COMPLÉMENT A LA THÉORIE DE L'INTÉRÊT
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prix une hausse vertigineuse. Mais sur l'intérêt, la surabondance d'argent n'aurait aucune influence. Nous avons montré en effet qu'entre prêteurs, il ne peut exister de concurrence. L'intérêt brut subirait même une hausse. (V. 7. Éléments de l'intérêt brut.) Faut-il dire que dans des circonstances semblables, personne n'emploierait son argent à la construction d'une usine ? Cela ne se reverrait que quand les ravages du temps, l'accroissement de la population, et des fléaux comme l'incendie, auraient réduit l'offre de capitaux réels au point de rétablir le rapport initial ramenant l'intérêt des capitaux réels au taux de l'intérêt fondamental. Par suite d'événements extraordinaires, l'intérêt des capitaux dits réels peut donc en tout temps tomber au-dessous de l'intérêt fondamental. Mais alors intervient la destruction naturelle à laquelle le. capital est exposé (Voir le bilan annuel des naufrages et dégréements, des incendies, des catastrophes de chemin de fer, des amortissements industriels, etc.) et le fait que l'argent ne permet pas que l'on crée de nouveaux capitaux réels aussi longtemps que l'intérêt du capital existant n'atteint pas le taux de l'intérêt fondamental. Cette destruction et cette interdiction finissent toujours par rétablir la proportion initiale entre la demande et l'offre de capitaux réels. Reste, à démontrer que l'intérêt des capitaux réels ne peut se maintenir au-dessus de l'intérêt fondamental. Nous reconnaissons que le phénomène peut se produire dans des conditions particulières et que dans maints pays il peut même durer des dizaines d'années par suite d'une immigration massive. Nous nous empressons même de le reconnaître parce que ce fait constitue la preuve péremptoire de l'exactitude de la doctrine selon laquelle l'offre et la demande déterminent quel intérêt rapporteront les capitaux réels'. J'ignore quelle est la part qui correspond, en Amérique, à une famille d'ouvriers, dans le capital que constituent habitations, moyens de production, magasins, voies ferrées, canaux; installations maritimes, etc. Cette fraction atteint peut-être 5.000 ou 10.000 dollars. Admettons qu'elle soit de 5.000. Dans ce cas, les Américains, pour fournir aux immigrants, soit à quelque 100.000 familles par an, le logement et l'emploi, doivent produire chaque année 5.000 X 100.000 = 500 millions de dollars de maisons, d'usines, de voies ferrées nouvelles. Si tous les ouvriers allemands émigraient en masse aux États-Unis, tout y manquerait pour les héberger et les employer. Cette pénurie d'usines, de machines, de maisons ferait baisser les salaires, tout en faisant hausser vertigineusement les loyers. L'intérêt des capitaux réels s'élèverait bien au-dessus de l'intérêt fondamental. Généralement, un tel phénomène échappe à l'observation directe parce que les diverses formes de capitaux augmentent de prix lorsque l'intérêt qu'elles rapportent augmente-; ainsi une maison qu'on peut