Chapitre IX : Orchestrer dans l'Ombre
La vie était devenue bien plus simple depuis ma dernière rencontre avec Huttington. Les jours passaient et se ressemblaient. Mais ce n'était absolument pas un mal. Bien au contraire. Pendant des semaines entières, j'ai pu vivre une vie on ne peut plus normale sans me soucier ne serait-ce qu'une seconde de ce qui se passait du côté de Randy Maksharm, de ses hommes, ou du Duc. J'ai pu retrouver toutes mes heures de sommeil, passer du temps avec mes Parents, lire des ouvrages passionnants sans le moindre élément pouvant me rappeler la deuxième vie que je menais. J'étais à vrai dire un petit garçon heureux. Il n'y avait que le dimanche, à minuit, où je reprenais mes vieilles habitudes. Enfilant mon costume de vieillard, je partais seul en expédition dans la forêt afin d'y retrouver Leborgne. Ce dernier se chargeait de me faire un récapitulatif exhaustif de la situation concernant l'avancée du Gant Noir, de nos recrues, de notre réseau et des potentielles demandes du Duc. Je priais d'ailleurs intérieurement à chaque fois pour qu'il oublie cette partie là, ou à défaut, qu'il ne me réserve vraiment que des urgences. Heureusement, Huttington semblait avoir comprit ma demande. Comme quoi, bien mettre les points sur les I et les barres sur les T finit toujours par porter ses fruits. Quoiqu'il en soit, les rencontres avec Leborgne devenaient de plus en plus un petit plaisir coupable. J'avais l'impression d'enfin parler directement à quelqu'un de compétent, et qui, cerise sur le gâteau, ne manquait jamais d'être porteur de bonnes nouvelles. Notre organisation semblait grandir de jour en jour. Huttington jouait son rôle à merveille. Il était parvenu à se mettre dans la poche une grande partie des petits nobles de la région, s'assurant leurs services, et menait des expéditions punitives contre ceux qui refusaient son offre. Ce cher Raymond était devenu en moins de deux semaines la seconde figure de référence de tout l'Ouest de Costerboros, après Kal'Drik. Sa popularité et sa puissance étaient telles que j'en vins à questionner Leborgne sur la situation de la maison Klaussman. Il me rapporta qu'après cet incendie, leur famille ne faisaient plus le poids face à Huttington. Le Duc et son seul héritier étant morts, la direction de leur famille revenait à Franz, frère cadet de l'ancien Duc. Décrit comme docile, impuissant et inexpérimenté, il aurait été à l'origine d'un pacte de paix et d'entre-aide entre les Klaussman et les Huttington afin de continuer d'exercer leur contrôle sur le territoire tout en cessant les conflits. De ce que j'en sais, c'était en réalité plus une prise de contrôle totale par Huttington sur les possessions terrestres de Klaussman en échange d'une promesse de trêve. Il a humilié et dépouillé la famille de son ennemi de toujours, et n'avait ainsi plus aucune raison de les affronter puisque l'issue d'un conflit entre eux serait, de ce fait, réglée avant même qu'il ne puisse commencer.
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