TFE Le centre-ville colonial de Casablanca : Enjeux, appropriation et prospective

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Le centre-ville colonial de Casablanca Enjeux, appropriation et prospective CHIKRI Salma Promoteur : CAVION Aurélie Co-promoteur : DEPREZ Anne

Travail de fin d’études présenté en vue de l’obtention du diplôme d’architecte - juin 2022


FACULTÉ D’ARCHITECTURE ET D’URBANISME

Le centre-ville colonial de Casablanca Enjeux, appropriation et prospective

Mémoire réalisé par : CHIKRI Salma Année académique : 2021-2022 Promoteur : Aurélie CAVION Co-promoteur : Anne Deprez Travail de fin d’études présenté en vue de l’obtention du diplôme d’architecte – juin 2022

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Page signalétique

Le centre-ville colonial de Casablanca, enjeux, appropriation et perspectives CHIKRI Salma Le 25/05/2022

Notation du texte écrit : Remarques : _____________________________________________________________________________________________________________ _____________________________________________________________________________________________________________ _____________________________________________________________________________________________________________ _____________________________________________________________________________________________________________ _____________________________________________________________________________________________________________ _____________________________________________________________________________________________________________ _____________________________________________________________________________________________________________ _____________________________________________________________________________________________________________ _____________________________________________________________________________________________________________ _____________________________________________________________________________________________________________ _____________________________________________________________________________________________________________ _____________________________________________________________________________________________________________ _____________________________________________________________________________________________________________ _____________________________________________________________________________________________________________ _____________________________________________________________________________________________________________ _____________________________________________________________________________________________________________

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Résumé

Au cœur historique de Casablanca, se trouve le centre-ville colonial connu par sa richesse architecturale et sa valeur symbolique. En effet, l’architecture du quartier est unique, elle raconte l’histoire de la ville à travers les styles architecturaux du XXe siècle avec une touche casablancaise. Cependant, l’architecture n’est pas la seule composante du paysage, le temps et l’usage ont laissé leurs marques. Aujourd’hui, en plus du délabrement des bâtiments, le centreville est devenu synonyme d’insécurité, d’insalubrité, de délinquance et la précarité fait fuir ses habitants. Ainsi, il a fallu étudier le site pour pouvoir comprendre cette situation. La méthodologie suivie pour l’analyse vise à inclure la dimension sociale de l’espace en s’intéressant à comment il est vécu et perçu. Tout d’abord, la conception du site est basée sur les tendances françaises de l’époque qui consistaient à organiser le bâti selon le tracé de l’espace public, créant ainsi des îlots fermés entourés de rues et organisés autour de la place des nations unies. Cette dernière est un espace de rencontre qui permet la liaison entre la médina et la nouvelle ville. Un siècle après, l’usage de cet espace a changé, les îlots sont devenus une niche d’extensions clandestines et le quartier s’est paupérisé ce qui a affecté son rapport avec la population. D’un côté, le quartier est aujourd’hui approprié par les classes inférieures ce qui déplaît aux Casablancais qui gardent en tête l’image romantique du centre-ville du siècle dernier. D’un autre côté, ce changement de cadre a permis au centre-ville de devenir un véritable espace de mixité sociale où les usagers se sentent libres et chez eux. Le site est alors devenu une source d’inspiration pour les artistes qui puisent dans sa complexité et de sa richesse symbolique. Dans une telle situation, il est difficile de choisir quelle approche appliquer pour sauver ce bijou urbain. Certains pensent que la gentrification est la solution pour retrouver son charme perdu, mais est-ce vraiment la solution adaptée ? Dans ce travail, il s’agit d’apprendre à connaître le terrain afin de déterminer les enjeux à prendre en compte dans l’élaboration d’un plan d’action. Ainsi, avant d’essayer d’embellir l’image du centre-ville, l’approche devrait prioriser sa dimension sociale qui est aujourd’hui la source de sa richesse.

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Remerciements

Aujourd’hui, j’ai la chance de vous présenter mon projet de fin d’étude, le signe de la fin d’une étape et du début d’une autre. Un passage qui ne peut être franchi qu’en apprenant à vivre avec un regard d’architecte. Pour ce, je tiens à remercier tout le corps professoral qui m’a appris à aimer l’architecture, je cite Mme El Mandjra, Mme Karibi, M. Kharmich le professeur Larbi Bouayad ainsi que Mme Deprez et Mme Cavion qui m’a accompagnée durant toute l’étude et m’a donnée les outils adaptés pour la redécouverte du terrain ainsi que la réalisation de ce travail. Je tiens aussi à remercier ma famille qui a cru en moi et m’a toujours encouragé à sortir de ma zone de confort. Je dédie ce travail à mon père qui a tellement sacrifié, à ma mère pour son amour et à mon frère pour son humour ainsi que mon oncle, ma tante et mes grands-parents. Aussi, je remercie mes amis qui ont fait de mes années d’études une belle aventure ainsi que Julien Crête et Anne-Charlotte Hambye pour m’avoir aidé à franchir cette étape avec tant d’amour et de générosité. Finalement, je tiens à remercier la ville de Casablanca où j’ai passé mon adolescence et qui est à l’origine de ma passion. Elle a toujours su m’inspirer, m’intriguer et m’emporter dans ses paysages qui ont marqué mon esprit.

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INTRODUCTION .............................................................................................................................................................................. 12 Méthodologie .............................................................................................................................................................................. 15 1.

LE TERRAIN D’ETUDE...........................................................................................................................................................20 1.1.

Mise en contexte ......................................................................................................................................................... 21

Délimitation du terrain d’étude ........................................................................................................................................... 24 1.2.

L’HISTOIRE EN BREF.................................................................................................................................................. 26

1.3.

VISITE GUIDEE ............................................................................................................................................................ 33

1.3.1. Le patrimoine habité, un musée à ciel ouvert ................................................................................................... 35 1.3.2.

Le patrimoine public et d’entreprise .............................................................................................................. 45

1.3.3.

Un patrimoine sans vocation .......................................................................................................................... 47

Le style art-déco ................................................................................................................................................................... 48 Le style néo-mauresque ....................................................................................................................................................... 51 Le style Moderne fonctionnel .............................................................................................................................................. 51 1.4.

2.

La situation actuelle ................................................................................................................................................... 53

1.4.1.

Le cas des immeubles d’habitation ................................................................................................................54

1.4.2.

Problématiques ................................................................................................................................................. 55

Analyse URBAINE ET SOCIALE........................................................................................................................................... 64 2.1.

Le centre-ville Conçu..................................................................................................................................................66

2.1.1.

Au fil du temps… ............................................................................................................................................. 67

2.1.2.

Typo-morphologie du centre-ville .................................................................................................................. 70

2.1.3.

L’habitat .............................................................................................................................................................. 76

2.1.4.

Comparaison avec le modèle précolonial ..................................................................................................... 77

2.2.

Le centre-ville vécu .................................................................................................................................................... 78

2.2.1.

Les groupes sociaux ......................................................................................................................................... 80

2.2.2.

Les activités du centre-ville ............................................................................................................................ 81

2.2.3.

L’appropriation du centre-ville ....................................................................................................................... 87 Page | 9


2.3.

2.3.1.

L’art et le centre-ville .......................................................................................................................................93

2.3.2.

Le centre-ville dans les médias ...................................................................................................................... 95

2.4.

3.

Le centre-ville perçu................................................................................................................................................... 92

Quel avenir pour le centre-ville ?.............................................................................................................................96

2.4.1.

Synthèse et interprétations ............................................................................................................................ 97

2.4.2.

Hypothèse ..........................................................................................................................................................99

Une renaissance en marche… ....................................................................................................................................... 102 3.1.

Patrimoine et tourisme ...................................................................................................................................... 103

3.2.

Urbanisme ............................................................................................................................................................. 110

3.3.

Vers une gentrification de Casablanca ? ........................................................................................................ 113

CONCLUSION ................................................................................................................................................................................ 118 Table des illustrations................................................................................................................................................................... 121 Bibliographie ................................................................................................................................................................................. 124 Références .................................................................................................................................................................................... 125 Annexes...........................................................................................................................................................................................127

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« L’architecture est le seul moyen dont nous disposions pour conserver vivant un lien avec un passé auquel nous sommes redevables de notre identité, et qui est constitutif de notre être. »1 (Choay. 2007, 108). Ce pouvoir de conservation est ce qu’on attribue aujourd’hui au patrimoine architectural. D’une part, la notion du patrimoine est définie comme étant un élément qui se transmet de génération en génération, un héritage2. D’une autre part, le mot « architectural » inclut tout ce que l’homme a pu bâtir comme édifice, partant de l’abri primitif au bâtiment contemporain le plus excentrique. L’architecture, inventée par nécessité est devenue au fil des années un moyen d’expression ; diverses civilisations ont essayé de se démarquer en perfectionnant leur savoir-faire architectural afin d’arriver à un résultat qui est à leur image et qui les représente au mieux. Ainsi, le patrimoine architectural permet à l’homme d’avoir une fenêtre sur l’histoire qu’il partage avec le reste de la société, une racine qui unie et procure une identité commune et, par conséquent, de la stabilité. Néanmoins, le patrimoine architectural ne se limite pas à ce portrait idéaliste. Il est possible de trouver certaines anomalies qui rendent la notion beaucoup plus complexe. C’est le cas du patrimoine colonial : certes, on y trouve le bâti et l’histoire, mais le lien avec le passé est différent. La société qui l’a construit n’est pas celle d’aujourd’hui. Si l’affirmation ci-dessus est à prendre à la lettre, ça voudrait dire que la présence des colons dans le passé est indispensable à l’identité actuelle des individus concernés. Une idée qui peut sembler improbable, même dérangeante, mais qui contient une partie de vérité qu’on ne peut pas nier, surtout dans le cas de notre terrain d’étude, le centre-ville colonial de Casablanca. En effet, Casablanca est une ville marocaine qui a existé bien avant l’arrivée des Français en 1907. Cependant, elle n’a retrouvé son identité actuelle qu’à partir du protectorat. Durant cette période, la ville mutera et deviendra une vraie métropole économique dont les œuvres architecturales apparaîtront sur des revues internationales et où les architectes se feront un plaisir d’expérimenter leurs théories, faisant de la ville « Le laboratoire à ciel ouvert » du XXe siècle. « Ce qui n’est pas permis à la mesure et au sol de Paris l’est au gigantesque et au roc de Casablanca. » Affirme le critique parisien Léandre Vaillat (Vaillat 1931, p. 6), une remarque qui convaincra plusieurs architectes et urbanistes de renommée tels que Henri Prost, Auguste Perret et bien d’autres (Cohen 2004, p. 10.). Ainsi, elle gagnera une notoriété qui s’étendra au-delà des frontières comme un symbole de modernité et de la culture urbaine, une image qui a marqué toute une génération. Les parents racontent, avec beaucoup de nostalgie, leurs balades dans les grandes avenues commerciales du centre-ville où les gens sont bien habillés et les terrasses sont pleines. La ville qui ne comptait que 20 000 habitants vers la fin du XIXe siècle (Casamémoire s.d.), en accueillera presque 3 millions

1 Idée mentionnée par l’écrivain de Pierres de Venise et citée par F, CHOAY dans son ouvrage : L’allégorie du patrimoine. Paris, Seuil, 2007,

p. 108 afin d’aborder la notion du passé et de l’histoire qui sont avant tout liés aux générations qui y appartenaient. 2 Ibid., p. 1. Page | 13


à la fin du siècle suivant (Meskine s.d.). L’arrivé des Français a alors certainement laissé une empreinte dans l’identité des Casablancais en affectant leur environnement et leur vécu ; le patrimoine colonial est là afin d’en témoigner. Après l’indépendance, les Français sont partis en laissant derrière eux la ville qu’ils ont construite. Par conséquent, les Casablancais se sont retrouvés face à une richesse architecturale qui est désormais la leur et dont le destin dépendra d’eux. C’est ainsi que la notion d’appropriation prendra toute son importance afin de définir la relation qu’entretiennent les Casablancais avec cet héritage. On ne peut alors aborder le sujet du patrimoine colonial sans s’attarder sur ce phénomène. Le dictionnaire Larousse défini le verbe s’approprier comme « faire sa propriété de quelque chose ou d’un bien » et selon Vincent Veschambre dans le dictionnaire de l’habitat et du logement, l’appropriation est l’ensemble des pratiques et des marquages qui font la qualité d’un lieu (Chaya 2019, P. 38.), c’est alors une notion observable sur le terrain, qui sera indispensable au raisonnement. Aujourd’hui, le patrimoine colonial du centre de Casablanca est menacé ; seulement 78,7 % des logements sont occupés et le risque de finir en ruine ne concerne pas que les lieux abandonnés ; 63 % des nouveaux habitants sont locataires et l’entretien reste la responsabilité des propriétaires (Haut-commissariat du plan s.d.). Le centre-ville a alors perdu son éclat pour devenir synonyme d’insalubrité et d’insécurité et a succombé sous l’effet de la paupérisation. Cette situation nécessite d’agir au plus vite, une simple restauration n’est pas une réponse durable. Il faudra aller plus loin dans la réflexion et proposer des solutions de réhabilitation découlant d’une analyse approfondie qui prend en compte la complexité du site tout en le considérant comme un espace social. On se trouve alors face à une question qui s’impose :

Comment l’usager pratique et s’approprie le centre-ville colonial de Casablanca et quel avenir peut-on aspirer pour celui-ci ?

La problématique de l’habitat colonial n’est pas nouvelle, elle a déjà été traitée dans d’autres contextes avec différentes approches. Quelques exemples sont cités dans l’ouvrage dirigé par Maria Gravari-Barbas, « Habiter le patrimoine : Enjeux, approches, vécu ». Dans ce dernier, deux solutions sont mises en avant : le maintien de la population actuelle ou la gentrification. Le choix entre les deux dépend du contexte de la ville et de l’image que le centre-ville représente pour les habitants. Ainsi, afin de répondre à la question, nous allons projeter les deux options sur notre terrain d’étude selon les résultats obtenus après l’analyse afin de proposer un début de solution.

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Méthodologie Page | 15


Tout d’abord, l’intérêt de ce sujet commence par le terrain, c’est un quartier plein de contradictions, rassemblant d’autant plus le génie architectural et urbanistique que le désordre. La nature intrigante de la situation appelle à une réflexion analytique qui permettra par la suite de trouver la racine de cette ambiguïté et de, potentiellement, choisir la meilleure approche à appliquer. Ainsi, il est naturel que ce travail suive une démarche empirico-inductive, définie comme suit : « La démarche inductive, aussi appelée approche empirico-inductive, est une méthode de travail qui part de faits, de données brutes réelles et observables, pour aller vers l’explication de celles-ci. À partir des phénomènes particuliers observés sur le terrain, le chercheur peut comprendre un phénomène général. On va du particulier au général. » (Claude 2020) Cette méthode sera mise en place en suivant le raisonnement : terrain, analyse, synthèse et interprétations.

Méthodes de l’étude empirique o Une observation documentée avec des photos et des enregistrements audios. La visite du site a permis à la fois de répondre à plusieurs questionnements et à en poser d’autres qui ne peuvent être traités sans passer à la deuxième méthode. o Des entretiens réalisés avec les habitants en faisant du « porte-à-porte ». Certains ont répondu au questionnaire complet tandis que d’autres ont préféré choisir les questions qui les intéressent. La conversation dépassait souvent les limites du formulaire afin de permettre à l’interlocuteur de s’exprimer librement et d’apporter de nouvelles perspectives à l’étude. o Un questionnaire numérique dont le but est d’élargir l’échelle de l’étude ; ce dernier vise toute personne pratiquant l’espace, qu’elle habite dans le quartier ou non, une démarche nécessaire pour comprendre l’influence du quartier et la manière dont il est perçu.

Etape 1 : Le terrain Le terrain sera traité comme étant un concept tridimensionnel, qui inclut l’espace, le temps et la population. Ainsi, des connaissances d’autres disciplines comme la sociologie ou la géographie seront aussi inclues dans le raisonnement de ce travail.

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Avant de plonger dans le terrain, il est indispensable de le présenter au lecteur en le remettant dans son contexte géographique et historique, une étape qui permettra de comprendre son origine et son évolution surtout dans le cas du centre-ville colonial, où l’histoire et l’identité sont indissociables. En suivant cette ligne de temps, on arrivera à l’état actuel du quartier, celui-ci sera détaillé à l’aide d’une visite guidée suivie d’un résumé des observations faites sur place. Cette partie permettra de dessiner le portrait complet du quartier avant de commencer une analyse approfondie.

Etape 2 : L’analyse Toujours dans l’optique d’approcher le terrain comme concept tridimensionnel, les données récoltées dans la première partie seront décortiquées selon le modèle d’Henri Lefebvre définissant l’espace comme conçu, vécu et perçu. Ainsi, l’analyse sera complète et les conclusions seront plus exactes. Les sorties d’analyse permettront de formuler une explication générale ; une compréhension du pourquoi et des différentes facettes de la situation actuelle, l’ingrédient indispensable pour formuler une hypothèse sur la direction que le quartier devrait prendre afin d’améliorer son état et d’atteindre son potentiel.

Etape 3 : Les explications et solutions

Etude du Terrain

Cette partie du travail aura pour but de critiquer la gestion actuelle du site en se basant sur les résultats de l’analyse et l’hypothèse.

Recherches documentaires Analyse

Hypothèse

Crtique

Conclusion

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Figure 1 : Dessin de Zineb Benjelloun, www. zineb-benjelloun.com, consulté le 23/05/2022 Page | 19


LE TERRAIN D’ETUDE

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1.1.

Mise en contexte Page | 21


En tant que la plus grande ville du Maroc et sa capitale économique, Casablanca compte aujourd’hui plus de 3 millions d’habitants grâce à sa puissance économique et son emplacement stratégique. Elle est située sur la côte atlantique sous les coordonnées 33°35 latitude nord et 7°25 longitude ouest. Sa côte qui s’étend sur 50 km est son point fort puisqu’elle abrite l’un des ports les plus actifs du pays. La ville est délimitée au Nord par l’océan, à l’est par les plateaux de Benslimane et au sud et l’ouest par les plaines fertiles de la Chaouia. Son climat est semiaride méditerranéen, mais elle profite de son littoral comme élément modérateur considérable.

Figure 2 : Carte de la population selon les régions (Haut-commissariat du plan s.d.)

Figure 3 : La région de Casablanca-Settat et ses communes, www.casablanca.ma, consulté le 02/05/2022

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Le pouvoir de Casablanca en chiffre

Figure 4 : Arrondissements de Casa Anfa, www.casablancacity.ma, consulté le 02/05/2022

La région de Casablanca-Settat détient 32,2 % du PIB du pays et 20 % de la population dont le taux de jeunesse atteint 65,5 %. Elle est aussi un carrefour à l’échelle nationale en assurant 40 % de la mobilité et 69% de l’échange international. (CRI s.d.) Néanmoins, Casablanca n’est pas une ville idéale, elle est aussi la ville la plus dangereuse du pays avec un taux de criminalité de 61,44 %. (Numbeo s.d.)

Figure 5 : Préfectures de Casablanca. Mohamed Amine Chadi, www.reaserchgate.net, consulté le 02/05/2022

Casablanca est alors un carrefour à l’échelle du pays, elle est le cœur urbain du Maroc qui le représente dans le monde entier et dont l’image va au-delà des frontières. La ville de Casablanca est composée de 8 préfectures : Ain Sbaa, Mers Sultan, Hay hassani, Bernoussi, Moulay Rchid, Sidi Othmane, Ain Chock et Casa Anfa. Cette dernière comprend 3 arrondissements : Anfa, Maarif et Sidi Belyout où se trouve notre terrain d’étude : le centre-ville colonial de Casablanca.

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Délimitation du terrain d’étude Ce travail a pour but de se concentrer sur le centre-ville colonial de Casablanca ; ceci exclut tout autre patrimoine en extérieur de ce périmètre ou y appartenant, mais dont l’origine n’est pas coloniale, on entend par ceci l’ancienne Medina. Bien que cette délimitation soit déjà assez sélective, les limites du terrain restent absurdes. Il est alors intéressant de s’attarder sur la définition du centre-ville afin de choisir des limites signifiantes et qui correspondent au sens de la notion. En effet, le terme « centre-ville » est défini dans le dictionnaire Larousse comme : « Quartier central d'une ville, le plus animé ou le plus ancien. ». Le choix du terrain sera alors basé sur ces trois notions. La centralité

Figure 6 : Plan satellite de Casablanca, Google Earth, consulté le 17/02/2022

Sur l’image ci-dessus, se trouve le centre géographique de Casablanca indiqué par le logiciel Google Earth. Ce point correspond au quartier Al Fidaa qui ne représente en aucun cas l’endroit auquel les Casablancais pensent quand il s’agit du centre-ville. Cette affirmation n’est certes qu’une constatation générale, mais elle est en accord avec ce qu’on peut trouver en insérant « centre-ville de Casablanca » sur un moteur de recherche. Ainsi, dans notre cas, le centre-ville est défini par les deux autres critères : l’ancienneté et l’animation. L’ancienneté Le premier noyau de la ville de Casablanca, comme la plupart des villes marocaines, est l’ancienne Médina. Le reste de la ville s’est développé de manière concentrique vers toutes les directions sauf à l’ouest où l’étalement est bloqué par l’atlantique. Ceci explique l’emplacement du centre-ville qui ne correspond pas au centre géographique. Le centre-ville est alors composé de l’ancienne Médina et de la « nouvelle ville » coloniale construite autour de sa porte avec la place des nations unies comme espace tampon. Figure 7 : Schéma de croissance et de zoning du « grand Casablanca » 1951 (Cohen 2004, p. 294) Page | 24


L’animation Aujourd’hui, la place des nations unies représente un espace de rencontre pour les habitants de la ville, c’est aussi un espace de croisement de différents axes de transport (Tramway, Bus et Taxis). Elle est un point de convergence de plusieurs axes structurants de la ville dont le boulevard Mohammed V, l’avenue des FAR et le boulevard Hassan II. Elle représente aussi avec ses environs, en plus de la médina, un centre commercial et touristique.

Médina Place des nations

Figure 8 : Dessin de Philippe Simon, plan de Casablanca en 1952 (Cohen 2004, p. 116)

« Cette place située en plein centre-ville, est la plus emblématique du Casablanca Art déco. A quelques minutes de la gare de Casa-Port, la place des Nations Unies donne sur l’ancienne médina, à la fois souk et quartier populaire, et fait face à l’hôtel le plus luxueux de la métropole. […] Animée le soir venu, c’est un lieu de mixité sociale où des fast foods à l’américaine côtoient le Café de France, au rez-de-chaussée d’un bâtiment créé au milieu des années 1920, dont les baies carrées et les meneaux en pierre ocre témoignent de la richesse architecturale de la ville blanche. » (Wecasablanca, La place des nations unies s.d.)

Médina Av. Des FAR

Ainsi, le terrain d’étude comportera la place des nations unies et les îlots coloniaux qui l’entourent. La délimitation exacte est définie en fonction des axes et de la continuité urbaine sans trop s’étaler sur le reste du centre afin de pouvoir approfondir l’étude.

Figure 9 : Terrain d’étude, Place des nations unies, ilots et avenues. Google Earth, consulté le 20/02/2022 Page | 25


1.2.

L’HISTOIRE EN BREF Page | 26


Anfa

Figure 10 : Vue des ruines d’Anfa, in George Braun, Franz Hogenberg, Civitates orbis terrarum, Bertram Buchholtz, 1572. (Cohen 2004, p. 25)

La ville d’Anfa a été fondée par les Amazighs de Zenata vers le XIe siècle3. Sa forme urbaine initiale reposait sur la présence d’un port autour duquel se greffaient quelques habitations protégées par une enceinte. Cette petite ville sera complétement détruite par les Portugais en 1770, une maison blanche y survivra et sera à l’origine du nom actuel de la ville « Dar El Baida » en arabe. Quelques années plus tard, le sultan alaouite Sidi Mohammed Ben Abdallah ordonnera de reconstruire la ville et de restaurer ses enceintes. Elle bénéficiera alors à nouveau de son port, d’une nouvelle mosquée, d’une école et d’autres équipements, la relançant après un long sommeil. Ces changements ont certes offert à la ville une nouvelle vie, mais elle restera modeste par rapport aux autres grandes villes du pays. (Cohen 2004) Ouverture à l’Europe Des Européens commencent à s’installer à l’intra-muros à partir du IXe siècle pour des raisons commerciales et diplomatiques. La ville connaîtra dès lors une croissance démographique et un changement général dans son apparence ; petit à petit, des maisons remplaceront les huttes et les cabanes qui dominaient le paysage auparavant. La population de la ville qui dépendait principalement de pêche changera et gagnera en diversité ; elle est désormais composée de Musulmans, Juifs et quelques Européens qui participent aux activités portuaires, au commerce et à l’échange international. Le développement de la ville ne garantira malheureusement pas des meilleures conditions de vie pour tous les habitants de Casablanca ; les plus grands bénéficiaires seront, en majorité, les Européens et leurs protégés.

3 Les origines de la ville restent sujet du débat, on peut trouver plusieurs récits différents.

Les fondateurs de la ville peuvent être des Berbères,

des Phéniciens, des Carthaginois ou des Romains. Page | 27


Pour les étrangers, Dar El Baida est une ville très bien située sur la côte atlantique dans une zone entourée de terrains agricoles fertiles, mais dont le potentiel reste inexploité. C’est néanmoins pour la même raison que les Européens ont préféré s’y installer au lieu de se diriger vers les grandes villes qui sont plus protégées et réglementées. Ainsi, elle deviendra l’avant-poste colonial du Maroc. (Cohen 2004) (Cattedra s.d.) Casablanca de 1900 À la veille du protectorat, la ville de Casablanca a été représentée en plan par Dr. Félix Weisgerber en 1900. Grâce à ce plan, on peut clairement distinguer la délimitation de la ville qui longe la cote autour du port, entourée de jardins potagers. L’intra-muros d’une cinquantaine d’hectares était alors composé de trois grands quartiers : La médina ; le quartier principal occupé par la classe dominante, on y trouve les consulats, les hôtels (Fondak), les habitations des étrangers et des familles marocaines aisées, le Tnaker ; le quartier le plus pauvre occupé par les ruraux dans des habitations éphémères et finalement, le Mellah ; le quartier des Juifs marocains aux habitations modestes. A l’extérieur de la ville, à droite du quartier Mellah, on peut déjà identifier l’ancêtre de la place des nations Figure 11 : Plan de la ville de Casablanca de Félix Weisgerber en unies, anciennement un Souk extérieur. (Cohen 2004, 1900. (Cohen 2004, p. 25) Ayadi s.d.) : Délimitation actuelle de la place des nations unies.

Le protectorat Dès le début du XXe siècle, le port de Casablanca connaîtra une activité croissante, il finira par devenir le premier port du pays en termes d’affluence. Les Européens se rendront vite compte de son manque d’infrastructure et de praticabilité et il commencera à devenir la victime de son brusque succès.

Figure 12 : Noualla dans le quartier des Tnâker. Carte postale, c. 1910. (Cohen 2004, p. 26) Page | 28


Malheureusement, la situation politique fragmentée du pays4 empêchera des travaux de reconstruction et de rénovation dont la ville avait aussi besoin vu la dégradation continue de son état sanitaire et la pression démographique causée par l’exode rural. Ce n’est qu’au début du protectorat en 1912, avec l’arrivée du maréchal Lyautey comme premier résident général de France au Maroc, que le Casablanca moderne commencera à prendre sa forme. Le maréchal ayant comme terrain de travail une ville en expansion continue et non contrôlée décide alors de structurer et tracer son développement. Ainsi, les prix des terrains connaîtront une hausse exponentielle afin de ralentir l’occupation des sols entrainant par conséquent une hausse similaire du coût de la vie. Cette situation attire de nombreux investisseurs immobiliers étrangers et marque le début de l’ère de l’architecture coloniale. (Cohen 2004) Le plan d’extension de Tardif (1912)

Figure 13 : Le plan d’extension de Tardif en 1912 (Cohen 2004, p. 46) : Délimitation actuelle de la place des nations unies.

4 Le Sultan, sous la pression de différentes tribus révolutionnaires, appelle à l’aide le pouvoir français afin de contrôler la situation. Casablanca

connaît alors une série de combats entre marocains et français en 1907 qui finit par l’établissement définitif du pouvoir français dans la ville. Page | 29


Ce plan est un document essentiel pour la compréhension de l’extension de la ville. On y trouve les axes qui ont structuré son développement ainsi qu’un début de zoning. D’un côté, on distingue clairement le « boulevard circulaire »5 dont la fonction est de lier les différents quartiers de la future ville et de définir son périmètre d’extension, le plan d’extension au sud-est de la médina se situant idéalement entre les nouvelles industries, le port et les premiers boulevards marchands découlant de la place du Souk ou du Grand Socco (nations unies). De l’autre côté, l’ouest de la ville reste libre, c’est le futur quartier Anfa destinée à être la partie « bourgeoise » de Casablanca. Ce zoning est basé sur deux éléments naturels : les vents dominants qui soufflent vers l’est dont la nature du sol est rocheuse, protégeant ainsi les terres fertiles de l’ouest. (Cohen 2004) Le plan d’Henri Prost (1914-1917)

Figure 14 : Le plan de Prost entre 1914 et 1917. (Cohen 2004, p. 48)

: Délimitation actuelle de la place des nations unies.

Se basant sur le plan de Tardif, le plan d’Henri Prost est plus précis et pousse le zoning encore plus loin. Le nouveau quartier au sud-est de la médina est appelé quartier de la Liberté, celui-ci est réservé aux français et quelquesuns de leurs protégés. Tout au sud, la nouvelle-ville indigène est conçu afin de dédensifier l’ancienne médina et d’accueillir les ouvriers. A l’ouest de la médina, on retrouve le quartier arabe Bousbir, avec des nouveaux équipements de proximité, ce dernier est séparé de la ville française par la place administrative. Le tout est relié au centre, la place du Socco qui deviendra la place de France puis la place des Nations Unies.

5 Boulevard de la Résistance et boulevard Zerktouni aujourd’hui

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Le centre-ville devient alors un croisement de plusieurs artères structurantes de la ville, il est représenté par la place idéalement située entre l’ancienne Médina, plus précisément la partie commerçante du quartier Mellah, les magasins Paris-Maroc et l’hôtel Excelsior de la nouvelle ville. Cette composante d’aménagement sera l’espace public principal de la ville, destiné à devenir un carrefour où les habitants de l’ancienne et de la nouvelle ville pourraient se rencontrer et où la mixité sociale sera la norme. Malgré son intention de créer une forme de mixité, le principe du zoning reste dominant, la nouvelle ville européenne et l’ancienne médina marocaine doivent rester bien séparées et ce même dans l’ombre de la surpopulation. Prost a alors dédié un nouvel emplacement pour la population locale : la nouvelle ville indigène (nouvelle Médina) à l’ouest de l’ancienne, bien éloignée du quartier européen Liberté. Depuis l’entrée en vigueur de ce projet d’aménagement, l’exécution fut lente, celle-ci était principalement retardée par la spéculation des terrains constructibles des investisseurs aux années 20, ce qui a entraîné une hausse considérable des prix et un désordre paysager. Il faudra attendre que la crise économique de 1929 et la deuxième guerre mondiale poussent les spéculateurs à revendre leurs terrains pour que la ville retrouve un bon rythme de construction et que le paysage casablancais commence à se dessiner. Celui-ci ne ressemblera qu’en partie à l’imaginaire de Prost ; les différents quartiers dont les divergences sont à la fois architecturales et ethniques finiront par se fusionner et les populations musulmanes seront de plus en plus présentes dans les zones européennes favorisant ainsi l’échange entre les deux groupes socioculturels. (Cohen 2004, André 1968)

L’évolution de la population casablancaise Comme mentionné ci-dessus, la population casablancaise était composée de Juifs, Musulmans « nobles » et des Musulmans des Tnakers, vivant tous à l’intra-muros de l’enceinte de l’ancienne médina. Le changement a commencé par l’installation des Européens à l’extra-muros avec l’apport d’une activité industrielle qui finira par attirer un grand nombre de migrants marocains, causant ainsi une explosion démographique qui échappera aux tentatives de zoning du Maréchal. La relation entre les Marocains et les Européens n’a jamais été égalitaire. Ces derniers étaient à la fois les héros et les antagonistes de l’histoire ; certes, c’est grâce à eux que le marché d’emplois a connu une grande expansion, mais ils en ont toujours été les plus grands bénéficiaires. En effet, beaucoup de Marocains travaillaient pour des Européens, il est donc naturel qu’ils cherchent à habiter plus proche de leurs lieux de travail en s’introduisant dans la zone européenne. En parallèle, certains Européens se dirigeront de plus en plus vers la périphérie afin de se procurer de plus grands terrains vu l’étroitesse des appartements du centre. Cependant, cette image de la population marocaine ne représente pas sa totalité ; l’après-guerre marque l’âge d’or de la classe aisée marocaine qui, elle aussi, cherche à bénéficier de la modernité des quartiers européens. Ainsi, juste après à l’indépendance en 1956, les quartiers qui étaient désignés « européens » accueilleront de plus en plus de Marocains dont la classe sociale et les motivations sont différentes.

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La nouvelle ville européenne est alors devenue marocaine, elle ne cessera de grandir et son nombre d’habitants est passé de 20 000 au début du siècle, à presque 1 million après l’indépendance.

Figure 15 : Tableau représentant les investisseurs dans la construction à Casablanca entre 1955 et 1958. (André 1968, p. 54)

Les immeubles du centre-ville ont alors été récupérés par des Marocains, leur imposant donc un passage de la maison marocaine unifamiliale traditionnelle à l’appartement, un passage brusque et imposé par les circonstances. Un grand nombre de Marocains adoptent ainsi un nouveau mode de vie dicté par les décisions des autorités afin de limiter l’étalement horizontal de Casablanca. Par conséquent, ils finiront par s’adapter à leur manière, en modifiant leurs nouveaux habitats, mais aussi en modifiant leur façon d’habiter. (André 1968)

La ville-blanche après l’indépendance

La nouvelle ville française devenue marocaine connaîtra plusieurs changements dont des nouvelles constructions, mais aussi plusieurs démolitions d’anciens repères comme le cinéma Vox en 1970 qui donnait sur la place des nations unies. Ce phénomène sera dénoncé par la population qui poussera les autorités à reprendre en main la situation après les émeutes de 1981. Plus tard, l’association Casamémoire verra le jour en 1995 grâce à plusieurs architectes qui souhaitent sauvegarder l’ensemble du centre-ville comme patrimoine national pour assurer sa protection. Ainsi, un plan de sauvegarde sera mis en place et lancera le processus de patrimonialisation du site. Aujourd’hui, la ville de Casablanca est la capitale économique du Maroc, elle produit 50 % de la valeur ajoutée du Maroc et attire 48 % d’investisseurs. Elle doit alors représenter le pays à l’échelle internationale en tant qu’une métropole riche en passé et au futur prometteur. Ce passé, pas très lointain, est le point de transformation de la ville, il est alors l’histoire qu’elle se doit de raconter aux visiteurs, c’est son patrimoine. Toujours dans la même optique, les autorités décident de faire de la ville une nouvelle destination touristique. Elles investissent alors dans le secteur en partenariat avec Casa patrimoine, société de développement local dotée de 40 millions de dirhams qui prendra la responsabilité de réhabiliter le centre en commençant par les grands repères urbains comme la coupole de Zevaco et récemment, l’hôtel Lincoln. (Mouaddine s.d.)

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1.3.

VISITE GUIDEE Page | 33


Le centre-ville comprend plusieurs repères et points de rencontre faisant de lui un espace où les flux se croisent au vu de la présence de différents types de transport en commun. De plus, on y trouve des composantes urbaines allant de l’hôtel cinq étoiles au bidonville le tout dans un décor dominé par des architectures de tendance du siècle dernier. 6

Enceinte d’habitations Composée de maisons et de bidonvilles.

Médina L’ancienne Anfa entourée d’enceintes datant du XXe siècle.

Hôtel Hayat Regency cinq étoiles. Datant de la fin du XXe siècle, il se situe à l’emplacement de l’ancien Mellah.

Coupole de Zevaco Connu comme « kora ardia ». C’est la partie apparente d’un passage sous-terrain aménagé, conçu par Zevaco.

Tour d’horloge Construite et détruite au début de XXème siècle, elle est déplacée et reconstruite en 1994.

Jardin enterré Nouvel espace vert intermédiaire entre l’aménagement sous-terrain et la place.

Place 16 novembre Terminus Grands Taxis

Terminus Bus

Station de Tramway

Figure 16 : Plan des repères

Il est aussi possible d’interpréter cette diversité urbaine comme manque de continuité et de fil conducteur, ce qui peut troubler le visiteur du site, mais elle représente aussi la mixité sociale, l’un des points forts du centre-ville.

6 Coupole

de Zevaco : elle est faite par un architecte du XXe siècle connu au Maroc pour ses conceptions à la fois modernes et inspirées du contexte. Elle reste à l’abandon pendant plusieurs décennies avant d’être réhabilitée en parallèle à la place. Page | 34


1.3.1. Le patrimoine habité, un musée à ciel ouvert

Figure 20 : Situation immeuble 1

Figure 19 : Détail immeuble 1

Figure 18 : Intérieur immeuble 1

Figure 17 : Immeuble 1, façade principale

Immeuble datant de 1928, conçu par l’architecte italien Joseph et l’architecte marocain Elias Suraqui pour une famille marocaine qui y habite toujours. Il est composé de quatre étages avec un style art déco revisité. La façade principale est symétrique avec des angles arrondis qui se démarquent par la présence d’un quatrième niveau. La hiérarchisation des niveaux est facilement remarquable ; plus on monte en hauteur, plus on trouve d’éléments architectoniques : le premier est doté de petits balcons en béton, les balcons du deuxième sont fait avec du fer forgé typiquement art-déco, au troisième on commence à voir des ornementations moulées ou en Zelij (morceaux de céramique colorés) toujours avec la présence du fer forgé et le dernier est le niveau le plus ornementé avec des colonnes qui mettent en avant les balcons et sur lesquels reposent des toitures en tuiles vertes tandis que le rez-dechaussée est dédié aux commerces. C’est une architecture tendance du XXème siècle qui témoigne de la volonté des propriétaires marocains de s’intégrer au contexte colonial. Une forme d’appropriation qui sera analysé plus tard dans le travail. (Casamémoire 2020, p. 43) Page | 35


Figure 21 : Situation immeuble 2

Immeuble de trois étages avec un style moderne contrairement à son environnement. La façade est plus sobre en termes d’ornementation, mais est munie de formes d’arcs réinterprétés qui mettent en avant les Figure 22 : Immeuble 2, façade principale ouvertures tout en rappelant l’architecture locale.

Figure 23 : Situation immeuble 3

L’immeuble Lazare Hazan est en continuité avec le premier immeuble en termes de style architectural tout en étant plus modeste en ornementation vu qu’il date de 1930. Cet immeuble est composé de trois appartements loués, un Figure 24 : Immeuble 3, façade principale appartement vide et des bureaux.

Figure 25 : Situation immeuble 4

Immeuble de trois étages d’un style architectural moderne et minimaliste en béton armé. Les balcons rappellent l’architecture fonctionnelle du Corbusier avec une rue intérieure partagée par les habitants. Figure 26 : Immeuble 4, façade principale Page | 36


Figure 29 : Situation immeuble 5

Un autre immeuble art-déco datant des années 20. Il est composé de quatre étages hiérarchisés par un traitement de façade ; le premier étage est doté d’un balcon continu en béton, le deuxième et le troisième ont des balcons en fer forgé avec la présence d’ornementations et le dernier est distingué par la présence de colonnes comme le premier immeuble. Il est aussi important de mentionner le traitement d’angle en arrondi avec des « bow-windows » donnant Figure 27 : Angle Immeuble 5 sur la place.

Figure 28 : Situation immeuble 6

Un immeuble de trois étages datant de la première moitié du siècle. Chaque étage représente un appartement vide dont un est en cours de restauration. Figure 31 : Angle immeuble 6 Il se démarque par rapport aux autres immeubles par ses ornementations plus chargées et diversifiées ; on y trouve des inspirations de la flore, l’une des caractéristiques du style art-déco, mais aussi des références à la faune, plus répondues dans le style artnouveau.

L’angle est aussi traité en octogone et

représente la façade principale où se trouve l’entrée de l’immeuble.

Figure 30 : Détail immeuble 6 Page | 37


Figure 32 : Situation immeuble 7

Un immeuble de quatre étages en continuité avec les autres immeubles art-déco. Les ornementations végétales se démarquent avec une couleur dorée audessus des ouvertures. L’angle est arrondi et comprend une colonne de balcons encadrés de part et Figure 34: Angle immeuble 7 d’autre par un alignement de fenêtres en meurtrière.

Figure 33 : Situation immeuble 8

Un immeuble art déco de trois étages, n’étant pas doté d’angle, l’horizontalité des étages est atténuée par l’alignement de balcons arrondis à droite et à gauche de la façade avec un balcon au centre afin d’accentuer Figure 35: Immeuble 8, façade principale la symétrie.

Figure 37 : Situation immeuble 9

Un immeuble de trois étages, il se distingue de celui d’avant par ses ornementations dorées et une horizontalité plus assumée, marquée par des balcons en béton et en fer forgé qui s’étendent sur tout l’étage. Figure 36: Immeuble 9, façade principale Page | 38


Figure 38 : Situation immeuble 10

Un immeuble de quatre étages hiérarchisés de manière très claire ; le premier est sobre avec un balcon qui longe l’étage, le deuxième est doté d’un balcon en fer forgé et le troisième est ornementé avec des colonnes moulées qui soutiennent le balcon du quatrième, qui se démarque par ses colonnes classiques aux chapiteaux ornementés. Les murs du rez-de-chaussée sont en retrait afin de créer une forme de galerie marchande du côté du boulevard Hassan II. Figure 39 : Angle immeuble 10

Figure 40 : Situation Immeuble 11

Immeuble datant de la première moitié du XXème siècle. Il est composé de trois étages et semble s’intégrer au contexte même si son architecture est différente. L’arc est très présent et la casquette en tuiles vertes rappelle le style néo-mauresque utilisé surtout pour les bâtiments administratifs. La hiérarchisation des étages est différente aussi ; le dernier étage n’a pas de balcon contrairement aux deux premiers et l’ornementation est minimaliste et géométrique.

Figure 41 : Angle immeuble 11

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Figure 42 : Situation immeuble 12

L’un des rares immeubles asymétriques du site, il est composé de quatre étages dont le dernier n’est qu’au prolongement de la colonne octogonale qui longe la façade verticalement afin de casser son horizontalité et sa symétrie. L’architecture est de style art-déco, mais tout en restant modeste en Figure 43 : Immeuble 12, façade principale ornementations.

Figure 44 : Situation immeuble 13

Un immeuble de trois étages qui semble suivre la même logique du précédent en termes d’hiérarchisation d’étages, mais dont l’horizontalité est beaucoup plus marquée. Figure 45 : Immeuble 13, façade principale

Figure 46 : Situation immeuble 14

Un immeuble de trois étages qui suit la même logique que les autre immeubles art-déco dans le traitement des niveaux ; le premier étage est le plus modeste et le dernier est mis en avant. L’horizontalité est atténuée par un traitement de façade. Il se démarque cependant par sa grande porte d’entrée en fer forgé Figure 47 : Immeuble 14, façade principale couronnée par des ornementations végétales imposantes. Page | 40


Figure 50 : Situation immeuble 15

Figure 48 : Galerie immeuble 15

Figure 49 : Angle immeuble 15

Immeuble art-déco de cinq étages. Son architecture est caractérisée par la mise en avant de l’angle non seulement par sa forme arrondie, mais aussi grâce à la courbure de la façade qui donne sur la place, lui offrant une fluidité unique. Le rez-de-chaussée est occupé par une banque. Plus en monte en hauteur, moins les niveaux sont mis en valeur à l’exception du quatrième étage qui se démarque par ses ornementations et sa casquette.

Figure 52 : Situation immeuble 16

Donnant sur la place, cet immeuble est très sobre pour son emplacement stratégique, anciennement occupé par les magasins Paris-Maroc. Il est composé de cinq étages faisant de lui l’un des plus hauts immeubles d’habitation du site. Son architecture est fonctionnelle, elle s’intègre au site avec le traitement Figure 51 : Angle immeuble 16 d’angle en octogone et l’utilisation du fer forgé. Page | 41


Figure 54 : Situation immeuble 17

L’immeuble Tazi est un îlot rectangulaire composé de Figure 53 : Angle immeuble 17 plusieurs immeubles de quatre étages datant de 1930. Contrairement aux exemples précédents, les appartements appartiennent à plusieurs propriétaires. Son apparence est géométrique, mais ne manque pas en ornementations de style néo-mauresque. Ses façades sont composées d’un modèle répétitif qui, grâce au jeu de volumes, atténue son l’horizontalité. Au rez-de-chaussée, en plus de la galerie extérieure donnant sur l’avenue Hassan II, l’intérieur est aménagé en centre commercial où se trouve les accès des Figure 55 : Galerie Immeuble 17 immeubles aussi.

Figure 56 : Situation immeuble 18

En continuité avec l’immeuble précédant et portant le même nom (celui du propriétaire), cet immeuble date de 1931. Conçu par Aldo Manassi, il est composé de quatre étages. L’architecte utilise les mêmes jeux d’hauteur avec des ornementations florales et géométriques en moulage et en Zelij toujours dans un style néo-mauresque. Il se distingue néanmoins par ses balcons arrondis et l’utilisation du fer forgé. L’arc est aussi présent au niveau des fenêtres du premier étage ce qui met en avant la volonté de marier le géométrique et la courbe ; l’importé et le local. Figure 57: Angle immeuble 18 (Casamémoire 2020, p. 73) Page | 42


Figure 60 : Situation immeuble 19

L’immeuble Socifrance est le plus haut immeuble d’habitation du site avec ses six étages. Son architecture datant des années 30 est sobre et repose sur l’horizontalité. Les angles sont arrondis sauf au premier étage qui constitue le socle du bâtiment. (Casamémoire 2020, p. 70) Figure 59 : Angle immeuble 19

Figure 58 : Situation immeuble 20

Un immeuble de quatre étages, sobre et minimaliste, il suit la forme complexe de l’ilot ce qui attenu la monotonie de la façade. Figure 61 : Angle immeuble 20

Figure 62 : Situation immeuble 21

Un immeuble de trois étages dont la façade est composée de trois parties aux traitements différents laissant penser qu’il s’agirait d’immeubles fusionnés. Le style art-déco reste néanmoins présent comme un fil conducteur. Figure 63 : Façade immeuble 21 Page | 43


Figure 64 : Situation immeuble 22

L’immeuble Bendahan de six étages est conçu par l’architecte Edmond Brion en 1935. Il a un style sobre et moderne reposant sur l’horizontalité et la courbe. Il donne sur la place du 16 novembre et offre son rez-de-chaussée aux commerces. Les quatre premiers étages sont identiques alors que les deux derniers sont en gradin ce qui assure une continuité Figure 66 : Angle Immeuble 22, B. Moussaoui, www.pinterest.com, urbaine avec l’immeuble 20. consulté le 06/05/2022

Figure 65 : Immeubles Tazi et Bendahan, 1935, (Cohen 2004, p. 171)

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1.3.2. Le patrimoine public et d’entreprise

Figure 67 : Situation hôtel Kenzi Basma

Construit à la place d’une synagogue, l’hôtel Kenzi Basma de quatre étoiles se démarque par sa hauteur de huit étages et son architecture moderne. Ses façades nues ne manquent pas de charme grâce au traitement de reculs et de balcons qui font de lui un joyau architectural du XXème siècle. Il a été récemment rénové en 2015 et habillé complétement en blanc, un choix qui met en valeur la forme unique du bâtiment. Figure 69 : Angle hôtel Kenzi Basma

Figure 68 : Situation bâtiment Wafasalaf

Datant de 1928, ce bâtiment qui appartient Figure 71 : Entrée bâtiment Wafasalaf aujourd’hui à Wafasalaf, a été conçu par les architectes Prost et Antoine Marchisio comme une réinterprétation du style local ; les arcades surdimensionnées permettent d’accéder au bâtiment où se trouve un patio intérieur qui est aujourd’hui couvert d’une verrière. Les façades sont sobres et décorées avec des fresques en Zelij vert dont les motifs sont inspirés des tapis traditionnels. Le tout est couronné de tuiles vertes faisant du bâtiment l’un des premiers bâtiments de style néo-mauresque de la Figure 70 : Angle bâtiment Wafasalaf période coloniale. (Casamémoire 2020, p. 72) Page | 45


Figure 72 : Situation immeuble BMCI

Construit en 1950, ce siège de banque BMCI domine son environnement avec ses 15 étages. Il est conçu par l’architecte Alexandre Courtois afin de moderniser la place et de l’ouvrir à la scène internationale. Son architecture est sobre composée de trois parties ; un socle qui se distingue par ses grandes colonnes et son murrideau, huit étages répétitifs couronnés par un niveau vitré et les derniers cinq étages en gradin offrant une vue panoramique sur la ville. Figure 73 : Angle bâtiment BMCI (Casamémoire 2020, p. 68)

Figure 74 : Situation hôtel Exelsior

Le bâtiment colonial existant le plus ancien de la place. Construit en 1916 par l’architecte Hippolyte-Joseph Delaporte qui avait aussi conçu Figure 76 : Angle hôtel Exelsior les magasins Paris-Maroc qui n’existent plus. L’hôtel Exelsior a une architecture néo-mauresque en continuité avec les tendances coloniales en Algérie et en Tunisie avec ses arcs en plein cintre, ses ornementations en Zelij et ses tuiles vertes tandis que l’intérieur est dominé par le style artdéco. Aujourd’hui, une partie de l’hôtel est consacrée à l’habitat. (Casamémoire 2020, p. 67) Figure 75 : Hall d'entrée hôtel Exelsior Page | 46


1.3.3. Un patrimoine sans vocation

Figure 80 : Situation Synagogue

Figure 78 : Synagogue, façade principale

Figure 79 : Porte Synagogue

Figure 77 : Synagogue, vu Rue Abou Soufiane

Ancienne synagogue de la première moitié du siècle dernier. Elle est discrètement située entre des immeubles d’habitation. Composée d’un seul étage, le rez-de-chaussée est aujourd’hui en partie occupé par des commerces de proximité tandis que le reste du bâtiment est abandonné. Son architecture est d’un style néo-mauresque modeste ; l’arc domine les formes des ouvertures qui donnent sur des balcons en béton armé alors que le fer forgé est réservé pour la porte d’entrée, celui-ci est travaillé en forme de spirale, une des caractéristiques de la ferronnerie art-déco. Page | 47


Le style art-déco Le style art-déco, comme relevé dans la visite guidée, domine le paysage du centre-ville casablancais. En effet, il a été apporté par les français au début du XXème et plus précisément pendant la période de l’entre guerres qui est aussi son âge d’or. Ce style détient son nom de l’exposition des arts décoratifs à Paris en 1925. C’est une continuité plus sobre de l’Art Nouveau qui est caractérisée par (Caractéristiques de l'art-Déco s.d.):

Les « bow-windows » Les fenêtres sont disposées au niveau de l’angle avec un aspect symétrique. Elles ont comme rôle d’offrir une vue panoramique

du

paysage

extérieur aux habitants. Figure 81 : Imm. 7

Figure 83 : Imm. 1

Figure 82 : Imm. 5

L’absence des angles droits Les concepteurs du style art-déco rejettent l’angle droit et font preuve de créativité afin de lui trouver une autre forme. Les traitements d’angle les plus répondus dans le site sont la courbe et l’octogone. Figure 85 : Exelsior

Figure 84 : Imm. 15

Les frontons Elément qui permet d’ajouter un aspect dynamique à la façade et à mettre en valeur des ouvertures en créant un jeu de volumes. Figure 87 : Imm. 3

Figure 86 : Imm. 18

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Les ornementations de motifs végétaux Les ornementations sont moins présentes dans le style art-déco que dans le style art nouveau, mais sont toujours variée allant du palmier à la grappe de Figure 88 : Imm. 14 fruits. Figure 90: Imm. 14

Figure 89: Imm. 9

Figure 91 : Imm. 8

Figure 92 : Imm. 1

La ferronnerie et le motif spiral La ferronnerie est la caractéristique par excellence de l’art déco, elle reprend des formes végétales et spirales qui la rendent unique.

Figure 94 : Imm. 7

Figure 96 : Imm. 13

Figure 93 : Imm. 14

Figure 97 : Imm. 6

Figure 95 : Imm. 5 Page | 49


Intérieurs A l’intérieur, le style art-déco est représenté par la ferronnerie qui vient créer une continuité avec la façade, elle est surtout présente dans les garde-corps des escaliers avec des motifs organiques. L’escalier devient ainsi un élément de décor ; sa forme qui laisse passer la lumière du dernier étage ainsi que la courbure de ses premières marches invitent à visiter le reste de l’immeuble. Le marbre est le matériau de choix à l’intérieur, il couvre le sol parfois en toute simplicité et d’autres avec des motifs géométriques créant un effet de tapis. Pour les immeubles les plus luxueux, le marbre est marié avec du bois de cèdre sculpté Figure 98 : Imm. 3 créant ainsi une ambiance à la fois chaleureuse et noble. Dans certains cas, les ornementations s’invitent à l’intérieur du hall tout comme d’autres éléments art-déco.

Figure 99: Imm. 1

Figure 101 : Hall hôtel Exelsior Figure 100 : Imm. 7 Page | 50


Le style néo-mauresque Ce style est né au début du XXème siècle avec l’arrivée des Français dans les territoires arabes. Le nom du style comprend deux parties : Le mot « néo » qui signifie « après » et le mot « mauresque » qui réfère aux habitants musulmans de l’Andalousie. Il est alors une réinterprétation de l’architecture arabo-andalouse souvent représentée par des emprunts tel que la forme de l’arc, l’utilisation de matériaux locaux comme le Zelij et la tuile verte. Il est présent à Casablanca, mais aussi dans toutes les nouvelles villes coloniales et est utilisé principalement pour les bâtiments de caractère administratif.

Figure 102 : Bâtiment Wafasalaf

Figure 104 : Sas hôtel Exelsior

Figure 105 : Imm. 18

Figure 103 : Hôtel Exelsior

Le style Moderne fonctionnel Certains immeubles présentés font l’exception et sont conçus avec un style moderne dont la forme est simple et les jeux de volumes sont absents. Les façades sont plates ne laissant ressortir que l’alignements des fenêtres ou des balcons continus sur tout l’étage avec une horizontalité assumée. Les intérieurs sont aussi simples que l’extérieur avec le béton et le crépis comme matériaux dominants en plus d’un revêtement de sol sobre en carrelage ou en granite. Figure 106 : Imm. 20 Page | 51


Figure 107 : Les styles architecturaux du site

Le patrimoine du centre-ville

Services

Habitat

Années 20 et 30

Art-déco Le style des immeubles les plus anciens du site,, il est importé par les européens souhaitant vivre dans un cadre familier

A partir des années 30

Néo-mauresque Témoigne de la volonté des européens de s'integrer dans le contexte local

Style moderne Témoigne d'une époque où le fonctionnalisme primait sur la forme

Années 10 et 20

A partir des années 30

Style moderne Les bâtiment publics suivent les tendances internationnalles en adoptant une architecture moderne

Néo-mauresque Les bâtiment publics, n'étant pas réservés qu'aux européens, ont un style hybride assemblant l'importé et le local

Les immeubles du centre-ville racontent alors une histoire, celle des années 20 et 30, le récit du passage de l’art nouveau au style moderne, un changement de mentalité dicté par des changements sociaux à l’échelle mondiale en quête des formes épurées et de simplicité. Ainsi, cette visite guidée a permis de contempler la variété architecturale que représente le terrain d’étude, allant du purement européen au néo-marocain, se promener dans le site est l’équivalent d’une visite d’un musée vivant ; on y trouve l’histoire de la ville blanche écrite par plusieurs architectes au fil des années sous forme de bâtiments. En effet, c’est pour cette raison que le centre-ville casablancais devrait être mis en valeur et préservé afin de l’utiliser comme un échantillon de la richesse de la ville pour toute personne souhaitant la découvrir. Cependant, la visite du site et les recherches documentaires ont aussi fait ressortir les points faibles du centre-ville qui est encore loin d’atteindre son potentiel.

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1.4.

La situation actuelle Page | 53


1.4.1. Le cas des immeubles d’habitation Dans le site, il existe une corrélation entre la fonction du bâtiment et son état. En effet, si les immeubles d’entreprise et les hôtels sont dans un état qui semble bon, l’état des immeubles d’habitation est bien différent ; ils sont reconnaissables de par leurs peintures effacées et leurs façades altérées. Le cas de du bâtiment Exelsior est très parlant à cet égard ; la partie occupée par l’hôtel a une façade propre et homogène alors que la partie habitée est fragmentée puisque chaque habitant semble décider de l’apparence de sa propre façade.

Figure 108 : Façade de la partie hôtel

Figure 109 : Façade de la partie habitat Page | 54


1.4.2. Problématiques Délabrement des bâtiments Bien que quelques bâtiments ne semblent avoir besoin que d’un coup de peinture, le problème que rencontre le patrimoine colonial et surtout les immeubles d’habitation est plus grave. Le manque d’isolation et les problèmes d’étanchéité sont le plus grand fléau du centre-ville, en plus du vieillissement normal qui demande un entretien continu. L’un des symptômes de cette dégradation est le décollement de la Figure 110 : Sas Imm. 13 peinture causé par la moisissure, mais aussi, dans des cas plus inquiétants, l’effritement du bâtiment au point que le ferraillage de la structure devienne apparent ou que des végétations poussent sur du béton. Cependant, les bâtiments du site ne sont pas un cas désespéré et il faut agir au plus vite avant qu’il ne soit trop tard puisque loin des problèmes d’esthétique, la dégradation représente un vrai danger pour la sécurité des habitants. Il est aussi important de noter que la visite du terrain a permis de constater que plus il y a d’appartements abandonnées, plus l’état de l’immeuble est critique (sauf au cas où les habitants sont propriétaires). Ainsi, le phénomène d’abandon doit aussi entrer en compte dans l’étude. Figure 115 : Imm. 13

Figure 114 : Imm. 15

Figure 113 : Synagogue

Figure 112 : Imm. 6

Figure 111 : Imm. 9 Page | 55


Extensions clandestines Le centre-ville de Casablanca est un quartier stratégique, son emplacement et les opportunités qu’il offre doivent alors attirer les Casablancais souhaitant vivre au cœur de la ville. Cependant, comme constaté, plusieurs appartements sont laissés à l’abandon depuis des années pour diverses raisons, mais ceci n’est que la partie apparente du décor. En effet, de plus en plus d’extensions Figure 116 : Imm. 8, vue sur l’intra-îlot s’agrippent aux immeubles, des fois en toute discrétion et d’autres de manière claire et assumée. Celles-ci abritent des familles depuis des années dans le cadre d’un flou administratif qui laisse penser que ces pratiques échappent aux réglementations. Ces extensions sont souvent construites en béton armé à l’exception de quelques-unes en tôles et peuvent être trouvées soit sur les terrasses des immeubles ou dans les cours intérieures dans îlots. Ainsi, des espaces qui sont conçus comme propriétés communes des habitants de l’immeuble subissent une privatisation continue.

Figure 118 : Imm. 6, hall d'entrée

Figure 120 : Imm. 13, entrée de l’intra-îlot

Figure 119 : Imm 13, vue sur l'intra-îlot

Figure 117 : Imm. 3, extension terrasse

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Insalubrité En plus du manque d’entretien des immeubles d’habitation, l’espace public est lui aussi dans un état déplorable. Les rues donnant sur la place des nations unies sont fermées par des socles en béton en dessous desquels les déchets s’accumulent en plus des traces d’anciennes affiches collées partout dans le quartier. Certains murs sont aussi couverts de tags, d’appareils de ventilation et de paraboles. Les galeries commerçantes sont dotées d’un alignement de jardinières vides, n’ayant jamais été planté, elles sont aujourd’hui

Figure 121 : Galerie bâtiment Wafasalaf

utilisées comme poubelles. La situation pousse à se demander si l’espace public est lui aussi laissé à l’abandon par les autorités, qui est le responsable ?

Figure 125: Porte habitat Exelsior Figure 124 : Blocs rue piétonnes

Figure 123 : Galerie Imm. 10

Figure 122 : Début rue Allal Ben Abdellah

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Nuisances sonores On ne peut se balader dans la place sans entendre le bruit des voitures et des mobylettes en plus de celui des klaxons et du signale de tramway. Cette ambiance n’est pas acceptable pour une place pleine de bancs dont quelquesuns donnent directement sur l’avenue des Far, l’une des avenues les plus animées de la ville et où l’embouteillage est la norme. Ceci est en contradiction avec la volonté de réhabiliter le site puisqu’il perd de plus en plus d’attractivité. Figure 127 : Avenue des FAR

Figure 126 : Idem.

Figure 128 : Idem.

Appropriation de l’espace public En plus des devantures colorées qui surchargent les façades, les trottoirs et les rues piétonnes sont encombrés de marchandises appartenant aux magasins. Cette exposition est presque une règle générale dans le quartier et les autorités préfèrent détourner le regard. Cet abus représente d’un côté un obstacle pour les piétons pour certains cas, mais est surtout responsable d’un désordre paysager et d’une surcharge visuelle qui pourraient être évités. Figure 131 : Synagogue

Figure 129 : Imm. 17, rue piétonne

Figure 130 : Imm. 17, avenue Hassan II Page | 58


Figure 132 : SDAU 2014 : SDAU 2014 (AUC s.d.) Page | 59


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Réglementation

Afin de comprendre la situation juridique de l’urbanisme au Maroc, il faudra connaitre les différents outils d’urbanismes mis en place. L’histoire de l’urbanisme marocain commence par le dahir du 16 avril 19147 qui mettait en place un cadre judiciaire permettant de contrôler l’utilisation du sol. Cependant, la loi qui définit les documents de l’urbanisme n’est rentrée en vigueur qu’en 1992 et son application n’a toujours pas réussi à se concrétiser dans la totalité du pays. La loi définit alors les documents suivants : Le SDAU Le schéma directeur d’aménagement urbain. Ce document peut être à l’échelle communale ou pluri communale qui a pour but de définir le zoning, les affectations du sol et les secteurs à rénover ou à restructurer. Son application est malheureusement freinée par le manque de détermination des administrations et l’absence d’organismes de suivi. Le PZ Le plan de zoning comporte un plan d’affectation plus précis que le SDAU et un règlement et a pour but de préparer le terrain pour le PA. Le PA Le plan d’aménagement comprend aussi un plan et un règlement et définit les limites de voiries, les dispositions des espaces publiques et les zones non aedificandi. Il définit, avec une valeur réglementaire, les quartiers à protéger ou à mettre en valeur et les secteurs à rénover ou à restructurer. La législation en vigueur représente plusieurs lacunes dont la rigidité des outils, la lenteur de la mise en place des documents d’urbanismes, la complexité de la procédure de modification avec des durées d’application qui peuvent atteindre les 20 ans et le manque d’intégration des autorités locales dans l’étude. Pour toutes ces raisons et plus, un projet de rénovation urbaine est élaboré et prévoit des nouveaux documents d’urbanismes. (GRET-GRIDAUH s.d.)

Casablanca a connu quatre documents d’urbanisme : le plan de Prost, le plan Ecochard et les SDAU de 1984, de 2010 et de 2014 qui est une révision du précèdent. Ce dernier n’intègre pas le centre-ville dans ses priorités et se focalise surtout sur le patrimoine non bâti et le contrôle de l’étalement de la ville. Aussi, certains PA qui sont à l’échelle de préfecture, ne sont pas tous homologués, c’est notamment le cas du PA de Sidi Belyout dont l’enquête publique vient d’être clôturée. (AUC s.d.)

7Dahir

: L’équivalent d’un décret royal. Page | 61


Flou administratif La visite du site a permis de mieux cerner le terrain, mais a aussi permis une vision réaliste de la situation complexe où se trouve le patrimoine colonial de la ville. En effet, l’échange avec les habitants a révélé un problème qui semble être l’un des freins principaux à n’importe quel projet de restructuration souhaitant faire avancer les choses. L’une des questions posées aux sujets concernait leurs relations avec le propriétaire et la réponse qui revenait souvent était qu’ils ne le connaissaient pas. Il s’est donc avéré que la plupart des immeubles sont gérés par des intermédiaires et que la location n’était pas faite de manière réglementaire ; le locataire paie une grosse somme au début afin de réduire le loyer et le propriétaire doit rendre cette somme pour récupérer l’appartement, ce type de location et souvent appelé « achat de clé ». Dans une telle situation, il faudra commencer par un recensement des données qui permettra par la suite de trouver la bonne approche, c’est justement l’une des missions de l’association Casa mémoire se consacre depuis son inauguration à rassembler les informations concernant les propriétaires, l’année de construction, etc. (Casamémoire s.d.)

La Population Tout d’abord, le centre-ville qui était un des pôles les plus attractifs pour habiter proche de toutes les commodités est aujourd’hui en train de perdre sa population avec un indice de croissance de -1,42%. Selon les statistiques de 2018, la population de Sidi Belyout est jeune dont la moitié est célibataire et une taille de ménage de 3,3 en moyenne. En 2004, seulement 14% de la population avait fait des études supérieures alors que 29,3% n’avait pas fait d’études. Ces chiffres ne prennent sens qu’après la visite du site qui révèlent un contraste social imposant. (Haut-commissariat du plan s.d.) D’après l’échange avec les habitants et les observations faites sur le site, les personnes habitant les appartements suivent en général le portrait suivant : un ménage de trois à quatre personnes, les parents sont souvent actifs et ont fait des études universitaires et leur niveau de vie est moyen. Ils sont soit locataires depuis plus de dix ans ou propriétaires. En parallèle, les ménages habitant les extensions sont des familles nombreuses et intergénérationnelles, les adultes n’ont pas fait d’études supérieurs et sont soit de la classe moyenne basse ou pauvre. Il est aussi important de souligner le fait que les deux cas de figure sont parfois dans la même situation juridique en termes d’occupation.

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Figure 133 : Basé sur une photo prise dans le site Page | 63


Analyse URBAINE ET SOCIALE

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La ville est un organisme vivant, elle n’existe pas sans ses habitants et c’est grâce à eux qu’elle sait survivre et se développer. L’Homme aussi, est attaché à cette ville, qu’il l’aime ou pas. Cette relation dépasse l’aspect fonctionnel et prend une dimension qualitative ; l’espace est alors vivant. Selon Henri Lefebvre, philosophe et amateur de la géographie, la ville est un « espace social », il est défini par les pratiques et les comportements des hommes et est en même temps à l’origine de ses comportements. Afin de mieux comprendre cette dimension vivante de la ville, il propose le concept de triplicité de l’espace ; il existerait donc une dimension conçue, vécu et perçu. (Lefebvre 2000)

L’espace conçu C’est l’espace qui existe dans l’imaginaire des personnes qui l’on construit avant qu’il soit modifié par le vécu. Il sera alors analysé en se basant sur les plans et les idées des concepteurs et des urbanistes qui ont fait la ville.

L’espace vécu C’est l’espace qu’on pratique et qui nous affecte. Cette dimension comprend les ressentis, les activités, et les formes d’appropriation. Il conviendra alors de recenser ces éléments dans la ville. La dimension temporelle ne sera pas suffisamment traitée vue le manque des données collectées. Cependant, l’appropriation en tant que pratique sociale ayant un effet direct sur l’espace sera décortiquée. Pour ce, le concept de triplicité sera aussi appliqué en la divisant en trois types : l’appropriation idéelle, l’appropriation matérielle et l’appropriation symbolique. (Chaya 2019)

L’espace perçu Finalement, l’espace perçu est l’image mentale qu’on se fait de l’espace, c’est comment on le décrit et comment on en parle. Dans notre cas, il s’agira de demander l’avis des Casablancais afin de comprendre leur ressenti, il sera aussi nécessaire de prendre en compte l’art et les réseaux sociaux dans cette partie de l’analyse.

Casablanca et le patrimoine colonial en général, peu importe le pays, est un terrain riche en leçons pour les amateurs de la sociologie urbaine. En effet, c’est un cas où l’espace n’est jamais vécu comme il a été conçu et cette méthode a été choisie parce qu’elle permet d’établir une comparaison entre ces deux réalités parallèles alors que l’espace perçu permettra de découvrir, au final, si l’histoire racontée par l’espace est celle qu’on avait écrite pour lui.

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2.1. Le centre-ville Conçu Page | 66


2.1.1. Au fil du temps…

Figure 134 : Carte Postale : Carte www.geneanet.org, consulté le 03/05/2022

1961

Afin de constater l’évolution de la place au fil des années, un « avant-après » basé sur des cartes postales est indispensable. Pour le bâtiment BMCI, un mur-rideau est ajouté aux deux premiers niveaux et les balcons des derniers étages sont refermés par un vitrage. En revanche, l’immeuble Socifrance n’a changé que de peinture. La place tout aussi animée bénéficie aujourd’hui d’une station de Tramway. Figure 135 : Vue actuelle

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Figure 136 : Carte Postale, www.geneanet.org, consulté le 03/05/2022

1930-1940

Figure 138 : Vue actuelle

Le bâtiment Wafasalaf est resté identique alors que les magasins Paris-Maroc ont disparu au profit d’un immeuble d’habitation.

Figure 137 : Vue actuelle

1920-1930

Figure 139 : Carte Postale www.delcampe.net, consulté le 03/05/2022

L’hôtel Exelsior garde toujours sa même apparence sauf au rez-de-chaussée qui a été habillé en bois dans un style marocain.

Figure 140 : Vue actuelle Figure 141 : Carte Postale non datée, La Maison De Blanc, Casablanca, Google Maps, consulté le 03/05/2022

Le magasin Maison De Blanc dans l’immeuble Tazi toujours existant. Page | 68


Initialement, la place des nations unies (ex place de France) a été conçue comme espace tampon entre l’ancienne et la nouvelle ville. Elle avait une forme rectangulaire tracée sur le plan, mais, vue le nombre des axes routiers donnant sur elle, elle agissait aussi comme un grand rond-point. Figure 143 : Image satellite 2001, Google Earth, consulté le 05/05/2022

Figure 142 : Plan de Casablanca datant du protectorat. M. Josée, www.darna.com, consulté le 05/05/2022

En 2001, les modifications sont nombreuses en termes de traçage de voirie, une partie de la médina est rasée afin de laisser la place à l’avenue des FAR, mais la place est plus grande et agit toujours comme un carrefour routier.

En 2011, le traçage de voirie est toujours le même, mais l’avenue Hassan II et le boulevard Mohammed V sont en travaux afin de mettre en place une ligne de tramway.

Figure 145 : Image satellite 2017, Google Earth, consulté le 05/05/2022

Figure 144 : Image satellite 2011, Google Earth, consulté le 05/05/2022

En 2017, la place a complètement changé ; la voiture n’a plus autant de place qu’avant et certaines rues sont rendues piétonne, mais la végétation est beaucoup moins présente.

Aujourd’hui, la place garde le même aspect en plus du nouvel aménagement au niveau du passage souterrain de Zevaco.

Figure 146 : Image satellite 2021, Google Earth, consulté le 05/05/2022

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2.1.2. Typo-morphologie du centre-ville Voirie et orientation

Figure 147 : Plan d'orientation

Places et rues piétonnes

Voirie carrossable

Ligne de tramway

Le tracé de la voirie témoigne du passé du centre-ville. En effet, la nouvelle ville a commencé à se développer bien avant l’établissement du premier plan d’urbanisme, ce qui explique l’irrégularité du tracé et l’absence d’un fil conducteur clair. Cependant, il est possible d’en ressortir quelques tendances. Tout d’abord, le tracé de la place des nations unies qui s’étend sur deux hectares est dominée par l’axe du boulevard Hassan I d’où sa forme allongée. Certes, ce choix est surtout le résultat de l’extension de la ligne du tramway en présence d’un alignement de bâtiments préexistants, mais il peut aussi être expliqué par une volonté d’intégrer la tour de l’horloge à la place ou de créer un maximum d’ombre vu son orientation et le climat du pays. En outre, la place des nations unies, tout comme la place du 16 novembre, est un point de convergence de plusieurs rues rappelant le modèle d’urbanisme Haussmannien qui a certainement influencé les premiers concepteurs du centre-ville. Ainsi, les îlots ont des formes hétérogènes allant du simple rectangle aux formes plus complexes et irrégulières. Pareillement, la taille change d’un îlot à l’autre, mais la grande différence réside entre ceux du tissu colonial et les îlots plus récents comme celui de l’hôtel Hayat Rengency.

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Avenue des FAR

Figure 149 : Plan de voirie

Places et rues piétonnes

Voirie carrossable

Ligne de tramway

Le tracé du centre-ville repose sur une hiérarchie de voirie claire qui peut être classée en trois catégories ; en plus de l’avenue des FAR, il y a les boulevards : Hassan I, Hassan II et Mohammed V qui structurent la ville et qui se croisent au niveau de la place. Ensuite, se trouve les rues carrossables et les rues piétonnes qui définissent la forme des îlots. Concernant ces dernières, leur emplacement dans le plan n’est pas un hasard, elles ont récemment été piétonnisées afin de lier la place des nations unies et la place du 16 novembre, un geste qui compense le manque de largeur de la première en s’étendant au-delà des obstacles.

Figure 148 : Coupe sur rue Chénier avant et après la piétonisation Page | 71


Les galeries

Figure 150 : Rues intérieures Places et rues piétonnes

Galeries

Voirie carrossable

Rues intérieures

Ligne de tramway

En plus des rues classiques, le site bénéficie de deux autres types de rues : le premier est représenté par les galeries extérieures couvertes par les arcades et ouvertes d’un côté sur l’espace public. Elles sont situées niveaux des rez-de-chaussée des façades de la place et des boulevards traversés par la ligne du tramway. Elles ont un rôle d’espace de transition entre le non bâti et le bâti. Le deuxième est un modèle de rue entièrement couvert sous forme de couloirs traversant l’îlot et dont l’accès est ouvert au grand public. Ce modèle se situe au niveau de l’immeuble 17 sous le nom du passage Tazi et est consacré aux commerces. Ainsi, les bâtiments du quartier art-déco ont été conçus en tant que composantes urbaines permettant une continuité et une harmonie entre l’intérieur et l’extérieur en atténuant la rupture qui se trouve habituellement entre les deux.

Figure 151 : Passage Tazi, B. Moussaoui, www.pinterest.com, consulté le 06/05/2022 Page | 72


Hauteurs En passant du plan à la coupe, on découvre un autre visage de la place. La différence entre les tissus urbains du nord et ceux du sud est claire. En se plaçant en face du quartier art-déco, les volumes sont espacés régulièrement et la Figure 154 : Skyline sud et nord de la place des nations unies continuité urbaine est présente en dépit de l’hétérogénéité des hauteurs. Du côté opposé, le scénario est différent, l’hôtel Hayat regency domine le paysage qui n’est composé au premier plan que de la tour de l’horloge et de la coupole tandis que le deuxième plan est représenté par l’enceinte de la médina qui ne dépasse pas la hauteur de l’horloge. Figure 153 : Vue sur la médina

Figure 155 : Vue sur la tour de l'horloge

Figure 152 : Vue sur la tour de l'horloge de la place administrative

En pratiquant l’espace, il est difficile de ne pas remarquer le jeu de perspective entre les deux extrémités de la place ; d’un côté, s’impose la tour de l’horloge solitaire dans un paysage ouvert, de l’autre, la tour de l’horloge de la place administrative apparait au bout de la perspective art-déco du boulevard Hassan II. Une scène qui résume parfaitement la différence entre la morphologie urbaine du nord et du sud, laissant croire que la place des nations unies joue le rôle d’un espace tampon, un pont entre deux réalités. Page | 73


L’îlot fermé

Figure 156 : Ilots du terrain d'étude

Places et rues piétonnes

Voirie carrossable

Ligne de tramway

La configuration des îlots du site est similaire à celle du modèle de l’ilot fermé ou haussmannien, conçu afin de créer une homogénéité au niveau de la rue en garantissant l’alignement des parcelles. Ainsi, la façade extérieure est conçue pour la rue ; elle offre aux habitants de la ville un paysage harmonieux marqué par des alignements de grandes fenêtres alors que les façades de la cour intérieure commune sont moins travaillées. Figure 157 : îlot fermé : intérieur et extérieur

Dans cette typologie, la priorité du concepteur est d’assurer la visibilité et l’ordonnancement des façades extérieures alors que l’espace intérieur, plus intime et isolé, n’appartient qu’aux habitants de l’îlot qui peuvent le modifier sans changer son apparence extérieure. Page | 74


Ainsi, l’évolution de l’îlot fermé se passe à l’intérieur et échappe aux regards. En effet, les cours intérieures de ce type d’îlot restent rarement intactes ; souvent, l’image que le premier concepteur lui donne est complétement transformée par l’action des habitants. C’est pour cette raison que ce processus est représentatif des occupants de l’espace. Ce phénomène est répondu dans le centre-ville Casablancais comme constaté dans l’état des lieux. Les extensions ne sont alors que l’évolution naturelle du modèle de l’îlot fermé. Néanmoins, les habitants du site ne se sont pas contentés de modifier les cours intérieures, dans plusieurs cas, les extensions s’installent également sur les terrasses (vue que la toiture plate est la règle) en faisant attention à laisser un recul qui leur garanti d’être à l’abri des regards. Ce mode de croissance est encore plus justifié en prenant en compte les jeux de volumes qui sont, comme constaté pendant la visite guidée, une expression architecturale très courante donnant aux extensions sur les terrasses la possibilité de ne pas se faire trop remarquer.

Figure 158 : L'évolution de l'îlot fermé

Figure 159 : Images satellite 2003, 2009, 2022, Google Earth, Consulté le 09/05/2022

Figure 160 : Partie apparente de l'extension

Il n’est pas facile de trouver des images ou des sources qui montrent l’état initial des terrasses avant les extensions puisqu’elles ont été majoritairement construites très tôt après l’indépendance. Cependant, l’exemple ci-dessus représente une extension qui date du début des années 2000. Elle est presque invisible de la rue vue son recul par rapport à la façade. Page | 75


2.1.3. L’habitat L’appartement est le seul model d’habitat au centre-ville, un choix qui a été fait dès le début de l’urbanisation de Casablanca par Prost, inspiré des tendances des grandes capitales européennes où l’immeuble est la solution qui permet d’économiser le foncier, mais aussi de loger plusieurs ménages dans un cadre moderne et luxueux. Ainsi, les premiers immeubles d’habitat verront le jour au Maroc dès le début du XXème siècle en proposant des appartements destinés aux Européens et aux Marocains aisés. Ces immeubles sont composés de trois à six étages avec un rez-de-chaussée souvent réservé aux commerces. La partie suivante consistera à analyser l’aménagement intérieur de quelques-uns. L’immeuble Bendahan L’étage de l’immeuble Bendahan est constitué de huit appartements dont la moitié dispose d’une seule chambre et l’autre de deux. L’aménagement consiste à aligner les pièces de vie (salon, salle à manger et chambres) sur le balcon courant de la façade extérieure alors que les autres pièces « humides » et la cage d’escalier sont disposés sur la cour intérieure de l’îlot. Une conception qui correspond au mode de vie européen, jugée moins « pudique » que l’architecture indigène qui se renferme sur l’extérieur et s’ouvre sur l’intérieur considéré comme le cœur de la maison. De même, les pièces de l’appartement sont spécialisées dont Figure 161 : Plan de l'étage courant, immeuble la cuisine et la salle à manger qui n’ont jamais fait partie du quotidien Bendahan, (Cohen 2004, p. 171) des marocains auparavant. L’immeuble Socifrance Cet immeuble est composé d’un premier étage destiné aux bureaux, de quatre étages abritant chacun dix appartements de deux pièces et d’un sixième étage consacré à un grand appartement d’angle donnant sur la place ainsi que des studios qui profite d’une terrasse. L’immeuble est conçu pour accueillir des jeunes couples et des célibataires dans un cadre luxueux. En effet, en plus des pièces classiques de l’immeuble précédant, ces appartements peuvent comporter un bureau. Tout comme l’immeuble précédant, le trajet créé au sein de l’appartement commence par un hall qui donne sur le salon et la salle à manger permettant de les mettre en avant, puis la cuisine et les chambres qui sont connectées à la salle de bain.

Figure 162 : Plans de l'étage courant et du dernier étage (Cohen 2004, p. 173) Page | 76


2.1.4. Comparaison avec le modèle précolonial D’un point de vue urbanistique, le concept de place publique n’existe pas de la même manière dans le modèle traditionnel. La vie sociale de la population se passait dans les rues commerçantes, les mosquées et les places qui se trouvaient souvent à l’extérieur ou à la périphérie de la ville et qui avaient une fonction précise (armée, souks, etc.). Ces espaces publics sont bien isolés des habitations qui ne sont accessibles qu’en traversant les rues étroites de la médina, contrairement au modèle importé où les habitations représentent les arrêtes de la place. Cette mixité de fonction est poussée encore plus loin en l’intégrant aux immeubles dont le rez-de-chaussée est commercial et les étages rassemblent habitations et bureaux.

Cuisine

Hall

Salle à manger

Salon

S.D.B

Chambre

W.C

Pièce 2

Hall

Patio

Pièce 1

Salon

Figure 163 : Différence entre l'aménagement traditionnel et l'aménagement des appartements du centre-ville

Ainsi, les habitants marocains devront apprendre à vivre dans des appartements qui leur dictent un nouveau mode de vie. Tout d’abord, le concept de l’immeuble impose une relation de voisinage verticale qui est nouvelle pour les habitants. Aussi, les pièces sont tournées vers l’extérieur avec des fenêtres donnant sur la rue alors que le modèle traditionnel ne dispose pas de fenêtres et est orienté vers la cours intérieure. D’un autre côté, la spécialisation des pièces est beaucoup plus poussée que dans les maisons traditionnelles composées de plusieurs pièces polyvalentes (aménagées comme un salon), d’un W.C et d’un salon principal qui se trouve au fond de la maison. En outre, le hall qui a une forme ouverte et basique dans le modèle européen est en chicane dans la maison traditionnelle. Ce changement de cadre aura son impact sur les habitants marocains, mais aussi sur ces appartements qui seront parfois modifiés afin de correspondre au mode de vie et aux mœurs des nouveaux occupants. Une forme d’appropriation digne d’être analysée.

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2.2. Le centre-ville vécu Page | 78


Cette partie du travail se focalisera sur deux phénomènes socio-spatiales qui définissent la relation des usagers avec l’espace. D’un côté, les pratiques peuvent être classés en différents types d’activités qui permettrons, une fois analysés, de discerner le lien entre l’usage et l’usager. D’un autre côté, ce lien peut aussi être lu à travers les modes d’appropriation de l’espace ; un phénomène où c’est l’usager qui s’exprime directement en marquant son territoire. Ainsi, l’analyse du vécu commencera d’abord par définir les catégories des usagers. En effet, la population qui pratique le centre-ville de Casablanca n’est pas homogène, elle comprend des individus et des groupes de différentes classes sociales. Cette catégorisation sera générale et ne sera certainement pas exhaustive, mais elle sera utile pour comprendre la masse en se basant sur les observations personnelles effectuées sur place, les questionnaires et les entretiens ainsi que les statistiques disponibles. Ensuite, les types d’activités seront énumérées selon ce qui a été recensé sur le site et seront comparées par rapport aux différentes catégories sociales. La dernière partie de l’analyse consistera à identifier les formes de l’appropriation sur le site en les organisant comme suit : o Les formes d’appropriation à dominante matérielle : elles sont liées aux modes d’usage de l’espace qui peuvent être exclusifs ou autonomes ; une expression de la volonté de posséder l’espace en excluant les « autres ». Cette forme permettra aussi d’identifier les détournements par rapport à l’espace conçu à travers un changement d’usage, mais aussi le contrôle exercé par certaines catégories sociales. En bref, cette partie traitera l’usage de l’espace dans sa dimension physique. o Les formes d’appropriation à dominante idéelle : elles résident, d’une part, dans l’attachement des usagers à l’espace qui se concrétise sous forme d’un sentiment d’appartenance ; d’un « chez-soi ». D’une autre part, l’appropriation idéelle est aussi le savoir-faire de l’espace ; la capacité des usagers de pratiquer l’espace. o Les formes d’appropriation à dominante symbolique : en plus d’être attaché à l’espace, ce dernier devient l’un des attributs de l’usager, il fait partie de son identité. Par exemple, la patrimonialisation est une de ces formes d’appropriation où l’espace devient un symbole identitaire. Ces formes seront lues à partir des marquages qui peuvent être définis comme toute action faite sur l’espace que ce soit une démolition, une modification, une activité, une loi…etc. (Veschambre 2008)

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2.2.1. Les groupes sociaux Les classes sociales Selon les statistiques de 2004, 8,1 % de la population de la préfecture de sidi Belyout est en dessous du seuil de pauvreté alors que le reste appartient à la classe moyenne (Haut-commissariat du plan s.d.). Ces deux classes représenteront alors les catégories socio-économiques en plus de la classe aisée qui ne se rend au site que rarement afin de bénéficier d’un des services comme celui d’un médecin ou encore d’un avocat par exemple. Concernant les habitants, la classe dite pauvre est celle qui habite dans les extensions alors que la classe moyenne réside dans des appartements. Une corrélation a aussi été ressentie entre l’état du bâtiment et la classe sociale ; plus les habitants sont « aisés », plus ils s’occuperont du bâtiment. Les tranches d’âge Naturellement, les pratiques de l’espace d’un enfant de cinq ans ne sont pas les mêmes que celles d’un adulte. Afin de pouvoir comprendre le vécu des usagers, il faudrait prendre en compte les différentes tranches d’âge qui, afin de simplifier le travail, seront présentés comme ceci : Les enfants de 0 à 13 ans, les adolescents de 13 à 18 ans, les jeunes de 18 à 26 ans, les adultes de 27 à 60 ans et les ainés +61. Le type d’usage C’est les différents cadres qui lient les usagers au site. Ce cadre peut être soit le travail pour toute personne exerçant une profession légale ou illégale dans le site, soit l’habitat pour ceux qui y résident, soit le passage quand le site n’est pas la destination, ou encore la visite pour les usagers externes. Le genre La société marocaine, tout comme les autres sociétés du monde, avait un passé dominé par la gent masculine. Aujourd’hui, même si la situation s’est améliorée, il reste encore des traces de ce passé qui impose des pratiques différentes pour chaque genre. Les groupes ethniques Les casablancais forment une société hétérogène, elle est connue comme étant une ville construite par les étrangers et ses habitants proviennent de toutes les régions du Maroc ; les « vrais Casablancais » sont alors inidentifiables. Cette mixité est familière et ne cause plus autant de friction qu’auparavant, en revanche, une nouvelle catégorie ethnique commence à s’installer dans la ville ; il s’agit des immigrants subsahariens. Une nouvelle mixité à laquelle la ville ne s’est pas encore habituée.

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2.2.2. Les activités du centre-ville Les flux

Figure 164 : Schéma sensible des flux

Les flux découlent de chaque recoin passant par les boulevards et les rues piétonnes et se concentrent au niveau de la place. Selon les observations sur le terrain, les usagers à l’origine de cette concentration ne considèrent pas la place comme destination principale, mais sont surtout des passagers qui font la file devant les stations de transport en commun. Ils proviennent des zones attractives entourant le site comme la médina ou de leurs lieux de travail. En outre, les boulevards et les rues piétonnes sont aussi animées par une autre catégorie sociale visitant le site afin de bénéficier des différents commerces et services.

Figure 165 : File devant la station de Bus

Figure 166 : File devant la station de Tramway

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Les activités économiques formelles Avec le centre-ville de la capitale économique du Maroc comme terrain d’étude, il n’est pas surprenant que les pratiques lucratives soient très répondues et diversifiées. Afin de ne pas se perdre et de bien cadrer l’étude, cellesci seront classées selon leur nature qui est soit formelle ; caractérisée par le payement des impôts, soit informelle. Elles se trouvent dans tout le site et appartiennent toutes au secteur tertiaire.

Figure 167 : Schéma des activités économiques formelles Bureaux service

Horeca

Epiceries

Commerce

Hôtellerie

Banques

Plusieurs tendances peuvent être relevées dans ce plan : o Les façades donnant sur la place abritent la grande majorité des services bancaires en plus de l’Horeca sous forme de cafés ou de restaurants alors que le reste de l’îlot est consacré au commerce (vente de vêtements, d’antiquités, librairies…etc.). o Les épiceries ou les commerces de proximité sont beaucoup plus présents au niveau des îlots de l’ouest alors que le commerce général y est presque absent. o L’hôtellerie est mise à distance en se situant sur les coins nord et ouest de la place (en plus de l’hôtel Hayat Regency qui se trouve au nord) et les bureaux de service (médecins, avocats, architectes, écoles de formation…etc.) sont présents dans tous les immeubles d’habitation.

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Les activités économiques informelles

Figure 168 : Schéma des activités économiques informelles Services

Commerce

Mendiants

Le site, comme le reste de la ville, n’échappe pas aux pratiques illégales qui sont devenues un vrai fléau à l’échelle nationale. A Casablanca, le poids du secteur informel était à 19,2% en 2014 (Haut-commissariat du plan s.d.). Dans le site, ces activités ont trois formes : la mendicité, les services (cireur et location de jouets) et le commerce. Les personnes pratiquant ce type de délinquance semblent préférer les endroits qui connaissent un grand flux. Figure 169 : Cireur en bas de l'immeuble 1

Figure 171 : Des vendeurs informels sous l'hôtel Exelsior

Figure 170 : Location de jouets pour enfants Page | 83


Les activités économiques pratiquées dans le centre-ville ne sont pas les mêmes pour toutes les catégories sociales ; il est évident que les activités informelles sont intrinsèquement liées à la classe pauvre alors que les activités formelles sont réservées à la classe moyenne. En effet, la plupart des « délinquants » sont pauvres et proviennent en majorité des bidonvilles environnants. Concernant les tranches d’âges, la mendicité semble être dominée par les enfants, ils s’approchent des passants et demandent de la monnaie ou se rassemblent devant les billetteries de tramway. Durant la visite de site, une conversation a eu lieu avec un de ces enfants : -

« Où habites-tu ? » L’enfant, en indiquant l’est avec son index : « De là-bas » « Qu’est-ce qu’il y a là-bas ? » « Le bidonville. »

En effet, l’enfant a probablement été en train d’indiquer le quartier de Sidi Moumen, l’un des quartiers les plus pauvres de la ville avec une grande présence de bidonvilles ; un long trajet rendu plus cours grâce au tramway. Selon les déclarations de quelques habitants de classe moyenne, le phénomène s’est multiplié depuis l’inauguration du tramway. Une remarque qui exprime une forme de regret pour un passé où cette personne n’avait pas accès au centreville. La tranche d’âge jeune est présente dans toutes les activités formelles, mais aussi dans le secteur informel en offrant des services comme gardiens de voitures, cireurs, intermédiaires…etc., ou en faisant du commerce. Les adultes pratiquent des services formels en plus du commerce dans ses deux formes tandis que quelques ainés le font de manière informelle.

Figure 172 : Un ainé pratiquant du commerce informel, près du passage Tazi

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Les activités de loisirs Dans le cas de notre site, les activités culturelles ne sont pas très présentes dans leurs formes classiques, contrairement au reste du centre-ville. Cependant, l’absence d’un équipement culturel n’est pas un frein pour la place qui accueille des talents à ciel ouvert. En effet, à partir de 18h, la place s’anime alors que les gens viennent de quitter leurs bureaux ; c’est l’heure où plusieurs regroupements se forment autour des artistes ; que ce soit des musiciens, des improvisateurs ou autre. En plus de ces Figure 173 : La place des nations unies durant le festival Jazzablanca en 2019. activités spontanées, la place a aussi été le www.jazzablanca.com, consulté le 13/05/2022 lieu de quelques festivals comme Jazzablanca de 2018 à 2020. Le premier type d’activités culturelles est ouvert à tout le monde sans ségrégation alors que les festivals excluent la classe pauvre qui assiste de loin. En plus, le sexe féminin est, comme le témoigne la photo, minoritaire dans ce genre d’évènement, mais ce n’est pas inhabituel, c’est le cas dans l’espace public en général, faisant de ce phénomène un sujet d’étude à part entière. En plus de l’offre d’emploi, le centre-ville est attractif grâce au commerce puisqu’il propose un grand nombre de magasins, en plus de pôles commerciaux adjacents qui ne sont autres que la Médina et le boulevard Mohammed V. Les casablancais s’y rendent pour faire du shopping et pour profiter, éventuellement, des cafés et des espaces publics.

Figure 174 : Ambiance de la place, une après-midi de la semaine Page | 85


Certes, la place est un espace public ouvert à toutes les catégories sociales peu importe leur provenance. Cependant, en visitant le site, on se rend compte que l’espace est dominé par la classe moyenne, inférieure et la classe pauvre tandis que les classes moyenne supérieure et aisée y sont absentes. Un fait qui peut être expliqué par leur volonté de se distinguer en fréquentant des sites plus huppés comme le quartier côtier Ain Diab, mais aussi par le sentiment d’intrusion dans un espace que la classe populaire s’est approprié. Figure 175 : Ambiance de la place, une après-midi de la semaine

Pourtant, cette tendance ne se traduit pas en un espace homogène, la mixité sociale a toujours eu lieu dans la place des nations-unies. En effet, même si la classe aisée ne ressort pas du décor elle n’y est pas totalement absente. En plus, dans un tel espace urbain, il n’est pas étonnant de tomber sur une scène qui représente des tensions entre les différents groupes sociaux. Par exemple : un enfant mendiant qui vise de ses mains une femme d’origine subsaharienne en imitant un revolver ; la preuve que des conflits d’appropriation peuvent aussi avoir lieu entre des groupes marginalisés appartenant à la classe inférieure.

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2.2.3. L’appropriation du centre-ville L’appropriation matérielle Ainsi, le centre-ville de Casablanca est dominé par deux classes sociales dont chacune se l’approprie à sa manière. Dans cette partie, le but est de comprendre comment chacune a choisi de marquer son territoire afin de pouvoir le contrôler. Pour la classe moyenne, le contrôle de l’espace est direct : l’espace intime (l’appartement) est fermé et la présence des habitants est visible à l’extérieure à travers l’exposition du linge dans les balcons, les ventilateurs de climatisation sur les Figure 179 : Marquage de la façade, immeuble 4 façades ou encore les modifications au niveau de celles-ci. A l’échelle de l’immeuble, tout comme la classe pauvre, ils modifient l’espace physique en refermant les balcons donnant sur la cour intérieure ou en ajoutant des extensions.

Figure 176 : Marquage en modifiant la façade, immeuble 18

Figure 177 : Marquage en modifiant l'intérieur, immeuble 8

Figure 178 : Marquage en modifiant la façade (ajout des grilles aux fenêtres), immeuble 10 Page | 87


Au niveau de l’appartement, les habitants de la classe moyenne ont S.D.B dû s’adapter à un nouveau mode d’habitat. En faisant cette Cuisine Hall démarche, l’usager s’approprie son milieu de vie en le rendant plus « marocain ». Ainsi, la salle à manger est souvent supprimée pour agrandir le salon et lui rendre l’aspect qu’il avait dans les maisons Salle à Salon Chambre marocaines ; les bureaux sont convertis en chambres, certaines manger pièces sont transformées en deuxième salon alors que la cuisine, une pièce occidentale, est entrée dans le quotidien de la société. Figure 180 : Modifications courantes des appartements Les appartements du centre-ville semblent alors avoir réussi le test Agrandissement de salon en supprimant la salle à d’adaptabilité. En effet, les habitants qui ont participé à l’enquête manger ont affirmé être satisfaits de leurs habitations. Chez la classe inférieure, l’espace intime est ouvert et parfois directement visible dès l’entrée de l’immeuble quand il est au rez-de-chaussée. En terrasse, les extensions sont moins visibles pour les étrangers, mais l’accès est beaucoup plus facile et ouvert pour les autres habitants de l’immeuble. Ce choix est le résultat d’une autre manière d’habiter l’espace où l’intime et l’extérieur sont confondus. Ainsi, il est normal que les marquages de l’espace de ce groupe social soient aussi retrouvés dans l’espace public.

Conversion de bureau ou de salle à manger en chambre ou en deuxième salon selon les besoins du ménage.

Au niveau de l’immeuble, ce marquage se fait de la même manière, le linge est exposé et les portes sont ouvertes, un geste qui témoigne du sentiment de confiance et de Figure 181 : Enfants qui jouent dans une rue piétonne légitimité que ces habitants peuvent ressentir. A l’extérieur, l’appropriation se fait aussi par certaines pratiques. Par exemple, les familles des classes inférieures sont plus susceptibles de laisser leurs enfants jouer dans l’espace public sans supervision ou de sortir pour se détendre pendant une longue durée. En effet, l’appropriation de l’espace est tellement poussée au point de retrouver le confort du « chez-soi » à l’extérieur. En plus, les marquages d’appropriation se font aussi à travers les graffitis qui renvoient, dans le cas de la synagogue par exemple, à un club sportif du derby casablancais, une composante identitaire populaire très présente chez la jeunesse pauvre.

Figure 182 : Marquage espace public, graffitis Page | 88


Il est intéressant de se demander si le déménagement de la classe marocaine moyenne et aisée ainsi que le phénomène d’abandon sont causés par la confrontation entre ces deux visions opposées concernant l’espace public et les limites de son utilisation. Il est aussi important de rappeler le rôle que joue la classe sociale dans ce comportement, les constats cités peuvent aussi être expliqués par le manque de moyen. Par exemple, il est compréhensible de passer plus de temps à Figure 183 : Marquage bâtiment abandonné l’extérieur si on habite avec une famille nombreuse dans une extension de 60m².

L’appropriation idéelle L’une des formes de l’appropriation idéelle est la maîtrise de la pratique de l’espace, un des exemples les plus simples est l’accès ; les Casablancais se sont appropriés le centre-ville en créant un code que seul eux comprennent pour y accéder. En effet, le système de transports en commun de Casablanca peut facilement embrouiller un visiteur étranger de par les numéros de bus qu’il faut connaitre par cœur (7 pour la place des nations unies) et les signes de mains à faire pour indiquer au taxi la destination désirée. Ce savoir-faire réside aussi dans la pratique de la place, il est très facile de différencier entre les usagers récents et les habitués ; si les premiers préfèrent découvrir le centreville en se baladant, les habitués ont des destinations bien plus précises que ce soit des cafés cachés à l’intérieur d’un îlot ou un lieu de travail. L’appropriation idéelle réside aussi dans le sentiment d’attachement que les usagers éprouvent pour l’espace. Pendant l’entretien, tous les habitants interrogés, peu importe leur catégorie sociale, ont affirmé être attachés au centre-ville et qu’ils auraient aimé être propriétaires du bien où ils résident depuis des années8. Une autre manifestation de cet attachement est la volonté de prendre soin du bâtiment même en étant locataire ; dans le cas de l’immeuble 3, les habitants se sont réunis et ont pu imposer à l’agence d’agir et de ravaler la façade. Pour le reste des Casablancais, l’attachement change d’une personne à une autre, mais reste la norme et plusieurs associations de sauvegarde dont Casamémoire en témoignent. En outre, l’analyse de l’espace perçu permettra de mieux comprendre la place symbolique du site chez les casablancais.

8 Cette volonté est souvent bloquée par le flou administratif qui complique la démarche.

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L’appropriation symbolique

Avenue des FAR

Figure 184 : Noms actuels

Figure 185 : Noms pendant le protectorat

Cette forme d’appropriation a lieu quand l’identité des usagers se mêle à celle de l’espace. Dans le cas du site, celle-ci a commencé juste après l’indépendance quand les autorités ont décidé de renforcer l’identité marocaine du centre-ville en remplaçant les noms français des rues et des lieux publics par des noms marocains.

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La patrimonialisation est aussi l’une des formes symboliques d’appropriation. Le centre-ville colonial est aujourd’hui repris dans les plans de patrimoine9 et la population milite pour qu’il soit classé à l’échelle internationale. Il est aussi repris par les artistes qui souhaitent représenter le vécu des Casablancais. L’un des exemples les plus parlants est le film Casanegra de Nour Eddine Lakhmari qui date de 2008 et où la ville coloniale est un personnage à part entière qui interagie avec les autres. Le créateur de contenu spécialisé en cinéma Youssef Ksiyer décrit la relation entre les personnages et la ville dans sa vidéo YouTube intitulée « ‫( » كازا نيكرا أحسن فيلم ديال لخماري؟‬Casanegra, le meilleur film de Lakhmari ?) : « L’un des personnages principaux du film est la ville elle-même. […] Casablanca exerce une pression sur les personnages ; les immeubles et les rues semblent renfermer Karim et Adil […] Les touristes viennent à Casablanca pour voir la beauté de l’art déco et se perdre dans ce musée à ciel ouvert mais pour les habitants de Casanegra, on ne sait pas si cette beauté leur est encore visible ou s’ils n’y voient que des murs de prison infranchissables. […] A la fin du film la vie de Karim est Adil n’a pas changé, [..] ils sont toujours bloqués à Casablanca et malgré les circonstances, ils vivent encore dans cette ville dont ils ont, peut-être, toujours été amoureux ». Ainsi, ce film a pu représenter la place symbolique de la ville art-déco chez les usagers qui, certes, ne sont pas satisfaits de son état actuel, mais qui y sont attachés au point qu’ils fassent de cet espace une partie de leur identité. Ces expressions artistiques sont alors un des éléments les plus significatifs en termes d’analyse des formes de l’appropriation symboliques. C’est pour cette raison que l’espace perçu, la dimension symbolique de l’espace, est la prochaine à être étudiée.

9 Voir p. 108

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2.3. Le centre-ville perçu Page | 92


2.3.1. L’art et le centre-ville Selon Marcel Mauss, « un objet d’art, par définition, est l’objet reconnu comme tel par un groupe » (Mauss 1971, p. 89). L’art est alors fait par le groupe et est, par conséquent, un des langages de la société. Ainsi, les artistes s’expriment au nom du groupe en traduisant leur manière de percevoir l’espace en œuvre d’art. Dans le cas de la fresque de l’artiste italien Millo « Enjoy the silence », l’objet de l’art reflète le regard d’un étranger qui découvre la ville et qui dessine son expérience sensorielle dans l’ambiance bruyante du centre. Un grand nombre de Casablancais s’y sont attachés et se sont retrouvés dans l’œuvre dont la vie a été courte. En 2018, la fresque a été recouverte de peinture blanche après un ravalement de façade, un incident qui a été fortement dénoncé par la société. Si Millo perçoit le centre-ville comme un endroit bruyant et Figure 186 : Fresque murale "Enjoy the silence" à 300 mètres rempli, d’autres artistes perçoivent la ville d’un angle plus de la place, www.millo.biz, consulté le 17/05/2022 attachant.

Dans l’exposition « Casablanca vue d’en haut », le photographe Adnane Zemmama a représenté une nouvelle facette de la ville ; un point de vue qui permet de lire l’histoire de la Casablanca à travers son paysage urbain. Ce nouveau point de vue laisse aussi apparaitre la face cachée de la ville ; c’est un visage anarchique, mais calme donnant sur les terrasses, les extensions et les belles façade art-déco avec l’église coloniale sacré-cœur et les tours jumelles en arrièreplan. Il déclare pendant une interview : « Ce projet a été une manière de me réconcilier avec ma ville natale, à laquelle je n’appartiens plus. J’ai compris que, proche ou loin, cela ne change rien, on ne peut qu’aimer Casablanca, avec ses qualités comme ses défauts » (Jadraoui 2022) Les défauts de Casablanca font alors partie de son charme. A l’image de New York des années 70, elle est une ville qui Figure 187 : Photo prise au-dessus de la place, Casablanca vue intimide et intrigue en même temps. d'en haut, Adnane Zemmama, www.artfirst-galerie.com, consulté le 17/05/2022 Page | 93


A l’occasion du mois de Ramadan, un photographe casablancais crée le concept nommé « Ramadance » en invitant un danseur par jour pendant tout le mois qui performe dans l’ambiance du crépuscule casablancais. Son but est de représenter la culture marocaine à travers la ville de Casablanca en invitant des artistes de styles et groupes sociaux différents. Le concept a connu un grand succès chez les Figure 189 : Dance devant la coupole de internautes marocains. Zevaco, Idem.

Figure 188 : Dance devant le bâtiment Tazi, place du 16 novembre, Mouhsine Harris, www.Instagram.com, consulté le 18/05/2022

Figure 190 : CASA MON AMOUR, Aïcha Elbeloui, www.aichaelbeloui.com, Consulté le 18/05/2022

Dans l’œuvre « CASA MON AMOUR » de Aïcha Elbeloui, une architecte et artiste de Casablanca, l’horloge de la place des nations unies est au centre entre la partie industrielle de la ville et les quartiers huppés de l’ouest, le tout retissé afin de compléter l’image de la ville de Casablanca pleine de contraste. Page | 94


2.3.2. Le centre-ville dans les médias Aujourd’hui, il est devenu possible pour toute personne souhaitant s’exprimer de le faire de manière anonyme et publique grâce aux réseaux sociaux. Il est alors nécessaire de prendre en compte cette forme d’expression en faisant ressortir les idées qui reviennent le plus. Pour ce faire, plusieurs plateformes en ligne ont été fouillées afin de diversifier les sources et d’être plus proche de la réalité (réseaux sociaux, avis google, avis des sites touristiques, etc.) Critiques et reproches Pour certains, le centre-ville propose beaucoup plus de négatif que de positif ; on lui reproche d’être trop fréquenté, trop sale, dangereux ou pas assez entretenu. En effet, ces reproches s’accordent avec ce qui a été relevé dans la partie « situation actuelle », mais ils sont réversibles ; le site n’est alors pas une cause perdue, il mérite une seconde chance surtout que pour certains, le potentiel du centre-ville a déjà été atteint au passé... Nostalgie « Le centre-ville était mieux avant », c’est l’avis d’une grande partie des usagers qui pensent que la réponse aux problèmes est dans l’histoire. En effet, c’est une possibilité à prendre en considération ; peut-être que le site était mieux géré avant et qu’il faudrait se remettre en question afin de trouver la réponse adéquate. Optimisme Si le premier groupe a soulevé les défauts du site, celui-ci laisse apparaitre ses points forts et son potentiel ; même-ci le centre-ville n’est pas parfait, il a des atouts dont certains peuvent aussi être considérés comme défauts. En effet, si on reproche à la place de ne pas être assez touristique, c’est aussi pour la même raison qu’on y trouve moins de vendeurs et de faux guides. Cette idée permet de nuancer les autres avis qui sont beaucoup plus tranchés. Page | 95


2.4.

Quel avenir pour le

centre-ville ? Page | 96


2.4.1. Synthèse et interprétations Après le constat, le but de cette analyse est de pousser la réflexion plus loin afin de comprendre les enjeux du terrain d’étude. Celle-ci se fait en adoptant une approche sensible prenant en compte la dimension quantitative et qualitative de l’espace qui est alors étudié comme espace social. Ainsi, pour commencer, l’espace a été décortiqué et chaque dimension a était traitée individuellement. Ensuite, il s’agira dans cette conclusion de rassembler les pièces du puzzle afin d’en sortir des outils de réponse. En guise de synthèse, les résultats de la première partie peuvent être présentés comme suit :

L’espace conçu o Le site est de plus en plus piétonnisé, un choix qui compense la longueur de la place et s’accorde avec l’intention initiale des concepteurs qui était d’adapter l’espace au piéton en créant des galeries et des passages. Cette piétonisation est accompagnée de la minéralisation qui laisse peu de place à la verdure. o La place est un élément de liaison entre les différentes composantes urbaines qui l’entourent. o Le mode de croissance des immeubles d’habitat est en grande partie dicté par la typologie de l’îlot fermé qui permet aux extensions d’être à l’abris des regards. o L’habitat colonial est différent du modèle traditionnel. L’espace vécu o Les habitants de classe moyenne s’approprient l’habitat en modifiant l’intérieur, mais aussi, dans certains cas, en modifiant la façade. o Une grande partie de la classe pauvre souffre de précarité avec un habitat et un travail informel. o La place des nations unie est un carrefour d’artistes, c’est un des centres créatifs de la ville. o Le centre-ville est dépendant de sa fonction commerciale. o La pauvreté est l’une des composantes du paysage de la place. o La paupérisation du centre-ville semble avoir poussé quelques habitants de classe moyenne à le quitter. L’espace perçu o Les atouts et les défauts du centre-ville font de lui un terrain fertile pour les artistes. o Certains usagers dénoncent l’état actuel du site au point de ne plus le fréquenter. o La nostalgie ouvre la porte à la possibilité de chercher des réponses dans le passé. o Le centre-ville est, dans certains cas, apprécié pour sa nature urbaine intrigante et accepté malgré ses imperfections. Page | 97


En croisant ces notions, quelques éléments ressortent. D’un côté, la précarité est un phénomène qui domine l’espace, elle se présente physiquement sous forme d’habitat clandestin de bâtiments délabrés et est vécu à travers des activités informelles et un sentiment d’insécurité. D’un autre côté, le potentiel culturel du site n’est pas négligeable, il ressort de sa richesse architecturale, de son rôle de liaison urbaine et de son influence créative. Ainsi, ce constat peut être reformulé en deux lignes directrices qui représentent un début de réponse à la problématique : Une solution économique et culturelle : La priorité est de régler le problème de précarité à travers des stratégies économiques et urbaines permettant au centre-ville de regagner son aspect luxueux de la période coloniale et d’attirer des touristes. Ce processus correspond à la solution de gentrification qui a été utilisée dans d’autres capitales comme le Caire ; elle consiste à remplacer la population pauvre pas une autre qui est beaucoup plus aisée en investissant dans les activités attractives à celle-ci. Une solution socio-culturelle : Elle a comme priorité de mettre en valeur le potentiel culturel du site en maintenant la population actuelle tout en restructurant sa situation et en l’intégrant dans le développement du centreville. Cette approche est alors à l’image de celle qui a été appliquée aux centres-villes coloniaux de l’Amérique latine. (Gravari-Barbas 2005)

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2.4.2. Hypothèse D’après les résultats de l’analyse, le centre-ville est loin d’être un « haut » quartier. La gentrification est un long processus qui ne prend pas en compte la population de classes inférieure. Afin de trouver la bonne réponse, il est nécessaire de se rappeler l’image du centre-ville chez la population casablancaise. En effet, comme dans le cas du Caire, le site n’est pas attractif pour la classe aisée et les gens qui le pratiquent sont certes de classes plus modestes, mais diversifiées. Le centre-ville est avant tout un pôle de mixité sociale et urbaine et, vu comment cet espace est perçu, c’est cette mixité qui lui donne sa valeur et son charme. Il est cependant important de souligner la différence entre la mixité et la précarité ; la pauvreté est un fléau à l’échelle nationale qui doit être traité au lieu d’être caché. Certes, la solution doit comprendre une approche économique qui permettra d’attirer les investisseurs et de relancer le marché casablancais afin d’améliorer la qualité de vie de la population. Néanmoins, cette approche ne doit pas exclure les classes inférieures en les mettant « en attente » le temps que les investisseurs aient besoin de main d’œuvre. En guise d’exemple, Marrakech est une ville qui a subi un processus de gentrification axé sur le tourisme. Aujourd’hui, elle est la capitale touristique du pays en échange de son patrimoine immatériel (théâtre et spectacles de rue) qui se concentrait dans Jamaa Lefna, la place emblématique du centre-ville Marrakchi. En effet, la muséification de sa médina et la multiplication des hôtels de luxe ont poussé les usagers à s’adapter à la demande internationale et les artistes de rue traditionnels ont cédé la place aux vendeurs de souvenirs.

Ainsi, la réponse adéquate devrait se baser sur une approche socio-culturelle afin d’éviter de perdre l’identité du centre-ville qui a toujours été un lieu de mixité et d’expression.

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Figure 191 : Place des nations unies, Kenpiic, www.instagram.com, consulté le 24/05/2022

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Figure 192 : Photo de Usef.Lens, www.instagram.com, consulté le 24/05/2022 Page | 101


Une renaissance en marche…

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Dans cette partie, il s’agira de survoler les grands projets qui s’appliquent au site et qui concernent l’urbanisme et la gestion du patrimoine pour pouvoir critiquer l’approche appliquée en la comparant avec l’hypothèse formulée.

3.1. Patrimoine et tourisme Casa patrimoine Après la signature de la convention relative à la sauvegarde et à la valorisation du patrimoine de Casablanca en présence de SM Mohammed VI, la société de développement local Casablanca Patrimoine a mis en place un programme dont l’objectif est de réhabiliter le centre-ville en se basant sur quatre projets : o La création d’un circuit touristique : il a pour objectif de mettre en valeur les différents bâtiments et repères patrimoniaux recensés dans le cadre d’un schéma directeur qui n’a toujours pas été publié. « Le choix du circuit s’est effectué en concertation avec un comité ad hoc composé d’experts nationaux et internationaux. Ce projet s’intègre, par ailleurs, dans le cadre de la coopération internationale entre Casablanca et Bordeaux » (2m 2020) o La restauration de 28 Bâtiments : Malheureusement, la liste des bâtiments concernés est introuvable. o Le ravalement des façades des bâtiments du centre-ville : hormis les 28 bâtiments concernés par la restauration, les façades du centre-ville de Casablanca seront remises à neuf en commençant par celles qui donnent sur le circuit touristique prévu. o La mise à niveau de quatre passages historiques du centre-ville : les passages concernés sont Botbol, Glaoui, Sumica et Tazi qui se trouve dans notre terrain d’étude (immeuble 17). En plus, les galeries commerciales seront aussi mises en lumière grâce à un nouvel éclairage. Ce programme réunit plusieurs acteurs du patrimoine dans le cadre d’une approche transversal. « Selon Casa Patrimoine, ce projet réunit plusieurs partenaires, à savoir le ministère de l’Intérieur, le ministère de l’habitat, la Commune de Casablanca et la wilaya de la Région Casablanca-Settat. Sa mise en œuvre repose aussi sur la collaboration des membres de la société civile et des partenaires locaux dont les associations de commerçants, l’Arrondissement de Sidi Belyout, l’Ordre des architectes ainsi que l’association Casamémoire, l’association Carrière Centrale et d’autres partenaires institutionnels » (2m 2020) Concernant le troisième projet, la ville de Casablanca a commencé une compagne de sensibilisation visant à convaincre les propriétaires de repeindre leurs façades. Des PV sont alors distribués en commençant par les grandes artères ; « En cas de non-respect, le propriétaire concerné recevra une 2ᵉ lettre recommandée lui rappelant l’obligation de repeindre son bien. Après une quinzaine de jours, les dossiers des contrevenants seront transférés aux services communaux afin d’effectuer les travaux aux frais du propriétaire » (Bladi 2022). Cette démarche paraît complète puisque le ravalement de la façade sera réalisé même dans le cas de l’absence de la réponse du propriétaire, une situation probable vu le flou administratif qui domine le quartier.

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Cependant, il est difficile de trancher sur l’état d’avancement du programme même après la visite du site, mais il est pour le peu, inachevé. (2m 2020, Médias24 2020, Bladi 2022)

La réhabilitation de la place des nations unies « La fameuse coupole de la place des Nations unies est un espace, pour ne pas dire un monument, car elle est ancrée dans la mémoire des Casablancais et de tous les Marocains même, comme décor emblématique de Casablanca. Cet espace a connu un ensemble de modifications pour en faire, d’abord, un lieu de passage et de traversée en toute sécurité pour les piétons, et aussi un espace d’animation en plein cœur de la métropole », Le président du Conseil de la région de Figure 193 : Place des nations-unies années 70, www.darnna.com, consulté le Casablanca-Settat, Abdellatif Maâzouz. 23/11/2021 (Hamdane 2021)

Figure 194 : Place des nations unies avant les travaux, point de vue de la Médina. www.2m.ma, consulté le 04/05/2022

La place des nations unies a dernièrement changé d’apparence, ce changement réside au niveau de la coupole de Zévaco qui se situe à l’ouest de la place. Elle a initialement été réalisée par l’architecte Jean-François Zevaco en 1975 comme l’ouverture zénithal d’un passage souterrain permettant aux piétons de traverser l’avenue des FAR dans un espace sécurisé et animé par la présence de plusieurs commerces. La coupole a été composée d’une structure en Page | 104


acier couverte d’une résine colorée qui sera retirée plus tard. Après quelques années d’activité, la coupole de Zevaco est vite devenue un repère urbain qui figure sur les cartes postales de Casablanca et attire des visiteurs de tout le pays. Cependant, son âge d’or n’a pas duré longtemps, elle a vite été délaissée et transformée en abris pour les délinquants et les chiens errants, seule l’odeur qui émanait du passage était capable de dissuader les curieux. Depuis, plusieurs tentatives de restauration ont eu lieu sans pouvoir relancer l’équipement dont la dernière réhabilitation de 2005. Plus de dix ans plus tard, un nouveau programme de réhabilitation en partenariat avec la société privée Al Ajial Holding est annoncé avec un budget atteignant 14 millions de dirhams et un coût total de 35 millions. Ce dernier comprend : o La restauration de la coupole après l’étude des relevés et de son état sanitaire, et la réinsertion de celle-ci dans les repères de la ville en la mettant en valeur avec un plan d’eau agissant comme miroir. o L’élargissement et la réhabilitation du passage souterrain qui abritera de l’Horeca et des activités commerciales et culturelles. o L’insertion de l’œuvre dans la trame verte de Casablanca en intégrant la composante végétale dans le projet.

Figure 195 : Maquette 3D du projet, point de vue du bâtiment BMCI (Fathi 2017)

Ce projet est conçu pour donner une nouvelle vie à la place des nations unies en la redynamisant et la réinsérant dans la série des repères urbains de Casablanca. Ainsi, le passage de Zevaco pourra s’intégrer au contexte actuel où la dimension culturelle est mise en avant et deviendra une destination au lieu d’un simple passage. (Matin 2017, Hamdane 2021)

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En même temps, plusieurs voix se sont levées contre la réalisation du projet sous prétexte qu’il s’écartait trop de la vocation initiale de l’œuvre et que le contexte actuel ne représente pas un réel besoin d’un passage souterrain puisque l’avenue des FAR est devenue moins imposante avec l’arrivée du tramway. Néanmoins, comme constaté dans l’état des lieux, l’avenue est pour le moindre aussi fréquentée et le passage souterrain semble être une réponse à un vrai problème de circulation.

Figure 196 : Vue sous la coupole

Peu après l’ouverture, le nouvel aménagement de la place semble être un succès auprès de la population casablancaise, le jardin est toujours occupé même si les activités prévues pour le passage n’ont pas encore vu le jour. Aussi, le plan d’eau et l’habillage multicolore qui faisaient partie de la maquette de la coupole ne sont pas présents dans son décor final, un changement qui plait aux opposants de Figure 198 : Point de vue de la porte du passage sur la place la proposition initiale.

Figure 197 : Vue sur l'aménagement de la place Page | 106


Certes, le projet représente la réponse appropriée à un besoin nouveau et complexe, mais le succès du projet risque d’être freiné par le caractère austère qui domine la place. En effet, les nuisances sonores, les mendiants fixes et l’insécurité ne sont que des exemples de ces possibles obstacles. Figure 199 : Structure de la coupole

L’agence urbaine de Casablanca Dans le cadre d’une prise de conscience générale au sujet du patrimoine de Casablanca grâce au lancement du projet de la réhabilitation de l’ancienne Médina inauguré par SM Mohammed VI, l’agence urbaine de Casablanca a entamé une étude afin de réaliser un plan de sauvegarde et de valorisation du patrimoine architectural de Casablanca. Il s’agit alors d’identifier et de répertorier les biens à caractère patrimonial à l’échelle du quartier, de l’espace public et du bâtiment. Ce choix sera basé sur les critères suivants : o Le caractère unique : le bien représente des caractéristiques exceptionnelles qu’on ne peut trouver ailleurs même en le comparant aux œuvres de son style ou de sa période. o Le caractère typique : le bien représente les œuvres de son style ou de sa période de manière emblématique. o L’intégration urbaine : le bien a une valeur urbanistique importante. o Le caractère immatériel : la valeur du bien dépasse le bâti, elle réside dans le rôle qu’il joue dans la mémoire de la société. o La valeur architecturale : elle réside dans l’insertion du bâtiment dans un style architectural emblématique de l’histoire comme l’art-déco et le néo-moresque. L’étude est finie, mais la liste exhaustive des biens recensés n’est malheureusement pas encore rendue publique, l’obtention de la liste n’a alors pas été possible même après une prise de contact avec l’agence urbaine. (AUC s.d.)

Figure 200 : Inventaire du patrimoine recensé (AUC s.d.)

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: Terrain d’étude

Figure 201 : Plan du patrimoine architectural du centre de Casablanca, (AUC s.d.) Page | 108


L’association Casamémoire L’un des plus grands projets de l’association Casamémoire est le classement de Casablanca comme patrimoine mondial de l’Unesco afin de l’ouvrir à la scène internationale et d’attirer plus de touristes ; un processus toujours en cours depuis 2014. Seulement, la demande a été refusée en 2016 pour cause d’insuffisance de mesures de sauvegarde du patrimoine proposées, mais l’association ne perd pas espoir et continue à mettre en place des propositions afin de corriger les lacunes de la première tentative. Ces dernières sont présentées en trois volets : o Technique : dans ce volet, Casamémoire propose : de surveiller les autorisations de démolir et de construction dans les sites patrimoniaux en attendant une loi qui les protège, de remettre en question le classement isolé des monuments qui représente une pénalisation pour les investisseurs et les pousse à laisser leur propriété à l’abandon, de considérer la mise en place d’une législation plus souple, d’assister les propriétaires pendant la réhabilitation des bâtiments, de réaliser un inventaire et de mettre les archives à la disposition des chercheurs et des étudiants. o Mise en valeur : afin d’augmenter l’attractivité des sites patrimoniaux, l’association propose de limiter la place de la voiture en favorisant les transports en commun comme le tramway, d’intégrer la composante verte dans les projets de réhabilitation tout en renforçant leur nettoyage et de retravailler l’éclairage et les signalisations. o Sensibilisation : à travers des compagnes, des conférences, des expositions et des événements comme les journées du patrimoine qui proposent des visites guidées gratuites dans les sites patrimoniaux de Casablanca. o Communication : encourager les instances publiques et privées à investir dans le patrimoine.

Aujourd’hui, Casamémoire travaille en partenariat avec la région de Casablanca afin de préserver le patrimoine de la ville en préparant une nouvelle demande de classement auprès de l’UNESCO. En parallèle, elle continue à sensibiliser le public en publiant plusieurs ouvrages comme le guide des architectures du XXème siècle, une des sources les plus utilisées dans ce travail, qui reprend une liste des bâtiments à caractère patrimonial accompagnés d’une description et est en train d’être réédité ou la revue mensuelle Casamémoire Le mag qui contient des articles qui traitent du sujet et des nouvelles actions de l’association. (Casamémoire s.d., Bousquet 2016) « Tous les volets esquissés d’un tel plan patrimoine sont indissociables les uns des autres. Pour la réussite de ce projet, il est nécessaire d’assurer une parfaite coordination des interventions, et éventuellement de créer un organisme centralisateur des études et des décisions, relayé au niveau communal, piloté par la Municipalité et la Wilaya, dans lequel on devra trouver comme acteurs principaux : l’Agence Urbaine, le ministère de la Culture, le ministère du Tourisme et la société civile représentée par des associations. » (Casamémoire s.d.) En effet, certains des projets précédents semblent avoir pris en considération quelques propositions de l’association, mais le besoin d’une approche globale qui inclut les quatre volets est toujours d’actualité.

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3.2. Urbanisme Le projet de rénovation urbaine C’est un projet qui compte corriger les failles de la législation existante en intégrant une approche décentralisée et participative donnant plus de pouvoir aux instances locales et régionales tout en prenant en compte les enjeux environnementaux et sociaux d’aujourd’hui. Pour ce faire, de nouveaux documents d’urbanisme sont conçus afin de réglementer les autorisations d’urbanisme ainsi que les opérations d’aménagement. o Les SOU : un schéma d’orientation de l’urbanisme qui comprend des plans qui définissent les orientations d’aménagement et les zones à urbaniser ou à préserver, accompagnés d’un rapport comprenant une banque de projets classés par ordre de priorité. o Les PLU : un plan local d’urbanisme est un document à valeur réglementaire qui définit l’affectation du sol et les quartiers, monuments, sites historiques ou archéologiques dont la préservation nécessite des mesures spéciales tout comme un plan secteur en Belgique. Il est plus précis que les autres documents cités et permet aux autorités locales des agglomérations dépassant les 2000 habitants d’avoir un cadre légal facilitant l’exécution. Ce document comprend des plan graphique et un plan de sauvegarde et de mise en valeur du patrimoine historique. D’autres mesures et documents sont prévu aussi, mais ne seront pas mentionnés afin de ne pas perdre de vue le sujet principal qui est l’effet que cette réforme aura sur la gestion du patrimoine du centre-ville. En effet, la mise à jour du cadre légal permettra aux autorités locales de prendre en main la situation en étant accompagnés de documents plus clairs et complets. « De cette situation découle une urbanisation à deux facettes. La première est caractéristique des centres villes et des quartiers réglementaires principalement occupée par les couches moyennes et aisées qui bénéficient d’un taux d’équipement raisonnable. La deuxième est caractéristique des quartiers d’habitat populaire, regroupant les médinas sur densifiées et les extensions dites périphériques et clandestines, où les problèmes de viabilisation et d’équipements sont d’une extrême gravité. » (GRET-GRIDAUH s.d.) Il reste à voir comment ce programme se concrétisera au niveau du centre-ville qui rassemble ces deux facettes dans un même espace en plus de la présence d’un patrimoine à protéger.

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Villes sans bidonvilles Le terme bidonville a été créé pendant les années vingt dans le contexte de l’exode rurale et de la crise démographique afin de désigner tout quartier informel et auto-construit avec des matériaux de récupération. Dans le cas du centre-ville de Casablanca, les extensions sont faites de manière clandestine sans passer par le système judiciaire, elles forment alors un quartier dans un quartier. Ainsi, le bidonville du centre-ville devrait aussi être concerné par le programme. Le programme villes sans bidonvilles date de 2004 et a pour but d’éradiquer tous les bidonvilles du territoire national comptant initialement 270 000 ménages puis 453 906 ménages après la mise à jour de 2020. Pour ce, une stratégie a été mise en place et consiste à donner un délai de préavis aux habitants avant de procéder à la résorption qui se fait en trois modes : o La restructuration : concerne les bidonvilles jugés intégrables dans leurs contextes urbains. Ils sont alors dotés d’infrastructure et d’une régulation de leur situation urbanistique et foncière. o Le relogement : les bidonvilles sont rasés et les ménages sont relogés dans des appartements du logement social dont la superficie est inférieure à 60m². o Le recasement : les bidonvilles sont rasés et des lots aménagés de 60 à 70m² sont distribués aux ménages qui s’occuperont de la construction suivant des plans préalablement établis. Aujourd’hui, Casablanca n’a toujours pas obtenu le statut de ville sans bidonvilles même si la date d’échéance initiale était en 2012. En effet, en 2021, seulement 66 % des familles concernées ont bénéficié du programme baissant leur taux de pauvreté de 58 %. Ce retard est causé par plusieurs facteurs dont l’augmentation continue du nombre de ménages ciblés, le manque de collaboration de certains ménages, la hausse des coûts et le manque de financement. (Znagui s.d., YousraJaa 2021, L'Economiste 2021)

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Figure 202 : Plan des bidonvilles de Casablanca en 2004 (AUC s.d.) Page | 112


3.3. Vers une gentrification de Casablanca ? Afin de trouver l’approche appliquée au site, il est aussi important de sortir du site et de parcourir les nouveaux projets structurants à l’échelle de la ville. Le grand théâtre de Casablanca Ce projet fini a pour but de renforcer l’image de la ville comme métropole africaine de la culture et de l’art et d’ouvrir Casablanca à l’international en adoptant une architecture contemporaine signée par le starchitecte Christian De Portzamparc. « […] ce haut lieu de culture pourra accueillir tout au long de l'année, des manifestations et spectacles culturels et artistiques de dimension internationale. » (Aménagement s.d.) Bien que ce projet ait comme but de mettre en avant le potentiel culturel de la ville, il est traité avec une approche économique se basant sur le marketing de Figure 203 : Grand théâtre de Casablanca, (Aménagement s.d.) l’image.

Le projet d’Anfa

Figure 204 : Maquette 3D du projet d'Anfa, (Robert s.d.)

Il s’agit de la réhabilitation en cours de l’ancien aéroport au cœur de la ville en créant un nouveau centre contemporain. « Le quartier « centre » de Prost a été le générateur du développement de la ville. ANFA, second centre de Casablanca, va être la clef de voûte d'un dispositif de transformation de la ville existante. C'est le statut de cette modernité qu'il faut définir. » (Robert s.d.) C’est une approche qui suggère la création d’une multi centralité dans la

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ville. Cette approche s’inscrit dans le même registre que la dernière, le but est d’attirer l’attention au-delà des frontières. Wecasablanca Une marque de ville a été créé par la société Events & Animations afin de vendre la ville aux touristes et aux investisseurs internationaux. « WECASABLANCA est donc devenue la bannière qui accompagne la stratégie 20152020 de la métropole axée sur les conditions de vie des citadins, la mobilité, l'attractivité économique et le climat des affaires. La réhabilitation et la mise à niveau des infrastructures de divertissement et de loisirs, l’aménagement du littoral touristique, la mise à niveau et l’équipement de zones sous-équipées, l’amélioration de la mobilité et des moyens de transports publics et la construction de nouveaux équipements publics. » (Wecasablanca, Démarche s.d.) A l’image du grand théâtre, ce projet vise de mettre en valeur le potentiel culturel de la métropole pour créer une relance économique.

Réhabilitation de l’hôtel Lincoln

Situé à 500m du site au niveau du boulevard Mohammed v, l’hôtel Lincoln qui date de la période de protectorat est en ruine depuis plus d’une décennie. Ce projet aura alors pour but de le réhabiliter en y intégrant 7500 m² d’hôtel haut standing avec un aménagement de rooftop en restaurent et piscine et 2000 m² de surface de bureaux. (Invest s.d.) Figure 205 : Hôtel Lincoln en ruine, www.lerepoter.ma, consulté le 21/05/2022

Ce projet est un échantillon de ce à quoi s’attendre pour le reste du centre-ville et il est toujours dans la même logique : attirer les touristes et les entreprises.

Figure 206 : Maquette 3D de la réhabilitation de l'hôtel Lincoln (Invest s.d.)

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Les projets cités ont tous le même but : requalifier le patrimoine de la ville blanche. Certes, ils utilisent des outils différents, mais la plus grande partie de ces projets mise sur le même secteur qui est le tourisme alors que des projets qui sont censés avoir une approche sociale comme ville sans bidonvilles est bloqué par sa démarche qui n’a pas beaucoup évoluée malgré ses nombreux « échecs ». La patrimonialisation du centre-ville, dans sa logique actuelle, ne semble pas être qu’un résultat naturel de l’appropriation symbolique de l’espace, elle est aussi une stratégie qui vise d’augmenter l’attractivité internationale de la métropole d’où la volonté de le classer comme patrimoine mondial. Pour ce faire, les projets misent sur le tourisme et l’investissement étranger comme outil de développement urbain et de sauvegarde de patrimoine. Pour finir, la ville de Casablanca ne semble pas avoir une approche unifiée, elle manque encore d’une coordination suffisante espérée par l’association Casamémoire. Si certains projets comme le grand théâtre ou l’hôtel Lincoln semblent vouloir déclencher un processus de gentrification, d’autres sont plutôt dans une logique sociale comme le projet de piétonnisation et de réhabilitation de la place qui est accessible à tout le monde et dont les commerces programmés ne semblent pas être des grandes enseignes. Un autre exemple est aussi le tramway qui a ouvert le centre-ville aux quartiers défavorisés laissant ainsi une grande ambiguïté autour de la logique de gestion actuelle.

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« A Casablanca, l’origine coloniale du patrimoine a entraîné un travail sur la mémoire des lieux et ce qui fait des lieux de mémoire et non pas sur sa capacité à être gentrifié ou investi. » Abderrahim Kassou, membre de Casamémoire. (Kurzac-Souali 2013)

Figure 207 : Peinture du centre-ville réalisée par Mohamed Assalmi

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Le centre-ville de Casablanca, le petit Paris marocain, le quartier art-déco ... plusieurs sont ses appellations, mais elles se réfèrent toutes au passé glorieux qui hante le quartier. Aujourd’hui, il semble avoir perdu de son charme ; les grandes enseignes ont cédé la place aux vendeurs ambulants et le centre-ville n’a plus la même image qu’il y 30 ans. Certes, il est tout à fait naturel de s’attacher à ce passé et d’espérer sa résurrection, mais est-ce réaliste ?

Avant de répondre à cette question, il faudra rappeler ce qui fait la force du centre-ville. Tout d’abord, le patrimoine architectural est le point fort le plus évident, c’est un patrimoine riche en valeur symbolique et matériel. D’un côté, il fait preuve d’une prouesse architecturale qui a su s’inspirer du contexte tout en suivant les tendances occidentales, d’un autre côté, sa diversité est un témoignage de l’histoire de l’architecture du XXe siècle. Aussi, la situation du centre-ville est dans un contexte urbanistique unique, liant entre des composantes opposées ; la médina au nord, les quartiers riche d’Anfa à l’ouest et les quartiers défavorisés et industriels à l’est, un fait qui est encore plus visible à travers le paysage de la place des nations unies où la diversité urbaine se traduit en mixité sociale et où un hôtel cinq étoile coexiste avec les bidonvilles. Ainsi, l’autre point fort du centre-ville est sa mixité ; c’est un espace que tout le monde peut s’approprier et c’est à ce niveau que réside son charme actuel. En effet, le cadre dans lequel se pratique cette mixité n’est pas idéal, mais elle est à l’origine de la créativité casablancaise, les artistes se nourrissent de cette richesse socio-spatiale qui, à son tour, évolue pour devenir une richesse culturelle. Le centre-ville d’aujourd’hui est à prendre comme tel ; la nostalgie espère l’impossible puisque le temps ne peut être remonté, un fait qu’il faudra accepter pour pouvoir avancer. Si la vocation initiale du quartier était aussi liée à la consommation et aux apparences, c’est parce qu’il a été conçu sous l’influence de l’idéologie industrielle ; une idéologie qui priorise le matériel à l’humain. Evidemment, l’histoire du site n’est pas aussi unidimensionnelle, l’espace a aussi été conçu en lien avec son contexte, mais la ségrégation spatiale faisait partie de son vécu, c’était « la nouvelle-ville européenne ». Cette complexité est ce qui fait du terrain d’étude un sujet de débat, personne ne semble détenir la bonne réponse à une situation que tout le monde dénonce. Un blocage qui met le site en pause alors que les bâtiments patrimoniaux se délabrent et que ses habitants continuent à le quitter. Pourtant, nombreux sont les projets conçus pour améliorer son état : les réhabilitations, les projets de loi, les compagnes de sensibilisation … En effet, certains projets sont prometteurs, mais leur effet est altéré par le manque de coordination.

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L’approche générale de la gestion de la ville est réactionnelle, elle agit ponctuellement et fini souvent dépassée par la complexité du site. En outre, après des mois de recherches, aucune projection à long termes du centre-ville n’a été trouvée et les projets manquent souvent de vision à grande échelle. Par exemple, un projet peut avoir pour objectif de sensibiliser les habitants au sujet du patrimoine pour les convaincre de l’entretenir alors que ces derniers ne sentent pas en sécurité et leur situation est incertaine. C’est ainsi que le syndrome de la fenêtre cassée fait son effet ; si la situation est déjà condamnée, il ne sert à rien d’agir individuellement pour l’améliorer. Ainsi, si la population ne coopère pas, aucun projet ne peut vraiment atteindre son objectif. L’approche devrait alors découler d’une étude sociale qui permet de comprendre l’usager pour ensuite savoir prédire sa réaction. Elle devrait alors commencer par traiter le conflit que celui-ci a avec l’espace. Dans le cas du centre-ville casablancais, ce conflit n’est autre que la précarité. Ceci dit, il ne faut pas laisser le nihilisme avoir le dessus. La piétonnisation du centre-ville, la réhabilitation de la place et le tramway sont des projets qui renforcent le statut de l’usager ordinaire en lui facilitant l’accès et en lui accordant plus d’importance dans le centre de sa ville. Sur le plan personnel, ce travail a permis d’avoir un regard plus nuancé sur la situation actuelle, mais aussi plus intrigué. En effet, l’étude qui consistait à : parler aux habitants, observer les usagers et s’arrêter devant chaque bâtiment, a aidé à comprendre le langage du site. Le terrain parlait à travers des marquages et des scénarios qu’il a fallu décortiquer pour pouvoir le cerner et, enfin, l’apprécier autrement.

Pour finir, il est aussi important de rappeler que le raisonnement inductif employé dans ce travail ne permet que de formuler des hypothèses. En effet, l’étude n’est certainement pas exhaustive ; le terrain est infiniment riche en matière d’analyse et il faudra beaucoup plus de temps et de moyens pour épuiser le sujet. L’hypothèse devrait alors être mise à l’épreuve. Mais sous quelle forme ? En effet, si l’approche socio-culturelle est la réponse adéquate au cas du centre-ville de Casablanca, comment peut-elle être appliquée ? et quel type de projet faut-il mettre en place ?

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Table des illustrations Page | 121


Figure 1 : Dessin de Zineb Benjelloun, www. zineb-benjelloun.com, consulté le 23/05/2022 Figure 2 : Carte de la population selon les régions (Haut-commissariat du plan s.d.) Figure 3 : La région de Casablanca-Settat et ses communes, www.casablanca.ma, consulté le 02/05/2022 Figure 4 : Arrondissements de Casa Anfa, www.casablancacity.ma, consulté le 02/05/2022 Figure 5 : Préfectures de Casablanca. Mohamed Amine Chadi, www.reaserchgate.net, consulté le 02/05/2022 Figure 6 : Plan satellite de Casablanca, Google Earth, consulté le 17/02/2022 Figure 7 : Schéma de croissance et de zoning du « grand Casablanca » 1951 (Cohen 2004, p. 294) Figure 8 : Dessin de Philippe Simon, plan de Casablanca en 1952 (Cohen 2004, p. 116) Figure 9 : Terrain d’étude, Place des nations unies, ilots et avenues. Google Earth, consulté le 20/02/2022 Figure 10 : Vue des ruines d’Anfa, in George Braun, Franz Hogenberg, Civitates orbis terrarum, Bertram Buchholtz, 1572. (Cohen 2004, p. 25) Figure 11 : Plan de la ville de Casablanca de Félix Weisgerber en 1900. (Cohen 2004, p. 25) Figure 12 : Noualla dans le quartier des Tnâker. Carte postale, c. 1910. (Cohen 2004, p. 26) Figure 13 : Le plan d’extension de Tardif en 1912 (Cohen 2004, p. 46) Figure 14 : Le plan de Prost entre 1914 et 1917. (Cohen 2004, p. 48) Figure 15 : Tableau représentant les investisseurs dans la construction à Casablanca entre 1955 et 1958. (André 1968, p. 54) Figure 16 : Plan des repères Figure 17 : Immeuble 1, façade principale Figure 18 : Intérieur immeuble 1 Figure 19 : Détail immeuble 1 Figure 20 : Situation immeuble 1 Figure 21 : Situation immeuble 2 Figure 22 : Immeuble 2, façade principale Figure 23 : Situation immeuble 3 Figure 24 : Immeuble 3, façade principale Figure 25 : Situation immeuble 4 Figure 26 : Immeuble 4, façade principale Figure 27 : Angle Immeuble 5 Figure 28 : Situation immeuble 6 Figure 29 : Situation immeuble 5 Figure 30 : Détail immeuble 6 Figure 31 : Angle immeuble 6 Figure 32 : Situation immeuble 7 Figure 33 : Situation immeuble 8 Figure 34: Angle immeuble 7 Figure 35: Immeuble 8, façade principale Figure 36: Immeuble 9, façade principale Figure 37 : Situation immeuble 9 Figure 38 : Situation immeuble 10 Figure 39 : Angle immeuble 10 Figure 40 : Situation Immeuble 11 Figure 41 : Angle immeuble 11 Figure 42 : Situation immeuble 12 Figure 43 : Immeuble 12, façade principale Figure 44 : Situation immeuble 13 Figure 45 : Immeuble 13, façade principale Figure 46 : Situation immeuble 14 Figure 47 : Immeuble 14, façade principale Figure 48 : Galerie immeuble 15 Figure 49 : Angle immeuble 15 Figure 50 : Situation immeuble 15 Figure 51 : Angle immeuble 16 Figure 52 : Situation immeuble 16

Figure 53 : Angle immeuble 17 Figure 54 : Situation immeuble 17 Figure 55 : Galerie Immeuble 17 Figure 56 : Situation immeuble 18 Figure 57: Angle immeuble 18 Figure 58 : Situation immeuble 20 Figure 59 : Angle immeuble 19 Figure 60 : Situation immeuble 19 Figure 61 : Angle immeuble 20 Figure 62 : Situation immeuble 21 Figure 63 : Façade immeuble 21 Figure 64 : Situation immeuble 22 Figure 65 : Immeubles Tazi et Bendahan, 1935, (Cohen 2004, p. 171) Figure 66 : Angle Immeuble 22, B. Moussaoui, www.pinterest.com, consulté le 06/05/2022 Figure 67 : Situation hôtel Kenzi Basma Figure 68 : Situation bâtiment Wafasalaf Figure 69 : Angle hôtel Kenzi Basma Figure 70 : Angle bâtiment Wafasalaf Figure 71 : Entrée bâtiment Wafasalaf Figure 72 : Situation immeuble BMCI Figure 73 : Angle bâtiment BMCI Figure 74 : Situation hôtel Exelsior Figure 75 : Angle hôtel Exelsior Figure 76 : Hall d'entrée hôtel Exelsior Figure 77 : Synagogue, vu Rue Abou Soufiane Figure 78 : Synagogue, façade principale Figure 79 : Porte Synagogue Figure 80 : Situation Synagogue Figure 81 : Imm. 7 Figure 82 : Imm. 5 Figure 83 : Imm. 1 Figure 84 : Imm. 15 Figure 85 : Exelsior Figure 86 : Imm. 18 Figure 87 : Imm. 3 Figure 88 : Imm. 14 Figure 89: Imm. 9 Figure 90: Imm. 14 Figure 91 : Imm. 8 Figure 92 : Imm. 1 Figure 93 : Imm. 14 Figure 94 : Imm. 7 Figure 95 : Imm. 5 Figure 96 : Imm. 13 Figure 97 : Imm. 6 Figure 98 : Imm. 3 Figure 99: Imm. 1 Figure 100 : Imm. 7 Figure 101 : Hall hôtel Exelsior Figure 102 : Bâtiment Wafasalaf Figure 103 : Hôtel Exelsior Figure 104 : Sas hôtel Exelsior Figure 105 : Imm. 18 Figure 106 : Imm. 20 Figure 107 : Les styles architecturaux du site Figure 108 : Façade de la partie hôtel Figure 109 : Façade de la partie habitat Figure 110 : Sas Imm. 13 Figure 111 : Imm. 9 Figure 112 : Imm. 6 Figure 113 : Synagogue Figure 114 : Imm. 15

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Figure 115 : Imm. 13 Figure 116 : Imm. 8, vue sur l’intra-îlot Figure 117 : Imm. 3, extension terrasse Figure 118 : Imm. 6, hall d'entrée Figure 119 : Imm 13, vue sur l'intra-îlot Figure 120 : Imm. 13, entrée de l’intra-îlot Figure 121 : Galerie bâtiment Wafasalaf Figure 122 : Début rue Allal Ben Abdellah Figure 123 : Galerie Imm. 10 Figure 124 : Blocs rue piétonnes Figure 125: Porte habitat Exelsior Figure 126 : Idem. Figure 127 : Idem. Figure 128 : Avenue des FAR Figure 129 : Imm. 17, avenue Hassan II Figure 130 : Imm. 17, rue piétonne Figure 131 : Synagogue Figure 132 : SDAU 2014 : SDAU 2014 (AUC s.d.) Figure 133 : Basé sur une photo prise dans le site Figure 134 : Carte Postale : Carte www.geneanet.org, consulté le 03/05/2022 Figure 135 : Vue actuelle Figure 136 : Carte Postale, www.geneanet.org, consulté le 03/05/2022 Figure 137 : Vue actuelle Figure 138 : Vue actuelle Figure 139 : Carte Postale Figure 140 : Vue actuelle Figure 141 : Carte Postale non datée, La Maison De Blanc, Casablanca, Google Maps, consulté le 03/05/2022 Figure 142 : Plan de Casablanca datant du protectorat. M. Josée, www.darna.com, consulté le 05/05/2022 Figure 143 : Image satellite 2001, Google Earth, consulté le 05/05/2022 Figure 144 : Image satellite 2011, Google Earth, consulté le 05/05/2022 Figure 145 : Image satellite 2017, Google Earth, consulté le 05/05/2022 Figure 146 : Image satellite 2021, Google Earth, consulté le 05/05/2022 Figure 147 : Plan d'orientation Figure 148 : Coupe sur rue Chénier avant et après la piétonisation Figure 149 : Plan de voirie Figure 150 : Rues intérieures Figure 151 : Passage Tazi, B. Moussaoui, www.pinterest.com, consulté le 06/05/2022 Figure 152 : Vue sur la tour de l'horloge de la place administrative Figure 153 : Vue sur la médina Figure 154 : Skyline sud et nord de la place des nations unies Figure 155 : Vue sur la tour de l'horloge Figure 156 : Ilots du terrain d'étude Figure 157 : îlot fermé : intérieur et extérieur Figure 158 : L'évolution de l'îlot fermé Figure 159 : Images satellite 2003, 2009, 2022, Google Earth, Consulté le 09/05/2022 Figure 160 : Partie apparente de l'extension Figure 161 : Plan de l'étage courant, immeuble Bendahan, (Cohen 2004, p. 171) Figure 162 : Plans de l'étage courant et du dernier étage (Cohen 2004, p. 173) Figure 163 : Différence entre l'aménagement traditionnel et l'aménagement des appartements du centre-ville Figure 164 : Schéma sensible des flux

Figure 165 : File devant la station de Tramway Figure 166 : File devant la station de Bus Figure 167 : Schéma des activités économiques formelles Figure 168 : Schéma des activités économiques informelles Figure 169 : Cireur en bas de l'immeuble 1 Figure 170 : Location de jouets pour enfants Figure 171 : Des vendeurs informels sous l'hôtel Exelsior Figure 172 : Un ainé pratiquant du commerce informel, près du passage Tazi Figure 173 : La place des nations unies durant le festival Jazzablanca en 2019. www.jazzablanca.com, consulté le 13/05/2022 Figure 174 : Ambiance de la place, une après-midi de la semaine Figure 175 : Ambiance de la place, une après-midi de la semaine Figure 176 : Marquage en modifiant la façade, immeuble 18 Figure 177 : Marquage en modifiant l'intérieur, immeuble 8 Figure 178 : Marquage en modifiant la façade (ajout des grilles aux fenêtres), immeuble 10 Figure 179 : Marquage de la façade, immeuble 4 Figure 180 : Modifications courantes des appartements Figure 181 : Enfants qui jouent dans une rue piétonne Figure 182 : Marquage espace public, graffitis Figure 183 : Marquage bâtiment abandonné Figure 184 : Noms actuels Figure 185 : Noms pendant le protectorat Figure 186 : Fresque murale "Enjoy the silence" à 300 mètres de la place, www.millo.biz, consulté le 17/05/2022 Figure 187 : Photo prise au-dessus de la place, Casablanca vue d'en haut, Adnane Zemmama, www.artfirst-galerie.com, consulté le 17/05/2022 Figure 188 : Dance devant le bâtiment Tazi, place du 16 novembre, Mouhsine Harris, www.Instagram.com, consulté le 18/05/2022 Figure 189 : Dance devant la coupole de Zevaco, Idem. Figure 190 : CASA MON AMOUR, Aïcha Elbeloui, www.aichaelbeloui.com, Consulté le 18/05/2022 Figure 191 : Place des nations unies, Kenpiic, www.instagram.com, consulté le 24/05/2022 Figure 192 : Photo de Usef.Lens, www.instagram.com, consulté le 24/05/2022 Figure 193 : Place des nations-unies années 70, www.darnna.com, consulté le 23/11/2021 Figure 194 : Place des nations unies avant les travaux, point de vue de la Médina. www.2m.ma, consulté le 04/05/2022 Figure 195 : Maquette 3D du projet, point de vue du bâtiment BMCI (Fathi 2017) Figure 196 : Vue sous la coupole Figure 197 : Vue sur l'aménagement de la place Figure 198 : Point de vue de la porte du passage sur la place Figure 199 : Structure de la coupole Figure 200 : Inventaire du patrimoine recensé (AUC s.d.) Figure 201 : Plan du patrimoine architectural du centre de Casablanca, (AUC s.d.) Figure 202 : Plan des bidonvilles de Casablanca en 2004 (AUC s.d.) Figure 203 : Grand théâtre de Casablanca, (Aménagement s.d.) Figure 204 : Maquette 3D du projet d'Anfa, (Robert s.d.) Figure 205 : Hôtel Lincoln en ruine, www.lerepoter.ma, consulté le 21/05/2022 Figure 206 : Maquette 3D de la réhabilitation de l'hôtel Lincoln (Invest s.d.) Figure 207 : Peinture du centre-ville réalisée par Mohamed Assalmi

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Bibliographie Travail de fin d’études présenté en vue de l’obtention du diplôme d’architecte - juin 2022


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21. Haut-commissariat du plan. Annuaire statistique de la région de Casablanca-Settat. s.d. www.hcp.ma (accès le 02 17, 2022). 22. Invest, Casa. HÔTEL LINCOLN. s.d. www.casainvest.ma (accès le 05 20, 2022). 23. Jadraoui, Siham. Exposition «Casablanca vue d’en haut» : Immersion au cœur de la métropole. 17 05 2022. www.aujourdhui.ma (accès le 05 12, 2022). 24. Kurzac-Souali, Anne-Claire. «13. Peut-on parler de gentrification pour Casablanca ?» Open edition books. 2013. www.books.openedition.org (accès le 05 22, 2022). 25. L'Economiste. Villes sans bidonvilles: 152.000 familles attendent toujours. 27 01 2021. www.leconomiste.com (accès le 05 04, 2022). 26. Lefebvre, Henri. La production de l’espace. Paris: Anthropos, 2000. 27. Matin, Le. La coupole Zevaco : renaissance d’un symbole. 16 07 2017. ww.lematin.ma (accès le 05 04, 2022). 28. Mauss, Marcel. Manuel d'ethnographie. Paris: Payot, 1971. 29. Médias24. Casablanca Patrimoine lance un programme de mise à niveau du centre ville, qui s'articule autours de quatre projets. 11 09 2020. www.medias24.com (accès le 05 03, 2022). 30. Meskine, Ahmed. Le logement à Casablanca ampleur et cause de la crise. s.d. www.memoireonline.com (accès le 02 12, 2022). 31. Mouaddine, Alexandra. Centre historique de Casablanca : une renaissance en marche. s.d. www.leseco.ma (accès le 04 19, 2022). 32. Numbeo. s.d. www.numbeo.com (accès le 05 16, 2022). 33. Robert, Reichen. Casablanca-Anfa. s.d. www.reichen-robert.fr (accès le 05 20, 2022). 34. Vaillat, Léandre. Le visage francais du Maroc. Paris: Horizons de France, 1931. 35. —. Le visage français du Maroc. Paris: Horizons de France, 1931. 36. Veschambre, Fabrice Ripoll et Vincent. «introduction.» Openedition journals. 05 08 2008. www.journals.openedition.org (accès le 05 11, 2022). 37. Wecasablanca. Démarche. s.d. www.wecasablanca.com (accès le 05 05, 2022). 38. —. La place des nations unies. s.d. www.wecasablnaca.com (accès le 02 15, 2022). 39. YousraJaa. Villes dans bidonvilles, le bilan à fin 2020. 28 01 2021. www.medias24.com (accès le 05 04, 2022). 40. Znagui, Bachir. Synthèse du rapport sur le programme villes sans bidonvilles. s.d. ww.economia.ma (accès le 01 04, 2022). Page | 126


Questionnaire habitants

L’accès au logement : Q1 : Depuis quand habitez-vous dans le centre-ville, depuis combien de générations ? Q2 : Etes-vous locataires où propriétaire ? 1.

Si locataires : Comment pouvez-vous décrire la relation avec le propriétaire ? Quel est le montant du loyer ? a-t-il changé depuis votre arrivée ?

2.

Si propriétaires : Qui était le propriétaire avant votre arrivée ? A combien avez-vous acheté la propriété ?

Q3 : Habiter au centre-ville était-il un choix délibéré ? Le ménage : Q1 : De combien de personnes (et de générations) est composé votre ménage ? Q2 : Quel est votre niveau de scolarisation et êtes-vous diplômés ? Q3 : Tous les membres majeurs du ménage sont-ils actifs et dans quel domaine ? Q4 : Est-ce que votre activité se situe à proximité ? Conditions de vie : Q1 : Etes-vous globalement satisfaits de votre logement ? Sinon, qu’est-ce qui vous retient ici ? Q2 : Est-ce que l’aménagement du logement convient à votre mode de vie ? Q3 : Si vous pouviez changer quelque chose dans votre logement, que changeriez-vous ? Q4 : Avez-vous modifié l’intérieur afin de l’adapter à vos besoins, comptez-vous le faire ? Entretien : Q1 : Etes-vous satisfait de l’état du bâtiment ? Q2 : Qui est responsable de l’entretien du bâtiment ? Q3 : De quand date la dernière restauration et quelle était son ampleur ?

Annexes Page | 127


Questionnaire habitants L’accès au logement : Q1 : Depuis quand habitez-vous dans le centre-ville, depuis combien de générations ? Q2 : Etes-vous locataires ou propriétaires ? 1.

Si locataires : Comment pouvez-vous décrire la relation avec le propriétaire ? Quel est le montant du loyer ? a-t-il changé depuis votre arrivée ?

2.

Si propriétaires : Qui était le propriétaire avant votre arrivée ? A combien avez-vous acheté la propriété ?

Q3 : Habiter au centre-ville était-il un choix délibéré ?

Le ménage : Q1 : De combien de personnes (et de générations) est composé votre ménage ? Q2 : Quel est votre niveau de scolarisation et êtes-vous diplômés ? Q3 : Tous les membres majeurs du ménage sont-ils actifs et dans quel domaine ? Q4 : Est-ce que votre activité se situe à proximité ?

Conditions de vie : Q1 : Etes-vous globalement satisfaits de votre logement ? Sinon, qu’est-ce qui vous retient ici ? Q2 : Est-ce que l’aménagement du logement convient à votre mode de vie ? Q3 : Si vous pouviez changer quelque chose dans votre logement, que changeriez-vous ? Q4 : Avez-vous modifié l’intérieur afin de l’adapter à vos besoins, comptez-vous le faire ?

Entretien : Q1 : Etes-vous satisfait de l’état du bâtiment ? Q2 : Qui est responsable de l’entretien du bâtiment ? Q3 : De quand date la dernière restauration et quelle était son ampleur ?

L’accessibilité : Q1 : Etes-vous motorisé ? Q2 : Quel moyen de transport utilisez-vous le plus souvent et pourquoi ? Page | 128


Q3 : Que pensez-vous du Tramway ? Est-il bénéfique pour vous ? Vivre au centre-ville : Q1 : Vivre au centre-ville est-il un avantage ? Q2 : Que pensez-vous de votre voisinage ? Q3 : Vous sentez-vous en sécurité ? Q4 : Quelles sont vos activités au centre-ville ? Q5 : Etes-vous attachés au centre-ville ? Q6 : Quel est le point fort et le point faible du centre-ville ? Q7 : Que voudriez-vous changer dans le centre-ville ? Q8 : Que représente la place des nations unies pour vous ? Fait-elle partie de votre quotidien ? Que pensez-vous de son état actuel ? Que pensez-vous du projet de l’aménagement de la place ? Q9 : Que pensez-vous du projet de restauration du centre-ville ? Avis : Q1 : Pensez-vous que vivre avec une classe sociale plus élevée est bénéfique ? Q2 : Voudriez-vous devenir propriétaire ? Si oui, assumeriez-vous la responsabilité de l’entretien ? Q3 : Selon vous, votre cas est-il représentatif de la majorité ?

Habitant 1 : Femme retraitée. Appartement, immeuble 1 Accès au logement :

Q1 : Depuis la construction de l’immeuble Q2 : Propriétaire depuis la construction Q3 : Oui, le grand père de mon mari était le propriétaire du terrain

Le ménage :

Q1 : On est un couple retraité Q2 : J’ai fait des études universitaires et mon mari était architecte

Conditions de vie :

Q1 : Oui Q2 : Oui Q3 : Rien Q4 : Non

Entretien :

Q1 : Globalement Page | 129


Q2 : C’est le concierge (un avocat), il est payé par les habitants Accessibilité :

Q1 : Oui Q2 : La voiture Q3 : Je ne l’utilise pas souvent

Vivre au centre-ville :

Q1 : Oui, ici tout est proche Q2 : Ça va Q3 : Oui, la porte se ferme bien Q4 : La balade quand il fait beau Q5 : Oui Q6 : Son point fort c’est la proximité et son point faible c’est les SDF Q7 : Trouver une solution pour les SDF

Avis :

Q3 : Oui

Habitant 2 : Père de famille. Extension, immeuble 6 Accès au logement :

Q1 : Depuis 85 Q2 : Locataire mais je ne paie pas de loyer Q3 : C’était une opportunité, je suis concierge

Le ménage :

Q1 : On est 15 personnes de 3 générations Q2 : Je n’ai pas fait d’étude et personne n’a fait d’études supérieures Q3 : L’artisanat Q4 : Oui

Conditions de vie :

Q1 : J’en suis reconnaissant, c’est gratuit Q2 : C’est petit Q4 : On l’a un peu agrandi

Entretien :

Q1 : Non Q2 : Je ne sais pas, les propriétaires peut-être Q3 : Ils sont entrain de refaire l’appartement

Accessibilité :

Q1 : Non Q2 : Le bus Q3 : Bien

Vivre au centre-ville :

Q1 : Oui Page | 130


Q3 : Oui Q4 : Le travail Avis :

Q2 : Oui

Habitant 3 : Père de famille retraité. Appartement, immeuble 3 Accès au logement :

Q1 : Depuis 85 Q2 : Locataire, 600dh. J’avais essayé d’acheter mais c’était trop compliqué Q3 : C’est pour améliorer le cadre de vie de ma famille, on habitait à Mers Sultan…

Le ménage :

Q1 : On est 3, moi ma femme et notre fille Q2 : Oui, mon épouse était professeur de français et moi je travaillais pour l’état. Mes enfants ont fait des études à l’étranger Q4 : Oui, c’était proche du lycée où travaillait mon épouse

Conditions de vie :

Q1 : Oui Q2 : Oui Q4 : On a transformé le bureau en pièce de rangement

Entretien :

Q1 : Non, il y a trop de laisser aller, l’agence loue des extensions sur la terrasse et on a des problèmes de fuite Q2 : Les habitants et l’agence Q3 : Il y a quelques années, on a pu convaincre l’agence de repeindre la façade

Accessibilité :

Q1 : Oui Q2 : le vélo, c’est agréable Q3 : Depuis son inauguration, le nombre de vendeurs ambulants s’est multiplié ce qui attire des gens défavorisés. Ça a complètement changé le paysage du quartier

Vivre au centre-ville :

Q1 : Oui, c’est un emplacement stratégique Q2 : Dans l’immeuble la relation est bonne Q3 : Moi oui, mais pas mon épouse surtout la nuit Q4 : Balade Q5 : Oui Q8 : Il y a beaucoup de monde au centre, on préfère allez autre part. La réhabilitation donne bien mais il faudra attendre pour voir si ce sera bien entretenu Q9 : A part la restauration de l’hôtel Lincoln, je ne suis pas au courant

Avis :

On ne peut pas chasser les gens de leurs habitations, en même temps, les propriétaires ne sont pas prêts à vendre. Beaucoup d’habitants voudraient acheter mais la situation est trop compliquée Page | 131


Habitant 4 : Femme âgée. Appartement, immeuble 9 Accès au logement :

Q1 : Depuis les années 70 Q2 : Locataire, on a acheté la clé Q3 : Oui, c’est stratégique

Le ménage :

Q1 : On est deux

Conditions de vie : Entretien : Avis :

Q1 : Oui Q2 : Le concierge

Q2 : Oui Q3 : Oui

Habitant 5 : Appartement, immeuble 18 Accès au logement :

Q1 : Depuis les années 60 Q2 : Locataire, c’est l’agence qui s’en occupe

Conditions de vie :

Q1 : Oui Q2 : Oui Q4 : On n’a rien changé

Entretien :

Q2 : Les habitants et l’agence Q3 : La restauration est en cours

Vivre au centre-ville :

Q1 : Oui Q2 : Tout se passe bien Q3 : Pas la nuit Q5 : Oui Q7 : Peut-être moins de délinquance

Habitant 6 : Jeune père de famille. Appartement, immeuble 17 Accès au logement :

Q1 : Depuis 2011 Q2 : J’étais locataire mais je viens de devenir propriétaire Q3 : Oui

Le ménage :

Q1 : On est 5, un couple avec 3 enfants Q2 : Oui, je suis médecin et mon épouse est ingénieure Q4 : Oui

Conditions de vie :

Q1 : Oui Q2 : Oui Page | 132


Questionnaire Casablancais Q1 : A quelle fréquence allez-vous au centre-ville ? (0, 1 à 3, 3 à 5 par semaine, presque tous les jours) Q2 : Le centre-ville est-il une de vos destinations principales à Casablanca ? (Oui, relativement, non) Pourquoi ? Q3 : Quelle est votre destination favorite au centre-ville ? Q4 : Quelles sont vos activités au centre-ville ? (Culturelle (cinéma, musée, …), récréative (restaurants, cafés, pubs …), balade et tourisme, travail, shopping) Q5 : La place des nations unies est-elle ? (Une destination, un point de rencontre, un point de passage, autre) 1. 2. 3.

Que faites-vous à la place des nations unies ? Appréciez-vous l’ambiance de la place ? (Oui, relativement, non) Vous vous sentez en sécurité dans la place ? (Oui, non)

Q6 : Si vous pouviez changer quelque chose dans le centre-ville que changeriez-vous ? Q7 : Comment le Tramway a-t-il changé votre rapport au centre-ville ? (Positivement, il n’a pas changé, négativement) Q8 : Pensez-vous que l’aménagement de la place (Kora ardia) sera bénéfique à son attractivité ? Q9 : Que pensez-vous du projet de restauration du centre-ville ?

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