OUTRE-MER grandeur Nature n°11 _ juillet-août 2022

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JUILLET| AOÛT 2022

OUTRE-MER

OcéIndia

grandeur Nature

L’E-MAG ULTRAMARIN DE L’ENVIRONNEMENT n°11

ÉDITO | Karine

Claireaux, 19 ans maire de Saint-Pierre MAYOTTE | M aybiotech , une start - up prometteuse NOUVELLE-CALÉDONIE | les 10 ans de C aledoclean

SOMMAIRE

UNE

MARTINIQUE 2 3 5 8 9

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VOILENATURE.COM, LA PLATEFORME WEB À VISITER !

édito actu outre-mer Saint-Pierre-et-Miquelon Saint-Martin Saint-Barthélemy

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Martinique Guadeloupe Guyane Île de La Réunion Mayotte

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TAAF Polynésie française Nouvelle-Calédonie Wallis-et-Futuna


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De par sa situation géographique et les aléas climatiques qui s’accélèrent, l’archipel de Saint-Pierre-etMiquelon est très exposé aux risques littoraux et en particulier les risques liés à l’érosion et à la submersion. En effet, il est composé de petites îles basses sur l’eau et une partie de la population est installée dans ces zones basses. C’est particulièrement le cas de Miquelon dont le village est installé en bord de mer sur un cordon littoral de faible altitude et en recul.

ÉDITO PAR KARINE CLAIREAUX 1, MAIRE HONORAIRE DE SAINT-PIERRE ET ANCIENNE SÉNATRICE DE SAINTPIERRE-ET-MIQUELON Au sud de l’île de Terre-Neuve, l’archipel de SaintPierre-et-Miquelon se compose de 4 îles principales : Saint-Pierre avec en face du port, l’Île aux Marins, abri naturel de ce dernier ; Miquelon et Langlade reliées par un isthme de sable fin de 12 kilomètres de long, fermé naturellement depuis le XVIIIème siècle. Saint-Pierre, le chef-lieu grâce à son port abrité, est l’île où se concentre 90 % de la population sur 25 km2. Miquelon et Langlade sont elles plus sauvages et préservées, avec des enjeux différents à tous les niveaux. À la confluence du courant froid du Labrador et des eaux chaudes du Gulf Stream, Saint-Pierre-et-Miquelon est un trésor de biodiversité unique en France, avec plusieurs écosystèmes aussi remarquables que fragiles mais assez peu connus, sauf de quelques spécialistes. C’est la seule collectivité d’outre-mer (COM) française en zone subarctique. Le climat est plutôt froid et humide, même si les températures extrêmes en hiver sont très éloignées de celles des zones continentales comme le Québec.

L’une des conséquences prévisibles du changement climatique dans la région est une montée du niveau des océans et une intensification des tempêtes. Force est de constater que depuis quelques décennies l’archipel subit des phases d’érosion plus actives. La mer entame le littoral avec plus de force à chaque tempête hivernale et les cordons dunaires s’amenuisent. Ce recul généralisé du trait de côte est avéré et risque de s’accélérer dans le futur. Les changements climatiques, avec des hivers plus doux, provoquent l’absence récurrente de pieds de glace protecteurs pour le littoral et l’élévation du niveau marin. Ce ne sont pas des signes positifs en faveur d’une stabilisation du système. Les cordons littoraux constitués de sable et de galets offrent peu de résistance aux assauts de la mer et sont de plus en plus fragilisés. La zone la plus fragile apparaît être celle dite des « buttereaux » sur l’isthme de Langlade où l’érosion dégrade régulièrement la route d’accès Miquelon-Langlade et menace la lagune saumâtre du Grand Barachois, un écosystème particulièrement riche et varié. Certaines infrastructures notamment routières sont régulièrement mises à mal par les tempêtes. Il faut alors agir dans l’urgence par la réalisation d’ouvrages lourds et coûteux visant à protéger ces infrastructures et plus généralement les zones menacées. Face à la montée des eaux, l’adaptation devient aussi nécessaire qu’inévitable afin de protéger la population et préserver les zones remarquables et la biodiversité sur laquelle pèsent déjà de nombreuses menaces. Les hommes comme la biodiversité marine et terrestre ont dû et su s’adapter face à de grands bouleversements au fil des siècles. À Saint-Pierre-et-Miquelon, comme dans d’autres Outre-mer, la résilience est une seconde nature pour tous les organismes vivants… Karine Claireaux

Karine Claireaux a été maire de Saint-Pierre de 2001 à 2020. L’ancienne sénatrice de l’archipel (de 2011 à 2017) est spécialiste des questions maritimes, environnementales et polaires, et a également présidé le Conseil national de la mer des littoraux (CNML) de 2014 à 2021. | Photos de couverture : voilenature.com, première plateforme web dédiée aux balades en mer écoresponsables en Martinique. © Voile Nature | 10 ans d’actions pour l’environnement en Nouvelle-Calédonie. © Caledoclean | Portrait de Karine Claireaux : © Grégory Pol 1


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ACTU OUTRE-MER 145 PROGRAMMES DE SCIENCES PARTICIPATIVES MENÉS DANS LES OUTRE-MER EN 2021 ! Un inventaire de grande ampleur a été réalisé en 2021 par PatriNat – centre d’expertise et de données sur le patrimoine naturel copiloté par l’Office français de la biodiversité (OFB), le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), et le Muséum national d’Histoire naturelle (MNHN) – et par Vigie-Nature, un réseau citoyen porté par des associations et des observateurs volontaires.

ÉCOLE BLEU OUTREMER : 75 JEUNES EMBARQUENT SUR LE MARION DUFRESNE POUR UNE AVENTURE SCIENTIFIQUE INÉDITE

Près de deux tiers d’entre eux portent sur le milieu marin, et notamment sur les tortues marines, sur les mammifères marins et les récifs coraliens. Les programmes qui concernent la flore sont en revanche moins nombreux.

Le Marion Dufresne a levé l’ancre le 27 juin à La Réunion et mis le cap sur les Îles Éparses et Mayotte. Le plus grand navire de la Flotte océanographique française s’est transformé en « navire-école », avec à son bord 75 étudiants, scientifiques, des métiers maritimes ou en formation artistique, qui vont vivre, aux côtés des chercheurs et de l’équipage chevronnés, une aventure unique d’échange et d’apprentissage autour des enjeux de l’océan de demain. Une expérience inédite pour ces jeunes d’outre-mer, des pays du bassin de l’océan Indien et de l’Hexagone, ancrée dans la diversité et le partage. Les étudiants embarqués jusqu’au 22 juillet vont pouvoir être force de sensibilisation et d’initiatives et deviendront des passeurs pour un océan plus durable.

Cet état des lieux a également permis d’identifier que la disponibilité des financements est le principal frein pour garantir la pérennité des suivis mis en place. Ces programmes de science participatives ont par ailleurs l’avantage de récolter un grand nombre de données sur des territoires étendus et sont parfois, pour certaines espèces protégées ou méconnues, l’unique source de données disponible. Ce Premier panorama sera prochainement valorisé sous la forme d’un annuaire en ligne disponible sur le site du Compteur Biodiversité Outre-mer. + d’info ici : Diffusion du premier panorama des sciences participatives dans les outre-mer Pour télécharger le rapport : https://inpn.mnhn.fr/ docs-web/docs/download/398569

L’objectif est ainsi de faire découvrir et partager les connaissances sur les métiers et enjeux de l’océan dans ces territoires plus vulnérables au changement global. Organisée par l’Ifremer et le ministère des Outre-mer, l’École bleu outremer est rendue possible grâce à l’implication et au soutien de 30 partenaires.

Fou à pieds rouges à Tromelin, avec le Marion Dufresne en arrière-plan. © Lucie Pichot

Il a abouti à la réalisation d’un premier panorama des sciences participatives en outre-mer. Au total, ce sont plus de 145 programmes, principalement initiés par des associations, qui ont été répertoriés dans les 13 territoires ultramarins.


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© CAUE971 | Plante & Cité

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Ramassage de déchets en Nouvelle-Calédonie. © Caledoclean

UN GUIDE DE BONNES PRATIQUES POUR UNE GESTION ÉCOLOGIQUE DES ESPACES DE NATURE EN VILLE

GESTION DES DÉCHETS DANS LES TERRITOIRES ULTRAMARINS : COMMENT ÉVITER LE « TROP PLEIN » ?

L’urbanisation souvent rapide de l’outre-mer a causé la perte de nombreux habitats et participé au phénomène d’érosion de la biodiversité. Les espaces verts urbains « restants » ont alors un rôle particulièrement important pour le maintien des continuités écologiques et contribuent à améliorer la résilience des territoires face au changement climatique.

La Délégation sénatoriale aux outre-mer va consacrer son prochain rapport d’information à la gestion des déchets dans les territoires ultramarins. Comme l’a souligné son président Stéphane Artano, la collecte et le traitement des déchets sont un service public de base indissociable de la qualité de vie et de la santé publique. La délégation procédera ainsi à l’évaluation d’une politique publique confrontée à de profondes transformations pour être au rendez-vous des objectifs du « zéro déchet » et de l’économie circulaire.

En 2019, le Conseil d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (CAUE) de la Guadeloupe et Plante & Cité ont mis en œuvre le projet « Greenville », pour une gestion résiliente et écologique des espaces de nature en ville. Après bientôt 3 ans de travaux, un Guide de bonnes pratiques vient d’être publié à l’attention des gestionnaires publics et privés, maîtres d’ouvrage – collectivités, bailleurs… – et réalisateurs : services techniques, entreprises d’insertion, associations… Ce guide offre des recommandations générales, valables pour tous les types d’espaces, en matière de gestion de l’eau, du sol, de la flore et de la faune, d’utilisation de mobilier, ou encore de formation et d’accueil du public. Un calendrier d’intervention est également proposé, pour rendre compatible l’entretien de ces espaces avec les cycles biologiques des espèces présentes. Pensé dans un contexte antillais, ce document a vocation à être utilisé dans l’ensemble des territoires tropicaux ultramarins et représente, pour le CAUE, la première étape vers le développement d’un réseau d’échanges de pratiques sur les espaces verts en milieu tropical. + d’info ici : Greenville

Les problématiques environnementales revêtent en effet en outre-mer une acuité particulière. Décharges sauvages, pollution des littoraux, tri sélectif insuffisant y témoignent d’une situation préoccupante. Les perturbations du commerce maritime mondial liées à la crise sanitaire ont encore accru l’extrême difficulté d’exporter les déchets, notamment les plus dangereux. Conséquence : les stocks s’accumulent dans certains territoires où le manque d’investissements dans des infrastructures, pourtant essentielles, s’ajoute souvent aux problèmes de gouvernance et de répartition des compétences. Ces enjeux se trouvent aussi amplifiés par divers facteurs locaux : densité de population, habitat informel, isolement, nature du relief, rareté du foncier... Ce rapport, dont les corapporteures sont Gisèle Jourda et Viviane Malet, sénatrices de l’Aude et de La Réunion, a été nourri par un cycle d’auditions. Outre des tables rondes géographiques en visioconférence, un déplacement a eu lieu à La Réunion et à Mayotte fin juin, et un second est prévu en septembre à Saint-Pierre-et-Miquelon. Les conclusions de ce rapport seront présentées en novembre prochain. Source : Délégation sénatoriale aux outre-mer


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SAINT-PIERREET-MIQUELON LE MACAREUX MOINE, UN OISEAU EMBLÉMATIQUE DE L’ARCHIPEL Rédaction : Bruno Letournel, chef du service territorial de l’Office français de la biodiversité

Chaque été, des milliers de macareux moines nichent à Saint-Pierre-et-Miquelon. L’étude de l ’OFB et du CNRS réalisée en 2008 et 2015 apporte quelques éléments de connais sance sur cette espèce et sur la biodiversité remarquable du territoire . Tôt au printemps, le volatile arrive sur nos côtes pour nicher. Il affectionne comme habitat terrestre les falaises abruptes et pentes tourbeuses souvent difficiles d’accès. Dans le monde, le macareux moine est classé en statut vulnérable et au niveau national, en danger.

UN LIEU D’ÉTUDE UNIQUE À environ 500 mètres au nord de l’île de Saint-Pierre, l’île du Grand Colombier est un rocher de 65 hectares culminant à 120 mètres, et qui présente un habitat favorable à la nidification du macareux moine.

L’ÉTUDE RÉALISÉE En 2008 et 2015, avec les chercheurs du CNRS de Chizé et les scientifiques de l’Office français de la biodiversité, le service territorial de l’OFB a participé à un recensement des colonies d’oiseaux marins nicheurs de l’île. Selon un protocole bien défini, la colonie de macareux moines a été estimée à plus de 10 000 couples nicheurs, soit la population la plus importante de France. Pour connaître le déplacement des oiseaux en mer durant la période de reproduction, des GPS miniaturisés ont été posés sur les individus

capturés au nid. Ainsi, on a pu constater que pour nourrir les jeunes au nid, les adultes se déplaçaient sur un rayon maximal de dispersion de 51 kilomètres. Certains habitats dans les régions subarctiques peuvent présenter des taux anormalement élevés dus aux pollutions d’origine industrielle. Contrairement à d’autres oiseaux observés sur l’île, le mercure présent dans le sang des macareux moines n’atteignait pas des taux significativement élevés (1,7 ng/mg). Si l’habitat terrestre reste un élément essentiel pour accomplir le cycle de vie des macareux moines, la rencontre du Gulf Stream et du courant froid du Labrador au sud de l’archipel rend les eaux propices à la production du phytoplancton et du zooplancton. Ce phénomène attire de nombreuses espèces d’oiseaux pélagiques et les grands mammifères marins dans la région des bancs de Terre-Neuve. En zone subarctique, Saint-Pierre-et-Miquelon présente ainsi une biodiversité tout à fait remarquable et unique pour les régions ultramarines de l’outre-mer français. + d’info ici : Le film réalisé lors de la venue des scientifiques en 2015

Ci-dessus : également appelé « perroquet de mer », le macareux moine vit en mer la majeure partie de l’année. Cet oiseau de taille moyenne de la famille des alcidés se caractérise par un plumage bicolore avec un bec triangulaire coloré. © Bruno Letournel

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Pour tout savoir sur les Outre-mer 24h/24 Rendez-vous sur la1ere.fr

Le portail des Outre-mer Guadeloupe • Guyane • Martinique • Saint-Pierre-et-Miquelon • La Réunion • Mayotte • Nouvelle-Calédonie • Polynésie française • Wallis-et-Futuna


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Sargasses photographiées en 2011 dans la baie de Porte d’Enfer en Guadeloupe, où le phénomène continue aujourd’hui. © Pierre-Olivier Jay - 97px

Pour faire face aux échouements massifs et récurrents des algues sargasses , l a Guadeloupe, Saint-Martin, la Martinique et la Guyane ont mis en place un programme de coopération caribéen intitulé « SARG’COOP ». Ce programme a permis d’établir des axes de travail. Tout d’abord, il faut réussir à caractériser ces algues : sont-elles des déchets, une pollution ou bien une espèce envahissante ? Puis il faut mettre en place un système de détection satellitaire pour anticiper les échouages. Le troisième axe de travail consiste à déployer un réseau de qualité de l’air dans de nombreux pays de la Caraïbe. Jusqu’à présent, les Antilles françaises sont les seuls territoires à bénéficier d’un réseau de capteurs qui leur donne la possibilité de détecter les gaz issus de la décomposition des sargasses, que sont l’hydrogène sulfuré et l’ammoniac. Sylvie Gustave-dit-Duflo, en charge de l’environnement à la Région Guadeloupe, témoigne : « Nous avons déployé des capteurs sur les sites impactés par les échouements des algues sargasses. Ces capteurs

travaillent 24 heures sur 24 et permettent d’avoir en temps réel le niveau de l’hydrogène sulfuré et de l’ammoniac. Et lorsque les valeurs seuils sont dépassées, ces associations préviennent les autorités de l’État, qui à leur tour préviennent les maires. Les maires s’engagent alors dans ce qu’on appelle un “ plan communal de sauvegarde ” qui les oblige à alerter la population et à mettre à l’abri les populations du littoral qui seraient impactées par des seuils trop élevés de ces gaz qui, je le rappelle, sont neurotoxiques et irritants pour les voies respiratoires. » SARG’COOP travaille également à la mise en place d’une plateforme de vulgarisation qui va collecter toutes les données sur les sargasses pour le grand public. Enfin, ce programme a pour objectif d’obtenir la reconnaissance des échouages de sargasses par les instances internationales en charge de la biodiversité.

Ce texte est issu de la chronique « Planète Outre-mer » présentée par Caroline Marie sur le portail des Outre-mer de France Télévisions.

© Pierre-Olivier Jay - 97px

LA COOPÉRATION CARIBÉENNE POUR LUTTER CONTRE LES SARGASSES


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SAINT-MARTIN MIEUX CONNAÎTRE LES ESPÈCES ET LES PRATIQUES POUR UNE GESTION INTÉGRÉE DE 2 ESPÈCES DE MÉROUS Le projet LIFE BIODIV’OM, piloté par la Réserve naturelle nationale de Saint-Martin (présenté dans l’e-mag n°2), continue à déployer ses actions de suivi et d ’ amélioration des connaissances de 2 poissons menacés au niveau mondial , pour mettre en œuvre une gestion basée sur les réalités du territoire. Sur la période 2018-2023, la Réserve naturelle nationale de Saint-Martin s’est engagée pour la protection du mérou de Nassau et du mérou géant dans le cadre du programme LIFE BIODIV’OM coordonné par la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO), et qui vise à protéger la biodiversité de 5 territoires ultramarins français. Julien Chalifour, responsable scientifique de la Réserve, précise : « Ce projet va nous apporter de nombreuses réponses : y a-t-il encore ici des mérous adultes ? Et des arrivages larvaires ? Quels sont les usages et les pressions sur la ressource halieutique ? Notre but est d’améliorer les connaissances sur ces poissons et les enjeux qui leur sont associés, pour pouvoir mettre en place des actions de gestion adaptées, qui protégeront véritablement les mérous de Nassau et les mérous géants à Saint-Martin, dans le futur. »

Le réseau participatif d’observateurs « Les yeux des mérous » cherche à documenter la présence des mérous à Saint-Martin.

Aude Berger, coordinatrice du projet à la Réserve, sensibilise le public scolaire à la protection du milieu marin.

La Réserve réalise des comptages de poissons sur 8 stations coralliennes 2 fois par an, qui ont conduit à l’observation de quelques jeunes mérous de Nassau et d’un mérou géant – l’espèce n’est donc pas éteinte à Saint-Martin ! L’étude n’a en revanche pas permis de repérer de larves de ces 2 espèces aux périodes et sur les zones étudiées. Pour analyser les pressions sur la ressource, une étude des usages et des enjeux, notamment économiques, a été réalisée en suivant la méthodologie SocMon (pour Socioeconomic Monitoring) déployée dans la Caraïbe. Les données ainsi collectées au cours de nombreux entretiens renseigneront sur les rapports qu’entretiennent population et économie locale avec ces espèces. Rédaction : Lucie Labbouz

Plus de 60 espèces ont été comptabilisées sur 8 stations lors de ce suivi sous-marin. | L’étude des arrivages de larves.

Photos de la page : © LIFE BIODIV’OM

+ d’info ici : www.lifebiodivom.fr/


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SAINT-BARTHÉLEMY Cette structure artificielle électrifiée va aider à recréer l’habitat essentiel aux organismes marins.

LE COURANT PASSE ENTRE LES CORAUX ET SAINT-BARTHÉLEMY !

À Saint-Barthélemy, l’association Ouanalao Reef travaille sur la restauration corallienne à l ’ aide du procédé B iorock , qui accélère la croissance des coraux par l ’ apport d ’ un courant électrique de faible intensité. Une manière de redynamiser les récifs et de recréer de l ’ habitat pour la faune marine . Turenne Laplace est un natif de l’île, plongeur professionnel et passionné du milieu marin. Ces 20 dernières années, il a assisté avec désolation à la dégradation des récifs et s’est très vite questionné sur les moyens d’y remédier. Durant ses recherches, il découvre le procédé Biorock imaginé par Wolf Hilbertz et son collaborateur Thomas Goreau, biologiste et président de la Global Coral Reef Alliance. Turenne s’envole alors pour Bali afin de visiter une installation sousmarine de Biorock et, séduit par ce qu’il découvre, revient à Saint-Barth avec la volonté de décliner cette technique sur son île. Il propose alors le projet à l’Agence territoriale de l’environnement, qui l’accepte et il obtient dans la foulée le classement du site de la Pointe Milou en réserve marine. Les structures électrifiées qu’il installera seront alors préservées de toute activité de pêche et de mouillage.

Pour Turenne Laplace, « ce projet donne un vrai coup de pouce à la nature. Il permet de faire pousser des coraux, mais aussi de recréer un habitat. Notre site a attiré au fil des ans une foule de poissons et d’organismes marins et offre un beau spectacle aujourd’hui ! En parallèle, après chaque forte houle, nous récupérons des morceaux de coraux cassés que nous installons sur nos structures ou directement en mer ». Une manière d’assurer la survie de nombreuses espèces plus que jamais menacées actuellement par le dérèglement climatique. Rédaction : Mariane Aimar

UN PARTENARIAT AVEC LES PÊCHEURS

Le procédé Biorock consiste à alimenter en courant de faible intensité des structures métalliques placées sous l’eau. L’électricité permet de fixer sur les structures le calcium dissout dans l’eau, dont les coraux ont besoin pour construire leur squelette.

Photos : © Ouanalao Reef

Afin de stabiliser les structures métalliques qui accueilleront les boutures de coraux, Turenne Laplace y agglomère des coquilles de lambis vides. Il fait appel pour cela aux pêcheurs locaux qui viennent déposer leurs conques à proximité du site. Turenne et son équipe les installent alors au pied des structures pour les renforcer face aux houles cycloniques. Aujourd’hui, 3 structures témoins non électrifiées sont présentes sur la Pointe Milou et 8 autres reçoivent un faible courant électrique apporté par des câbles sous-marins.


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LA PREMIÈRE VISITE DES INTERCOMMUNALITÉS DE FRANCE DANS LES OUTRE-MER 2022 marquera la première visite en outre-mer d’un président des Intercommunalités de France. Accompagné de deux de ses collaborateurs et du représentant d’Interco’ Outre-mer, Sébastien Martin est ansi allé à la rencontre des élus de Martinique, de Guadeloupe et de Guyane, afin d’être le porte-parole des projets locaux auprès des instances nationales.

INTERVIEW CROISÉE

Photo de V. Carolo-Lutrot : © Intercommunalités de France | L.Pagès

SÉBASTIEN MARTIN, PRÉSIDENT D’INTERCOMMUNALITÉS DE FRANCE ET VIRGINIE CAROLO-LUTROT, 1ÈRE VICE-PRÉSIDENTE D’INTERCOMMUNALITÉS DE FRANCE

• Pourquoi être allés à la rencontre des élus des outre-mer ? Qu’avez-vous appris ? Sébastien Martin - Pour correctement plaider leur cause à Paris, il fallait rencontrer les intercommunalités d’outre-mer. Ce déplacement nous a permis de les voir presque toutes en Guyane, Martinique et Guadeloupe. Il y a des spécificités, bien sûr, qu’on pense à l’habitat spontané à Cayenne, aux inondations à Pointe-à-Pitre ou aux sargasses sur la côte Atlantique de l’île de la Martinique. Mais comme dans l’Hexagone, quand les élus ont des projets et travaillent sur la base de stratégies partagées, les choses avancent. De ce point de vue, il n’y a certainement pas de complexe à avoir vis-àvis de la métropole : projets alimentaires territoriaux (PAT), plans climat-air-énergie territoriaux, territoires d’industrie… sont autant de preuves du dynamisme de l’intercommunalité en outre-mer !

Sébastien Martin et Virginie Carolo-Lutrot étaient en déplacement en mars dernier en Martinique, en Guadeloupe, ainsi qu’en Guyane, pour aller à la rencontre des élus locaux des différentes intercommunalités et recenser leurs besoins.

Virginie Carolo-Lutrot - Les autres défis ne sont pas si différents de ceux des bassins de vie métropolitains mais se posent avec plus d’acuité : le développement économique, la transition écologique et énergétique, les mobilités… Trop de jeunes partent en métropole et l’insularité complique le développement des entreprises. Les risques naturels et le changement climatique, les enjeux de l’eau, des déchets, de la production d’énergies renouvelables, des mobilités… Sur tous ces sujets, les intercommunalités ont un rôle à jouer. Leur capacité à travailler ensemble et avec l’échelon régional est déterminante.

• Quel rôle les intercommunalités doivent-elles jouer selon vous ? Virginie Carolo-Lutrot - Ce sont les élus de terrain qui ont les réponses. Dans les Antilles par exemple, ils ont développé une réflexion fine pour accompagner


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la filière alimentaire de leur territoire. À travers des stratégies tout d’abord, comme les PAT qui permettent d’animer les échanges entre les acteurs de l’agroalimentaire à l’échelle d’un bassin de vie. Grâce aux équipements et à l’ingénierie ensuite, comme les pépinières d’agrotransformation qui permettent l’accueil de plateformes de recherche et d’innovation pour les entrepreneurs du secteur et valorisent la diversité de la production locale. Sébastien Martin - Les intercommunalités d’outremer innovent aussi grâce à leurs nouvelles compétences comme la mobilité. Nous avons pu visiter le chantier du futur transport en commun en site propre (TCSP) de l’agglomération de Cayenne. Les bus à haut niveau de service pourront accueillir jusqu’à 20 000 voyageurs par jour et encourageront les échanges multimodaux. Ces projets structurants et innovants vont contribuer au développement équilibré et durable des territoires ultramarins.

TÉMOIGNAGES D’ÉLUS

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MARTINIQUE JOSEPH PÉRASTE, ÉLU À CAP NORD MARTINIQUE ET MAIRE DE LA COMMUNE DE MARIGOT « Le déplacement du Président d’Intercommunalités de France a été apprécié en Martinique. Il a permis aux présidents de nos 3 intercommunalités d’agglomération d’échanger avec Sébastien Martin. Par exemple, en ce qui concerne la problématique des sargasses, il est question que nous parlions tous d’une même voix en Martinique, Guadeloupe et Guyane, car nos 3 territoires sont impactés. D’autres sujets ont été abordés, comme l’érosion côtière, qui concerne l’ensemble des outre-mer. Ce déplacement a été de nature à rapprocher les hommes. Ce sont des moments à répéter. »

GUADELOUPE

GUYANE

LYLIANE PIQUIONSALOMÉ, PRÉSIDENTE DÉLÉGUÉE DE LA COMMISSION ÉCONOMIQUE DE CAP EXCELLENCE

SERGE SMOCK, PRÉSIDENT DE LA COMMUNAUTÉ D’AGGLOMÉRATION DU CENTRE LITTORAL (CACL)

« Sébastien Martin, président des Intercommunalités de France, a rencontré les élus des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de la Guadeloupe, et a pu ainsi découvrir les réalités du terrain. Il s’agissait de créer du lien avec les ultramarins, de mieux travailler ensemble, notamment sur les grands défis que sont la lutte contre le réchauffement climatique, ainsi que l’environnement et l’économie. Et surtout, de mieux faire reconnaître les départements d’outre-mer, dans leurs diversités et leurs potentialités sur le plan national. »

« Le séjour du président Martin en Guyane a été riche de visites terrain et d’échanges, nécessaires pour comprendre les enjeux et les limites des projets complexes, mais ambitieux, menés par notre EPCI dans un cadre législatif qui ne peut pas toujours être adapté à nos territoires ultramarins. J’espère qu’il saura s’appuyer sur nos échanges pour restituer et valoriser les ambitions de la CACL et de l’ensemble des intercommunalités d’outre-mer auprès des différents ministères. »

Au sein d’Interco’ Outre-mer, Lyliane Piquion-Salomé est vice-présidente, Joseph Péraste trésorier et Serge Smock membre du bureau.


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L’OFFICE FRANÇAIS DE LA BIODIVERSITÉ (OFB) AUX CÔTÉS DE PORTEURS DE PROJETS ANTILLAIS Pour

soutenir , mobiliser et accompagner les acteurs ultramarins , l ’O ffice français de la

biodiversité déploie des dispositifs adaptés aux enjeux des territoires.

La Solidarité Inter-Bassin et le programme T e M e U m proposent des financements spécifiques pour les outre - mer , notamment aux A ntilles où des projets novateurs peuvent ainsi voir le jour .

LA SOLIDARITÉ INTER-BASSINS (SIB) Parmi ses leviers d’intervention en outre-mer, l’OFB consacre chaque année une importante enveloppe pour le financement d’infrastructures en eau potable et assainissement collectif : 22 millions d’euros par an en moyenne. Au total, ce sont plus de 200 millions d’euros qui ont été engagés entre 2008 et 2018 sur l’ensemble des territoires ultramarins pour garantir la solidarité financière entre les bassins hydrographiques de métropole et des outre-mer. En tant qu’établissement dédié à la protection de la biodiversité, l’ambition est en premier lieu de tendre vers l’amélioration de la qualité des eaux terrestres, littorales et marines ainsi que celle de l’état de santé des écosystèmes associés. Les outre-mer souffrent globalement de systèmes d’assainissement défectueux, non conformes ou parfois inexistants : face à l’urgence, les moyens se renforcent pour soutenir la mise en œuvre des travaux.

DES OISEAUX DE PARADIS POUR ASSAINIR LES EAUX DU DIAMANT

En Martinique, dans la commune du Diamant, une station d’épuration a été déployée selon une filière d’assainissement innovante : les eaux usées sont filtrées grâce à un lit planté de végétaux, en l’occurrence ici des oiseaux de paradis (voir à ce sujet dans l’ e-mag n°10 l’article de l’ODE Martinique). Comme nous l’explique Odile Cruz de la direction des Outre-mer à l’OFB : « C’est un système à privilégier pour les stations de petites tailles. Les résultats sont très probants et la technicité d’exploitation est bien plus facile à mettre en œuvre. » Ce site pilote a été financé en 2015 par l’OFB dans le cadre de la SIB à hauteur de 40 % du budget total. + d’info ici : vidéo de la Société Martiniquaise des Eaux (« regards » d’Odile Cruz et Thierry Numa)

Depuis 4 ans, la Société Martiniquaise des Eaux (SME) est responsable de cette station d’épuration de 1 200 équivalents habitants. © SME


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+ d’info ici : http://temeum.ofb.fr/fr

Depuis plus de 10 ans, le programme Terres et Mers Ultramarines (Te Me Um) est déployé outre-mer pour soutenir les réseaux locaux des acteurs de la biodiversité. Chaque année ou presque, 3 appels à projets sont lancés pour aider les associations, les collectivités et structures publiques à initier de nouvelles actions

ou à se former en réalisant des compagnonnages. En 2021, 43 projets ont été financés dans les territoires ultramarins, dont 36 micro-projets pour des montants de 10 000 € maximum par projet. Des « coups de pouce » notamment appréciés par les petits porteurs de projets locaux qui ont parfois du mal à accéder aux plus gros leviers de financements nationaux ou européens. Les appels à projets Te Me Um 2022 sont clôturés depuis le 9 mai et les 57 dossiers de candidature sont maintenant en cours d’instruction… Rendez-vous en septembre pour connaître les résultats !

Inventaire collectif des oiseaux et des insectes à l’occasion de la fête de la Nature des 20 et 21 mai derniers. © Rezilyans 971

En Martinique, pose d’enclos (196 m2) et plantation par l’équipe des Jardins de Gaïac en haut de l’Anse Gros-Raisin.

LES COUPS DE POUCE DU PROGRAMME TE ME UM

© Jardins de Gaïac

UN INVENTAIRE PARTICIPATIF SUR L’ÉCOLIEU DE SAINTE-ANNE

UN PROJET D’ADAPTATION AUX CHANGEMENTS CLIMATIQUES À SAINTE-LUCE

En Guadeloupe, la jeune association Rezilyans 971 développe un tiers-lieu dédié à la transmission des savoirs et à l’expérimentation d’alternatives durables et écologiques. Aux espaces de jardins partagés développés selon les principes de l’agroécologie, s’ajoutent différents projets destinés à sensibiliser et impliquer la population locale. Te Me Um a soutenu l’association en 2021 pour réaliser l’organisation d’un inventaire de la faune et de la flore de l’écolieu avec le grand public : l’occasion de mieux identifier les espèces présentes sur le site mais aussi, d’initier petits et grands à cette connaissance de la biodiversité.

La plage de Gros-Raisin à Sainte-Luce est sujette à l’érosion côtière : une menace sur le long terme tant pour les infrastructures d’arrière-plage et les habitants que pour la biodiversité, car le site est notamment un lieu de ponte pour les tortues marines. La commune, lauréate de l’appel à micro-projets Te Me Um 2021, revégétalise le haut de plage dans le cadre du projet Walima. Les plantations viennent d’être lancées et avec elles, des animations scolaires et de nombreuses collaborations 1. Ce projet bénéficie de l’expertise de l’assocation Les Jardins partagés de Gaïac, qui particpe au projet « Planter un million d’arbres en Martinique ».

Avec les restaurateurs de la plage, l’ONF, le réseau tortues marines, le Conservatoire national botanique de Martinique, l’Université des Antilles et l’observatoire Olimar pour les suivis scientifiques d’évaluation du projet. 1


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grandeur Nature

MARTINIQUE

VOILE NATURE VEUT FAIRE DE LA MARTINIQUE UNE DESTINATION ÉCOTOURISTIQUE

Et

si un autre t ype de tourisme nautique était possible

? P lus

lent, plus engagé , plus

respectueux de la biodiversité marine, de la faune et de la flore martiniquaises l’objectif que s’est fixé

Voile Nature, la première plateforme web dédiée contribuant à la protection de l’environnement en M artinique.

? C’est

aux balades en mer

L’ÉCOTOURISME EN LIGNE DE MIRE

UN OUTIL À USAGE COLLECTIF

En 2009, alors que le concept d’écotourisme n’a encore que peu d’écho en Martinique, Délice Nouel, skipper et monitrice de plongée, décide de proposer des balades en mer, à la voile et en petit comité, pour profiter du littoral marin de son île natale en toute écoresponsabilité. Il faut dire qu’avec l’accroissement de l’offre de sorties en catamaran et en bateau à moteur, les pressions sur les écosystèmes marins martiniquais ne cessent de se renforcer. « Nous savons maintenant que nous sommes un hotspot de biodiversité. Je voudrais que ma fille et les enfants martiniquais puissent eux aussi, demain, profiter du bel environnement que l’on a connu. C’est ce qui me motive au quotidien », explique la créatrice de l’entreprise Dénébola, à l’origine de la création d’un site internet dédié à la valorisation de l’écotourisme nautique en Martinique.

Voile Nature, c’est le nom de cette plateforme web qui voit le jour en mai 2022, après avoir remporté l’appel à projet Biodiv’Eco 2021 de l’OFB. On y retrouve une première poignée de partenaires nautiques, unis par les 3 principes fondateurs de la charte d’engagement de Voile Nature : proposer des excursions à la voile, en petit groupe et sans musique. Mais si contribuer à la pérennité des prestataires engagés est la première ambition de Voile Nature, la plateforme se positionne aussi comme une vitrine des initiatives locales de préservation de l’environnement, en développant des partenariats avec les institutions et associations du territoire. On peut ainsi citer un partenariat avec l’association L’Asso-Mer destiné à aider les excursionnistes intéressés par la plateforme à analyser leur impact et modifier leurs pratiques.

Sur son voilier, Délice Nouel propose des sorties ludiques et écoresponsables. © Voile Nature | Page de droite : matelots d’un jour, lors d’une balade proposée par l’entreprise Dénébola. | Jessica et Polo de Madisail, Délice, Lisa et Bastien de Dénébola. © Axelle Dorville


L’E-MAG ULTRAMARIN DE L’ENVIRONNEMENT

Voile Nature réunit aujourd’hui 4 premiers partenaires nautiques engagés dans la même démarche. De haut en bas, et de gauche à droite : le voilier monocoque de Dénébola, celui de Pogo Luciole, le trimaran de course de Madisail et le catamaran de Ty Domino.

À terme, la plateforme envisage également d’intégrer des acteurs guadeloupéens et au-delà, ultramarins. « Il n’est pas trop tard pour faire le choix de rentrer dans le cercle vertueux d’un tourisme plus responsable, pour attirer une clientèle qui prendra plus soin de l’île et préserver l’outil de travail de tous les excursionnistes. Nous avons tout intérêt à jouer cette carte-là », conclut Lisa Roucoul, cheffe de projet Voile Nature et diplômée en licence professionnelle d’écotourisme. À suivre sur voilenature.com !

Rédaction : Axelle Dorville + d’info ici : https://www.voilenature.com/

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+ d’info ici : www.cirad.fr

ÉTUDIER LES SERVICES RENDUS PAR LA BIODIVERSITÉ POUR FAVORISER UNE AGRICULTURE DURABLE

Garantir l’intégrité des cultures locales tout en préservant et en renforçant la biodiversité des écosystèmes , telle est la mission complexe mais passionnante des chercheurs du CIRAD en M artinique . T rois d ’ entre eux nous présentent leurs travaux en cours .

La présence de vers de terre est donc un bioindicateur, un élément visible et concret renseignant sur la qualité biologique des sols, auquel je sensibilise les agriculteurs. Mon rôle de chercheur est ainsi d’étudier la biodiversité du sol dans les bananeraies et milieux naturels, en partenariat avec les instituts techniques, le Conservatoire botanique, le Parc naturel régional, pour des associations et acteurs du monde agricole. »

MATHIEU COULIS, CHERCHEUR EN ÉCOLOGIE DU SOL « En tant que membre de l’unité de recherche GECO qui s’intéresse au fonctionnement écologique et à la gestion durable des agrosystèmes bananiers et ananas, ma mission consiste à étudier l’effet des pratiques agricoles sur les invertébrés du sol, et en miroir, à déterminer l’intérêt de cette biodiversité pour fournir des services écosystémiques.

Des tests sont effectués en serre afin d’évaluer l’impact de différents types d’invertébrés sur la croissance de bananiers.

En effet, la macrofaune, c’est-à-dire les espèces d’invertébrés visibles à l’œil nu, peut participer à la biorégulation des ravageurs de cultures. Les fourmis et les dermaptères par exemple sont capables de manger les oeufs du charançon noir du bananier, un ravageur majeur de cette culture. D’autre part, les vers de terre, en tant que saprophages, se nourrissent des matières organiques mortes, remettent à disposition du sol des nutriments, et modifient aussi la structure du sol par leur brassage constant. Leur action améliore alors la fertilité des sols, et permet par conséquent un moindre recours aux engrais chimiques. La biodiversité joue un rôle essentiel dans l’équilibre des agrosystèmes bananiers. La macrofaune du sol, telle que ces araignées, participe à la biorégulation des ravageurs de cultures.


L’E-MAG ULTRAMARIN DE L’ENVIRONNEMENT

bioagresseurs par la prédation, et ainsi réduire les besoins en intrants des systèmes de culture. Je m’intéresse tout particulièrement au service de stockage de carbone dans les sols cultivés, qui améliore la fertilité des systèmes de culture, tout en piégeant dans le sol une partie des gaz à effet de serre que nous émettons.

MARIE SAUVADET, CHERCHEURE EN ÉVALUATION DES SERVICES ÉCOSYSTÉMIQUES EN BANANERAIES

J’applique ces évaluations sur les systèmes innovants développés dans les bananeraies au cours des dernières décennies aux Antilles. Ces innovations s’appuient notamment sur le recours aux plantes de services – lors des phases de jachère ou pour l’enherbement des parcelles – et la gestion du couvert végétal, qui favorise la fourniture de nombreux services écosystémiques encore peu évalués.

« Mon rôle est d’évaluer les services écosystémiques, à savoir les avantages fournis par les composantes naturelles – végétaux, arbres et organismes du sol – des agrosystèmes, en milieux cultivés. Ces écosystèmes peuvent aider au maintien de la fertilité et de la structure du sol, ou à la régulation naturelle des

Notre futur projet consiste à participer au développement de l’agroforesterie en Martinique en évaluant les bénéfices et contraintes de ces systèmes, en partenariat avec les acteurs du monde agricole et les instituts locaux tels que Valcaco ou le Parc naturel régional de la Martinique. »

BÉATRICE RHINO, CHERCHEURE ENTOMOLOGISTE ET ÉCOLOGUE

« Au sein de l’unité de recherche HortSys, je m’intéresse aux interactions entre les insectes et les plantes dans les systèmes de cultures maraîchères et aux solutions de biocontrôle basées sur l’écologie chimique. J’étudie ainsi le potentiel attractif ou répulsif de plantes, qui pourront être introduites au sein des parcelles ou autour de celles-ci pour lutter contre les ravageurs et attirer des auxiliaires. Par exemple, lorsque la noctuelle pond sur les plantes en fleur de la tomate, les chenilles de ce papillon se développent

Le gros thym a un effet répulsif contre Bemisia tabaci, vecteur de bégomovirus sur tomate. Son huile essentielle pourrait avoir un effet biocide sur les aleurodes. © CIRAD

dans les fruits, provoquant une perte de production pour les agriculteurs. Le maïs doux, utilisé comme plante-piège, détourne alors les pontes de Helicoverpa zea de la tomate. Intéressée par le potentiel des plantes locales pour la santé végétale, mes études actuelles portent sur l’effet répulsif ou insecticide des plantes aromatiques et médicinales. L’idée in fine est de pouvoir trouver des solutions alternatives aux insecticides de synthèse que les agriculteurs pourront facilement s’approprier. »

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GUADELOUPE

FRÉZIAS NATURE, LA CRÉATION D’UN JARDIN DES MERVEILLES Rédaction : Camille Caumette

Imaginé par 2 jeunes passionnés, le projet Frézias Nature s’attelle depuis 2019 à façonner à M atouba un « jardin des merveilles » . L’idée est de valoriser les richesses forestières de l’ île et de recréer des corridors écologiques en pratiquant l’agroforesterie. Situés entre 600 et 800 mètres d’altitude, 2 hectares de terres ont été concédés par l’ONF Guadeloupe à Ulysse Mogue et son associé Léonard Normand, les jeunes fondateurs de Frézias Nature, pour leur permettre de développer leur projet agroécologique. Cette initiative, lauréate en 2019 du concours Agriculteurs d’Avenir, catégorie « arbres et cultures » avait au départ été pensée autour de la vanille et du cacao. Puis Frézias Nature a opté pour une succession de cultures étagées et diversifiées assurant un rendement rapide et une meilleure résilience de la production au fil des saisons. L’entreprise propose des paniers de produits frais occasionnels, des cosmétiques naturels et autres consommables transformés, le tout 100 % bio et issu de ces plantations forestières.

De belles cabosses fraîches récoltées sur les cacaoyers.

L’objectif était de s’inspirer des savoirs locaux en matière de techniques agroécologiques afin d’obtenir une grande diversité végétale via des processus naturels, tout en recréant un maximum de forêts. Plutôt qu’un système de monoculture défavorable à la biodiversité, Ulysse et Léo ont mis en place un large éventail de cultures étagées sur de petites parcelles, parfois de seulement 60 m2. Leur exploitation retirée dans les hauteurs de Matouba s’apparente ainsi à une mosaïque composée de giraumon, roucou, cannelle, goyave, café, piment, herbacées, madère, pois... et même riz ! L’ensemble est cultivé sans machines ni intrants chimiques, entièrement à la main et selon la temporalité de l’agriculture naturelle.

Une gamme de produits artisanaux est proposée en vente directe à la ferme ou en livraison : confitures, pâtes à tartiner, fleurs coupées, gousses de vanille certifiée AB, laits corporels...


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Des excursions touristiques et pédagogiques sont régulièrement organisées depuis la maison forestière de Matouba.

L’agroforesterie est une pratique ancestrale qui désigne l’association d’arbres et de cultures ou d’animaux sur une même parcelle. Elle fait partie des pratiques agronomiques vertueuses. Sur certaines zones dégradées par l’activité humaine, l’agroforesterie offre par exemple la possibilité de reconstituer des écosystèmes et des corridors écologiques – ces passages indispensables au déplacement de la faune et la flore d’un espace naturel à un autre – ce qui favorise les échanges entre les espèces et permet aux végétaux et animaux de recoloniser des milieux endommagés, comme d’anciennes clairières. Plus globalement, l’agroforesterie participe à améliorer la qualité des sols et la ressource en eau, en réintégrant notamment dans les terres des systèmes racinaires limitant les pertes d’eau et de minéraux. Par l’action naturelle des arbres, elle contribue à capter du carbone et favorise une meilleure qualité de l’air.

TÉMOIGNAGE LÉONARD NORMAND, COGÉRANT DE FRÉZIAS NATURE « Nous voulons tester d’autres techniques et continuer à mettre sur le devant de la scène des végétaux différents. On a tout à gagner à se diversifier, à produire plein de choses sur une même parcelle et par conséquent, à revaloriser le métier d’agriculteur. Ce dernier est celui qui connaît vraiment bien son terrain, qui sait quoi planter, comment et quand. Il doit à nouveau être celui qui détient le savoir et continue de l’améliorer et de le transmettre, afin de conserver l’aspect culturel de notre rapport à la terre. »

À l’échelle de la Guadeloupe, Ulysse et Léo sortent des sentiers battus et souhaitent créer des référentiels pour les agriculteurs dits « non conventionnels », qui se distinguent de l’agriculture productiviste ou industrielle. Ils cherchent à partager leur expérience quant à la production, la transformation et la commercialisation des fruits et légumes pour lesquels il n’existe pas aujourd’hui de marché sur l’île.

Frézias Nature ne pouvait pas ne pas cultiver de fraises ! Léo et Ulysse, le duo à l’origine de Frézias Nature.

+ d’info ici : www.frezias-nature.com

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L’AFD ACCOMPAGNE LES COLLECTIVITÉS VERS UN DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE DURABLE Présente depuis plus de 70 ans sur le territoire, l’Agence française de développement de la Guadeloupe et des îles du Nord soutient les collectivités locales au travers de partenariats forts et d’appuis techniques et thématiques pour les aider à structurer leurs investissements dans le contexte actuel de changement climatique.

© Ville de Sainte-Anne

Dans la situation particulière de fragilité financière des collectivités du territoire, l’Agence française de développement (AFD) propose des dispositifs d’assainissement des finances aux communes et collectivités territoriales pour leur permettre de retrouver leurs capacités d’investissements. Le dialogue de confiance entre l’AFD et la collectivité s’établit notamment autour d’une analyse minutieuse des programmes pluriannuels d’investissement et oriente les établissements publics dans une trajectoire de développement la plus vertueuse possible au regard du contexte écologique actuel.

La réussite de ses dispositifs d’appui-conseil permet dans un second temps à l’AFD d’accompagner des projets de territoire intégrant une dimension d’adaptation au changement climatique, en cohérence avec la stratégie « climat – développement » du groupe, elle-même alignée avec l’Accord de Paris 1. En 2021, ce sont 84 millions d’euros qui ont été engagés en Guadeloupe et à Saint-Martin, pour soutenir des projets d’aménagement, d’énergie verte, de gestion des déchets, de mobilité urbaine, ou encore de lutte contre l’érosion du littoral.

La rénovation de l’éclairage public à Sainte-Anne fait partie des projets ayant bénéficié de prêts de l’AFD en Guadeloupe. L’Accord de Paris est un traité international sur le réchauffement climatique adopté en 2015 lors de la 21ème Conférence des Parties à la convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques. 1


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Frédéric Guillaume - L’AFD et la Guadeloupe, c’est une vieille histoire. Nous sommes présents sur le territoire quasiment depuis la création de l’AFD, et avons noué des partenariats historiques avec les collectivités locales. Avec la Ville de Sainte-Anne, nous avons engagé un partenariat pour amener l’équipe municipale à rétablir une situation financière qui a rendu possible notre soutien à plusieurs investissements à cobénéfices pour le climat.

INTERVIEW CROISÉE CHRISTIAN BAPTISTE, MAIRE DE LA VILLE DE SAINT-ANNE ET FRÉDÉRIC GUILLAUME, DIRECTEUR DE L’AFD EN GUADELOUPE

Les prêts budgétaires accordés à la Ville ont ainsi eu pour vocation de financer des projets qui limitent les consommations énergétiques et protègent la biodiversité. Ce sont des projets qui vont dans le sens d’une véritable transition énergétique et écologique et qui s’inscrivent pleinement dans nos orientations en faveur d’un développement économique durable, sur un territoire particulièrement vulnérable aux effets du changement climatique.

• Quels étaient vos principaux objectifs à travers ce partenariat avec l’AFD ? Christian Baptiste - En 2014, lorsque nous avons été élus, la Ville de Sainte-Anne s’est retrouvée à la croisée des contradictions car elle devait en même temps résorber son déficit budgétaire tout en réalisant les investissements nécessaires à une ville de 25 000 habitants. En 2018, nous avons alors établi un contrat d’objectifs avec l’AFD pour permettre à la ville de retrouver son équilibre budgétaire. Au-delà des aspects financiers, l’AFD nous a également apporté une assistance technique et une ingénierie organisationnelle via la réalisation de différents audits. Grâce à ce partenariat, nous avons pu remplir notre objectif fondamental de redressement de la situation budgétaire au 31 décembre 2020, un an avant la date initialement fixée ! Ce soutien a donc permis à la ville d’une part de maîtriser ses dépenses, d’optimiser et de consolider certaines recettes, et de résorber son déficit d’investissement pour retrouver un équilibre budgétaire, et d’autre part de cofinancer des projets par le biais de prêts bonifiés.

• Très concrètement, qu’a permis de mettre en œuvre le financement de l’AFD ? Christian Baptiste - Les prêts de l’AFD nous ont offert la possibilité de financer des projets tels que le renouvellement de notre parc automobile par des véhicules électriques et la mise en place de bornes photovoltaïques pour les alimenter, des projets de modernisation de l’éclairage public en centre bourg et au niveau du stade, ou encore la réduction de la consommation énergétique des bâtiments municipaux. Ces prêts et, plus largement, ce partenariat avec l’AFD soutiennent la démarche de transition énergétique et environnementale engagée par la Ville de Sainte-Anne. + d’info ici : https://www.afd.fr/fr/page-region-pays/guadeloupe

© AFD

• En quoi ce partenariat avec la Ville de Saint-Anne s’inscrit-il dans les orientations stratégiques de l’AFD en Guadeloupe ? Le renouvellement du parc éolien de la Montagne à la Désirade est une opération accompagnée par l’AFD.


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GUYANE

HISTOIRE D’UN TRÉSOR... Rédaction : Romy Loublier

La Réserve naturelle régionale Trésor s’étale sur une relative petite surface de près de 2 500 hectares et abrite une surprenante diversité de milieux. Au fil des années, les défenseurs du patrimoine local ont lutté pour offrir à ce petit écrin de biodiversité un statut de protection fort et troquer projets d’exploitation aurifère contre conservation durable de ce joyau vert…

L’histoire de Trésor commence en 1992 lorsqu’un naturaliste néerlandais projette d’acheter les terrains de l’actuelle réserve pour y créer un Parc tropical. Mais il faudra attendre presque 20 ans, pour que le site acquiert son statut actuel de Réserve naturelle régionale (RNR), un statut de protection fort qui garantit la conservation des forêts, des savanes et de la grande richesse des espèces qu’elle abrite. Le parcours fut long pour en arriver là. L’Université d’Utrecht avait accepté de garantir le prêt nécessaire à l’acquisition, or celle-ci ne pouvait être réalisée qu’à travers une institution légale indépendante.

La Fondation Trésor « Stichting Tresor » voit alors le jour le 13 décembre 1994 à Utrecht. Un important support financier est obtenu de la part de plusieurs entreprises néerlandaises, notamment de la Compagnie d’électricité et d’une des loteries nationales des Pays-Bas, permettant à la Fondation de devenir l’acquéreur du terrain en 1995. Les moyens de protection se renforcent ensuite : un arrêté préfectoral classe tout d’abord le site en Réserve naturelle volontaire en 1997, puis la création de l’association Réserve naturelle Trésor en 1999 fixe des objectifs concrets de préservation, de recherche scientifique et de sensibilisation du public.

Dans ce secteur très arrosé de Guyane, la pluviométrie moyenne dépasse 4 mètres d’eau par an ! © Jean-François Szpigel | Association Trésor


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Mais en parallèle, la Guyane porte aussi des ambitions de développement économique et d’exploitation des ressources aurifères, notamment dans la région de la montagne de Kaw. Dès 1995, non loin du site Trésor, des permis d’exploration minières sont attribués au Camp Caïman sur la commune de Roura et la société CBJ-Caïman SAS 1 obtient en 2004 une concession de 25 ans par décret en Conseil d’État. Le potentiel est estimé à 34,2 tonnes d’or sur une superficie de 30 km². La tension monte en 2006 alors que les procédures d’instruction des demandes d’ouverture des travaux miniers (OTM) et d’exploitation (ICPE) sont achevées et que les projets d’arrêtés préfectoraux n’attendent plus que la signature du préfet pour être rendus applicables. Le collectif « Non à Cambrior » se monte alors. Il rassemble 33 organisations – des associations, des habitants et des mouvements politiques – et dénonce la politique incohérente menée sur une même entité de territoire : conservation de la biodiversité sur certaines parcelles et destruction profonde de leurs voisines. À cette époque du Grenelle de l’environnement et du projet de Parc national guyanais, c’est finalement du côté de la préservation que penchera la balance : en janvier 2008, le président de la République Nicolas Sarkozy déclare officiellement ne pas donner de suite favorable au projet de la mine d’or de Roura. Le statut de Réserve naturelle régionale est par la suite accordé au site Trésor le 12 février 2010 par le Conseil régional et la pérennité de la démarche de protection entreprise par la Fondation est, depuis 2014, assurée grâce à l’acquisition foncière de la réserve par le Conservatoire du littoral. Récemment, la Collectivité territoriale de Guyane (autorité de tutelle de la réserve), le Conservatoire du littoral (propriétaire foncier) et l’association Trésor (gestionnaire du site) ont renouvelé leur engagement à travers la reconduction de la convention de gestion pour les 10 prochaines années. La réserve Trésor dispose d’un nouveau plan de gestion, le 3ème, qui s’étale sur la période 2021-2030 et définit les actions de gestion en intégrant les enjeux à l’échelle de la Montagne de Kaw, pour une meilleure cohérence écologique et une gestion adaptée sur le moyen terme. C’est ainsi que, sur la montagne de Kaw, l’or vert triompha de l’or jaune ! 1

La tortue denticulée, qui atteint 40 à 50 cm, est communément rencontrée en forêt guyanaise. © J.-F. Szpigel | Association Trésor

Mare pédagogique créée en 2019 pour permettre aux visiteurs d’observer la faune : amphibiens, libellules... © J.-F. S. | A. Trésor

Une visite virtuelle à 360 ° est à découvrir sur le site de la réserve.

+ d’info ici : https://www.reserve-tresor.fr/

Elle devient en 2006 filiale du groupe canadien Iamgold Corportation, 10ème producteur mondial d’or, basé à Toronto (Ontario, Canada).

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LES HABITATS CÔTIERS DE GUYANE : UN PATRIMOINE NATUREL À PRÉSERVER POUR LA BIODIVERSITÉ Les

zones côtières et estuariennes sont connues pour leur forte productivité et leur rôle

de nurserie pour une multitude d ’ espèces marines .

Malgré leurs fonctions importantes, ces habitats manquent de mesures de conservation pour faire face aux différentes pressions . Les habitats côtiers de la Guyane française sont encore largement inconnus mais déjà soumis à des pressions anthropiques croissantes. L’identification et l’estimation de la valeur des différents habitats constituent une étape clef pour le développement d’une gestion durable de ces zones critiques. Le projet BioCotEs – financeurs : Feder, Ifremer et Gepog – vise à améliorer les connaissances sur la biodiversité des larves et juvéniles de poissons et crustacés le long des côtes guyanaises (12 sites de prélèvement). Un inventaire du patrimoine biologique a été effectué dans les estuaires, mangroves et eaux côtières, puis les habitats ont été caractérisés par plusieurs mesures physico-chimiques de l’eau et du sédiment.

Ces variations spatiales étaient principalement liées à des changements de température, salinité et de matière organique dans l’eau. Les résultats obtenus au cours de ce projet, et qui viennent de faire l’objet d’un séminaire de restitution, seront disponibles pour les différents acteurs concernés par la biodiversité et l’aménagement du territoire, afin d’inciter des mesures de protection de ces zones littorales. + d’info ici : Le projet BioCotEs Contact : Morgana Tagliarolo, Unité « Biodiversité halieutique » de Guyane | morgana.tagliarolo@ifremer.fr

Les communautés étudiées étaient fortement influencées par la saisonnalité. Les abondances et la diversité étaient plus élevées pendant la saison sèche. La biodiversité était maximale dans la zone de mangroves à la fois pour les crevettes et la méiofaune 1. Les juvéniles et larves des poissons ont montré une biodiversité maximale en zone côtière. Les sites de l’Approuague et de Cayenne ont montré une richesse spécifique supérieure à celle des autres sites étudiés.

Ci-dessus : zone de mangrove. © Ifremer | Morgana Tagliarolo | 1 Petits animaux vivant dans le sédiment.

Espèces prélevées durant le projet BioCotEs. © Ifremer | Morgana Tagliarolo


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Le bateau Ayawende va faciliter pour les scientifiques l’accès aux zones littorales et côtières de Guyane. © Ifremer

UN NOUVEAU BATEAU POUR LE LEEISA D’une longueur de 7,50 mètres, le bateau côtier Ayawende est un nouvel équipement nautique du laboratoire « Écologie, évolution, interactions des systèmes amazoniens », ou LEEISA, qui regroupe des forces issues du CNRS, de l’Université de Guyane et de l’Ifremer. Sa construction a été financée par le CNRS, l’Ifremer et la Préfecture de la Guyane. L’Agence française de développement (AFD) apporte un financement de 150 k€ pour l’équipement scientifique. Ce nouveau bateau est adossé à l’équipe EDyLiC du laboratoire et au projet d’Observatoire pluridisciplinaire de l’écosystème mangrove. Il va faciliter l’accès aux zones d’études des scientifiques travaillant sur les questions littorales et côtières, plurithématiques, de la Guyane. Le navire sera ouvert à une communauté scientifique plus large. Son inauguration officielle est prévue à la fin du mois d’août. + d’info ici : Le bateau Ayawende Contact : Antoine Gardel, CNRS LEEISA | antoine.gardel@cnrs.fr

Base de données génétiques permettant d’identifier plus facilement les larves de poissons. © Ifremer

IDENTIFIER LES POISSONS PAR LEURS GÈNES L’inventaire des espèces de poissons guyanais reposait auparavant sur des descriptions morphologiques. Des analyses génétiques ( barcoding ) ont montré que cet inventaire était incomplet et présentait des erreurs. Certaines espèces, y compris des espèces commerciales très communes, n’étaient pas encore référencées dans les bases de données génétiques internationales. Le projet GuyaGenFish, débuté en 2020, a pour objectif de constituer une collection de référence des poissons marins et estuariens de Guyane ainsi qu’une base de données génétiques correspondante. + d’info ici : Le projet GuyaGenFish Contact : Yann Rousseau, Unité « Biodiversité halieutique » de Guyane | yann.rousseau@ifremer.fr

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ÎLE DE LA RÉUNION LA CONNAISSANCE SCIENTIFIQUE SUR LES CÉTACÉS À LA PORTÉE DU PLUS GRAND NOMBRE ! L’association GLOBICE

Pendant l’hiver austral, de juin à septembre, les baleines à bosse rejoignent les eaux chaudes de La Réunion pour s’accoupler, ou mettre bas et élever leurs baleineaux. © GLOBICE | Adrian Fajeau

est née de la volonté d’améliorer les connaissances sur les cétacés

dans les eaux réunionnaises.

Après

plus de

20

ans de recherche scientifique et d’actions de

sensibilisation, l’association a aujourd’hui acquis une notoriété nationale, voire internationale, dans le domaine de la protection des cétacés.

Le Groupe local d’observation et d’identification des cétacés (GLOBICE) a été fondé en 2001 par des passionnés de l’océan basés à La Réunion, qui observaient un nombre croissant de baleines à bosse et se sont interrogés sur les espèces de cétacés présentes près des côtes réunionnaises. Au fil des années, l’association s’est professionnalisée, a porté et participé à des programmes de recherche scientifique pointus, à l’échelle des eaux territoriales et du bassin océanique, pour étudier la question des migrations par exemple. Les travaux réalisés ont mis en évidence l’existence de 24 espèces de cétacés dans la zone ! En mai 2020, un hydrophone 1 a été immergé au sommet du mont sous-marin La Pérouse, à plus de 70 mètres de profondeur et quelque 160 kilomètres des côtes. Cette expérimentation acoustique a permis d’enregistrer pendant près de 10 mois en continu les sons émis par différentes espèces de cétacés. Le rapprochement avec un « répertoire de sons » a confirmé la fréquentation de nombreuses baleines à bosse, de dauphins à long bec mais également… de baleines bleues ! L’espèce est classée par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) en danger critique d’extinction dans le monde. Le retour des observations et enregistrements de ces géants bleus pourrait signifier une augmentation du nombre d’individus : une bonne nouvelle pour l’Océan. 1

Microphone destiné à être utilisé sous l’eau.

Au-delà de ses actions de recherche, GLOBICE a à cœur de vulgariser les connaissances scientifiques acquises et de les rendre accessibles à la population réunionnaise. De nombreux événements sont organisés à destination du grand public et des scolaires, avec la communauté éducative et l’ensemble des acteurs impliqués dans la protection des cétacés. Pour élargir sa présence sur l’île, 2 projets sont ainsi en cours de développement. Le « Campus cétacé mobile », container itinérant, ira à la rencontre des écoles et partenaires plus éloignés. Le projet « Cétadistance » consistera quant à lui à réaliser des actions de sensibilisation de manière dématérialisée, pour intervenir auprès des populations les plus isolées de La Réunion… et pourquoi pas hors du territoire !

Pose d’un hydrophone au fond de l’eau. © GLOBICE


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désormais, à laquelle GLOBICE a fortement contribué, pour réguler l’activité dans le sens d’un plus grand respect des mammifères marins.

• GLOBICE a fêté l’année dernière ses 20 ans d’existence, comment résumeriez-vous votre parcours ces 2 dernières décennies ?

INTERVIEW JEAN-MARC GANCILLE, RESPONSABLE COMMUNICATION, SENSIBILISATION ET DÉVELOPPEMENT DE L’ASSOCIATION GLOBICE • La protection des cétacés semble être une évidence, existe-t-il toujours aujourd’hui des menaces qui pèsent sur ces espèces ?

- Depuis 2001, nous avons conduit une montée en puissance des programmes scientifiques qui nous ont permis d’acquérir une crédibilité à l’échelle locale, comme à l’échelle internationale. En 2020, GLOBICE a ainsi été parrain de la motion 118 visant à « Renforcer la protection des mammifères marins par la coopération régionale » au dernier Congrès mondial de la Nature de l’UICN : une vraie reconnaissance de l’ensemble des confrères, dont nous sommes particulièrement fiers !

- Malheureusement, oui ! Dans le nord de l’océan Indien, les techniques de pêche utilisées ne permettent pas de différencier les animaux capturés. On estime que près de 1,8 million de dauphins a été décimé ces 50 dernières années, ce qui représente 80 % de la population…

• Quelles actions souhaitez-vous mener au cours des prochaines années ?

Dans les eaux territoriales réunionnaises, ces techniques de pêche ne sont pas utilisées, et la plus grande menace pour les cétacés est finalement celle de l’observation touristique. L’activité de whale watching (observation des baleines) est très attractive et exerce une pression permanente sur les populations de cétacés résidentes. Une réglementation existe

Nous avons imaginé le projet « Balèn », qui devrait voir le jour d’ici 2025 : l’idée est de créer un tiers-lieu qui serait un endroit d’éducation scientifique et de découverte, dédié à la connaissance et à la protection des cétacés de La Réunion… Une première en France !

- Au-delà des programmes de recherche, GLOBICE cherche à être toujours plus présent sur le terrain, auprès des Réunionnais et des Réunionnaises.

Rédaction et interview : Lucie Labbouz

+ d’info ici : https://www.globice.org/

Activité ludique vouée à sensibiliser la jeunesse. © GLOBICE | J.-M.Gancille| Groupe de dauphins d’Électre. © GLOBICE | Emmanuelle Leroy

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PORT RÉUNION S’ENGAGE POUR LE DÉVELOPPEMENT DURABLE

Finalisé

Développement Durable (PA2D) constitue la feuille de route du développement durable du G rand P ort M aritime de L a R éunion . Il correspond à la démarche de responsabilité sociétale des entreprises (RSE), telle qu’elle a été définie par la C ommission européenne 1. en

2017,

le

Plan d’Aménagement

et de

En adoptant son PA2D, qui s’inscrit dans son Projet stratégique 2019-2023, Port Réunion s’est doté d’une véritable politique de développement durable. Celle-ci se décline en objectifs et en actions pour favoriser l’efficacité énergétique, la qualité environnementale, l’équité sociale, et la mise en valeur du patrimoine architectural, archéologique et paysager du GPMDLR. À l’image de la RSE, qui suppose pour une entreprise d’intégrer volontairement des préoccupations sociales et environnementales à ses activités commerciales et ses relations avec les parties prenantes, les piliers du PA2D du Grand Port Maritime sont : le social 2, l’environnement et l’économie. La définition et le suivi des actions sur ces 3 thèmes clés sont le fruit d’un travail participatif mobilisant de manière transversale le personnel de l’établissement portuaire. Aujourd’hui, la démarche PA2D, qui s’enrichit au fil du temps, des pratiques, des apports des collaborateurs et de l’évolution de la réglementation, représente une vraie philosophie de travail qui anime les équipes ! Parmi les thèmes des actions environnementales du PA2D

figure la réduction des impacts environnementaux. Pour ce faire, le Grand Port Maritime a participé récemment à la manifestation nationale « Mai à Vélo » soutenue par le ministère de la Transition écologique et le ministère des Sports. Ses équipes ont ainsi parcouru 814 kilomètres à vélo dans le cadre du Challenge organisé via l’application « Geovelo ». Le but de cette initiative était de rassembler tout au long du mois de mai les entreprises, associations, collectivités et écoles au sein d’un « défi » visant à faire parcourir le plus de kilomètres à vélo possible à sa communauté. Le 13 mai, Port Réunion a également organisé une matinée d’animations dédiées au vélo afin d’encourager sa pratique par les agents du port. Les différents ateliers proposés ont permis de partager un moment convivial et pédagogique autour de l’initiation au vélo électrique, de la sécurité routière et du moindre impact de ce mode de transport alternatif à la voiture sur l’environnement. Rétrospective en photos et témoignages de cet événement RSE qui a réuni au Foyer du personnel de nombreux participants.

« La responsabilité des entreprises vis-à-vis des effets qu’elles exercent sur la société ». | 2 Notamment à travers la prévention des risques professionnels, la lutte contre les discriminations, le partage de l’esprit d’entreprise et l’engagement citoyen. 1


TÉMOIGNAGES

BENOÎT DUFLOT, RESPONSABLE DE PRODUCTION DE WELLO À LA RÉUNION « Wello, marque réunionnaise, propose aux entreprises et aux communes un vélo électrique urbain à 3 roues, compact et intelligent, à assistance électrique solaire, avec une autonomie de 60 à 100 kilomètres. On s’est rendu compte qu’environ 80 % des déplacements varient localement entre 5 et 10 kilomètres. Alors pourquoi déplacer une voiture d’1,5 tonne pour si peu de trajets ? »

Ci-dessus : l’équipe PA2D du GPMDLR.

L’ÉQUIPE « SMOOTHY BAR » LE TEMPS DE L’ÉVÉNEMENT,

AXONE VENAISSIN,

AGENTS DE PORT RÉUNION

GÉRANT DE LA SOCIÉTÉ VÉLO ÉVASION 974

« Nous apprécions cette matinée RSE, qui a pour objectif de sensibiliser le personnel du Grand Port Maritime sur les pratiques du vélo. Quels que soient nos métiers ici au port – service des marchés publics, achats, assistance de direction, etc. – nous avons en effet à cœur de sensibiliser sur les impacts environnementaux, et cette action conviviale et fédératrice s’inscrit dans notre plan mobilité. »

« Je suis venu réaliser une animation autour du vélo pour rassurer l’usager. Par exemple, pour réparer un pneu on n’a plus besoin de poser une rustine, on applique un liquide préventif qui va colmater la brèche. Nos vélos à assistance électrique permettent d’éviter les embouteillages, de faire du bien à son corps et aussi de rencontrer des gens, pour seulement 0,40 € les 100 kilomètres ! »

Photos : © Stéphanie Castre

Le « vélo smoothy » vient astucieusement entraîner la lame d’un blender. | L’atelier « home trainer » est un parcours vidéo de mesure de performance : produire par exemple de 132 watts en pédalant équivaut à alimenter 2 ordinateurs portables. | Le départ à vélo des participants le 13 mai sur le port.


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MAYOTTE L’IDÉE DE MAYBIOTECH ? VALORISER LES PLANTES ENVAHISSANTES POUR SOIGNER LES ÉLEVAGES LOCAUX

Rédaction : Stéphanie Castre

Lauréate de l’appel à projets Innovation Mayotte du Département et de l’Adim, la start-up MayBiotech s’est fixé un objectif de recherche pour le moins ingénieux : concevoir des additifs alimentaires soutenant la santé animale à partir de plantes médicinales et d’espèces envahissantes. « J’ai une passion pour la recherche de nouveaux médicaments ». C’est ainsi que le Docteur en sciences de la vie et de la santé Mohamed Issouf débute notre entrevue. Responsable scientifique de Maybiotech, ce Mahorais a étudié à l’Université de Tours et au centre INRAe Val de Loire et a, entre autres expériences, « travaillé sur l’asthme au Canada » et « avec des laboratoires pharmaceutiques sur le criblage de molécules », avant de rentrer sur son île natale en 2016. « Je souhaitais apporter ma contribution à la valorisation de la biodiversité mahoraise comme alternative aux entrants médicamenteux dans les exploitations agricoles ». Le Docteur explique par exemple que les antiparasitaires administrés dans les élevages pour traiter certaines infections ne peuvent venir à bout des parasites résistants, qui finissent par devenir majoritaires. De plus, ils laissent des traces dans le sol, l’appauvrissent. Le recours intensif à ces médicaments pose donc, selon Mohamed Issouf et Sittirati Mohamed, gérante de la société Maybiotech, un enjeu à la fois sanitaire et environnemental. « Dans ce contexte, Maybiotech étudie les plantes traditionnelles de l’île, ces espèces à haut potentiel qui disparaissent souvent faute d’utilisation actuelle, et qui pourraient pourtant permettre de combattre des bactéries, de traiter les vers intestinaux, les diarrhées et autres dermatoses chez les volailles et ruminants », indique Sittirati Mohamed.

Une place de choix est également consacrée dans le programme de Maybiotech à la sélection d’espèces envahissantes établies en milieux naturels, dont l’effet biologique est dans un premier temps testé sur les parasites. « Parmi ces végétaux invasifs, certains ne sont d’ailleurs pas exotiques, comme plusieurs lianes indigènes de nos forêts », précise Mohamed Issouf. Si le premier test s’avère concluant, un second test est effectué sur l’animal pour vérifier que la plante ne développe pas chez lui d’effet toxique. « Nous allons faire ces expérimentations sur les volailles en juillet grâce à notre partenariat avec l’INRAe, qui a la technologie et l’expertise nécessaires, et met à notre disposition son animalerie. En l’absence de centre de recherche implanté à Mayotte, il nous faut chercher des experts mondiaux », poursuit le Docteur. « Les collaborations sont un élément très important dans ce type de projet, même si nous aimerions disposer à l’avenir du matériel de pointe pour faire les tests ici sur l’île ». Ce projet vise ainsi à développer une filière d’additifs alimentaires à destination des animaux d’élevage, qui permette de renforcer leur organisme, de protéger la biodiversité, de réduire les impacts sanitaires liés à l’usage de médicaments, et de réguler des plantes envahissantes, tels le bident hérissé ou le margoze, en leur attribuant une valeur socioéconomique.

Ci-dessus : l’exploitation du lycée agricole de Coconi. | Page de droite : Maybiotech étudie des plantes envahissantes terrestres comme Lantana camara aux fleurs roses, ou « galabert » à La Réunion, mais aussi marines comme, en bas à droite, l’algue rouge Asparagopsis taxiformis.


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Ci-dessus : le Docteur Mohamed Issouf, responsable scientifique de la start-up Maybiotech. | À droite : Sittirati Mohamed, gérante de Maybiotech, se rend très souvent « sur le terrain » pour connaître les besoins des agriculteurs de l’île.

Ce rapport de l’UICN de 2018 (LIEN ICI) vient toutefois nuancer le potentiel très attractif de la valorisation économique des espèces exotiques envahissantes.


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QUEL PROJET DÉPARTEMENTAL POUR L’ENVIRONNEMENT À MAYOTTE ?

L e projet de mandature 2021-2028 du Conseil départemental de M ayotte vient de paraître. C ette feuille de route intitulée Un territoire attractif et solidaire par nature fait, sur l’ île au lagon, la part belle à l’environnement et au développement durable. « C’est désormais ensemble qu’il nous appartient d’avancer pour un territoire attractif et solidaire par nature, comme une façon de dire que rien ne doit nous détourner d’un futur durable, qui préserve notre incroyable biodiversité, mais qui n’oublie jamais les urgences que nous avons à traiter. » C’est ainsi que Ben Issa Ousseni, président du Conseil départemental de Mayotte, s’apprête à conclure l’éditorial du document qui présente officiellement les objectifs de sa mandature. Parmi les « engagements clés pour la population de Mayotte » visés d’ici 2028, le document pointe en première ligne la réduction progressive « des embouteillages en combinant des mesures immédiates, de moyen et de long terme sur les déplacements ». Pour cela, afin de fluidifier la circulation en zone urbaine, le Département s’engage par exemple, sur le modèle de la barge reliant Mamoudzou à Dzaoudzi, à créer 3 lignes de voies maritimes rapides de 20 minutes : Iloni-Mamoudzou, Longoni-Mamoudzou-Petite-Terre.

Le milieu marin tient par ailleurs une place de choix dans la politique du Département, qui prend l’engagement de « faire de l’économie bleue un levier solide de la croissance économique de notre territoire ». Et côté terrestre, le Département souhaite notamment soutenir « le développement d’une agriculture raisonnée et biologique » et accompagner « la labellisation et la certification des produits agricoles locaux ». Ce projet de mandature qui fixe le cap pour Mayotte d’ici à 2028 se décline en 8 mesures phares, dont le « développement de l’écotourisme et de l’agrotourisme », et le fait de « porter l’objectif de 20 % du territoire en forêt et en zone naturelle préservée ». L’élaboration d’une stratégie de gestion de la ressource en eau et de l’assainissement des eaux usées est également placée au cœur des enjeux de développement durable de l’île. L’objectif est ainsi d’initier des actions pour une île plus propre, plus respectueuse de l’environnement et plus attractive.

Ci-dessus : le bâtiment du Conseil départemental de Mayotte dans la rue de l’Hôpital à Mamoudzou. © Marc Allaria


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Pour améliorer la gestion des déchets, qui est une problématique prioritaire, le recyclage va être développé massivement « en lien avec les acteurs locaux et les partenaires. Nous voulons interdire l’importation à Mayotte de tout véhicule de plus de 5 ans ». Le Département a à cœur de « promouvoir et mettre en œuvre la transition énergétique ». Des études vont donc être lancées pour évaluer « le potentiel des ressources renouvelables : biomasse, biogaz, solaire, éolien, la mer… sur le territoire ». Il s’agira plus largement de bâtir « un plan stratégique territorial en matière de lutte contre le réchauffement climatique et la pollution de l’air » et de porter « le développement des installations d’énergies propres ». Enfin, des efforts vont être réalisés en termes d’inventaires de la biodiversité, de gestion des habitats et espaces sauvages terrestres, de valorisation des sites du Conservatoire du littoral et du lagon, dont le Département espère l’inscription sur la liste du Patrimoine mondial de l’Unesco.

Le Département de Mayotte souhaite que la presqu’île de Saziley soit classée en réserve naturelle. © Stéphanie Castre

Tortue verte et zone de repos dans le lagon. © Marc Allaria

TÉMOIGNAGE BEN ISSA OUSSENI, PRÉSIDENT DU CONSEIL DÉPARTEMENTAL DE MAYOTTE « Notre projet pour Mayotte 2021-2028 porte une grande ambition dans le domaine de la transition écologique, qui fait l’objet d’une nouvelle délégation confiée à mon collègue, le vice-président Ali Omar. Nous pensons que, compte tenu des enjeux, le Conseil départemental doit être un acteur impliqué et investi, dans toutes ses politiques publiques, car le développement durable est forcément transversal.

Ainsi souhaitons-nous fortement développer les transports en commun (navettes maritimes, transports collectifs, multimodalité). Ainsi voulons-nous inscrire notre lagon sur la liste du Patrimoine mondial de l’Unesco, ou construire une véritable stratégie en matière de gestion de la ressource en eau et assainissement. Ainsi portons-nous la volonté d’atteindre l’objectif de 20 % du territoire en forêt et en zone naturelle préservée. Ainsi avec le concours des associations dont le rôle est essentiel, entendons-nous développer l’écocitoyenneté et les bons gestes pour l’environnement. C’est l’affaire de tous et toutes ; nous voulons prendre toute notre part ! »

Le sud de Mayotte et l’îlot Bambo. © Gwen Le Bigot


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TAAF

UNE STATION PHOTOVOLTAÏQUE INSTALLÉE À AMSTERDAM, L’UNE DES ÎLES LES PLUS ISOLÉES AU MONDE ! A près l ’ île

G rande G lorieuse équipées en 2017 et 2020 d ’ une centrale photovoltaïque , c ’ est au tour d ’A msterdam de donner l ’ exemple dans les TAAF en matière de réduction de la consommation d ’ énergies fossiles . de

T romelin

puis de

Depuis plusieurs années, la collectivité des TAAF met en œuvre une démarche de transition écologique, qui se traduit par la recherche de solutions pour améliorer son bilan énergétique et carbone. Dans ce cadre, après le remplacement des générateurs à énergie fossile de Tromelin et Grande Glorieuse, ceux d’Amsterdam ont été supplantés le 10 mars par une centrale hydride, photovoltaïque et thermique. « D’une puissance de 284 KWc (769 panneaux de 370 Wc), elle permettra à l’échelle locale d’éviter le rejet de 350 tonnes de CO2 par an dans l’atmosphère, et d’économiser, à usage équivalent, la consommation d’environ 130 m3 de gazole », annonce la collectivité des TAAF. Cette électricité en partie renouvelable assure ainsi désormais l’ensemble des besoins en énergie de l’île d’Amsterdam, qui accueille une population humaine permanente : conservation des denrées alimentaires, fonctionnement des laboratoires scientifiques, des services de télécommunications...

Il s’agit du premier dispositif de ce type mis en place sur une île non tropicale des TAAF, laquelle est par ailleurs extrêmement isolée. Cet éloignement exceptionnel de toute activité humaine qui caractérise Amsterdam explique que les scientifiques y effectuent des mesures atmosphériques de référence. Le site de Pointe-Bénédicte héberge ainsi en bord de falaise, à 2 kilomètres de la base, un observatoire de renommée mondiale pour l’étude des gaz à effet de serre et du climat. Avec plus de 40 ans de mesures ininterrompues, c’est dans le monde la 2ème plus ancienne station de suivi de la concentration de CO2 après Hawaï. Munie de panneaux photovoltaïques, de batteries robustes pour stocker l’énergie solaire et d’un groupe électrogène d’appoint, la station nouvellement installée contribuera à consolider sur le long terme ces suivis atmosphériques et sera un atout pour nouer de futurs partenariats de recherche. Rédaction : Stéphanie Castre

La station a été mise en place par la société réunionnaise Top Bis pour un montant global d’investissement de près de 2 millions d’euros, financé par le budget du Territoire avec le soutien du Fonds exceptionnel d’investissement du ministère des Outre-mer. © Flavien Saboureau


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Dans le sud de l’océan Indien, la base scientifique Martin-de-Viviès accueille en cette saison une vingtaine d’hivernants. | Ci-dessous : les hautes falaises d’Amsterdam vues du ciel. © Stéphanie Légeron

Timbre émis en janvier illustrant le laboratoire de Pointe-Bénédicte. © Yves Beaujard

Un poussin d’albatros à bec jaune. Ce grand oiseau de mer, qui se nourrit de céphalopodes, de poissons et crustacés, se reproduit sur l’île d’Amsterdam. © Flavien Saboureau

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LA CERTIFICATION DES BONNES PRATIQUES DE PÊCHE À LA LÉGINE Opérant au large de Crozet et Kerguelen, les 6 armements réunionnais qui pratiquent la pêche française de légine australe sont regroupés au sein du SARPC. Ils ont obtenu la recertification MSC ( M arine S tewardship C ouncil ), un écolabel exigeant qui garantit la pérennité des stocks de poissons, la préservation du milieu marin et un système de gestion efficace et réactif. Le Syndicat des armements réunionnais des palangriers congélateurs (SARPC) regroupe les armements français autorisés à pêcher la légine dans les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF). Il a été créé en 2002 afin de faciliter leur coopération et l’homogénéisation des bonnes pratiques. Cette collaboration a permis de mettre en œuvre et promouvoir une politique de développement durable de la pêcherie, qui s’articule autour de 3 piliers – environnemental, social et économique – et a représenté plus de 75 millions d’euros d’investissements. Fin 2018, « les armements français concernés, adhérents du SARPC, passent avec succès l’évaluation selon la dernière version du référentiel environnemental du MSC et prouvent qu’ils assurent la pérennité des stocks de légine et minimisent leur impact sur les écosystèmes », annonçait l’organisation à but non lucratif MSC. Le renouvellement de ce label créé en 1997 pour lutter contre la surpêche et reconnu au niveau international, est donc venu confirmer les pratiques vertueuses des 6 armements, qui déploient 7 navires palangriers dans les eaux australes.

La labellisation MSC, obtenue après l’audit d’un organisme certificateur indépendant, offre une reconnaissance des bonnes pratiques et rassure le consommateur. « Certifiée MSC pour la première fois en 2013 pour la zone de Kerguelen, et 2017 pour la zone de Crozet, la pêcherie de légine a continué d’améliorer ses performances environnementales pour maintenir et renouveler son certificat », précisait le MSC. Cette démarche n’a eu de cesse de se poursuivre, grâce à de nombreuses actions collaboratives : évaluations des stocks de légines par le MNHN ; fixation par l’administration des TAAF des totaux admissibles de capture sur la base des avis scientifiques du MNHN et des exigences de la CCAMLR ; protocoles d’observation et de contrôle sur tous les navires ; surveillance satellitaire pour prévenir la pêche illicite ; limitation des prises accessoires comme les raies et grenadiers ; protocole d’identification des orques... Depuis 20 ans, le SARPC, avec l’aide de ses partenaires, défend ainsi les intérêts de la profession en agissant de façon majeure dans la gestion responsable de la ressource et la préservation de l’environnement.

Cette photo illustre le moment du filage, quand les hameçons sont appâtés juste avant que la palangre ne soit mise à l’eau. © Sapmer


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Le palangrier Île de La Réunion à couple de L’Aventure II dans le golfe du Morbihan aux Kerguelen. © Comata Scapêche La légine australe, poisson sous haute surveillance scientifique, évolue entre 200 et 2 500 mètres de profondeur. Il peut vivre plus de 50 ans et atteindre 2 mètres de long. Doté d’une très grande valeur, il est commercialisé en particulier sur les marchés asiatique et américain. © Cap Bourbon

TÉMOIGNAGES LAURENT PINAULT, RÉFÉRENT SCIENTIFIQUE DU SARPC ET DIRECTEUR DU DÉVELOPPEMENT DURABLE DE SAPMER « Dans l’activité de la pêcherie de légine, le développement durable se traduit sur le plan environnemental, mais également social et économique. En matière d’environnement, on peut citer par exemple les méthodes de pêche qui ont été modifiées afin de réduire la pression sur les fonds, diminuer les prises accessoires et supprimer la mortalité aviaire : mise en place de système d’effarouchement, de lignes lestées, changement de zones... Un partenariat public-privé a par ailleurs été mis en place pour lutter contre la pêche illégale et protéger le stock de légines dans les ZEE des TAAF à travers le cofinancement d’un navire de surveillance – l’Osiris puis l’Osiris II. Au niveau social, la pêche australe joue un rôle moteur dans l’emploi réunionnais avec localement 450 emplois directs et 120 emplois indirects ou induits. Enfin, sur le plan économique, les investissements réalisés pour la valorisation de la légine et les démarches de labellisation ont développé la filière au point d’en faire le second secteur d’exportation de La Réunion (derrière l’activité sucrière), représentant 21% de la valeur totale des produits exportés. »

DELPHINE CIOLEK, SECRÉTAIRE GÉNÉRALE DU SARPC

« Le Référentiel Pêcherie du MSC repose sur 3 principes fondamentaux à respecter. Les organismes de certification mesurent la performance des pêcheries selon 28 indicateurs répartis sous ces 3 principes. Tout d’abord, l’effort de pêche doit se situer à un niveau qui permet d’assurer la pérennité des populations de poissons 1. Ensuite, les activités de pêche doivent être gérées de façon à maintenir la structure, la productivité, la fonction et la diversité de l’écosystème. Et enfin, la pêcherie doit respecter les réglementations en vigueur et avoir un système de gestion lui permettant de s’adapter de manière rapide et efficace aux différents changements. La recertification MSC que nous avons obtenue vient récompenser la collaboration des acteurs et la mise en œuvre des bonnes pratiques de pêche par les équipages. En fait, 2 types de certification ont été attribués. La première, portée par le SARPC pour ses membres, est la certification Pêcherie. La seconde, portée par chaque armement, concerne la traçabilité des produits : c’est ce qui autorise les armements à apposer le label MSC sur les cartons de légines. Il faut d’ailleurs que chaque intermédiaire de la chaîne de commercialisation soit certifié MSC pour qu’à la fin, le logo figure sur la légine mangée par le consommateur 2. »

Chaque année, l’objectif est de s’assurer que la biomasse des légines reproductrices soit au moins égale, d’ici 35 ans, à 60 % de la biomasse reproductrice initiale (c’est-à-dire avant exploitation de cette espèce). | 2 Les entreprises qui achètent des produits pré-emballés qui seront vendus comme tels aux consommateurs finaux, sans être ré-ouverts, ré-emballés ou ré-étiquetés, n’ont pas besoin de se faire certifier. 1

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Photos et graphisme de l’article : © Galaxea | Objectif 1 000

UNE MISSION SCIENTIFIQUE POUR EXPLORER LES ABYSSES DE LA RÉUNION

La zone des 1 000 mètres apparaît en vert sur cette carte du SHOM.

Lys,

« Objectif 1000 » s’est donné pour ambition d ’ aller explorer les grands fonds autour des côtes réunionnaises , et d ’ enrichir les collections du M uséum d ’H istoire naturelle de S aint -D enis . Carte : © SHOM,2016. MNT bathymétrique de façade de La Réunion (Projet Homonim)

À

bord du navire le

la mission océanographique

La Réunion est un volcan dont les pentes abruptes plongent au-delà de 4 000 mètres sous la mer. Les grandes profondeurs y sont accessibles à quelques milles nautiques des côtes – entre 2 et 20 kilomètres au large – ce qui facilite l’exploration marine.

À ce jour, près de la moitié des sorties en mer ont été effectuées et le bilan est déjà positif ! De nombreux crustacés ont été collectés ainsi que 22 spécimens de poissons, dont un requin bioluminescent jamais observé jusqu’alors à La Réunion.

En partenariat avec l’association Sciences Réunion, ainsi qu’avec le Muséum d’Histoire naturelle de La Réunion, le Conseil départemental et la DEAL, le bureau d’études spécialisé en biologie marine Galaxea a organisé une mission océanographique pour explorer les fonds marins à 1000 mètres sous la surface, où règne le noir absolu. Au total, 20 sorties en mer, de jour et de nuit, seront réalisées par une équipe pluridisciplinaire pour aller prélever du matériel vivant à cette profondeur et pour identifier et décrire les espèces présentes dans ces eaux. Des prélèvements de sédiments seront par ailleurs analysés pour détecter la présence d’autres espèces grâce aux techniques « d’ADN environnemental 1 », et pour identifier la présence éventuelle de microplastiques dans cette zone très profonde de l’océan. Technique d’identification d’espèces à partir de fragments d’ADN collectés dans l’environnement. 1

L’anguille à nez court vit généralement entre -500 et -1 800 mètres. | Le casier remonté à bord avec son prélèvement. | Un oursin irrégulier.| Une collecte issue de la mini-drague.


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La mission devrait s’achever au 3ème trimestre 2022. Ses résultats donneront lieu à des publications scientifiques, et aussi à des communications grand public, notamment par le biais des réseaux sociaux ou de conférences en milieu scolaire à la rentrée prochaine, en lien avec l’Académie de La Réunion. La Fondation d’entreprises des mers australes soutient ce projet innovant dans le cadre de ses missions d’appui à la recherche et de valorisation du patrimoine maritime dans les mers australes. Pour Émilie Richard, responsable Environnement et ressources halieutiques à la Compagnie maritime des Terres australes (COMATA) et membre du conseil d’administration de la Fondation : « Ce projet va permettre d’une part d’enrichir les collections du Muséum de La Réunion et d’autre part de sensibiliser et porter à la connaissance du grand public les espèces des grandes profondeurs. Cela fait partie intégrante des missions prioritaires de la Fondation qui a à cœur de soutenir ce type d’initiatives, de grand intérêt pour la biodiversité ».

Ce requin bioluminescent de la famille des sagres (Etmopteridae) n’avait jamais été inventorié dans les eaux de La Réunion. Il est peut-être même une nouvelle espèce pour la science. Les autres partenaires du projet Objectif 1 000 sont les suivants : la Préfecture de La Réunion, l’Aquarium de La Réunion, INSET, Runéo et l’Académie de La Réunion.

TÉMOIGNAGE SOPHIE DURVILLE, CHEF DE PROJET « OBJECTIF 1 000 », SOCIÉTÉ GALAXEA « En 2007, après “ l’éruption du siècle ” du Piton de la Fournaise, nous avions observé de nombreuses espèces de poissons morts flottant à la surface, que nous ne connaissions pas à La Réunion. Nous avions alors pris conscience du manque de connaissances dont nous disposions sur le monde sous-marin au-delà de quelques centaines de mètres de profondeur. En 2019, notre mission d’exploration sousmarine sur le mont La Pérouse avec Laurent Ballesta (voir ici l’article dans l’ e-mag n°1 , NDLR) a été un vrai succès, et nous avons voulu continuer à explorer les grandes profondeurs. 1 000 mètres, c’est le début des abysses, dans l’imaginaire collectif c’est le désert absolu, mais il y a pourtant de la vie ! Alors nous nous sommes dit : “ Pourquoi ne pas aller voir ? ” Nous avons constitué une équipe d’experts locaux (sur les crustacés, mollusques, poissons…), et avons sollicité des partenaires comme la Fondation des mers australes. Au départ, l’appréhension était grande, surtout au niveau technique, car pour réaliser les prélèvements, il faut envoyer des casiers, des palangres, des mini-dragues par 1 000 mètres de fond ! C’est un peu comme si on envoyait un panier depuis les nuages vers la Terre et qu’on essayait de ramener des échantillons de vie... Nous avons dû adapter nous-mêmes l’ensemble du matériel nécessaire. Il a fallu innover, tester le matériel et l’ajuster mais, au bout de quelques sorties, nos techniques étaient standardisées, et nous avons poursuivi la mission malgré une météo mauvaise cette année… En moins de 10 sorties, nos objectifs sont déjà presque remplis : nous avons trouvé diverses espèces, dont certaines inconnues à La Réunion et d’autres qui pourraient se révéler être nouvelles à l’échelle mondiale ! » + d’info ici : Le blog de la mission


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POLYNÉSIE FRANÇAISE

Un débarquement de marchandises sur la plage. © Benjamin Ignace

PRÉSERVER LES OISEAUX DE UA HUKA EN LUTTANT CONTRE LES RATS ET EN RESTAURANT LA FORÊT L’association Vaiku’a œuvre à la protection des oiseaux de l’île de Ua Huka, qui abrite certaines espèces endémiques . C ette faune aviaire est particulièrement menacée par l ’ introduction potentielle de rats noirs , et par la destruction récente de son habitat par les flammes . En 2014, la Société d’Ornithologie de Polynésie intervient à Ua Huka, une des plus petites îles de l’archipel des Marquises, et observe la présence de 2 espèces endémiques remarquables. Le pihiti, lori ultramarin historiquement présent dans 6 îles des Marquises et qui n’existe aujourd’hui plus qu’à Ua Huka, et le pati’oti’o, un monarque pie, sont classés en danger critique d’extinction par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Pour sauver ces espèces et protéger l’ensemble des oiseaux de l’île, l’association Vaiku’a a vu le jour. Chloé Brown, chargée de projets au sein de la structure, revient sur les premières actions initiées il y a 8 ans : « Les populations de loris présentes auparavant sur les autres îles ont été décimées par le rat noir. Nous avons donc cherché à éviter son introduction à Ua Huka.

Nous avons travaillé avec les armateurs de Tahiti pour qu’ils dératisent régulièrement leurs bateaux et avons installé des panneaux d’information à destination des pêcheurs et des plaisanciers sur les îles voisines. En 2015, nous avons acquis un chien de biosécurité qui travaille à quai avec un maître-chien pour inspecter l’ensemble des colis en provenance de Tahiti. L’avantage de Ua Huka, c’est que les cargos ne peuvent pas accoster ici, ce qui reste notre meilleure protection. Les mesures supplémentaires de prévention mises en place par l’association ont été suffisantes pour éviter l’introduction du rat jusqu’à ce jour. » Au-delà de ces pratiques de biosécurité, l’association a mené des actions de sensibilisation visant à protéger les espèces et les habitats, en intervenant dans les écoles et auprès de la population.


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Inspection du quai dans le cadre de la biosécurité, avec l’aide d’un chien dressé pour détecter les rats. © Benjamin Ignace

Autrefois présent à Ua Huka et Eiao, le monarque iphis (pati’oti’o) a disparu d’Eiao où le rat noir a été introduit. © Benjamin Ignace

Collecte des graines par l’association Vaiku’a. © Vaiku’a

Le pihiti a déjà disparu des autres îles Marquises. © Tuihei

Malheureusement, en février 2021, un incendie a ravagé près de 30 hectares de massif forestier sur la crête de Tevea. Cette forêt comptait notamment de nombreux pandanus, un arbuste pouvant atteindre une dizaine de mètres de haut, dans lesquels les loris aiment à nicher.

chevaux – circulent librement sur l’île. Le risque de destruction de ces jeunes plants mis en terre étant trop important, l’association cherche aujourd’hui à mobiliser un financement participatif complémentaire pour permettre l’installation d’une clôture qui sécuriserait les sites de replantation.

L’association Vaiku’a, avec le soutien de l’Office français de la biodiversité (OFB), s’est alors engagée dans un projet de reboisement de 4 hectares de forêt, pour restaurer les milieux et éviter que les terrains mis à nu ne soient envahis par des espèces exotiques.

Les 4 hectares choisis pour le reboisement sont principalement situés sur des parcelles privées, ce qui a permis d’intégrer les ayants droit dans le projet, notamment dans les plantations. Cette appropriation du projet par la population devrait garantir sa bonne réussite. Dans un second temps, les parcelles reboisées pourraient servir de vitrine pour présenter les différentes espèces du territoire aux jeunes scolarisés, au grand public et aux visiteurs. Pour Chloé Brown, la sensibilisation est en effet indissociable du projet de reboisement : « Plus les gens seront informés, et mieux ce sera pour Ua Huka et pour notre planète. Il nous faut persévérer ! ».

Depuis le commencement du projet, 10 000 graines de 15 espèces d’arbres endémiques de l’île – dont 5 en danger – ont été récoltées sur différents sites de l’île, garantissant ainsi un brassage génétique des populations d’arbres. Deux pépinières ont été construites pour accueillir les graines qui ont donné naissance à plus de 2 000 plants. Des collectes complémentaires seront réalisées afin d’atteindre 2 500 plants viables qui seront replantés au cours des 2 prochaines années pour assurer la régénération de la forêt. Les premiers plants pourraient d’ores et déjà être mis en terre, mais les sites de reboisement sont libres d’accès et de nombreux ruminants – chèvres et

Rédaction : Lucie Labbouz + d’info ici : https://www.facebook.com/ associationvaikua Pour soutenir le projet : https://www.anavai.org/ project/reboisement_de_la_crete_tevea_a_ua_huka

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OUTRE-MER

grandeur Nature

NOUVELLECALÉDONIE

Initiative

CALEDOCLEAN DRESSE UN BILAN POSITIF ET CONSTRUCTIF POUR SON 10ÈME ANNIVERSAIRE

citoyenne portée à ses débuts par une poignée de jeunes

est devenue en

10

Calédoniens, Caledoclean

ans une association reconnue , militant en faveur du droit à un

environnement sain pour tous , via des actions de collecte de déchets en milieu naturel , de reboisement et de sensibilisation .

En 2012, un petit groupe de jeunes constatent la pollution des sites naturels qu’ils avait connus dans leur enfance vierges de tout déchet, et décident de passer à l’action. Thibaut Bizien, cofondateur de Caledoclean et chargé de mission de l’association, se souvient : « Nous nous sommes demandé ce que nous pouvions faire en tant que jeunes pour participer à la construction de la société calédonienne, et nous nous sommes dit que ce que tout le monde pouvait faire, c’était ramasser des déchets. Et c’est ce qu’on a fait. ». Les toutes premières opérations de ramassage ont alors lieu, le mouvement grandit rapidement et, quelques mois plus tard, l’association Caledoclean est officiellement créée. Ses missions se déclinent aujourd’hui autour de 2 thématiques principales. D’une part, l’association continue sa mission de collecte et de valorisation de déchets et d’autre part, des actions de restauration d’espaces dégradés par les activités humaines – incendies, aménagement, activités minières, etc. – sont mises en place.

Après 10 années d’existence, le bilan est impressionnant : 750 tonnes de déchets ont été collectées dans la mangrove, sur le littoral, sur les îlots et dans les forêts, dont 500 tonnes ont pu être recyclées. Côté restauration, plus de 80 000 arbres de 200 espèces endémiques différentes ont également été plantés ! « Au-delà des chiffres, le message que nous voulons faire passer se veut constructif et positif : les déchets qui se retrouvent dans la nature sont avant tout des matières précieuses qui permettraient de fabriquer de nouveaux objets, localement, et donc de soutenir l’économie du pays ! », considère Thibaut Bizien. Des interventions en collège et lycée ou auprès de professionnels sont également mises en œuvre pour sensibiliser à l’environnement, à la gestion et la valorisation des déchets, mais aussi pour échanger sur les modes de consommation, apporter un regard différent sur la société calédonienne et pour proposer des solutions à la portée de tous.

L’association repose sur le travail collectif de nombreux bénévoles. © Caledoclean

Rédaction : Lucie Labbouz + d’info ici : https://caledoclean.nc


L’E-MAG ULTRAMARIN DE L’ENVIRONNEMENT

Opération d’arrachage d’algues sargasses en mai 2022 sur l’îlot Nukutapu. © Malia Pelo | STE

LES BANCS DE SARGASSES S’INVITENT ÉGALEMENT À WALLIS...

Alors

WALLISET-FUTUNA

que le fléau des sargasses est activement combattu aux antilles et en guyane , ces

grandes algues brunes et invasives s’amoncellent aussi, bien que dans une moindre mesure,

Wallis-et-Futuna. Les actions organisées localement tentent d’enrayer le phénomène avant qu ’ il ne prenne plus d ’ ampleur . sur les littoraux de

Dans le nord de Wallis, le lagon de l’îlot Nukutapu accueillait en mai une opération de nettoyage de sargasses initiée par le Service territorial de l’Environnement (STE). « Environ 2 800 m 2 de plage étaient jonchés de ces bancs d’algues brunes », nous informe Malia Pelo, chargée de mission Biodiversité au STE. Ces algues envahissantes qui, dans l’eau, entravent notamment les déplacements des tortues marines, produisent, lorsqu’elles se décomposent à terre, une odeur nausébonde et provoquent des démangeaisons au contact de la peau. Les ramasser est le seul moyen d’empêcher leur progression. « Il faut sortir les algues de l’eau, les arracher à la racine. Nous les avons stockées à terre, en attendant de les valoriser sous forme d’engrais pour nos agriculteurs », poursuit Malia Pelo. « Des observations ont aussi été rapportées sur la côte ouest de ‘Uvea et sur l’îlot Faioa. À Futuna, la prolifération de Sargassum polycystum a été observée, en parallèle de l’espèce Sargassum aquifolium – qui ne présente pas de problème de prolifération – et concerne 7 villages », détaille le STE. Ce n’est pas une Stockage des sargasses près de la plage le 21 mai dernier. © STE

nouveauté : en 2001, ses agents avaient déjà observé l’espèce Sargassum polycystum autour du port de Mata’ Utu. L’étude réalisée par l’expert régional Antoine de Ramon N’Yeurt en 2002 évoquait le caractère introduit, non natif de l’espèce. « Ce débat n’est pas tranché au niveau régional à ce jour », nuance le STE. Quatre causes de prolifération sont avancées par les scientifiques : de plus grandes surfaces d’accrochage liées à une mortalité des coraux ; la raréfaction des herbivores due à la surpêche ; des nutriments plus abondants dans l’eau du fait de l’érosion, des fosses septiques non conformes, des effluents d’élevages porcins... ; et enfin le changement climatique, comme le mentionne le STE : « À Tuvalu, l’événement La Niña de 2010 a diminué les précipitations pendant une période prolongée et a changé la direction du vent, entraînant une forte concentration de polluants dans le lagon ». Conscient de l’urgence, le STE a échangé en juin avec Monsieur N’Yeurt pour établir des recommandations, et promet d’organiser, afin de lutter contre les sargasses, autant de ramassages que nécessaires. Rédaction : Stéphanie Castre

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OUTRE-MER

grandeur Nature

Fédérer l’outre-mer, favoriser les échanges, mettre en lumière les acteurs de terrain, les initiatives pour la protection de la nature et le développement durable

MAI| JUIN 2022

E-MER OUTR deur Nature gran

L’E-MAG ULTRAMARIN

OcéIndia

DE L’ENVIRONNEMENT

n°10

in ultramarin ! ier téléPhérique urba ÉDITO | PaPang, Prem le dePuis irma e vert, davantage visib sing le | RTIN T-MA SAIN l’agriculture bio isgra, le « boss » de t éon l | UE TINIQ MAR

SOMMAIRE

UNE

RÉUNION 2 3 5 8 9

|

DERRIÈRE L’OBJECTIF

édito actu outre-mer Saint-Pierre-et-Miquelon Saint-Martin Saint-Barthélemy

14 18 22 26 34

DU PHOTOGRAPHE JON

Martinique Guadeloupe Guyane Île de La Réunion Mayotte

38 42 44 45

ATHAN PAYET

TAAF Nouvelle-Calédonie Polynésie française Wallis-et-Futuna

L’E-MAG ULTRAMARIN DE L’ENVIRONNEMENT SUPPORT D’INFORMATION BIMESTRIEL GRATUIT ADRESSÉ AUX : décideurs publics acteurs ultramarins de l’environnement académies d’outre-mer internautes via de nombreux sites web et réseaux sociaux

Page Facebook « Outre-mer grandeur Nature » Un support proposé par OcéIndia aux Éditions Insulae 7 chemin Léona Revest - 97417 La Montagne, île de la Réunion Stéphanie Castre, directrice de publication | oceindia@icloud.com Rédaction : Stéphanie Castre, Lucie Labbouz, Axelle Dorville, Romy Loublier, Mariane Aimar, Camille Caumette, Caroline Marie, Bruno Letournel Conception graphique : Océindia


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OUTRE-MER grandeur Nature n°11 _ juillet-août 2022

1min
page 44

Wallis-et-Futuna

3min
page 43

Nouvelle-Calédonie

2min
page 42

Polynésie française

4min
pages 40-41

Fondation des mers australes

5min
pages 38-39

Cluster maritime de La Réunion

5min
pages 36-37

TAAF

3min
pages 34-35

OUTRE-MER grandeur Nature n°11 _ juillet-août 2022

4min
pages 32-33

Mayotte

3min
pages 30-31

OUTRE-MER grandeur Nature n°11 _ juillet-août 2022

4min
pages 28-29

Île de La Réunion

5min
pages 26-27

Ifremer

3min
pages 24-25

Guyane

4min
pages 22-23

AFD

4min
pages 20-21

Guadeloupe

4min
pages 18-19

Cirad

4min
pages 16-17

Martinique

3min
pages 14-15

Office français de la biodiversité (OFB)

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pages 12-13

Interco' Outre-mer

5min
pages 10-11

Saint-Barthélemy

2min
page 9

Saint-Martin

2min
page 8

Planète Outre-mer

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pages 6-7

Saint-Pierre-et-Miquelon

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Actu Outre-mer

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Edito

3min
page 2
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