Atlas ECO n°16

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son bâtiment, l’acquisition de matériels modernes et performants (ligne d’embouteillage, pressoir à bande), il arrive « à la fin d’un programme de cinq ans d’investissements rapides » qui se compte en centaines de milliers d’euros. En donnant le chiffre, il hausse les épaules : c’est « le genre de montant qu’un professionnel peut comprendre, mais pas un particulier… » Sur le même temps, le chiffre d’affaires a plus que triplé, de 70 000 à 230 000 euros, avec « un objectif à 400 000 € ». Pour Thibault Verger, « 30 hectares, c’est la surface qu’il faut pour bien s’équiper ».

Certes, c’est deux fois et demie plus qu’en 2018, mais c’est sur le jus, pas sur le cidre, que se font les plus gros volumes. Jus de pomme du pays d’Othe, bien sûr, avec son acidité typique, mais aussi les jus de plusieurs fruits, pomme-poire, pomme-framboise, pomme-groseille… 80 000 bouteilles d’un litre et environ 20 000 de « petits formats » de 33 cl, développés pour cette «nouvelle clientèle de jeunes qui boivent du soft local ». Tout cela commercialisé en circuit court, un peu, et beaucoup chez les revendeurs et les boulangers. Sans oublier les jus « à façon », qu’il presse pour des clients professionnels. C’est même une des raisons de l’acquisition d’un pressoir à bandes. Avec un grand sourire, il conclut : « Pour parler d’image, on parle de cidre mais pour parler de développement économique, on parle de jus ».

Une trame de variétés locales Les vergers, justement : en 2018, plutôt que de racheter ceux de Bruno Farine avec le reste de son exploitation, il avait commencé à en replanter, à Bercenay, à côté des cinq hectares que comptait déjà l’exploitation de son père. C’est la ferme d’Hotte, autre producteur historique de cidre du Pays d’Othe, qui a racheté les vergers de Moussey, pour les intégrer à sa propre production. Dès 2017, alors qu’il est encore étudiant, Thibault Verger plante ainsi « des variétés qui nous plaisent pour les jus », judor et judaine (deux variétés de l’Inrae), ainsi que ce qu’il appelle des « pommes à deux fins », à jus et à couteau, qu’il propose en cueillette et en vente directe. Depuis l’arrêt de production de la ferme du Bornet, à Bouilly, dont c’était la spécialité, « il y a de la place » dans le département sur le marché de la pomme à couteau. Il en commercialise dix tonnes aujourd’hui ? « Je pourrais monter à 30 tonnes sans problème », estime-t-il. Pourtant, rappelle-t-il encore, s’il faut assurer les volumes, pas question d’oublier la qualité : la plus grande partie des plantations est réservée aux variétés locales, avrolles et cul d’oison principalement. « On veut garder cette trame de variétés locales dans le cidre », explique-t-il.

Yann Tourbe

Un logo sur la bouteille mais pas encore de signe de qualité Pas d’indication géographique protégée ni d’appellation d’origine pour le cidre du pays d’Othe. Sur les bouteilles de cidre brut ou doux que produit Thibault Verger, on ne trouve que le logo du syndicat de producteurs. « On n’a rien d’autre, pour l’instant », reconnaît le jeune homme. Pourtant, le cidre du pays d’Othe n’est pas né de la dernière pluie. Au XIXe siècle, on recensait même 350 pressoirs à pommes dans l’Aube. Sans compter ceux de l’Yonne, puisque le pays d’Othe est à cheval sur les deux départements. Ce cidre acidulé, au goût typique, a même connu son heure de gloire grâce au train, en alimentant les comptoirs parisiens au tournant du XXe siècle. Aujourd’hui, l’Aube compte une dizaine de producteurs et l’Yonne, cinq. Mais le dossier d’un signe de qualité, indication ou appellation, pourrait être relancé, si la nouvelle génération en train de prendre les commandes en ce moment s’en saisissait. Pour cela, pourtant, la valorisation reste le nœud du problème. Sans valorisation, ni communication, ni recherche de nouveaux marchés. Déjà, il faut sortir le produit de son image un peu ringarde, celle de la boisson des crêpes et des galettes et « du vieux paysan qui sort son cidre corsé », plaisante Thibault Verger. Pour ça, le cidre du pays d’Othe a des atouts. Peu alcoolisé, peu ou pas sulfité, fermenté avec des levures indigènes, il a un côté nature tout à fait dans l’air du temps. Et puis, son goût très terroir, que lui donnent les variétés de pommes locales, est inimitable.

Image et développement Le cidre, aujourd’hui, chez Thibault Verger, c’est environ 25 000 bouteilles par an, une moitié en bars, restaurants ou vente directe, et l’autre moitié chez des revendeurs.

À 24 ans, Thibault Verger est un des principaux producteurs de cidre dans l’Aube.

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