Chapitre II : Mes Parents
Félix. C'était le nom qu'ils m'avaient donné. Félix Switz. Mon Père, Picco, et ma Mère, Gretta, s'étaient enfin mis d'accord après quelques instants à se disputer sur leur choix. Il faut dire que l'on ne tient pas tête à ma Mère très longtemps au sujet de ce qui touche de près ou de loin à ses enfants. Ce nom leur plaisait. Je l'ai très vite assimilé. Mon Père, Picco Switz, est un grand gaillard de plus de deux mètres de haut pour une bonne centaine de kilos de muscles. Cela ne cache pas pour autant, aux yeux de ceux qui le connaissent un minimum, une petite brioche du fait des quelques verres par jour qu'il avait l'habitude de prendre fut un temps, malgré les commentaires de ma Mère à ce sujet. Si ses parents lui avait donné un tout autre prénom à la naissance, il commencera à l'abandonner au fil du temps pour le surnom affectif "Picco" que lui donnait sa mère, signifiant en vieux patois Costerborosien "Petit" ou "Enfant". Même moi, j'ignore encore quel fut son véritable prénom, n'ayant jamais pu poser directement la question à mes grands-parents, décédés bien avant ma naissance. Élevé dans une famille de fermiers plus que modestes, mon Père n'eut jamais l'occasion de recevoir une bonne éducation. Il passa son enfance entière à labourer les champs, à couper du bois et à plumer les volailles, sans jamais s'intéresser un seul instant à l'écriture ou à la lecture. Il n'en avait ni les moyens, ni la volonté, ni la chance. Comment voulez-vous trouver le temps de vous cultiver lorsque votre Famille compte sur votre travail acharné pour manger le soir ? Je respecte énormément celles et ceux dont le vécu a entraîné l'adoption de cet état d'esprit. Un homme qui ne prend pas soin de sa Famille, ne sera jamais vraiment un Homme. Et un homme qui n'est pas prêt à se sacrifier ou à tout donner pour elle, ne sera jamais vraiment digne d'en faire partie. Mon Père avait un seul frère. Il était plus jeune et plus frêle que lui. Par conséquent, ce fut à lui de se charger des tâches les plus rudes et les plus intensives. Si mon Père et mon oncle n'étaient pas spécialement proches, l'affection toute particulière qu'ils éprouvaient tous deux envers leur chien était des plus notables. C'était, de ce qu'il m'en a raconté, un molosse parfaitement dressé qui n'a jamais laissé le moindre renard ou le moindre loup s'approcher des troupeaux. Une telle loyauté plaisait beaucoup à mon Père et à son frère qui considéraient cet animal comme un membre à part entière de leur Famille. Cette idée ne me viendrait personnellement jamais en tête. Un animal reste un animal. On peut l'aimer, ce n'est pas pour autant qu'on peut le considérer comme faisant partie de quelque chose d'aussi important qu'une Famille. Enfin, peut-être dis-je cela du fait que j'ai toujours préféré les chats. Quoiqu'il en soit, ce genre de travaux exténuant qui étaient la routine de mon Père, cumulés à son grand appétit lui avaient permis d'acquérir très jeune déjà : une corpulence plus que massive. La facilité qu'il avait à couper les grands arbres et à chasser les bêtes qui se rapprochaient trop des champs étaient telles qu'elles attirèrent l'attention d'autres paysans, prêts à louer ses services en échange de dons de nourriture tous les jours pour sa Famille. J'ai toujours
12