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LA MONNAIE MÉTALLIQUE
le thaler neuf mettra trois semaines; le thaler usé, deux; le douteux, une seule. Pour effectuer le même nombre de transactions commerciales il faut trois thalers neufs, deux pieux, ou un suspect. Le rendement commercial du numéraire, ses qualités techniques du point de vue des échanges sont en raison inverse de ses qualités du point de vue de la banque. Poulie commerce, un thaler douteux est trois fois plus utile qu'un thaler tout neuf. Ce détail vaut d'être noté. L'offre est un fleuve qui, prenant sa source dans la division du travail, se déverse dans les maisons des consommateurs. La demande, elle, ne se prête pas à la même comparaison : c'est un objet qui parcourt une circonférence ; lorsque sa vitesse de rotation est suffisante, il ressemble à un anneau solide, à un volant. L'offre consiste en marchandises toujours nouvelles, et ne parcourant le chemin qu'une seule fois, pour disparaître à jamais. La demande consiste en un certain nombre de pièces de monnaie ayant parcouru mille fois le même chemin, et qui le parcourront encore autant de fois. Cette comparaison montre que la demande n'obéit pas aux mêmes lois que l'offre. Le seul fait que les marchandises deviennent toujours plus chères à mesure qu'elles circulent, alors que la monnaie peut changer mille fois de propriétaire sans augmenter de prix, ce seul fait prouve qu'on ne peut pas toujours comparer la monnaie aux marchandises. (Cette dernière remarque ne signifie pas que la monnaie intervienne gratuitement dans l'échange des marchandises.) Aucun des facteurs qui déterminent le niveau de l'offre de marchandises (voir chapitre précédent) ne s'applique à la demande, à l'offre de numéraire. L'un de ces facteurs, le progrès de la technique commerciale, raccourcit le chemin que les marchandises ont à parcourir pour atteindre le consommateur ; la technique commerciale réduit ainsi le stock de marchandises et l'offre de marchandises. Un progrès dans la circulation monétaire, un raccourcissement de la durée du circuit, fait que la monnaie se trouve plus vite en mesure de recommencer son travail. Chaque amélioration de la circulation monétaire accroît donc l'offre de numéraire. C'est pourquoi, en utilisant la monnaie franche) il est possible de susciter la demande actuelle avec trois fois moins de numéraire. Le montant de l'offre de marchandises est déterminé surtout par les conditions de la production, les richesses naturelles, l'habileté des travailleurs, le degré de perfectionnement de l'outillage. Pour la demande tout cela est sans importance. L'or ne se fabrique pas ; on le trouve. Le stock d'or existant, le seul qui compte pour la génération présente, a été légué par les ancêtres. Quant à la monnaie de papier, elle a été arbitrairement « émise ». Les marchandises produites il y a un an n'ont plus d'influence sur l'offre actuelle ; la demande présente est influencée par l'or que Salomon faisait venir d'Ophir, et qui