LE GRAND ENTRETIEN
CRÉDIT MUTUEL
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OR NORME N°37 Horizons
LE GRAND ENTRETIEN
Entretien réalisé par : Jean-Luc Fournier
Photos : Sophie Dupressoir
Cet étonnant Nicolas Théry ! Finalement, ce sont les premières lignes d’un article signé par Véronique Chocron dans le journal Les Échos qui résument le mieux l’impression faite par le président du Crédit Mutuel lors d’une première rencontre : « Ce matin de mars, Nicolas Théry, un gros sac à dos sur les épaules, s’apprête à prendre son train pour une tournée de quelques jours dans des caisses du Sud du Crédit Mutuel. Sa barbe de trois jours et son allure d’étudiant tranchent avec la mise traditionnelle du financier à la française, féru de boutons de manchette et de souliers rutilants. Inconnu du grand public et des médias, cet énarque de cinquante ans vient pourtant de pénétrer le cercle très fermé des puissants patrons de grandes banques françaises… » C’était il y a un peu plus de quatre ans lors de sa nomination à la présidence de la banque mutualiste, 5ème banque française. Rencontre - attendue donc depuis longtemps - avec Nicolas Théry. Le look n’a pas changé, les solides convictions non plus… Or Norme. Vous venez d’être renouvelé pour quatre années à la présidence du groupe Crédit Mutuel et à celle du CIC. Vous habitez et travaillez à Strasbourg depuis onze ans maintenant mais on ne vous connait que fort peu, même après cette percutante exposition médiatique en avril dernier, en plein confinement qui a révélé pour beaucoup votre tempérament iconoclaste et audacieux. On y reviendra mais ce sera une question toute simple, pour commencer. Qui êtesvous ? « Vous savez, on n’est jamais que la somme de ses expériences, tout bêtement. Et aussi la somme de ses choix, de ses actes, de ses sentiments et de ses attachements. Or Norme. Certes mais un coup d’œil sur votre CV révèle un brillant parcours. On note qu’à la sortie de l’ENA, vous empruntez la voie royale de l’Inspection des finances, on vous retrouve ensuite au cabinet de Dominique Strauss-Kahn alors ministre de l’Économie et des Finances, puis vous devenez directeur de cabinet de la secrétaire d’État au Budget, Florence Parly. S’en suivent deux années de break avec la fonction publique puisque vous mettez vos compétences à la disposition de Nicole Notat à la CFDT, en tant que secrétaire confédéral pour les questions économiques. En 2002, vous devenez
directeur de cabinet de Pascal Lamy, le commissaire européen pour le Commerce international avant d’intégrer, en 2009, le groupe Crédit Mutuel-CIC. Durant votre carrière, vous avez donc été en contact étroit avec des décideurs qui étaient de véritables « pointures », ont-ils décelé chez vous ce tempérament atypique, disons…, et le cas échéant, l’ont-ils encouragé ? Je vous dirais d’abord que je ne suis pas adepte du terme carrière car il induit un constant principe d’unité qu’on s’obstinerait en permanence et jusqu’au bout à mettre en œuvre. Oui, il y a une unité mais c’est au niveau de vos envies, des choses qui vous font vibrer, des sujets qui vous intéressent au plus haut point. Mais il y a aussi des opportunités qui se présentent comme celle d’un gouvernement de gauche et un report tout à fait inattendu des élections législatives qui font que vous vous retrouvez dans un cabinet ministériel, par exemple… Mais ce qui me frappe c’est que, de toute façon, ça n’est qu’une affaire de circonstances. À un moment donné, il y a des rencontres avec des gens qu’on aime bien et qui révèlent des centres d’intérêt communs.. À chaque fois qu’on me demande comment on choisit un job, je réponds : c’est un lieu, une équipe, un patron et un projet. À partir de là, il y a aussi les hasards de la vie. Je ne serais jamais allé à la CFDT si mon fils aîné n’était pas né durant ma période de cabinets ministériels