquer sur ce sujet, et en particulier les professionnels du végétal auprès des particuliers. » Car l’évasion dans la nature des espèces plantées dans les jardins pour leur intérêt ornemental, constitue la principale source de création de populations d’espèces envahissantes en milieu naturel. Il convient de le rappeler : l’introduction dans le milieu naturel de végétaux exotiques est interdite depuis 2016 en France. Rédaction : Axelle Dorville